Eglises d'Asie

La multiplication des groupes chrétiens amène le gouvernement à réglementer leurs activités

Publié le 18/03/2010




Le 10 octobre 1994, le ministère des cultes et des religions a publié un texte réglementant les activités des Eglises chrétiennes au Cambodge, qui fait suite à la circulaire du 4 novembre 1993 régissant la création d’associations chrétiennes (1). Ces documents, tout en affirmant que le bouddhisme est la religion du royaume, reconnaissent l’existence de diverses croyances religieuses au sein du peuple khmer et leur droit à s’exprimer.

La circulaire d’octobre 1994 demande à chaque groupe chrétien de former un “comité de chrétiens” qui aura la responsabilité et la direction du groupe. Ce comité devra aussi préparer des statuts à faire approuver par le gouvernement et envoyer des représentants à un “Conseil des chrétiens du royaume du Cambodge” qui devrait jouer un rôle de relais entre les autorités gouvernementales et les groupes chrétiens.

La publication de la nouvelle circulaire semble répondre à l’inquiétude de plus en plus manifeste de certains membres du gouvernement devant ce qu’un observateur du Cambodge interrogé par Eglises d’Asie considère comme un “déferlement de zèle chrétienLe directeur de cabinet du ministre des cultes n’a pas caché sa crainte de voir “la moitié de la population du Cambodge devenir chrétienne sous peu de tempsDe graves incidents récents (2) qui ont obligé un évangéliste américain à quitter précipitamment le pays ne font qu’augmenter cette inquiétude gouvernementale.

On dénombre aujourd’hui plus d’une dizaine de dénominations chrétiennes, aux contours souvent mal définis, qui animent 220 lieux de culte. Beaucoup de ces Eglises appartiennent à la mouvance évangéliste. Dans le but de recruter des membres, elles utilisent les moyens qui sont à leur disposition : cours d’informatique, enseignement de l’anglais, distribution d’aides financières, salaires généreux versés aux responsables etc. Quelques-unes ne cachent pas leur absence de scrupules : “Il faut, a déclaré un pasteur, profiter du désarroi du peuple cambodgien pour le faire entrer dans la religion chrétienne”. Ce prosélytisme s’accompagne souvent d’un mépris profond pour les traditions religieuses cambodgiennes. On recommence à dire, par exemple, que les “convertis” doivent fouler aux pieds les images de Bouddha.

Les groupes chrétiens protestants sont présents au Cambodge depuis 1923 et ont été souvent assimilés depuis lors à la présence américaine. C’est ainsi qu’en 1963, le prince Sihanouk avait expulsé tous les pasteurs américains soupçonnés d’être autant d’agents de la CIA. Après le coup d’Etat de 1970, les prêcheurs américains sont revenus. On les a revus dans les camps de réfugiés de la frontière thaïlandaise, après l’exode massif provoqué par les Khmers rouges. Depuis 1979, et surtout depuis 1990, leur nombre s’est accru considérablement par le biais des différentes organisations non gouvernementales.

Présents au Cambodge depuis 1555, les catholiques comptent 5 000 fidèles khmers qui se réunissent dans une trentaine de lieux de culte, des maisons privées pour la plupart, et 15 000 fidèles vietnamiens qui disposent d’une vingtaine de lieux de rassemblement. Pendant la période du protectorat français, les Khmers ont souvent fait l’amalgame entre l’Eglise catholique et la puissance coloniale.