Eglises d'Asie

Des travailleurs sociaux japonais remontent aux sources de l’émigration de Thaïlandaises dans leur pays

Publié le 18/03/2010




Mizuho Matsuda préside une organisation non gouvernementale, HELP, qui gère à Tokyo un refuge pour les femmes immigrées au Japon en situation difficile. On estime à 50 000 le nombre des Thaïlandaises entrées illégalement dans ce pays. La plupart y vivent de la prostitution. Le sida n’est que l’un des dangers auxquels elles sont affrontées. Selon des chiffres donnés en 1993 par l’ambassade de Thaïlande à Tokyo, 48 Thailandaises sont mortes au Japon de mort violente en 1992, 30 dans les six premiers mois de 1993. Presque toutes s’adonnaient à la prostitution et ont été victimes du Yakuza, l’organisation criminelle qui a la haute main sur ce trafic.

Mizuho Matsuda et des Japonais qui travaillent comme lui dans les domaines de la santé et de l’aide sociale se sont inquiétés du nombre croissant des Thaïlandaises amenées au Japon. Ils sont venus passer trois jours au début du mois de mai à Udon Thani, au nord-est de la Thaïlande, pour s’informer des conditions de vie des femmes, ainsi que des actions menées pour la prévention du sida.

Dans un bidonville d’Udon Thani, à Ban Pasuk, le groupe japonais a été témoin de la pauvreté des familles dont les fillettes de neuf ans disparaissent : des cabanes faites de bouts de ferrailles et de chiffons, les enfants sous-alimentés, refoulés par l’école publique comme n’étant pas, légalement, thaïlandais. Les parents venus de villages éloignés n’ont pas de cartes d’identité, parce qu’ils l’ont vendue ou ne s’en sont jamais fait faire, ou bien n’ont pas déclaré la naissance de leurs enfants. Ils vivotent comme manoeuvres et ont choisi Ban Pasuk parce que le bout de terrain n’y coûte aucun loyer. Une centaine d’enfants du bidonville ont accueilli les visiteurs japonais avec des chants, des danses et des prières.

L’évêque, Mgr George Yod Phimphisan, a montré à ces visiteurs les initiatives prises par son diocèse pour détourner les femmes d’aller chercher du travail ailleurs. Ainsi dans un quartier de la ville, un centre de réinsertion pour des familles pauvres. Le diocèse y a ouvert une école pratique. Les Japonais ont rencontré là un groupe de mères de famille qui reçoivent une aide du fonds de l’Enfance chrétienne. Ils ont pu se faire expliquer par l’équipe de « la maison d’accueil » (Ban Phak Jai) comment elle réalise son programme de formation et de conseil sur le sida dans les villages, les écoles, les centres sociaux, les milieux de travail du nord-est de la Thailande.

Le groupe d’étude japonais est ensuite allé à Nong-Khai, à soixante kilomètres au nord, s’informer de l’action menée par des missionnaires laïcs de Maryknoll sur l’épidémie du sida, au moyen de réunions avec les femmes des villages, avec les élèves des écoles…Leur but est d’armer davantage les jeunes et les femmes contre le danger d’être exploités, en les informant, en leur procurant un soutien, une formation pratique. C’est également à Nong-Khai que les soeurs du Bon Pasteur poursuivent un programme d’assistance aux jeunes et aux femmes dans une vingtaine de villages. Grâce au fonds de l’Enfance chrétienne et à des bienfaiteurs, elles procurent des bourses d’études et des cours d’enseignement professionnel.

Les visiteurs japonais ont vu une entreprise de tissage à vocation sociale, « le village des tisserands », qui emploie les femmes des villages pour la fabrication d’articles destinés à la vente locale et à l’exportation. Mais dans la même région, bien des villageois pauvres, dont très peu possèdent la terre qu’ils cultivent, victimes de la sécheresse, écrasés de dettes, partent dans les villes, surtout à Bangkok, où ils seront exploités dans des usines ou la proie du commerce du sexe.