Eglises d'Asie

Des évêques clandestins veulent que le Vatican maintienne un minimum de positions intangibles dans ses négociations

Publié le 18/03/2010




Plusieurs évêques clandestins estiment qu’en fixant une ligne infranchissable dans ses pourparlers avec Pékin pour la reprise des relations diplomatiques, le Vatican raviverait l’espoir de réconciliation dans l’Eglise catholique de Chine.

Un évêque clandestin de la province du Shaanxi, dans la Chine centrale, a déclaré au début de septembre 1993 que l’épiscopat de l’Eglise non reconnue a perçu la visite à Pékin du cardinal Roger Etchegaray (1), président de la commission pontificale Justice et paix comme un nouveau geste pour renouer les liens que la Chine a brisés dans les années 50. « Les deux parties auront beaucoup de choses à discuter, a-t-il dit. Toutefois, le pape ne doit pas perdre de vue combien il importe que le Saint-Siège reste ferme sur certaines questions » . Le pape ne doit selon lui rien concéder au sujet des élections et ordinations d’évêques faites sans son approbation, telles que l’Eglise « ouverte », autorisée par le gouvernement, les pratique (2). Plus récemment, le même évêque a dit à des visiteurs catholiques venus de Hongkong que le Vatican doit insister pour que les prêtres et les évêques mariés cessent tous d’exercer un ministère sacramentel et pastoral dans l’Eglise.

Selon une déclaration recueillie à la même époque auprès d’un autre évêque clandestin de la province du Shaanxi, le gouvernement chinois a tout à fait tort de prétendre que le Vatican fait obstacle à la normalisation parce qu’il s’immisce dans les affaires internes de la Chine, car « les affaires internes » sont difficiles à définir. « Le Saint-Siège et l’Eglise de Chine ne peuvent pas avoir des rapports normaux si le Vatican est empêché de superviser la développement de cette Eglise

Ces deux évêques de l’Eglise clandestine, qui ont souhaité de pas être nommément cités, partagent l’avis de nombreux dirigeants de l’Eglise « ouverte », à savoir que la normalisation peut favoriser l’union de tous les catholiques de Chine continentale, en aidant à surmonter les oppositions entre les membres des communautés clandestines et ceux de l’Eglise officielle. Les deux prélats pensent que certains catholiques clandestins peu désireux de coopérer avec l’Eglise officielle s’inclineront néanmoins devant la décision du pape, à qui ils restent fidèlement attachés. Ils estiment l’un et l’autre qu’il ne sera pas facile pour la Chine et le Vatican de régler à l’amiable tant de problèmes suscités par les divergences de leurs principes et de leurs perspectives.

Dans le même temps, deux évêques de l’Eglise « ouverte » du Shaanxi ont eux aussi évoqué les implications d’une éventuelle reprise des relations entre la Chine et le Vatican. Mgr Anthony Li Du’an, évêque officiel de Xi’an, affirme que plus vite la Chine reprendra ses relations avec le Vatican, plus grande sera la possibilité de développement pour l’Eglise de Chine continentale.

Selon Mgr Joseph Wang Zhenye, évêque officiel de Yan’an, « les conditions présentes sont meilleures que jamais pour la normalisation, j’espère que les deux parties saisiront cette chance. Nous savons tous que le pape ne cesse d’exprimer son souci des catholiques et de l’Eglise catholique de Chine

Les quatre évêques ont le sentiment que les catholiques de Taiwan, comprenant la situation de l’Eglise du continent, depuis longtemps éprouvée, ne s’opposeront pas à la normalisation.

Au dire d’un prêtre chinois d’outremer qui a fait un voyage en Chine au mois de mai 1993, la réconciliation et la coopération qui se font jour entre la communauté de l’Eglise clandestine et celle de l’Eglise officielle favorisent des pourparlers de normalisation. La Chine s’est davantage ouverte à l’activité religieuse et dans certains diocèses les deux communautés se sont rapprochées. Ce prêtre chinois qui préfère ne pas être nommé a observé pendant sa visite qu’il y a maintenant davantage d’évêques clandestins acceptant de coopérer avec les évêques de l’Eglise officielle pour le développement de leurs propres diocèses. Le fait, note-t-il, que des évêques clandestins ont pu s’entendre avec ceux de l’Eglise « ouverte » a renforcé l’espoir d’une Eglise unie, et des relations redevenues normales entre la Chine et le Vatican renforceraient à coup sûr cette réconciliation dans l’Eglise.

Cependant, le même prêtre doute que les catholiques de Taiwan, en particulier les intellectuels, acceptent que le Saint-Siège rompe ses liens officiels avec Taiwan pour renouer avec le gouvernement communiste (3). Selon lui, l’exigence du gouvernement chinois qui fait d’une rupture des relations diplomatiques entre le Vatican et Taiwan un préalable à la négociation n’est pas justifiée. Le gouvernement chinois n’a pas exigé cela de la Corée du Sud avant de convenir l’an dernier avec elle de reprendre leurs relations.