Eglises d'Asie

Tibet : une lutte pour le pouvoir entre des chefs religieux fait le jeu de Pékin

Publié le 18/03/2010




La presse chinoise donne une grande place à un différend survenu entre moines au sujet de la réincarnation de l’un des chefs les plus puissants du bouddhisme tibétain, le seizième Gyalwa Karmapa. Le Karmapa est le chef de l’ordre Karma Kagyu, dont le siège était au monastère Tsurphu de Lhassa, jusqu’à l’entrée des troupes chinoises au Tibet en 1959. Le seizième Karmapa s’enfuit alors et alla établir son quartier général d’exil au monastère de Rumtek au Sikkim. Il mourut en 1981. En 1992 deux régents du monastère de Rumyek, Tai Situpa et Gyaltsap, identifièrent comme la réincarnation du seizième Karmapa un garçon âgé de sept ans qui vivait au Tibet, Ugyen Thinlay Dorji. Le conflit actuel est survenu quand un troisième régent, Sharmapa Rimpoche, a identifié un nommé Tehzing Chentze comme le vrai Karmapa réincarné. Dans un communiqué reproduit par l’agence Chine nouvelle, le monastère de Tsurphu affirme que Dorji est le dix-septième Karmapa et taxe de fraude montée avec des documents fabriqués la désignation de son rival. Sharmapa aurait fait son choix sans consultation avant de faire passer son candidat hors du Tibet.

L’enjeu de la querelle est le contrôle de l’ordre Kagyu et du patrimoine du monastère Rumtek. La désignation de Dorjii a été acceptée par le Dalai Lama et par le Bureau des affaires religieuses de Chine. Depuis l’échec de l’insurrection tibétaine en 1959, c’est la première fois que le chef spirituel tibétain en exil et Pékin sont d’accord sur le successeur spirituel d’un lama défunt. Toutefois le gouvernement chinois approuve si bien le choix de Dorjii qu’il semble répugner à le laisser aller au Sikkim. Des observateurs se demandent si le pouvoir n’essaye pas d’influencer le futur chef d’une importante école du bouddhisme tibétain qui pourrait rivaliser avec le Dalai Lama.

Pékin dirige actuellement l’enquête destinée à trouver celui qui réincarnera le deuxième chef tibétain par la puissance, le Panchen Lama (7). Celui-ci était resté au Tibet après la fuite du Dalai Lama en 1959. Il avait coopéré avec le Parti communiste et soutenu la présence chinoise au Tibet, jusqu’à sa mort en 1989. La querelle de succession dans l’ordre Karma Kagyu que le China Daily vient de rapporter en première page donne peut-être à Pékin l’espoir qu’elle fera surgir un leader tibétain prochinois, comme l’ancien Panchen Lama.