Eglises d'Asie

Qinghai : les forces de l’ordre écrasent une manifestation des musulmans de la minorité Hui en prenant d’assaut la mosquée de Xining

Publié le 18/03/2010




Pour mettre fin aux manifestations musulmanes qui se poursuivaient depuis cinq semaines dans la province de Qinghai, en Chine de l’ouest, des forces de la police et de l’armée ont pris d’assaut la grande mosquée de Dongguan à Xining, le 7 octobre 1993. Au cours des journées précédentes, des dizaines de milliers de manifestants étaient descendus dans la rue. Certains avaient attaqué des postes de police, brûlé des véhicules. Ils occupaient la plupart des mosquées de Xining, ville de 700 000 habitants au coeur d’une province à forte population musulmane. Le mouvement menaçant de s’étendre, la police réussit à disperser les musulmans venus en foule à la gare de chemin de fer et au départ des autocars dans l’intention d’aller manifester à Pékin.

L’information donnée par le bulletin du 15 octobre 1993 de l’agence Chine nouvelle mentionne que “les organes de la sécurité publique de Xining ont pris des mesures légales de coercition à l’égard des responsables des atteintes à la loiAu dire d’un fonctionnaire de la sécurité, ce qu’il appelle “l’incident du 7 octobre” a fait au moins deux douzaines de blessés tant du côté des musulmans de la minorité Hui que dans les rangs des forces de l’ordre. La police n’a pu arrêter qu’une partie des meneurs de l’insurrection, dont un représentant de la chambre provinciale.

Le mouvement avait commencé au mois d’août quand des musulmans de la minorité ethnique des Hui (qui sont près de neuf millions en Chine) se mirent à protester, de façon pacifique, contre un livre jugé injurieux pour l’islam parce qu’il montrait un cochon à côté d’un musulman chinois en prière (2). Les autorités locales qui avaient autorisé la campagne de protestation s’empressèrent d’interdire le livre. Mais en septembre, le gouvernement central ayant rappelé que les manifestations de ce genre étaient interdites, les autorités de Xining déclarèrent illégal leur comité d’organisation et tentèrent de disperser les manifestants. La tension ne cessa de monter jusqu’à l’assaut du 7 octobre.

Certains témoins n’ont vu là qu’une réaction des autorités contre un désordre qui tournait au chaos. Pour Kheng Qinglu, ingénieur de Xining interviewé à Pékin, “plus les Hui ont semé le trouble, plus les démonstrations sont devenues violentes; c’était le désordre dans la ville, dans les entreprises, dans les services…” Mais selon un universitaire chinois musulman, “si cette répression permet au pouvoir de contrôler de nouveau la situation pendant un mois ou deux, peut-être plus longtemps, tôt ou tard les protestations éclateront de nouveau. Car la publication du livre qui a offensé les musulmans n’a été qu’une étincelle. Ce qui s’est manifesté, c’est un trop-plein de colère à l’égard de ce qui est ressenti dans la région comme des décennies d’oppression exercée par les autorités chinoises appartenant à la majorité Han. Même si le niveau de vie s’est élevé dans le Qinghai et dans les autres provinces de l’ouest, les musulmans restent traités comme des citoyens de second rang. La seule voie de progrès qui leur est ouverte est de devenir comme les Han” (3).