Eglises d'Asie

La présidente d’une association d’aide légale condamne l'”industrie du divorce”

Publié le 18/03/2010




Présidente d’une association d’aide légale aux familles, Mme Sharon Ser décrit le divorce comme l’industrie en expansion à Hongkong. Depuis 1981, le nombre d’époux divorcés ou séparés a doublé. En 1992, on a compté 5 650 divorces. En 1993, leur nombre passait à 7 454. Un mariage sur huit se termine par un divorce. Le pourcentage ne cesse d’augmenter.

Certains, comme M. Ian Strachan, directeur des services sociaux, pensent qu’il est devenu trop facile de divorcer. On devrait renforcer les lois, afin que les couples soient encouragés à essayer de sauver leur mariage. Par contre, la commission pour la réforme législative plaide pour que les divorces soient prononcés plus rapidement et dans une atmosphère moins acrimonieuse. La période de séparation effective imposée par la loi est de deux ans : c’est trop long, dit la commission. Si bien que beaucoup préfèrent, pour couper court, mettre en avant l’argument d’adultère ou de conduite insupportable. Il faudrait, selon la même commission, ramener la péridode d’attente à un an.

Quoi qu’il en soit, écrit Mme Sheila McNamara, journaliste au quotidien “Eastern Express”que le divorce soit rendu plus facile ou plus difficile, les mariages vont continuer de souffrir. On a beaucoup moins honte de divorcer. Et les individus donnent une plus grande priorité à leur bonheur personnel. De plus en plus de femmes deviennent indépendantes économiquement et choississent de prendre la route seules, plutôt que de continuer à subir l’infidélité, la violence ou l’absence d’une aide financière et affective”.

Les liens de plus en plus nombreux avec la Chine continentale ne font qu’aggraver le problème. Beaucoup d’hommes qui y travaillent régulièrement y fondent une deuxième famille. La femme restée à Hongkong est censée ne pas le savoir. Le jour où elle découvre la vérité, le mari l’abandonne. Il faut ajouter le fait que beaucoup d’hommes d’âge mûr, célibataires ou divorcés, préfèrent aller en Chine choisir une épouse dont la mentalité est restée traditionnelle.

Et, continue Mme McNamara, “la discorde à l’intérieur des ménages ne connaît pas de frontière, géographique, culturelle ou économique. L’épouse, dont les enfants étudient à l’étranger ou sont déjà grands, laissée à elle-même pendant de longues heures, a du mal à faire face à la situation. Le mari, qui doit faire carrière, passe parfois plus de temps avec une secrétaire ou une collègue qu’à la maison avec sa femme : ce qui peut entraîner des conséquences trop prévisibles”.

En ce qui concerne les familles chinoises, le Dr Law Chi-kwong estime que les valeurs traditionnelles comme la piété filiale, l’honneur familial, la maison familiale comme lieu de rassemblement sont encore honorées. Mais cela change. Le père ne domine plus la famille comme autrefois et “la mère n’est plus dépendante sur le plan économique”. Les femmes sont plus éduquées et ont davantage de chances de trouver un emploi à l’extérieur. Elles demandent à leurs maris de prendre une plus grande part dans les travaux de la maison. Elles n’acceptent plus aussi facilement l’infidélité ou la violence. Et l’éloignement des parents, des frères et soeurs, oncles et tantes, fait que les jeunes couples installés dans les nouveaux quartiers perdent une aide précieuse sur les plans affectif ou simplement pratique.

“Comparé à des pays occidentaux comme le Royaume Uni, où un mariage sur trois échoue, Hongkong n’est pas encore bien haut sur l’échelle des divorces. Mais pour combien de temps? Pour la majorité de la population, la vie rurale a pratiquement disparu du territoire, les femmes se marient plus tardivement et elles ne considèrent plus le mariage comme une nécessité”.

L’émigration joue aussi un rôle important : chaque année, de 30 000 à 40 000 personnes quittent Hongkong… et autant y reviennent. C’est désormais un mouvement à double sens. Alors qu’autrefois les enfants devenus adultes restaient à proximité de leurs parents, maintenant 10% d’entre eux travaillent en Chine. Et dans cinquante ans, la frontière avec ce pays aura disparu: “Il est impossible de prévoir quelle sera alors la structure de la famille de Hongkong. Mais il faut s’attendre à ce que la famille nucléaire reste la règle. On trouve désormais bien peu de familles où trois générations vivent sous le même toit”.