Chargé au Comité central de superviser le Front uni, Li Ruihuan a présidé les travaux et prononcé le discours d’ouverture. D’après le résumé qu’en a donné l’agence Chine nouvelle, il a insisté sur la nécessité, “dans la phase nouvelle de réforme et d’ouverture de la Chine”, de réévaluer complètement l’action du Front uni (4) . Dans un autre exposé il a souligné que “la formation d’un Front uni fort, élargi à tous les patriotes de l’intérieur et de l’extérieur, est aujourd’hui plus importante qu’elle ne l’a jamais été” (5). Wang Zhaoguo, chef du département action du Front, a tenu le même langage et insisté sur la nécessité d’ouvrir “de nouvelles voies d’approche” et d’élargir les objectifs du Front. Il a affirmé que, “dans la période nouvelle, ses tâches concernent presque tous les aspects de la société” (6). De la disparition de “la classe exploitante” (c’est-à-dire de ceux qui avaient le pouvoir sous le gouvernement nationaliste d’avant 1949), il conclut à l’obligation pour le Front de centrer son action sur l’ensemble de la société. Bref, la tâche du Front uni est désormais “une partie de la tâche de la masse”.
Les propos tenus par le chef du département action témoignent du changement fondamental opéré par le Parti, qui fonde de moins en moins son pouvoir sur le marxisme orthodoxe et de plus en plus sur un pragmatisme politique fortement orienté vers le développement économique. Dans cette perspective, Wang paraît souhaiter que le Front uni cesse de faire fond sur les différences idéologiques et s’attache à vérifier que tous les secteurs de la société reconnaissent au Parti son droit de détenir le pouvoir, de sorte que la Chine soit en mesure de développer rapidement son économie. Si les justifications théoriques du changement sont pour le moins faibles, c’est que la politique réformiste du patriarche Deng Xiaoping a eu pour conséquence logique de rendre risible la doctrine orthodoxe du marxisme. La récente conférence a également montré que, dans son désir d’attirer davantage d’investissements étrangers et de mener à bien la réunification avec Taiwan, le Parti donnait la priorité aux relations avec les communautés chinoises d’outremer.
Au cours de la conférence, la politique religieuse a suscité quelques commentaires, en particulier au sujet des minorités ethniques. Ce qui ne saurait surprendre alors que l’agitation augmente chez les bouddhistes tibétains et les musulmans du nord-ouest. Le China daily a ainsi résumé les vues de Wang Zhaoguo sur ce problème : “Tout en poussant au développement économique et culturel des régions où se trouvent les minorités ethniques, Wang souhaite que soit renforcée la direction légale dans les questions religieuses, en mettant en oeuvre la politique de liberté religieuse du Parti” (7). Jiang Zemin qui a également pris la parole sur le thème de la politique religieuse, a préconisé le maintien du statu quo, en rappelant qu’il doit exister une liberté religieuse légalement protégée, mais à l’intérieur des bornes fixées par le Parti (8).