Eglises d'Asie – Chine
LE MANQUE DE PRETRES IMPOSE UN NOUVEAU PARTAGE DES TACHES
Publié le 18/03/2010
Le même annuaire donne la liste de 326 prêtres et celle des 54 paroisses du diocèse. Ces chiffres feraient croire qu’il y a six prêtres par paroisse. En réalité, la plupart des paroisses n’ont qu’un ou deux prêtres, certaines n’en ont aucun qui y réside à plein temps. Plutôt que devant une pénurie, n’est-on pas en face d’un problème de mauvaise répartition ?
La situation est plus complexe. Parmi les 326 prêtres, 73 seulement appartiennent au clergé diocésain, 253 sont des religieux. Dans le clergé diocésain, deux seulement sont non-chinois [dont l’un, le P.Lee, irlandais, est mort depuis, NDLR]. En revanche, dans le clergé religieux, 60 prêtres seulement sont chinois, 193 appartiennent à d’autres nationalités. Ainsi, au total, soixante pour cent des prêtres de Hongkong ne sont pas chinois. Ces chiffres suggèrent que si les 54 paroisses du diocèse sont mal desservies, c’est qu’il y a disproportion et mauvais ajustement entre les vrais besoins et le personnel potentiellement disponible.
Outre la question de savoir quelles tâches incombent réellement aux prêtres et si les laïcs ne pourraient pas en faire certaines aussi bien, la présence des missionnaires étrangers complique encore les choses. Il me semble – c’est une opinion
personnelle – qu’il y a trop de missionnaires dans le territoire. Alors que le clergé diocésain est quasiment tout entier du pays, le clergé religieux, trois fois plus important, est aux trois quarts étranger. Et ces dernières années, un certain nombre de nouveaux groupes religieux sont venus dans le territoire. Je ne crois pas que ce soit le moyen de pallier le manque de prêtres dans une Eglise locale pleinement constituée. Certes, il est non seulement acceptable mais désirable que les autres parties de l’Eglise universelle soient représentées à Hongkong, spécialement celles qui ont tel ou tel talent particulier temporairement nécessaire. Mais on peut également penser que le personnel étranger devrait rester minoritaire.
Si l’on considère les choses dans l’autre sens, il n’est pas souhaitable pour l’Europe que des communautés mourantes se refassent une santé en faisant venir quantité de prêtres et de religieux d’Asie et d’Afrique, au grand dam du développement de ces pays. Car on peut dire que toute Eglise locale a les vocations dont elle a besoin, de même que tout institut religieux dans l’endroit où il est établi. A condition de ne pas entendre de façon étroite l’idée de vocation. Pour bien des catholiques, la vocation est quelque chose que d’autres personnes « ont ». Ils voient l’Eglise comme une chose extérieure à eux qui a certains besoins, comme une institution à laquelle ils ont affaire mais dont ils ne font pas pleinement partie. Tant qu’il en va ainsi, il est improbable qu’ils s’offrent à devenir des pasteurs. Ils pensent que les pasteurs et les chefs doivent venir de quelque part, pas de leurs propres rangs. A la limite, on peut les faire venir d’outre-mer. Ce qui revient à éluder la responsabilité d’une Eglise locale constituée de pourvoir à ses besoins pastoraux fondamentaux. La présence d’un grand nombre de missionnaires peut décourager les gens du pays préoccupés des
besoins de leur Eglise. Les pasteurs devraient être issus des Eglises locales et même des communautés locales.
Cela ne peut se produire si les communautés ne cultivent pas un esprit de service mutuel. Aujourd’hui, beaucoup de nos paroisses sont composées d’un prêtre et d’un tout petit nombre de personnes qui agissent, et pour le reste de gens qui se laissent passivement servir.
Peut-être avons-nous aussi besoin d’élargir notre conception d’un pasteur de communauté. Peut-être nous faut-il aller vers des communautés présidées par des pasteurs à plein temps ou à temps partiel, célibataires ou mariés, hommes ou femmes. Ce sera possible si les laïcs de la paroisse assument davantage de responsabilité dans la marche de la communauté, comme ils le font en fait de plus en plus en beaucoup d’endroits.
Une méthode beaucoup plus souple de formation des pasteurs de communautés serait nécessaire. La formation actuelle paraît beaucoup trop rigide. C’est pourquoi certains sont déformés, d’autres, si l’on peut dire, surformés. Ce qui est nécessaire à un pasteur est complètement différent dans une petite paroisse rurale, parmi des gens de la classe moyenne ou dans un milieu très instruit. Le temps n’est plus où les pasteurs devaient tout savoir sur tout. Il n’est pas rare aujourd’hui que des laïcs soient plus forts en théologie que leur curé.
Aujourd’hui, les qualités les plus nécessaires chez un pasteur sont :
– d’être accepté par la communauté à laquelle il est envoyé ; les paroissiens devraient avoir davantage leur mot à dire dans la désignation de leur pasteur, comme en certaines Eglises protestantes,
– l’aptitude à diriger,
– être un vrai berger, dévoué à servir son troupeau avec compassion et sollicitude, avec le désir, non pas d’exercer un pouvoir, mais de donner la capacité d’agir,
– le pasteur doit être l’homme de la parole, même si les prédicateurs de la paroisse sont souvent des religieux ou des laïcs, car c’est au pasteur qu’il incombe d’amener ses ouailles à une compréhension plus profonde de leur rôle de témoins de l’Evangile dans leur monde,
– peut-être les dons les plus précieux dont tout chef de communauté a besoin sont-ils la vision et le discernement, qui rendent capable de bien voir dans sa communauté où et comment l’Evangile doit être vécu et le Royaume, construit ; la construction sera l’oeuvre de toute la communauté.
L’indice d’une communauté chrétienne, ce n’est pas le nombre des « convertis » baptisés chaque année, ni l’importance des assemblées dominicales à l’église, ni le nombre des inscrits aux cours bibliques. Une communauté chrétienne se manifeste par sa contribution à la venue du règne de Dieu dans la communauté plus vaste dans laquelle elle est insérée et dont elle est une partie vivante.