Eglises d'Asie

Le rapatriement des réfugiés rohyngia vers la Birmanie provoque différends et violences

Publié le 18/03/2010




Pour les 250 000 Rohyngia musulmans réfugiés de Birmanie au Bangladesh, le désir de rentrer dans leur pays est contrebalancé par la crainte d’une répétition des atrocités qui les ont fait fuir.

Au Bangladesh, le gouvernement aimerait qu’ils partent de bon gré, tandis que les autorités régionales veulent leur départ immédiat. Les dirigeants birmans acceptent mal une intervention même limitée des Nations Unies dans les procédures de rapatriement. De leur côté, les guérilleros musulmans auraient proféré des menaces contre les réfugiés qui accepteraient de rentrer.

Issus d’un métissage entre Bengalis et aborigènes mongoloïdes de l’Arakan, les Rohyngia vivaient depuis des siècles au sud-ouest de la Birmanie quand une loi votée en 1982 leur dénia la citoyenneté birmane et que le pouvoir militaire à majorité bouddhiste lança une campagne pour les chasser de leur terre ancestrale (1). Leur exode commencé en juin 1991 s’est amplifié de mois en mois. En février 1992, le Bangladesh, impuissant devant leur afflux, a réclamé l’assistance du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Ils sont maintenant environ 250 000 regroupés dans quinze camps de transit du district de Cox’s Bazar, limitrophe de la Birmanie, au sud-est du Bangladesh.

“Asia Watch”, l’association américaine de défense des droits de l’homme en Asie, a authentifié les récits hallucinants de ces réfugiés sur les atrocités et les persécutions qui les ont fait fuir : viols, massacres, travaux forcés, destructions de mosquées (2).

Des conversations entre les autorités du Bangladesh et celles de Birmanie ont néanmoins abouti à un programme de rapatriement volontaire, destiné à commencer le 15 mai 1992. L’application de ce programme a subi du retard car les réfugiés refusent de rentrer si le Haut-commissariat n’est pas associé à la procédure de rapatriement et s’ils n’obtiennent pas des garanties pour leur sécurité, leurs droits de citoyens et la restauration de la démocratie en Birmanie.

De son côté, le régime de Rangoon a refusé un contrôle des opérations de retour par le Haut-commissariat. Il n’a donné que des assurances verbales concernant la sécurité des réfugiés rapatriés, tout en niant que des atrocités aient été commises. Il exige en outre de ceux qui rentreront qu’ils justifient de leur citoyenneté birmane, alors que ses soldats se sont appliqués à détruire les papiers d’identité des réfugiés en fuite.

Le gouvernement du Bangladesh soutient que la majorité des Rohyngia veulent repartir, mais qu’ils en sont dissuadés par le Haut-commissariat et les organismes étrangers d’assistance. Au dire de Bangladeshi de Cox’s Bazar, les Rohyngia musulmans insurgés, qui ont souvent des bases au Bangladesh et jouissent de l’appui de musulmans de ce pays, se sont infiltrés dans les camps de réfugiés où ils découragent, parfois sous la menace, les candidats au retour. Selon une information du commissaire du gouvernement chargé de l’assistance aux réfugiés et du rapatriement, trois réfugiés qui avaient exprimé leur volonté de rentrer dans leur pays ont été tués par des militants Rohyngia à la fin de juillet.

D’autres violences ont éclaté depuis l’accord du mois de mai 1992 sur le rapatriement. Quand un premier groupe de 49 réfugiés a été renvoyé en Birmanie le 22 septembre 1992, des démonstrations hostiles se sont déchaînées, les forces de sécurité ont fait feu et trois réfugiés au moins ont été tués.

Le Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, dont le représentant n’a pas été autorisé à s’assurer des conditions de ce premier retour, a fait savoir à la presse qu’il avait pu vérifier le caractère volontaire d’un deuxième rapatriement de 63 Rohingya, le 12 octobre 1992.