Les problèmes à affronter étaient nombreux: depuis le régime alimentaire insuffisant pour les séminaristes jusqu’aux locaux trop petits et en mauvais état dans lesquels ils étaient logés dans l’ancien évêché; du manque de textes et d’enseignants « à la page » jusqu’aux interférences continuelles du Bureau des affaires religieuses et de l’Association patriotique provinciale.
Quelques mois auparavant, les évêques avaient réussi à augmenter, par de grands sacrifices, le montant de l’entretien des séminaristes, mais les autorités civiles avaient mis à la cuisine un cuisinier « à eux », de sorte que la quantité et la qualité de la nourriture étaient restées inchangées, au détriment de la santé des jeunes étudiants.
La toute puissante Mme Li Jiachum, vice-présidente de l’Association patriotique provinciale, devait être encore plus omniprésente, de sorte que cela annulait les efforts des évêques pour améliorer le train de vie du séminaire. Le bruit avait aussi couru que les séminaristes auraient pu être transférés dans l’un des plus spacieux édifices appartenant à l’Eglise mais restitués seulement en apparence à leur usage ecclésial: en fait ils étaient exploités en commun par l’Association patriotique et le bureau des affaires religieuses, avec un bon rendement économique.
En profitant de l’absence de l’évêque, on avait nommé un nouveau vice-recteur, fonctionnaire du bureau des affaires religieuses et, détail peut-être sans importance pour les autorités, non baptisé. Pour remédier à l’incompétence évidente du nouveau « supérieur », le bureau des affaires religieuses et l’Association patriotique avaient obtenu la collaboration de deux jeunes prêtres: Li Zhigang et Yue Wenhui.
Mais les autorités avaient commis une grave erreur, en sous-estimant la réaction des évêques et des étudiants. D’accord avec ses autres confrères, Mgr Xu ne retourna plus au séminaire et les étudiants (plus de 40 sur 54) rentrèrent chez eux. Après deux ans environ, le cas n’est toujours pas résolu. Les évêques ne sont pas d’avis d’approuver un tel abus de pouvoir de la part du gouvernement, et ce dernier – malgré les condamnations parvenues de l’intérieur du pays et aussi de séminaires à l’étranger – ne réussit pas à trouver une voie de sortie honorable.
L’épisode, significatif de la pression constante « informelle » exercée par le régime au détriment de l’Eglise, n’est pas isolé. Des faits, tout aussi graves, se sont répétés en d’autres temps et dans des circonstances diverses dans les séminaires de Hohhot, Xi’an, Taiyuan, Wuhan. Pour les autorités ecclésiastiques, il n’y a pas d’autre recours possible que de se soumettre à d’exténuantes et humiliantes tractations. Par contre, l’Association patriotique se trouve invariablement du côté du régime, et essaye toujours de se présenter comme « l’interlocuteur » qui peut parler au nom de l’Eglise.
Dans les pages qui suivent, nous tenterons de déchiffrer la complexe réalité de l’Eglise chinoise: les vexations subies et les courageux témoignages de foi qui ont été donnés.
De Mao à Deng, une persécution sans fin
Octobre 1949: Le régime marxiste décide d’éliminer l’Eglise catholique du pays. La « déclaration de Guangyuan » la veut domestiquée et fidèle aux prescriptions du pouvoir. Mais, malgré l’expulsion des missionnaires, l’entreprise se révèle ardue pour Pékin. En 1957, le pouvoir décide de recourir à un piège: ainsi naît l’Association patriotique.
Aujourd’hui, entendre parler du conflit qui travaille l’Eglise catholique en Chine surprend et déconcerte. Cela déconcerte d’entendre des termes comme Eglise ou évêque « officiel » ou « non officiel », « clandestin » et « patriotique ». Certains parlent, de façon d’ailleurs très impropre, d' »Eglise patriotique ».
Mais cette situation n’est que le résultat de la longue et très explicite agression du régime contre l’Eglise catholique. Pour comprendre, il faut revenir un peu en arrière.
Quand, en octobre 1949, le président Mao Zedong proclama la République populaire de Chine, le nouveau régime avait déjà en tête la ligne qu’il voulait suivre dans le traitement de l’Eglise. Cette ligne entrait dans les catégories empruntées aux principes marxistes d’analyse du « phénomène religieux », déjà rôdés dans les zones occupées depuis des années au nord et à l’ouest du pays et, sur une plus grande échelle, en Union soviétique voisine. Il s’agissait de catégories très simples, selon lesquelles la religion est inutile et nocive, raison pour laquelle il faut en favoriser l’éradication dans le tissu social du pays. Les méthodes subiront des changements et des retouches au cours des années, mais la substance restera la même, jusqu’aujourd’hui.
L’Eglise catholique, toutefois, avait et continue d’avoir des particularités qu’on ne rencontre pas dans les autres religions. Les liens au-delà des frontières, l’imposant réseau de services sociaux et éducatifs, la préparation culturelle de ses cadres dirigeants, des fidèles clercs et religieux fortement motivés, sa densité interne, rendaient ce « phénomène religieux » difficile à soumettre et à manipuler. Les vastes services caritatifs opérant depuis toujours, rendaient en outre l’institution chère même aux non-catholiques.
Le nouveau régime mit d’abord en action une série d’initiatives variées dans le but d’affaiblir ou de faire plier l’Eglise.
Une branche spéciale de l’appareil du régime avait été chargée de ce travail: le département du Front uni. Sa tâche spécifique était de chercher à « unir et à diviser » toute force, institution ou organisation qui n’était pas le Parti communiste chinois, selon le principe que « l’ami d’hier sera l’ennemi de demain
Le plan d’action était presque toujours le même. Les commissaires du parti se montraient au début « amis » respectueux de l’Eglise et demandaient son aide en faveur des masses populaires. Ils installaient d’abord de petits groupes de leurs adeptes dans certain locaux de la mission ou de l’école; dans l’espace de quelques jours, l’institution catholique se trouvait de fait totalement expropriée des locaux et privée de moyens. C’est alors que, si cela n’était pas déjà commencé avant, s’engageait l’attaque contre les personnes les plus en vue, évêques et prêtres en premier lieu.
En certains lieux, les méthodes furent beaucoup plus expéditives. Prêtres ou chrétiens influents furent tout simplement éliminés, parfois avec un rituel d’une cruauté très inventive. Il y a eu plusieurs cas de personnes ensevelies vives, torturées pendant des mois, traînées à travers le pays attachées à un cheval, attachées à des arbres dans le froid du nord… Quand le régime prit possession du pouvoir sur tout le territoire national à la fin des années quarante, sa renommée et sa férocité dans la persécution étaient déjà bien connues.
Dès que le pouvoir se fut consolidé, commença dans tout le pays l’opération d’expulsion de tous les étrangers, missionnaires en tête. Des milliers d’évêques, prêtres, frères, laïcs et religieux furent contraints d’abandonner les lieux ou les institutions où ils avaient passé tout leur vie, avec les quelques haillons qu’ils avaient sur le dos. A beaucoup d’entre eux, cette opération coûta la vie. Une énorme injustice fut commise contre des milliers d’hommes et de femmes, souvent faussement accusés et maltraités avec barbarie, coupables seulement d’avoir donné gratuitement.
A leurs postes, à la merci de leur nouveaux patrons, les religieuses et religieux chinois restèrent seuls et sans défense. Le moment était venu pour eux de dire en « Qui » ils croyaient. Ils l’ont fait en donnant l’un des témoignages les plus beaux de l’histoire de l’Eglise.
Le régime était convaincu que, désormais privés du soutien des étrangers, les cadres de direction chinois de l’Eglise se plieraient vite et facilement. Il n’en fut pas exactement ainsi. Au début des années cinquante la pression du gouvernement s’exerça sur les évêques chinois et sur les administrateurs diocésains laissés par les évêques expulsés. Beaucoup disparurent pendant longtemps sans qu’on sût quoi que ce soit à leur sujet.
Mgr Ignace Pi Shushi, archevêque de l’actuelle Shenyang (alors appelée Moukden), disparut pendant quatre ans environ; il réapparut alors qu’on avait déjà célébré ses obsèques.
Que voulait le régime de la part de ces hommes? Tout simplement leur adhésion au « mouvement de réforme de l’Eglise de Chine », qui annonçait une Eglise établie sur des bases « démocratiques », et indépendante des forces extérieures. Une Eglise destinée à devenir progressivement toujours plus insignifiante, vidée de toute force d’attraction sur les gens, privée de toute possibilité de jugement sur l’homme et sur la société qui puisse défier le jugement du parti.
Ces objectifs étaient déjà contenus en synthèse dans la célèbre « Déclaration de Guanyuan », diffusée par l’Agence Chine nouvelle le 3 décembre 1950. Cette déclaration portait la signature – selon la même agence – de 500 catholiques, un chiffre non réaliste pour ce village perdu du Sichuan. Derrière, il y avait, reconnaissable, l’influence du curé Wang Liangzuo, encore en vie et actif à Chengdu et au niveau national. (Aujourd’hui il est marié et il est l’un des vice-présidents nationaux de l’Association patriotique).
Inspiré du modèle du mouvement protestant des « Trois autonomies » promu par le pasteur Wu Yaozong (1893-1979) dans les années quarante, le « Mouvement catholique de réforme » prévoyait la création d’un organisme interne à l’Eglise, auquel le régime aurait confié la responsabilité de poursuivre ses propres objectifs.
Les quatre autres religions reconnues en Chine – bouddhisme, taoïsme, islam et protestantisme – avaient vite capitulé devant les insistances du gouvernement et créé les organismes respectifs de contrôle: l' »Association nationale islamique » fondée à Pékin le 11 mai 1953, l' »Association bouddhiste » créée le mois suivant; le « Mouvement protestant des trois autonomies », inauguré officiellement au cours de l’été 1954; et enfin, plus tard, l' »Association taoïste », créée le 12 avril 1957.
Il n’était facile pour personne de résister aux pressions habilement mises en oeuvre contre quiconque aurait osé avoir une opinion ou une vision différentes des choses. Mais les catholiques n’étaient pas disposés à renoncer à ce qu’ils considéraient comme essentiel à leur foi et à la liberté de croyance. Le régime était surtout à la recherche d’un leader, un évêque, qui fût disposé – même de mauvais gré – à se mettre à la tête de la nouvelle organisation catholique. Il pensait qu’il était stratégiquement important que le mouvement fût perçu comme issu spontanément des éléments les plus en vue de l’Eglise, comme le sont les évêques.
L’archevêque de Pékin, le cardinal Thomas Tian Gengxin, verbite, était resté bloqué en dehors des frontières de la Chine au moment de la prise de pouvoir par les communistes.
Il était à l’étranger pour des soins médicaux et tout laissait croire qu’il y resterait. Pékin essaya à diverses reprises de le « ramener » en Chine, avec d’amples promesses de liberté et de privilèges. La contrepartie implicite était qu’il acceptât de se mettre à la tête du mouvement de réforme. Le cardinal Tian n’accepta jamais: une grande figure de pasteur qui, en exil et pendant de longues années, dut souffrir les accusations non fondées d’avoir abandonné son troupeau au moment de l’épreuve.
Pendant ce temps, à l’intérieur de la Chine, tout semblait marcher sur des roulettes pour Pékin: l’Eglise catholique était restée presque entièrement privée de moyens d’action, les étrangers désormais expulsés (à l’exception d’un tout petit nombre, entièrement neutralisé), les églises presque toutes fermées depuis le début de la réforme agraire (1950). Il ne manquait même pas un certain nombre de laïcs et de prêtres prêts à collaborer. Ce qui manquait par contre entièrement, c’était les évêques.
Septembre 1955 fut décisif. Le 8 de ce mois, le régime eut recours à la force, en commençant par Shanghai: en même temps que l’évêque de la ville, Mgr Ignace Gong Pinmei, furent arrêtés près de 70 prêtres et des centaines de fidèles. L’action de la police s’étendait bien au-delà de Shanghai. Le message était clair: ou on s’alignait ou il fallait accepter de payer un prix très élevé. Les victimes de ces rafles disparurent dans les goulags du régime: beaucoup y moururent, les survivants en sortirent après des décennies. Mgr Gong, nommé cardinal en 1979 (mais proclamé seulement en 1991 et aujourd’hui résidant aux Etats-Unis) en sortit après 30 ans; d’autres moururent en prison, comme le P. Philippe Wang Ziyang, du diocèse de Yanggu (dans la province du Shandong) décédé le 31 janvier 1990, après 36 années de détention. Mais cette page du martyrologe chinois serait sans fin…
Dans les premiers mois de 1957, en pleine campagne contre les éléments « de droite » et les intellectuels, plusieurs dizaines de catholiques furent appelés à Pékin dans le but de préparer l’imminente première « Assemblée nationale des catholiques chinois ».
Enfin, au cours de l’été de la même année, le régime convoqua dans la capitale 241 « représentants catholiques » provenant des 100 circonscriptions ecclésiastiques de la Chine. La réunion – on est actuellement davantage en mesure de le vérifier – fut méticuleusement préparée par les autorités centrales. On eut soin de réunir les personnalités les plus en vue du catholicisme chinois en même temps qu’une ample représentation de « collaborateurs » prêtres et laïcs, partisans du régime.
Pendant des mois, on discuta de tout, avec une ample liberté de parole. Même les évêques et les prêtres n’acceptant pour rien au monde de collaborer, purent donner leur avis. Cet événement est confirmé aujourd’hui par un évêque « non officiel » qui prit part à ces rencontres et qui, quelques semaines après son retour dans son diocèse, fut arrêté et emprisonné (il passera en tout 30 ans en prison et au travail forcé).
Je l’ai rencontré en 1993 dans une petite chambre de son ancien évêché. Voici son témoignage: « Le gouvernement voulait nous faire fonder une ‘Association patriotique’ qui aurait exprimé la solidarité des catholiques avec le pouvoir. Nous, évêques, et avec nous un bon groupe d’administrateurs diocésains, avions peur que l’Association se transforme en un second temps en un mouvement d’indépendance qui décréterait une séparation de l’Eglise de Chine et du Saint-Siège. En somme, nous voulions des garanties précises.
Vers la fin du mois d’août, les représentants du gouvernement nous dirent qu’ils étaient en mesure de nous fournir les garanties que nous demandions. Ils avaient parlé avec les leaders les plus élevés – disaient-ils – et tous étaient d’accord de n’établir aucun lien entre la nouvelle Association et le mouvement d’indépendance de l’Eglise. Ils nous dirent qu’il s’agissait d’une assurance seulement verbale mais que nous devions nous y fier. Nous le fîmes. Le jour suivant, – c’était le 3 août 1955 – le Quotidien du peuple publiait un article de l’Agence Chine nouvelle en première page, article qui louait les catholiques progressistes, lesquels avaient voulu fonder l’Association patriotique des catholiques chinois, ‘pour construire une Eglise catholique indépendante et autonome’. Nous nous sentions trahis et humiliés. Dans la grande salle de l’Hôtel Pékin, où nous nous réunissions depuis des jours et des jours, nous fûmes plusieurs à vouloir protester. Mais la parole ne nous fut plus donnée ».
Le régime était donc arrivé à ses fins: associer le nom de grandes personnalités catholiques à celui de l’Association patriotique. Par la suite, l’Association patriotique fut confiée aux partisans du régime, tandis que les grandes personnalités furent les unes après les autres enfermées dans les goulags. Celles-là disparues, l’Eglise en Chine fut confiée aux personnes qui s’étaient prêtées au double jeu.
Sept mois après, Pékin réussissait à faire ordonner, à Wuhan, les deux premiers évêques sans mandat apostolique, l’un desquels – encore en vie – est Mgr Dong. Après eux, rapidement, d’autres seront ordonnées, dont beaucoup étaient présents en ce jour fatidique à l’Hôtel Pékin.
Ce sera à ceux-là et à beaucoup des laïcs présents eux aussi à cette réunion – qui par la suite sera désignée comme la 1ère Conférence nationale des représentants catholiques chinois – que le régime de Deng remettra l’Eglise en 1979, après la grande catastrophe de la « Révolution culturelle », durant laquelle les religions furent officiellement déclarées « abolies ».
Les manoeuvres du pouvoir, étape par étape
Ainsi grandit « l’Eglise parallèle. » Nous présentons ici, en synthèse, les dates et les résultats des 5 Conférences nationales des représentants catholiques chinois.
2 août 1957: Siège: l’hôtel Pékin à Pékin
Délégués présents: 241
L’Association patriotique est fondée.
Président de l’Association patriotique: l’archevêque Ignace Pi Shuhsi.
1958-1962: Ordination de 41 évêques sans mandat pontifical.
6-18 janvier 1962: Siège: Pékin
Délégués présents: 256
Président de l’Association patriotique: l’archevêque Ignace Pi Shushi réélu. A la fin de la Conférence, 7 évêques sont ordonnés sans mandat pontifical.
22-30 mai 1980: Siège: Pékin
Délégués présents: 207 (dont 33 évêques)
Institution de la Commission administrative catholique présidée par Mgr Yang Gaojian et du Collège des évêques chinois) présidé par l’évêque Jiang Jiashu.
Président de l’Association patriotique: l’évêque Zong Huaide.
A la fin de la Conférence: aucune ordination épiscopale.
1981-1986: 18 évêques sont ordonnés sans mandat pontifical.
17 novembre- 3 décembre 1986: Siège: Jingfeng Hotel de Pékin
Délégués présents: 278
Président de l’Association patriotique: l’évêque Zong Huaide.
Président de la Commission administrative et du Collège des évêques: l’évêque Jiang Jiashu.
A la fin de la Conférence, 4 évêques sont ordonnés sans mandat pontifical.
1987-1992: 35 évêques sont ordonnés sans mandat pontifical.
15-19 septembre 1992: Siège: l’hôtel Jinfeng de Pékin
Délégués: 272 (50 sur 68 « évêques patriotiques »)
Restructuration de l’organigramme: la Commission administrative devient une des 6 commissions dépendant du Collège des évêques.
Président de l’Association patriotique et du Collège des évêques: l’évêque Zong Huaide.
1993-juillet 1995: Ordination de 11 évêques « patriotiques ».
La tromperie du régime : les évêques dans le piège
« Ce fut par un habile stratagème qu’ils nous coincèrentUn évêque « non officiel » raconte les dessous inédits de la cinquième Conférence nationale des représentants des catholiques chinois. C’est là que fut voté le statut du Collège des évêques, dans lequel ils se proclament autonomes et indépendants. Les dessous d’une douloureuse « déchirure » d’avec Rome.
Si elle n’avait pas été renvoyée plusieurs fois parce que « il manquait les fonds nécessairesla cinquième Conférence nationale des représentants catholiques chinois aurait dû être une réunion administrative ordinaire. Comme pour d’autre occasions semblables, le Front uni et le bureau des affaires religieuses, en étroite collaboration avec les fonctionnaires de l’Association patriotique, voulaient avoir tous leurs pions en place.
A l’ordre du jour de la rencontre (qui s’est tenue à Pékin du 15 au 19 septembre 1992), les thèmes importants sont au nombre de deux: le renouvellement des responsabilités au sommet de l’Association patriotique et du Collège des évêques et l’approbation du statut de cette dernière. Les thèmes se chuchotent mais rien ne filtre officiellement. Les fonctionnaires du régime, toutefois, sont en mouvement pour chercher « l’homme sûr » qui devra être élu pour guider l’Eglise catholique officielle dans la République populaire de Chine. Le sujet était et reste secret, surtout à cause des arrière-pensées: tout devait et doit continuer à apparaître comme un libre choix des évêques.
En Chine, à diverses reprises, j’ai eu l’occasion de discuter de ce sujet avec des personnes qui participèrent à la rencontre. Mais il y avait des points qui restaient obscurs. Une conversation, il y a plusieurs mois, dans une localité d’Europe, m’a fourni les chaînons manquants. Mon interlocuteur avait pris part à cette réunion, et dans une position où il était bien informé. « Nous avons été occupés pendant des mois par une question banale: le ‘nom’ de celui qu’il fallait désigner comme chef des organismes centraux, Association patriotique et Collège des évêques. Certaines personnalités ne plaisaient pas au gouvernement et on nous le fit comprendre à plusieurs reprises, sans ambages. Il n’y avait qu’un « homme sûr » en définitive : Mgr Zong Huaide, évêque de Jinan et Zhaocun, dans la province du Shandong ».
Deux choses faisaient de Mgr Zong un homme sûr: sa faiblesse et son amitié pour Antoine Liu Bainian, laïc, dans les coulisses du pouvoir depuis les années 50. Au fond, ce dernier reste l’atout principal des autorités de Pékin. Liu Bainian était déjà mal vu d’un grand nombre de personnes, surtout des évêques qu’il a toujours considérés comme une bande de morveux. La candidature de Mgr Zong signifiait un nouvau bail pour Liu Bainian. N’importe quel autre évêque qui aurait été élu aurait manoeuvré pour se débarrasser de sa présence.
« Après de patients et persistants contacts des hommes du régime avec ‘les représentants catholiques’, surtout avec les évêques, Mgr Zong Huaide était le seul nom qui restait sur la liste des candidats possibles. Son élection, proposée pendant les 20 dernières minutes de la réunion, a eu lieu à la hâte, à mains levées. Ses principaux partisans étaient l’évêque de Shanton, Cai Tixuan, et Liu Jinghe, évêque de Tangshan. »
La seconde grande question, celle du statut du Collège des évêques, devint secondaire pour les participants de la réunion qui sous-estimèrent son importance. « On ne nous donna pas beaucoup de possibilités pour approfondir sa signification, » affirme un autre évêque. « Cela avait été présenté comme quelque chose d’ordinaire qui avait été laissé en suspens pendant trop longtemps. A nous, par contre, on avait indiqué un autre sujet comme étant prioritaire pour notre attention: c’était la question de savoir si dans la structure ecclésiale en Chine, la préséance revenait au Collège des évêques ou à l’Association patriotique. L’acceptation par les fonctionnaires du bureau des affaires religieuses de donner la priorité à l’organisme épiscopal fut considérée par tous avec grande satisfaction, comme un signe de bonne volonté de la part du régime vis-à-vis de l’Eglise. »
Et c’est ainsi, hélas, que le statut passa. Pour la première fois dans l’histoire de l’Eglise en Chine, un groupe d’évêques (une cinquantaine parmi eux étaient présents) se proclamait autonome et indépendant » (art.2) et investi de la tâche de conduire sa propre Eglise, clercs et fidèles, vers cet objectif. Plus loin (art.13), apparaît par contre la « clause démocratique ». Les évêques répondent de leur travail, personnellement et collectivement, au Conseil national des représentants catholiques. Celui-ci est l’organisme dépositaire du pouvoir dans l’Eglise, il peut déposer les évêques ou dissoudre leur Collège, quand ce dernier ne respecte pas les objectifs proclamés.
La gravité de telles affirmations n’échappe à personne. On dit qu’en Chine, souvent les paroles n’ont pas le sens qu’elles semblent avoir. Mais il est difficile d’admettre un tel principe sur un sujet de cette importance.
Quelques mois après, le Comité permanent des évêques (c’est-à-dire Mgr Zong Huaide et Liu Bainian) publie un règlement pour la nomination des évêques catholiques, s’arrogeant l’autorité ultime en la matière. Aucune référence n’est faite à la tradition catholique et au rôle de Pierre.
1989, l’année des massacres : les prophètes sortent au grand jour
1989 a été unique dans l’histoire de la République populaire. Une des idées qui circulaient alors avec le plus d’insistance – mais qui finit par être écrasée par les chars d’assaut le 4 juin de la même année – se résumait dans la conviction qu’il était possible de prévoir pour le Parti communiste une « évolution interne » qui aurait peut être rendu possible l’émergence d’un système politique pluraliste. La Chine semblait avoir dépassé le « phase révolutionnaire » qui avait jusqu’alors justifié et légitimé le pouvoir hégémonique du parti. Le climat de réforme et d’ouverture exigeait en parallèle, disait-on, des réformes politiques qui auraient avalisé le droit de gouverner et de continuer à le faire.
Depuis juin de cette année 1989, une telle ligne de pensée a été défaite et est devenue une hérésie. Pourtant, ces idées avaient, de façon répétée, trouvé place dans la presse. Il semblait que même pour la Chine, l’heure avait sonné d’un changement radical; le climat qui s’était instauré faisait respirer un air de liberté et de nouveauté longtemps étouffé par la toute puissante « dictature du prolétariat
La même « ambiance » avait pénétré les milieux religieux, même catholiques. Dans ces derniers, on notait que pendant des décennies, l’élément de trouble avait été la présence de l’Association patriotique et de toutes les personnes et organismes liés à elle, y compris les évêques « patriotiques ». C’est de cette période que date l’apparition d’une hypothèse, discutée même à de très hauts niveaux, selon laquelle la présence encombrante – et souvent embarrassante – de l’Association patriotique n’était plus indispensable.
Mais celle-ci supprimée, qui aurait représenté l’Eglise catholique devant le gouvernement et à l’étranger? Aurait-on pu se fier à ces « collaborateurs historiques » qui étaient apparus – justement ou non- disposés à sacrifier leurs idéaux pour s’acquérir des espaces réduits de mouvement? Et surtout: après des décennies de silence, d’oppression et de confusion, où le catholique chinois aurait-il pu tourner son regard pour identifier l’authenticité de la foi et trouver, libre de calculs et d’intérêts, l’Eglise voulue par le Christ? Telles étaient les interrogations urgentes et brûlantes qui se répandaient dans les milieux catholiques et causaient bien des incertitudes et soucis sur les deux rives (officielle et non officielle) du catholicisme chinois.
Les milieux « patriotiques » ne trouvaient plus l’alliance et la sécurité que leur accordaient depuis longtemps les anciens interlocuteurs du régime, désormais occupés à humer dans quelle direction soufflait le vent, tandis qu’à l’intérieur du catholicisme « non officiel » (ou clandestin) on pensait que le moment était venu de poser un signe public qui exprimât l’authenticité de la foi: « ou maintenant ou, peut-être, jamais plus, » commentait une personnalité importante du milieu clandestin. Quel « signe » donner? La réponse vient spontanément à un petit groupe de courageux pasteurs: on avait besoin de la garantie d’une Conférence épiscopale qui aurait à coeur avant tout et surtout l’Evangile.
Après un échange intense de lettres et de messages, parfois contradictoires, finalement cela arriva. Le 21 novembre 1989, dans un village somnolent et perdu de la province du Shaanxi, se réunirent 11 évêques « non officiels », aidés par un peu plus d’une vingtaine de prêtres et de laïcs venus pour les soutenir. Dans une très pauvre chambre de la paroisse de Zhangerce, qui servait aussi de dortoir pour les évêques, fut fondée la conférence épiscopale chinoise « en continuité d’idées avec le synode de l’Eglise de Chine » célébré à Shanghai en 1924, et en solide « communion avec le successeur de Pierre ».
A peine quelques jours plus tard, tous – évêques et accompagnateurs – seront arrêtés et condamnés à des années de « rééducation par le travailexcepté Mgr Li Zhenrong, qui, atteint d’un cancer, sera arrêté plus tard dans un hôpital de Tianjin.
La personnalité qui avait inspiré ce geste est maintenant handicapée par une grave maladie: c’est Mgr Pierre Liu Guandong, évêque de Yixian. C’est à son courage et à sa foi que l’on doit ce très beau signe prophétique, destiné à demeurer tel, mais qui demeurera un geste historique marquant la permanence et l’authenticité inaliénable de l’Eglise catholique qui est en Chine.
Laïcs et clercs fidèles à Rome : le cauchemar de Pékin
Nous sommes dans les premiers mois de 1990. Le souvenir des massacres survenus à Pékin et dans beaucoup d’autres lieux de la République populaire en juin de l’année précédente est encore vivant et les conséquences humiliantes sur le plan international se font sentir. Les dirigeants chinois sont très soucieux: les régimes communistes européens s’écroulent les uns après les autres en une séquence terrifiante. Même le colosse soviétique, père historique du communisme, est sur sa fin. Pékin se sent menacé, mais de l’intérieur: d’une volonté de liberté, un germe qui se développe dangereusement et à l’excès.
Un des puissants « gérontes », l’ultra-conservateur Chen Yun, envoie une lettre au ton grave au nouveau chef du Parti communiste, Jiang Zemin, lui intimant l’ordre de confiner la religion dans d’étroites limites, spécialement en tenant compte du rôle qui lui est attribué dans la chute des régimes de l’Europe de l’Est. La lettre demande entre autres aux autorités centrales de faire faire une recherche de grande envergure pour se rendre compte du nombre effectif des croyants. Les résultats, demeurés secrets pendant longtemps (mais obtenus ensuite par l’auteur de cet article par voie privée), ne manquèrent pas d’alarmer les dirigeants chinois. Les chiffres allaient bien au-delà de ceux de 1988, date d’une autre enquête qui avait poussé, déjà, le premier ministre Li Peng à ordonner la répression contre le mouvement catholique « non officiel ». D’un autre côté, Pékin entreprend une série systématique de réunions au niveau national pour remettre de l’ordre dans le domaine des activités religieuses.
Du 15 au 30 novembre 1990, se tient ainsi à Shunyi, à 35 km au nord-est de Pékin, un séminaire d’études pour les dirigeants catholiques. Y prennent part 61 personnes, dont 26 évêques et 15 prêtres du nord du pays. Nombreux sont les sujets abordés. Le climat qui y régnait est décrit éloquemment dans un rapport qui a franchi les frontières de la Chine. « Le 21 novembre – y lit-on – Monsieur Z, représentant le Front uni, a fait une intervention très dure. Il a ouvertement accusé les évêques d’être trop conciliants et accomodants dans leur attitude à l’égard du pape et du Vatican. Certains évêques – continue M. Z, ont même osé se mettre en contact avec le pape pour lui demander d’être reconnus comme évêques de l’Eglise catholique. Le haut fonctionnaire a ajouté que le gouvernement chinois s’attend à ce que ces évêques s’avancent de leur propre initiative et admettent leur erreur. Les autorités en connaissent les noms mais leur laissent la possibilité de changer d’opinion en faisant le premier pas. »
L’adieu aux catacombes
Persécution et prison n’ont pas éteint l’ardeur du témoignage. Dans le sillage de guides indomptables qui ont payé de leur personne, des communautés chrétiennes entières ont refleuri dans diverses parties de la Chine. Et, grâce à un pasteur courageux, ils peuvent compter aujourd’hui sur de nouveaux évêques. Ordonnés en secret, en communion avec Rome.
Nous sommes non loin de Lanzhou, une cité autrefois ravissante au coeur de la province du Gansu. Sa population, comme dans le reste de la province, est très pauvre. De larges poches de territoire vivent bien en dessous des limites tolérables de la pauvreté: Les gens ne sont pas tous de race han, les minorités ethniques sont nombreuses.
Même ici, au début des années 80, la réforme de Deng permet le retour de beaucoup de personnalités et de membres des professions libérales, éliminés au cours des décennies précédentes comme contre-révolutionnaires, éléments de droite, espions, ou capitalistes… Parmi eux, il y a aussi des prêtres ou de simples fidèles catholiques. Le pays a de nouveau besoin de ces « intellectuels » pour retrouver une apparence de normalité, après la folie idéologique qui avait porté la République populaire au bord de l’effondrement, y compris celui de toutes les institutions dont le Parti communiste et également de l’économie du pays.
Prêtres et fidèles, après des décennies de souffrances, privations et brimades sont souvent réduits à des épaves humaines. Ils ne serviront certainement pas à la reprise économique du pays, mais ils contribueront à construire une apparence de normalité, à l’intérieur et surtout en dehors des frontières de la Chine. Deng Xiaoping compte beaucoup sur le soutien de la communauté internationale: pour l’obtenir, il est absolument nécessaire de créer une nouvelle image de la Chine.
Le Gansu, toutefois, est encore inacessible aux regards indiscrets de l’extérieur. D’autre part, les prêtres qui viennent d’être libérés ne donnent aucun signe de s’être « réformés » dans leur comportement « rétrograde » et « réactionnaire ».
Beaucoup d’entre eux avaient disparu pour toujours dans les institutions pénales. Parmi les survivants relâchés, on laissa mourir quatre prêtres dans les porcheries qui leur avaient été assignées comme logement. Il leur était interdit de sortir, et il était défendu aux fidèles et aux parents de leur porter nourriture et médicaments.
Peut-être est-ce grâce à ces prêtres, forts seulement de leur foi, que la vie de l’Eglise ici reprend avec vigueur. En vérité, l’Eglise officielle est réduite à un groupe infime et pathétique. L’administrateur diocésain de Tianshui, Augustin Zhao Jingnong, après les années où, comme un lion, il avait conduit la « réforme » de l’Eglise et dénoncé le danger pour l’Etat de ceux qui n’étaient pas disposés à suivre le régime en tout, se retrouve presque sans personne pour le suivre. L’ordination épiscopale, qui lui fut conférée en 1981, comme récompense de sa tenace et constante fidélité au parti, n’augmente pas sa crédibilité; au contraire, elle le relègue dans un isolement encore plus profond.
Dans la province, un formidable mouvement ecclésial, éloigné du pouvoir, est allé se développant parallèlement. Du côté « non officiel » émergent des personnalités d’une stature remarquable: Mgr Philippe Yang Libai organise les communautés sur les hauts plateaux, tandis que Mgr Casimir Wang Milu, avec l’aide de ses confrères, visite et organise le sud, de Tianshui (c’est là que se trouve son district d’origine de Ganggu) jusqu’aux confins méridionaux du Shaanxi. Du côté « officiel » aussi émerge Mgr Philippe Ma Ji, évêque de Pingliang. Celui-ci a le courage de rejeter, dans un document public, l’Association patriotique et d’en dénoncer le caractère extra-ecclésial.
Autour de ces figures se réorganise une solidarité ecclésiale exceptionnelle, qui n’est entamée ni par l’incarcération de Mgr Yang Libai (pendant trois ans) et celle de Mgr Wang Milu (pendant dix ans), ni par les pressions continuelles sur Mgr Ma Ji. La force pour de tels gestes leur venait d’immenses figures d’évêques, dont le mandat remontait au pontificat de Pie XII.
Leur communion – qui n’a jamais fléchi – avec le Siège de Rome, et leur opposition ouverte au mouvement de réforme de l’Eglise et à toutes ses expressions collatérales (comme l’Association patriotique) avaient été à l’origine d’une série interminable de souffrances et de vexations.
A partir du début des années 50, une grande partie (sinon la totalité) de leur temps s’était passée à l’intérieur d’institutions pénales de l’Etat. Deux d’entre eux avaient été remis en liberté entre 1979 et 1980: il s’agissait de Mgr Antoine Zhou Weidao, évêque de Fengxiang, dans le Shaanxi, et de Mgr Pierre-Joseph Fan Xueyan, évêque de Baoding, dans le Hebei.
C’est principalement grâce au zèle et au courage de Mgr Zhou que les nombreuses communautés du Shaanxi, province voisine de celle du Gansu, reprennent rapidement vie et se réunissent à nouveau pour une vie chrétienne ardente.
Le diocèse de Zhouzhi bénéficie rapidement de la présence d’un évêque ordonné secrètement, jeune et dynamique, Mgr Paul Fan Yufei. Celui-ci consacra toutes ses énergies à la reconstruction du presbyterium diocésain et, en peu d’années, il peut compter sur la collaboration de plus de trente prêtres et d’un vaste réseau d’étudiants, garçons et filles, disposés à consacrer leur vie au service de l’Eglise. Les fidèles sont très actifs: leur engagement permet au diocèse de rouvrir ou de reconstruire plus de 60 églises, sans aide extérieure. Le zèle de l’évêque, toutefois, n’échappe pas à l’attention des autorités qui l’emprisonnent à plusieurs reprises et tentent d’abolir le diocèse « illégal ». Mgr Paul Fan est mort, encore jeune, à l’âge de 62 ans, le 5 avril 1995.
Mgr Zhou est mort il y a une dizaine d’années, en février 1983, mais il a eu le temps de se donner un successeur digne de lui dans la personne de Mgr Lucas Li Ginfeng, et de réorganiser la vie ecclésiale diocésaine au milieu de mille difficultés. Mgr Li aussi passe de longues périodes en réclusion forcée, sans jamais accepter de compromis.
A quelques centaines de kilomètres vers le sud-est, dans la grande vallée où naît le fleuve Han, au milieu de la majestueuse chaîne de montagnes Quin Ling, d’autres communautés reprennent une vie vigoureuse: Hanzhong, où jusqu’au début des années 50, beaucoup de missionnaires italiens des Missions étrangères de Milan avaient travaillé, et Ankang sont lentement reconstruits.
Un prêtre (ordonné en 1949 par le dernier évêque italien, Mgr Joseph Maggi, des Missions étrangères de Milan) prend la direction d’un groupe important de chrétiens qui ont survécu à trois décennies de violente persécution: C’est Mgr Bartholomée Yu Chengti. Suivant l’exemple d’autres pasteurs, il met toute son énergie dans la formation des nouveaux leaders, prêtres et religieuses, qui pourront présider les communautés. En public, il ne peut pratiquement rien faire, mais son action rejoint des lieux même très éloignés. Il n’entre pas dans la ville épiscopale: ici le régime a pu rassembler un groupe redoutable et puissant de membres de l’Association patriotique, dont font également partie deux anciens prêtres. C’est ce groupe qui, en 1986, désigne pour l’épiscopat « patriotique » un prêtre timide, Louis Yu Runchen, qui a aujourd’hui 65 ans. Celui-ci ne réussira jamais à secouer la lourde tutelle de l’Association et restera toujours docile au régime, malgré lui. Il n’aura jamais le courage, au moins jusqu’ici, de reconnaître l’évêque légitime du lieu et de se débarrasser de la lourde responsabilité d’avoir usurpé la fonction épiscopale. Dans la République populaire de Chine, hélas, son cas n’est pas unique.
L’exemple de ces prélats exceptionnels aura une influence notable sur les circonscriptions voisines. A Xi’an, Sanyuan, Dali et jusqu’à la lointaine Yan’an à l’extrême nord de la province (où était la principale base communiste dans les années précédant la prise du pouvoir central) la vie catholique reprend avec vigueur.
A Xi’an, est organisé l’un des meilleurs séminaires de toute la Chine, toujours insuffisant pour contenir le nombre élevé de vocations au sacerdoce. Récemment, il a changé de siège pour la troisième fois en quelques années.
Baoding est seulement à environ 60 km de la capitale. Entre cette cité, aujourd’hui en pleine expansion, et Pékin, s’insère Yixian. Encore plus au sud-est, la nouvelle métropole de Shijiazhuang a absorbé des circonscriptions ecclésiastiques historiques comme Zhengding et Zhaoxian. Quelques kilomètres encore et on se trouve à Anguo, Xianxian et Xingtai. Ce ne sont pas seulement une série de noms géographiques: pour les catholiques de Chine, chacune de ces localités évoque des souvenirs et des images d’extraordinaires histoires de fidélité au Christ et à l’Eglise voulue par lui.
Baoding est le lieu d’où est venue l’inspiration pendant de longues années. Son évêque, mort en 1992 en captivité à la suite de mauvais traitements, était Mgr Pierre-Joseph Fan Xueyan. Plus qu’aucune autre personnalité, la frêle figure de cet homme de foi a marqué l’histoire récente de l’Eglise de Chine.
Tradition apostolique et martyre : « Ces os sont sacrés »
L’homme qui j’ai devant moi est un vieil évêque qui a passé 30 ans en prison. Malgré la prison, c’est un homme de paix et en paix. Il raconte avec une extrême simplicité: « La foi dans le Christ que Dieu nous a donnée dans l’Eglise vaut bien l’offrande de la vie. Les épreuves et les souffrances passent, l’amour indicible de Dieu reste. J’ai eu à coeur le Christ et son Eglise et je me retrouve maintenant, vieux et malade, satisfait de ce qu’a été ma vie. Le Christ, personne ne peut nous l’enlever ou le ravir, l’amour pour lui ne craint ni les cellules ni les chaînes. Je l’ai aimé parce qu’il m’a donné de me faire connaître ce qu’il a toujours ressenti pour moi. »
Tandis qu’il revit par la mémoire les sévices subis par l’Eglise par suite de l’oppression du régime, je cherche à orienter la conversation sur des aspects et des événements qui me tiennent à coeur. Mais il ne me laisse pas continuer; il fait signe qu’il veut se lever de son siège. Il est mal en point et ses jambes ne l’aident plus beaucoup; il s’appuie lourdement sur mon bras et m’indique un point distant de guère plus de trois mètres. Il veut que je le photographie sur ce point précis « avec les pieds bien visibles. »
Puis, chancelant, il retourne, satisfait, à son siège. « Là dessous nous avons caché les restes du premier évêque de cette Eglise. Ils sont là depuis plus de trente ans, nous sommes peu de personnes à le savoir. » Il se rend compte que je reste stupéfait. « Tu ne sais pas ce que signifie la tradition apostolique. C’est la transmission jusqu’à nous du Vivant, de la personne vivante du Christ. Ce sont tes frères missionnaires qui nous l’ont apportée. Ce vieil évêque a obéi à Dieu et est venu jusqu’ici pour nous apporter les moyens de reconnaître et aimer Jésus-Christ. L’Eglise, c’est cela. Alors, nous, nous avons pensé que ces os étaient sacrés pour nous, un signe dont nous ne devions pas perdre la mémoire. Ils sont le lien avec l’Eglise de tous les temps et de tous les lieux, et avec tes confrères. Nous avons toujours pensé que nous ne pouvions pas enlever ce lien visible; c’était un signe qui nous rattachait directement à la personne du Christ. Comment peut-on consentir à perdre le Christ! » Et il ajouta: « Dis-le à tes confrères: nous avons conservé ces os, nous avons continué à aimer le Christ. Nous sommes encore unis avec lui, pour toujours. »
Avec un tel message à conserver et à transmettre, jamais je ne me suis senti plus grand: « Dis-le à tes confrères.. » Les paroles du vieil évêque m’avaient secoué.
Retourné dans sa ville en 1979, mais pas encore réhabilité, il sait que sa liberté ne durera pas longtemps et que l’Eglise chinoise, contrainte de se priver de la communion explicite avec le successeur de Pierre et avec l’Eglise universelle, court le grand danger ou de s’éteindre ou de succomber aux plans du régime qui veut en faire une Eglise nationale. Les prémices en existent déjà, évidents, dans les évêques qui ont accepté ce ministère sans le mandat du pape.
C’est Mgr Pierre-Joseph Fan Xueyan qui, dans un acte de courage et de profond amour de l’Eglise, décide pour la première fois, en 1981, de choisir et d’ordonner secrètement des évêques qui ne soient pas soumis au régime. Il expliqua: « Le ministère épiscopal est d’une extrême importance pour la survivance de l’Eglise. La Chine a besoin d’évêques et nous, nous devons y pourvoir. Non pour lancer un défi au pape mais en communion avec lui et en obéissance envers lui, même si la communication ne nous est pas possible. » C’est Mgr Pierre-Joseph Fan Xueyan qui a ordonné les premiers évêques, en grand secret. Le régime ne les reconnaîtra pas et fera tout, y compris les emprisonner, pour empêcher leurs activités et saper leur influence. Tous payent leur refus d’allégeance au pouvoir d’un prix très élevé mais ce sont eux qui rappellent avec force le visage de l’Eglise voulue par le Christ. C’est avec ces hommes-là que l’on voit qu’aujourd’hui l’Eglise a repris vie avec ferveur.
Une longue série de pasteurs devraient être rappelés. Certains d’entre eux, hélas, sont déjà morts (Paul Liu Shuhe, Etienne Liu Daifen, Paul Li Zhen Rong, Stanislas Min Xilian, François-Xavier Zhou Shanfu, Etienne Li Xinzheng); d’autres sont encore vivants, indomptables, comme Pierre Liu Guan Dong, Michel Xiao Liren, Joseph Li Side, Melchior Shi Hongzhen et Jules Jia Zhiguo.
Le Testament de Melchior Zhang: « Mes pantalons, donnez-les au pape »
Ceci se passe au cours de l’hiver 1985. C’est déjà nuit noire et les lumière des rues renvoient des ombres sinistres. Le froid est intense, comme cela arrive au nord de la Chine, quand le thermomètre descend largement au dessous de zéro. Le visiteur étranger n’attend personne. Après le souper, on se prépare paresseusement pour la nuit.
Sa surprise est immense quand, entendant frapper, il ouvre la porte de la chambre. Un vieil homme, courbé et mal en point, est là dehors, debout. Sur ses lèvres, un sourire profond et calme. Il ne dit rien mais fait signe qu’il voudrait entrer. Il porte à la main un petit paquet.
Avant que le visiteur étranger ait pu formuler une réponse, l’hôte inattendu est déjà entré dans la chambre. « Je suis Melchior Zhang, l’évêque de Xiwanzimurmure d’une voix à peine audible le vieux monsieur.
L’étranger hésite à le croire. Pendant des jours, il avait exploré toutes les possiblités pour réussir à le rencontrer, mais les autorités avaient toujours opposé un net refus. « Oui, c’est vraiment moi, Zhang Kexing. Je suis venu te demander une faveur; porte ce petit paquet au pape. » Maintenant, les mains de l’étranger tremblent. Son émotion s’accroît tandis que le vieillard ouvre le petit paquet pour en extraire une paire de pantalons désormais décolorés et rapiécés et un maillot de corps usé portant un numéro imprimé.
« Dis au pape que je les ai portés durant toutes les années de ma captivité. Ce sont les témoins de l’amour que Jésus-Christ a mis dans mon coeur et de la paix qu’il m’a donnée. Dans ma vie, je n’ai aimé que le Christ et son Eglise. »
Le visiteur, pleurant d’émotion, se retrouve à genoux devant cet homme qui n’a que la peau et les os. Melchior Zhang avait été libéré depuis peu, après trente-trois ans de prison. Il mourra d’un cancer trois ans plus tard, le 6 novembre 1988, sans qu’il lui soit permis de rencontrer à nouveau des « étrangers ».
ANNEXES
Les structures religieuses du régime et de l’Eglise
un labyrinthe de sigles (et de fauteuils)
Dans le domaine civil comme ecclésiastique, la République populaire présente une série d’organismes très particuliers par rapport à ceux auxquels nous sommes habitués.
1. Le pouvoir politique, « l’esprit » qui donne l’impulsion, est le Parti communiste chinois avec ses structures opérationnelles. Le gouvernement est l’espace de l’exécutif, politiquement non décisif.
2. Dans le domaine religieux, la République populaire reconnaît cinq religions: bouddhisme, islam, taoïsme, catholicisme et protestantisme. Chacune d’elles est dotée, à l’intérieur, d’un instrument de contrôle ou d’une association dépendant du parti et du pouvoir civil.
3. L’organisme du parti chargé de « suivre » les religions est le « département du Front uni. Dans l’organigramme du Parti, le Front uni a pour tâche d’« unir toutes les forces » du pays sous la direction du Parti lui-même. L’idée d’un « Front uni » naquit dans les années 20: il se développe ensuite en une théorie articulée pour des fins stratégiques de conquête et de consolidation du pouvoir. Le Front uni fut supprimé pendant la révolution culturelle (1966-76) et rétabli avec la réforme de Deng à la fin des années soixante-dix. La section n° 2 s’occupe des religions.
4. Le Bureau pour les affaires religieuses, dépendant du Conseil d’Etat, est le bras exécutif du Front uni et du gouvernement en matière de religions. La section n°2 s’occupe de l’Eglise catholique. Le bureau des affaires religieuses a été créé en janvier 1950; pendant longtemps, il a été dominé par les forces de sécurité publique (une sorte de police secrète).
5. L’interlocuteur du bureau des affaires religieuses dans l’Eglise catholique est l’Association patriotique des catholiques chinois. Fondée en 1957, elle est un organisme extra-ecclésial implanté par le régime à l’intérieur de l’Eglise. Elle est l’un des éléments du contrôle gouvernemental et pose beaucoup de problèmes à l’Eglise: c’est l’organisme responsable en grande partie des conflits encore en cours. En beaucoup d’occasions, l’Association patriotique a dénoncé aux autorités les catholiques qui sont réticents à en reconnaître le rôle. Dans beaucoup de diocèses, l’Association patriotique jouit d’un pouvoir illimité, dans d’autres sa fonction est plus limitée.
6. La Conférence nationale des représentants catholiques chinois est, selon son statut propre, l’organisme suprême de l’Eglise chinoise. Elle se réunit généralement tous les cinq ou six ans (mais entre la seconde et la troisième assemblée il s’est passé 18 ans) et est dominée par la présence invisible des fonctionnaires du bureau des affaires religieuses et du Front uni. Elle est aussi un organisme « démocratique » de nature extra-ecclésiale, mais prétend (ce qui est naturellement inacceptable) exercer l’autorité dans et sur l’Eglise.
7. Le Collège des évêques chinois a été créé en 1980 par la troisième conférence nationale des représentants catholiques chinois. Il est composé seulement de ces évêques que le régime reconnaît comme tels et qui, au moins apparemment, acceptent la domination du Parti communiste sur l’Eglise. La conférence nationale des représentants est un organisme qui se situe au-dessus du collège des évêques et qui a le pouvoir de le dissoudre. Beaucoup de ces évêques « officiels » sont, individuellement et en cachette, en communion avec le pape et avec l’Eglise universelle. Ils sont donc catholiques de plein droit. Toutefois le collège, de par son statut, est « indépendant » et « autonome ».
8. La Conférence épiscopale chinoise a été fondée clandestinement par des évêques non reconnus par le régime (« non officiels »), le 21 novembre 1989, à Zhangerce, dans la province du Shaanxi. Sa nature « clandestine » l’empêche d’être pleinement opérationnelle et d’agir ouvertement. En font partie ces évêques qui n’ont pas de rapport avec le régime ou avec l’Association patriotique. Ses membres sont en pleine communion avec le Saint-Siège: certains d’entre eux sont habituellement connus en raison des vexations qu’ils subissent de la part du régime.
La carte des séminaires – Pendant 30 ans, aucun prêtre
A partir de la première moitié des années 80, l’Eglise catholique de Chine a pu réorganiser les séminaires, restés fermés pendant plus de trente ans. Leur suppression par le régime avait eu comme conséquence l’absence d’ordinations sacerdotales dès le début des années 50. (La dernière ordination d’un petit groupe de prêtres avait eu lieu en 1955). La réouverture des séminaires a été un processus lent et laborieux, hérissé d’énormes difficultés. Après une dizaine d’années, la carte des séminaires « officiels » est devenue plus fournie. Mais les problèmes demeurent, graves et pressants.
Au niveau des études théologiques, à Pékin s’est ouvert un séminaire national avec une centaine d’étudiants provenant de toutes les circonscriptions ecclésiastiques de Chine. Dirigé par l’évêque patriotique Zong Huaide, il est totalement sous le contrôle de l’Association patriotique. Le diocèse de Pékin a en outre son propre séminaire avec une trentaine d’élèves. Dans les provinces du nord-est fonctionnent trois grands séminaires: à Shenyang (Liaoning) avec environ 80 étudiants; à Chang Chun (Jilin) avec environ 70 étudiants; et à Hohhot (Mongolie intérieure) avec un peu plus de 50 séminaristes).
Dans les provinces du centre-ouest se sont ouverts deux des séminaires les mieux organisés: un à Xi’an (dans le Shaanxi), où le nombre des élèves dépasse la centaine et qui accueille des étudiants venant des diocèses limitrophes; l’autre à Taiyuan, dont le recteur est Guo Yinggong, évêque de Tatong; il accueille une cinquantaine d’élèves des diocèses du Shanxi.
Au centre-sud, nous avons le séminaire de Sheshan (près de Shanghai), avec 150 séminaristes provenant de treize provinces; à Shijiazhuang, il y a le séminaire pour la province du Hebei, avec presque 100 élèves; une autre quarantaine d’élèves du Shandong étudient à Jinan; à Wuchang, l’imposant séminaire régional pour le centre-sud abrite environ 140 étudiants et est sous la responsabilité de Mgr Bernardin Dong Guangqinq. Le séminaire de Fuzhou, en comparaison, est une modeste intitution réservée aux étudiants du Fujian; les séminaristes sont y sont seulement une vingtaine. Au sud, enfin, sont ouverts deux autres grands séminaires: à Guiyang, pour la province du Guizhou, avec une quarantaine d’étudiants; et à Chengdu (dans le Sichuan), le séminaire qui a récemment défrayé la chronique et qui peut loger environ 60 étudiants.
Il existe aussi un bon réseau de petits séminaires ou de séminaires préparatoires, où les jeunes ont la possiblité de se préparer intellectuellement et spirituellement à l’admission dans les grands séminaires régionaux. Parmi eux, à signaler les séminaires de Dali, Fengxiang et Sanyuan dans le Shaanxi; de Lanzhou dans le Gansu; de Changzhi et Fenyang dans le Shanxi; de Xianxian, Shijiazhuang, Tangshan et Yongnian dans le Hebei; de Suzhou dans le Jiangsu; de Nanchang dans le Jiangxi; de Guangzhou dans le Guangdong; le séminaire de Hankou et Yichang dans le Hubei; de Luohe pour le Henan et de Changsha dans le Hunan; deux séminaires à Anhui. Kunming (Yunnan) et Nanning (Guangxi) ont aussi des petits centres préparatoires.
Outre ce dense réseau qui opère plus ou moins officiellement, avec l’approbation tacite de l’Etat, il en existe un autre, « non officiel ». Il y a désormais des centaines de prêtres préparés et formés par ces institutions « illégales ». Précaires et sans siège fixe de par leur nature même, ces séminaires clandestins ont formé d’excellents prêtres, démentant le lieu commun selon lequel ces prêtres « manqueraient d’une solide formation intellectuelle ».
Message du pape à l’Eglise de Chine
le catholique est en communion avec Pierre
Nous rapportons ici quelques passages du message de Jean-Paul II aux catholiques de la République populaire de Chine. Le message fut transmis par Radio-Vatican, à l’occasion de la journée mondiale de la jeunesse à Manille, le 14 janvier 1995.
« … A vous, chers catholiques de Chine, la divine Providence a confié le devoir de vivre la foi au sein d’un peuple aux traditions culturelles anciennes. Vous êtes appelés à être ‘le sel de la terre’ et la ‘lumière du monde’, pour qu’ils voient ‘vos bonnes oeuvres et glorifient votre père qui est dans les cieux’ (Mt 5,16). Gardez donc votre regard fixé sur le ‘Christ, la lumière des nations’. N’ayez pas peur : il a vaincu le monde (cf Jn, 16, 33), il sera toujours avec vous (cf Mt 28, 20).
Votre témoignage sera d’autant plus éloquent qu’il s’exprimera par des paroles et des gestes d’amour. C’est Jésus qui l’a dit : ‘A ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous vous aimez les uns les autres’ (Jn 13, 35). Amour entre vous, avant tout, mais aussi amour envers tous vos frères et soeurs chinois : un amour qui s’exprime par la compréhension, le respect, la tolérance, le pardon et la réconciliation, au sein de la communauté chrétienne; un amour qui conduit au service, à l’abnégation, à la loyauté, au travail, à l’honnêteté et à la justice dans la société.
Toutefois, un amour véritable ne peut être distinct de la vérité. Saint Paul rappelle aux Ephésiens qu’ils doivent ‘vivre selon la vérité et dans la charité’ (Ep 4, 15). Chers frères et soeurs, l’unité profonde qui caractérise toute communauté catholique dans chaque partie du monde, doit être fondée sur la vérité qui jaillit de l’Evangile, et sur la charité qui naît du coeur du Christ. Cela est aussi valable pour vous.
Chaque jour je prie pour vous, demandant au Seigneur de vous aider à rester unis, en tant que membres vivants de l’unique Corps mystique du Christ. L’unité n’est pas le résultat de politiques humaines ou d’objectifs cachés et mystérieux. Elle naît au contraire de la conversion du coeur et de l’acceptation sincère des principes immuables établis par le Christ, pour son Eglise.
Parmi ces principes, particulièrement importante est la communion réelle de toutes les parties de l’Eglise avec son fondement visible : Pierre le Roc. C’est pourquoi un catholique qui désire demeurer tel et être reconnu comme tel, ne peut rejeter le principe de la communion avec le successeur de Pierre.
Combien de témoignages de foi, combien de messages de fidélité ai-je reçus de communautés qui vivent en Chine ! Des évêques, des prêtres, des religieux et des laïcs ont voulu réaffirmer leur pleine communion inébranlable avec Pierre et avec le reste de l’Eglise. En tant que pasteur de l’Eglise universelle, mon coeur s’en réjouit grandement.
Je vous invite tous ardemment à retrouver les chemins de la communion et de la réconciliation… »