Eglises d'Asie – Cambodge
LE POINT SUR LA SITUATION SOCIALE ET POLITIQUEDu 1er novembre au 31 décembre 1995
Publié le 18/03/2010
Le Parti de la Nation Khmère (PNK) déclaré « illégal »
Le 9 novembre, anniversaire de l’indépendance nationale, Sam Raingsy, ancien ministre des Finances, lance officiellement son Parti de la Nation khmère, au cours d’un petit rassemblement tenu à son domicile personnel, avant de l’annoncer à un milier de personnes rassemblées au siège du parti. Sam Raingsy en est le président, Kong Koam et Nguon Soeur vice-présidents, Khieu Rada secrétaire général, Yim Sovann trésorier. Sam Raingsy donne les noms des 360 membres du conseil national du parti, celui des 31 membres du comité directeur. D’après lui, entre 20 000 et 30 000 membres sont déjà inscrits. Les ambassadeurs des Etats-Unis, d’Australie, du Canada, du Japon, ainsi que des représentants de l’ambassade de Thaïlande assistent à la cérémonie, pour manifester leur volonté de voir le multipartisme s’instaurer au Cambodge.
Kong Koam, 54 ans, ex-membre du Prachéachon (PPC: Parti du peuple Cambodgien), ancien vice-président de l’Assemblée Nationale, ex-chef du département au ministère des Affaires Etrangères, devenu ambassadeur au Vietnam en 1981. Tombé en disgrâce en 1987, il a démissionné en 1992.
Nguon Soeur, ex-membre du FUNCINPEC, est ancien adjoint de la police nationale, démissionné par le gouvernement en juillet 1995. Il a révélé notamment les implications de hauts fonctionnaires dans le trafic de la drogue au Cambodge.
Khieu Rada, ex-membre du FUNCINPEC, sous-secrétaire d’Etat pour le Commerce.
Non Beng, ex PPC.
Yim Sovann, immigré des USA.
Le gouvernement déclare aussitôt le parti illégal. Les deux-co-ministres de l’Intérieur informent Sam Raingsy qu’il n’avait pas remis la documentation nécessaire pour l’enregistrement du nouveau parti. Sam Raingsy, quant à lui, prétend être en règle avec toutes les procédures de la loi électorale prévues par l’APRONUC, il affirme qu’il a remis la liste exigée de 5 000 militants, et qu’il va remettre la composition du comité directeur et les relevés bancaires le jour même.
Le prince Ranariddh, premier ministre, réagit vivement contre la présence des ambassadeurs étrangers qui ne cessent de répéter que le Cambodge doit devenir un Etat de droit.
Le 30 novembre, le ministère de l’Intérieur intime l’ordre de fermer le siège du PNK à Phnom Penh, et lui interdit d’ouvrir des bureaux dans le pays. Hung Neng, frère de Hun Sen, gouverneur de la province de Kompong Cham, prend les devants en promulguant des directives interdisant toute activité du PNK dans la province. Toute personne convaincue de soutenir des activités du PNK sera responsable devant la loi (en langage khmer rouge: « sera punie
Sam Raingsy vient d’ouvrir un bureau du PNK à Long Beach, en Californie, lieu de la plus importante communauté khmère aux Etats-Unis.
Le roi a laissé entendre que si le PNK changeait son logo (qui représente le grand roi Jayavarman VII), et sa date de création, le gouvernement royal pourrait légaliser le parti. Cependant, Sam Raingsy indique que des décisions comme celle de changer le logo du parti et sa date de création relèvent des statuts du parti, qu’elles ne peuvent être prises que lors d’un congrès dont la tenue devrait être acceptée par le gouvernement.
You Hockry, co-ministre de l’Intérieur, propose d’attendre qu’une nouvelle loi sur la création des partis politiques soit adoptée par l’Assemblée nationale. Alors Sam Raingsy sera autorisé à fonder un nouveau parti, mais seulement quand il aura rempli toute les conditions de la nouvelle loi, qui, selon le ministre de l’Intérieur, ne devrait pas être votée avant un an.
Selon You Hockry, « Il était illégal de lancer le parti, et maintenant, c’est toujours illégal. Raingsy a envoyé les documents trop tard. Je prévois des problèmes… Imaginez que quelque chose arrive à Raingsy, nous ne pouvons pas le protégerC’est le même type de menace voilée qui avait précédé les attaques contre le PDLB de Son Sann, le 30 septembre 1995. Les menaces ne sont d’ailleurs pas que verbales: trois hommes qui collectaient des empreintes digitales pour le lancement du parti ont été assassinés séparément dans la province de Takéo. Sam Raingsy n’accuse personne mais s’interroge sur les possibles motivations politiques de ces assassinats. On peut rapprocher de ces menaces l’arrestation de neuf « terroristes » à la mi-décembre à Phnom Penh. Ils sont accusés d’être khmers rouges: comme le craignait Sam Raingsy lors de la discussion sur la mise « hors la loi » des Khmers rouges, en 1994: c’est un des moyens légaux de faire disparaître les opposants. L’un d’entre eux est formellement reconnu comme membre du PNK.
Plus qu’une affaire de procédure, il s’agit d’une volonté résolue de ne pas accorder la possiblité à une opposition de s’organiser. Le pays est en marche vers le parti unique.
Le Parti démocratique libéral bouddhiste (PDLB), pour sa part, en a déjà fait les frais, lors de son congrès du 1er octobre. Ses dirigeants vont déposer une plainte pour protester contre la lenteur de l’enquête concernant l’attaque à la grenade dont il a été victime. La plainte sera présentée au cabinet du roi, à l’Assemblée nationale, au tribunal municipal de Phnom Penh, aux deux co-premiers ministres et aux co-ministres de l’Intérieur. Elle sera accompagnée de 20 000 empreintes digitales de militants du parti. Cette plainte ne doit pas être considérée comme une poursuite judiciaire, mais comme un appel pour que justice soit faite.
Hun Sen, second premier ministre, offre son aide à Son Sann, pour négocier la réconciliation au sein du PDLB. Il est disposé à organiser un congrès pour régler le problème d’une manière durable. Mais c’est aux membres de la faction de Son Sann que revient la décision ou non d’accepter cette offre.
L’affaire Sirivuddh ou la fin du FUNCINPEC
C’est sans doute dans cette même volonté de supprimer toute opposition que doit s’interpréter ce que l’on peut appeler l' »affaire Sirivuddh ».
Le 11 novembre, le journal en langue khmère « Angkor Thmei » rapporte en première page qu’à l’intérieur du gouvernement se prépare l’assassinat de Hun Sen, second premier-ministre, et nomme le prince Sirivuddh, demi-frère du roi Sihanouk et secrétaire général du FUNCINPEC, comme source d’information. Le prince nie cependant avoir dit à des journalistes qu’il voulait assassiner Hun Sen. Trois jours plus tard, après avoir mené sa propre enquête, Hun Sen confirme la tentative d’assassinat. Il indique que deux témoins affirment que les assassins devaient essayer de le tuer sur une route avec des lance-roquettes B40. Si le plan échouait, ils l’attaqueraient au palais royal où les gardes du corps ne sont pas autorisés. So Naro, secrétaire général de l’Association des journalistes khmers, et propriétaire du journal Angkor Thmei, précise que les informations contenues dans l’article sont enregistrées sur une cassette de l’entretien qu’il a eu avec le prince Sirivuddh. Le prince aurait dit qu’il y avait une tentative pour tuer Hun Sen et changer le cours de l’histoire. Hun Sen déclare que, même sans lui, l’histoire continuera, sans savoir pour combien de temps encore. Peut-être que beaucoup d’autres Hun Sen naîtront ensuite, ajoute-t-il.
Le vendredi 17 novembre, des militaires en armes, appuyés par des chars, entrent dans Phnom Penh, pour protéger la résidence de Hun Sen, alors que d’autres bloquent les routes autour de la maison du prince Sirivuddh. Ce dernier est placé en résidence surveillée. You Hockry, co-ministre de l’Intérieur, précise que l’enquête menée sur les menaces d’assassinat du second premier-ministre se concentre sur le prince Sirivuddh qui, pour sa part, nie toute implication dans l’affaire.
Le 21 novembre, à l’unanimité, les parlementaires, par un vote à main levée, retirent son immunité parlementaire au prince, sans même demander ni discuter les charges déposées contre lui. Les 58 députés du FUNCINPEC, dont Sirivuddh est secrétaire général, affirment qu’ils avaient reçu l’ordre du prince Ranariddh, premier-premier ministre, de voter cette levée de l’immunité, afin de sauver la vie de Sirivuddh, qui aurait été tué si les députés ne l’avaient pas remis à la justice. Le prince se voit incarcéré dans la sinistre prison de T3, au grand déplaisir du roi. Sur demande expresse de Sihanouk, le prince est transféré dans les locaux du ministère de l’Intérieur.
En signe de protestation déguisée, selon une pratique connue, le roi indique que ses médecins chinois s’inquiètent de ses hausses de tension et qu’il devra partir pour Pékin. Au dernier moment, le roi change d’avis et décide de rester au Cambodge. Sa décision reflète sa détermination « à satisfaire les demandes du peuple ». C’est en réalité pour mieux aider son demi-frère.
Des organisations communautaires, des groupes d’étudiants, des fonctionnaires et des militaires se relaient pour diffuser à la radio des messages de soutien à Hun Sen.
So Naro, journaliste qui a écrit l’article Thmei, interrogé par un rédacteur du Cambodia Daily, indique que la base de son article vient bien d’une conversation avec le prince, mais reconnaît ne pas avoir interrogé le prince avec suffisamment de soin avant d’écrire l’article. Il est donc possible que le prince plaisantait. « J’aurais dû m’en assurer avant d’écriredit-il. Sirivuddh nie avoir pu dire à So Naro quoi que ce soit sur un éventuel assassinat. On ne sait même pas s’il existe réellement un enregistrement de cette entrevue. Suite aux précisions apportées par So Naro au Cambodia Daily, Om Yen Tieng, un des conseillers de Hun Sen, annonce qu’il va poursuivre Mike Fowler, correspondant de la Fondation asiatique qui patronne le journal, en tant que conseiller pour les médias khmers, pour avoir fait pression sur So Naro afin qu’il change sa version des faits.
Le prince est accusé de terrorisme, d’organisation de forces armées, et de tentative de renversement du gouvernement.
La plupart des observateurs sont sceptiques sur ces accusations. Des sources proches du prince indiquent qu’il était de plus en plus déçu de la situation politique et qu’avec un humour un peu déplacé il plaisantait parfois sur des actions violentes contre des membres du gouvernement.
Le ministère de l’Intérieur semble ne se fonder que sur le témoignage de So Naro et sur une conversation téléphonique enregistrée l’an dernier, remise au département de la sécurité du ministère de l’Intérieur. Durant cette conversation, dont le texte a été remis aux diplomates étrangers, on entend Sirivuddh dire qu’il tuera Hun Sen et qu’il a l’habitude de tenir ses promesses. Le prince parlait à un interlocuteur qu’il appelle « excellenceau sujet d’une histoire de visa que Hun Sen refusait, quand Sirivuddh était encore ministre des Affaires étrangères. Le mystérieux interlocuteur serait Ung Phanh, membre du FUNCINPEC, ministre d’Etat. De toutes façons, l’utilisation de la cassette comme témoignage viole l’article 40 de la constitution qui garantit le secret des conversations téléphoniques.
Amnesty International s’inquiète de l’arrestation du prince Sirivuddh et le considère comme un prisonnier politique. Le groupe demande un procès juste et équitable.
Le samedi 2 décembre, à Paris, 400 manifestant réclament la libération immédiate du prince Sirivuddh, arborant des pancartes telles que « libérez Sirivuddh » ou « expulsez les dictateurs du CambodgeUne délégation de cinq représentants a été reçue à l’ambassade du Cambodge, où on les a accusés de ternir l’image du pays et d’être manipulés par les Khmers rouges. « Le Point » voit en Sirivudh « le fragile symbole de la démocratie du Cambodge » et « L’Express » se demande « si les pays donateurs doivent accepter cette dernière atteinte aux droits de l’hommeM. Giscard d’Estaing écrit à Claude Malhuret pour lui proposer de mettre la question Sirivuddh au programme de la prochaine réunion de la commission des Affaires étrangères françaises.
Le 4 décembre, l’Allemagne est le premier pays à exprimer son inquiétude au sujet du prince Sirivuddh, dans une déclaration lors de l’ouverture d’une session pour discuter des propositions d’aides au Cambodge pour 1996. Six membres du parlement allemand en visite au Cambodge demandent à rencontrer Sirivuddh.
Dans une lettre écrite en français, le 12 décembre, le roi Sihanouk supplie Hun Sen d’accorder un « semi-pardon » à son jeune demi-frère sous la forme d’une expulsion. En cas d’acceptation de Hun Sen, le roi se fait fort de convaincre le prince Sirivuddh, et laissera la justice continuer la procédure engagée contre lui en son absence. Hun Sen accepte la proposition royale comme la meilleure.
Cette lettre royale est sans doute à lire à plusieurs niveaux: elle est écrite en français, langue que ne parle pas Hun Sen. Elle est donc adressée à la communauté internationale. Plus qu’un acte d’humilité du roi, les flatteries royales à l’égard du second-premier ministre sont trop grosses pour que l’on ne perçoive pas l’ironie de Sihanouk qui se moque de son interlocuteur devenu tout puissant. Certains observateurs l’analysent comme un affront direct à Ranariddh, puisqu’elle reconnaît explicitement que Hun Sen est le seul maître du pouvoir.
Le roi Sihanouk supplie ensuite le prince Sirivuddh d’accepter l’exil en France, car en cas de refus il ne pourrait lui éviter la terrible prison T3 aux dures conditions d’hygiène et de nourriture, avec la présence de co-détenus dangereux qui pourraient mettre sa vie en danger. Le prince Sirivuddh qui s’était déclaré prêt à affronter la justice de son pays, sûr de son innocence, accepte finalement l’exil, en déclarant: « Avec la vie sauve, il y a de l’espoir, et l’espoir nous permet de vivre ». Il promet de ne plus prendre d’engagements politiques, ni de rejoindre le parti de Sam Raingsy. A la demande du roi, Sirivuddh va passer ses derniers moments au palais royal avant l’exil. Le 21 décembre, le prince prend l’avion pour Paris. Les deux co-premiers ministres lui envoyent une lettre le remerciant de sa promesse de ne plus prendre d’engagements politiques. Son procès va quand même continuer en son absence.
On ne connaît pas l’origine de la cassette qui a été la cause de l’arrestation de Sirivuddh. On apprendra par la suite que c’est un membre du FUNCINPEC qui l’a remise au ministère! On peut donc supposer que cette rocambolestque histoire peut émaner de rivalités au sein du FUNCINPEC. Certains n’hésitent pas à parler d’un coup monté par Ranariddh lui-même pour se débarrasser d’un rival éventuel pour le trône cambodgien.
Quoiqu’il en soit, le FUNCINPEC qui a accepté à l’unanimité la levée de l’immunité parlementaire de son secrétaire général, sans aucune demande d’éclaircissement ni opposition, perd toute crédibilité politique en s’alignant sur le plus fort. L’opinion de « The Economist » du 25 novembre est sans doute exacte: « Le FUNCINPEC est mort, le prince Ranariddh est prisonnier politique de Hun Sen ».
Cette « affaire » prouve que Hun Sen contrôle la totalité du pouvoir. Le roi n’a aucune prise sur lui. Un rédacteur du Cambodia Daily, tient Hun Sen pour responsable des deux grenades lancées lors du congrès du PDLB, de l’opération de commando contre le journal « Sereiphéap Thmei » du 23 octobre. De nombreux observateurs constatent que Hun Sen a considérablement renforcé son pouvoir, au point de n’être plus contesté par personne. Les chars dans Phnom Penh n’étaient pas nécessaires pour arrêter un homme seul, fut-il dangereux, mais ont permis à Hun Sen de montrer sa force. Même Sar Kheng, ministre de l’Intérieur, n’a pas été consulté sur l’envoi de troupes pour arrêter Sirivuddh. Le prince Ranariddh a beau affirmer qu’il ne s’est pas incliné devant Hun Sen, que ce dernier s’est plié à chacune de ses requêtes, que sans lui Sirivuddh aurait été tué : à l’évidence, c’est Hun Sen qui a mené le jeu d’un bout à l’autre.
La question que beaucoup se posent: qui sera la prochaine victime? Ranariddh? Peut-être.
Hun Sen a créé une nouvelle unité militaire pour sa garde personnelle, appelé « Bataillon 2 » comprenant 191 hommes spécialement entraînés avec au moins six tanks.
Un décret signé le 11 octobre par Chéa Sim, agissant comme chef de l’Etat, donne aux généraux Téa Banh et Téa Chamrath, respectivement commandant en chef et commandant-adjoint des FARK, pleins pouvoirs sur la police en cas d’absence des deux co-premiers ministres. Ceci pourrait signifier une réduction du contrôle du ministère de l’Intérieur sur la police. Plusieurs observateurs voient en cette nomination une dérive vers un régime de type militaire.
Muselage de la presse
En même temps que l’affaire Sirivuddh, plusieur autres faits manifestent la volonté gouvernementale de contrôler l’opinion nationale et internationale.
On se souvient que le 23 octobre, 150 manifestants de la commune de Kraing Ngoy, zone de développement organisée par Hun Sen, second-premier ministre, ont saccagé les locaux du journal « Sereiphéap Thmey » (Liberté nouvelle), car le journal avait publié un article critiquant ce projet lancé il y a un an. Hun Sen a soutenu les manifestants dans leur action, déclarant qu’ils n’avaient rien fait de mal et leur a même offert de les transporter pour une prochaine manifestation, s’ils en avaient besoin. Hun Sen a indiqué qu’il ne ferait rien pour arrêter les protestations et que quiconque critique les villageois est un Khmer rouge. Il précise qu’il n’incite pas à la violence, mais qu’il n’empêchera pas les habitants de Kraingyov de se battre pour leurs droits. « Si le journal a des droits, pourquoi les gens de Kraingyon n’en auraient-ils pas? Soyons bien clairs, il y a égalité de droitsSan Kheng, co-ministre de l’Intérieur révèle que la police connaît certains agitateurs qui ont saccagé les bureaux du Sereipheap Thmey, et qu’elle les traitera selon la loi. S’il tient le journal pour responsable de ces événements, pour avoir diffusé de fausses nouvelles, le ministre indique que les manifestants auraient dû se plaindre par des moyens légaux. Le journal « Koh Santephéap » (Ile de la Paix), favorable à Hun Sen, consacre la moitié d’une première page à féliciter les paysans de Kraing Ngov de savoir comment pratiquer la « démocratie
Depuis le 6 novembre, 6 journaux en langue khmère (« Monsosékar Chéat« , Conscience Khmère, « Podarméan Séreiphéap Thmey« , Nouvelles de la liberté retrouvée, « Samleng Youvachon Khmer« , Idéal Khmer, « Podarméan Pel Preuk« , Nouvelles du matin, « Samleng Youvachon Khmer« , Voix de la jeunesse khmère, et Vat Phnom) critiques envers le gouvernement, doivent cesser leur publication, faute de trouver un imprimeur. Certains imprimeurs invoquent des raisons économiques, mais en fait, en dépit des dénégations du ministère de l’Intérieur, ils ont subi des pressions politiques leur interdisant l’impression de ces journaux. Khieu Kanharith, secrétaire d’Etat au ministère de l’Information, affirme de son côté que le ministère n’a jamais mis en garde aucun imprimeur. Même si la loi sur la presse n’autorise pas de poursuites contre un imprimeur pour le contenu du journal qu’il imprime, plusieurs préfèrent rester tranquilles.
Les six journaux d’opposition achètent donc leur propre matériel d’imprimerie, affirmant qu’ils ne sont financés par aucun parti politique. Mais le ministère de l’Information fait savoir qu’il n’a pas donné son accord à cette nouvelle imprimerie. Pourtant, selon la loi cambodgienne, les imprimeurs ne sont pas tenus de se faire enregistrer au ministère de l’Information.
Hun Sen dans un discours prononcé à Koh Thom, le 4 décembre, déclare le quotidien en langue anglaise Cambodia Daily « illégalet appelle la police et le ministère de l’Information à enquêter sur les statuts du quotidien. Il menace d’expulser le staff du journal. Si le second premier ministre s’en prend au journal, c’est qu’il a eu l’audace de vérifier le reportage de So Naro, concernant l’affaire Sirivuddh! Son imprimeur habituel, qui est la maison d’impression du Prachéachun, a refusé d’éditer le journal qui en a trouvé immédiatement un autre.
Hun Sen se place dans une perspective communiste, pour qui tout ce qui s’oppose à la ligne du Parti, est « illégal ».
Le ministère de l’Information a mis plusieurs fois en garde le journal en langue khmère « Sathérnanrath khmer » (République khmère) en lui enjoignant de cesser ses critiques à l’encontre du roi et lui interdisant d’utiliser le drapeau de la République de Lon Nol comme logo en première page. Le 19 décembre, le journal est paru sans le drapeau controversé en première page, mais reproduit en bonne taille en haut de la seconde page. De plus, une grande photo du prince Sihanouk serrant la main de Khieu Sampan et Hu Nim est parue en première page avec cette légende: « Sihanouk avec ses anciens ennemis ». Lim Rattana, son directeur, a exprimé l’intention d’écrire sur le génocide Khmer rouge en enquêtant sur les responsabilités réelles durant cette période.
La cour d’appel de Phnom Penh a confirmé le verdict condamnant Heng Vipheak, directeur du journal en langue khmère « Spordaméah Sereiphéap Thmey » (Informations de la liberté nouvelle), à 2 155 dollars d’amende et à un an d’emprisonnement, pour avoir écrit un article intitulé « Un pays de voleurs », dans lequel il accusait les deux co-premiers ministres de corruption. Il a l’intention de porter l’affaire devant la cour suprême. Des procédures semblables sont engagées contre deux autres journalistes cambodgiens.
Menaces contre les ambassades étrangères
Les fréquentes remarques émanant de l’opinion internationale sur les violations des droits de l’homme, notamment à l’occasion de l' »affaire Sirivuddh, ont déclenché un processus de réaction violente de la part du second-premier ministre contre les étrangers.
Le 11 novembre, le juge Michael Kirby, représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies au Cambodge pour l’observation des droits de l’homme, rend public un rapport sur les violations récentes de ces droits: manque d’indépendance du pouvoir judiciaire par rapport au politique, mauvais état des prisons, restriction du droit d’expression, non respect de la loi sur la presse, expulsion de Sam Raingsy de l’Assemblée nationale, etc. Le gouvernement répond par l’envoi d’un avertissement, daté du 13 octobre, au centre des Nations Unies pour les droits de l’homme à Phnom Penh. Il accuse Kirby de diffuser des affirmations non fondées et d’agir comme un policier. Il prétend que le rapport Kirby ne reflète pas le ferme engagement du gouvernement en faveur des droits de l’homme. Le gouvernement mentionne quatorze points de désaccord avec le rapport et demande des amendements, spécialement sur l’expulsion de Sam Raingsy.
Un article de la Far Eastern Economic Review (FEER) de Hong Kong, en date du 23 novembre jette un pavé dans la mare. Au cours d’une conversation datant de février 1994, Charles Twining, ambassadeur des Etats-Unis au Cambodge, suggère à Sam Raingsy, alors ministre des Finances, d’avertir Ranariddh afin qu’il se méfie de Theng Bunma, richissime Cambodgien. Selon l’ambassadeur, les Etats-Unis ont des preuves de l’implication de Theng Bunma dans le trafic de drogue.
Theng Bunma est un Chinois du Cambodge, de son vrai nom Khau. Il a commencé sa carrière dans la province de Kompong Cham comme conducteur en second sur une ligne de bus rurale. Il a ensuite monté un petit commerce de riz. Le journal Samleng Youvachon khmer avance qu’en 1972, Bunma a été arrêté à Battambang, alors qu’il essayait de faire passer en fraude 20 kg d’opium à partir de la Thaïlande. Condamné à 20 ans de prison, il a soudoyé un garde et s’est échappé vers la frontière thaïlandaise. Bunma, pour sa part, dit qu’il est parti pour la Thaïlande parce que la guérilla Khmère rouge gênait les affaires. Il a reçu la nationalité thaïlandaise le 8 juillet 1975, et a créé l’entreprise d’import-export Thai Boon Roong avec un capital de 100 000 dollars. Le journal cambodgien rapporte qu’il utilisait des bateaux pour faire du trafic en tous genres, de l’huile de palme au tabac vers le Vietnam, et revenait avec de jeunes Vietnamiennes et de riches réfugiés sino-vietnamiens.
Ses enfants ont fait un séjour en France comme réfugiés politiques, certains y demeurent encore. Il a pu se rendre aux Etats-Unis avec un visa diplomatique au titre de conseiller de Chéa Sim, président de l’Assemblée nationale.
En août 1993, il a « offert » un avion Kingair-200 d’une valeur de 1,8 millions de dollars à Ranariddh, et une Mercédés à Hun Sen. Il a même participé au bouclage du budget de l’Etat de 1994, en accordant des prêts sans intérêts de plusieurs millions de dollars.
Theng Bunma rejette toutes les acccusations de la FEER, disant qu’il a fait sa fortune grâce à la prospérité du marché du bâtiment en Thaïlande durant les années 80. Son entreprise a cependant été condamnée à deux reprises, l’an dernier, à payer des amendes pour trafic d’or et d’autres denrées.
On peut toutefois se poser des questions sur le moment de telles révélations, connues des auteurs depuis longtemps. C’est au moment où Charles Twining quitte son poste d’ambassadeur des Etats-Unis au Cambodge et qu’il est remplacé par Kenneth Quinn, autre bon connaisseur du Cambodge. Désir personnel de prendre ses distances par rapport à une ligne politique imposée par son gouvernement? Volonté officieuse de Washington pour dire que « trop c’est trop »?
Selon certains diplomates, les Etats-Unis menacent de mettre le Cambodge sur la liste des 29 Etats qui font commerce de la drogue, ce qui entraînerait un arrêt de toute forme d’assistance bilatérale et un veto lors de votes concernant les programmes d’assistance multilatérale de la Banque mondiale, du FMI (Fonds monétaire international) ou de la BAD (Banque asiatique pour le développement).
La France, pour sa part, aurait menacé Phnom Penh de suspendre son aide pour la formation de la gendarmerie, si ses plus hauts officiers, notamment le général Kien Savuth, commandant de la gendarmerie, soupçonnés d’être impliqués dans le crime organisé, n’étaient pas relevés de leurs fonctions. L’Australie, qui apporte son aide à la renaissance de la marine cambodgienne, s’inquiète de ce que la marine soit directement impliquée dans le transport de l’héroïne.
La FEER révèle que les deux unités accusées de violences politiques, de violations des droits de l’homme, et de trafics divers, sont les services de renseignement du ministère de la Défense et la gendarmerie.
Ces unités ont été formées pendant l’occupation vietnamiennes et sont toujours dirigées par les mêmes personnes. Des documents de l’APRONUC affirment que le général Chhum Sochhéat a été impliqué dans un certain nombre d’actes d’intimidation politique et de violences pendant les élections de 1993, notamment dans l’enlèvement de 4 membres de partis d’opposition à Battambang. Les rapports confidentiels de l’ONU indiquent que ces unités s’adonnaient à un grand nombre d’arrestations, d’emprisonnements, d’interrogatoires, de tortures et d’exécutions, tout en exerçant des activités plus lucratives. L’APRONUC a donc recommandé que ces unités soient les premières à être démobilisées parce qu’elles étaient en contradiction avec la création d’un environnement politique neutre. Mais au contraire, ces unités ont été transformées en unités de gendarmerie. Leur répartition sur tout le territoire cambodgien facilite leur mainmise sur tous les trafics.
En août dernier, après la publication d’un rappport sur la complicité des militaires dans le trafic d’héroïne, par le journal en langue khmère « Podarméan Pel Preuk« , une grenade a été lancée dans la maison du rédacteur. L’année précédente, le propriétaire de « Samleng Youvachon Khmera été tué en plein midi, sur un carrefour animé de Phnom Penh, après avoir publié une biographie de Theng Bunma, l’accusant de diriger un très vaste réseau du crime.
Le président Clinton, dans un discours pour le 50ème anniversaire des Nations Unies, déclarait que les Etats-Unis identifieraient et mettraient au ban de la communauté internationale les pays qui s’adonnaient au blanchiment d’argent, et il menaçait de sanctions économiques les gouvernements qui ne prendraient pas des mesures énergiques.
Le gouvernement cambodgien proteste, affirmant qu’il fait tout ce qu’il peut pour combattre ces crimes. Le 15 septembre, il a mis en place un comité spécial dirigé par les deux co-premiers ministres pour combattre le trafic de drogue. Ranariddh réaffirme la volonté du gouvernement de trouver et de juger les trafiquants de drogue. « Ces personnes haut placées ou pas, doivent être punies si elles sont coupablesIeng Mouly, ministre de l’Information, envoie une lettre de protestation à la FEER, indiquant que les articles parus sont fondés sur des informations données par Sam Raingsy et Nguon Soeur, « deux personnalités cambodgiennes qui ont échoué dans leur poste gouvernemental et qui font tout pour prendre leur revanche, y compris en utilisant des preuves fabriquées et des rumeurs discréditant le gouvernementSam Raingsy, pour sa part, écrit à la FEER pour confirmer les accusations avancées par le journal.
Le 3 décembre, Cham Prasidh, ministre cambodgien du Commerce laisse entendre à une agence de presse de Grande-Bretagne que le Cambodge reconsidérerait sa politique envers les Etats-Unis, si la clause de la nation la plus favorisée » lui était refusée par le Sénat américain, ou si les conditions attachées étaient trop contraignantes en ce qui concerne les droits de l’homme.
Le 4 décembre, en visite dans la zone de développement qu’il dirige, à Koh Thom, Hun Sen, second-premier ministre, appelle les villageois à manifester contre les étrangeres et leurs ambassades pour protester contre leur interférence dans les affaires internes du Cambodge. Il prévient que les manifestation pourraient prendre un tour violent. Cet appel a été relayé par la télévision et la radio d’Etat. Hun Sen a ensuite fait part de son entretien avec Gildas Le Lidex, ambassadeur de France, durant lequel il a demandé au gouvernement français d’interdire toute manifestation concernant le Cambodge en France. L’ambassadeur lui a répondu que les citoyens français ont le droit de manifester pacifiquement. Le second-premier ministre a alors affirmé devant les villageois de Kandal: « Très bien. J’ai alors aussi le droit d’organiser des manifestations. »
Hun Sen réagit aussi contre la position de certains parlementaires américains qui, pour non respect des droits de l’homme, voudraient refuser au Cambodge la clause de la nation la plus favorisée. « A l’époque de l’Etat du Cambodge, nous survivions sans l’aide américaine, dit-il, indiquant par là la direction prise par le gouvernement: vers le monopartisme d’un système communiste déguisé.
Sur bien des points (mimiques, démagogie, thèmes nationalistes, anti-américanisme, fanfaronnades), Hun Sen est le parfait héritier du Sihanouk des années soixante. Les relations diplomatiques avec les Etats-Unis avaient été rompues en 1963, l’aide américaine refusée en 1965.
« Le gouvernement américain, qui finance une étude approfondie sur les atrocités commises par les Khmers rouges, est aussi coupable de nombreux crimes de guerre au Cambodge. Ils devraient comparaître devant un tribunal comme Pol Pot. Je préviens les Américains qu’ils n’ont pas à être fiers de leur grand pouvoir… Vous avez déjà perdu une fois, voulez-vous être battus une seconde fois? » Selon Hun Sen, les Etats-Unis, ayant fabriqué Pol Pot, devraient payer au moins 20 milliards de dollars en compensation de tous les dommages dont ils sont responsables au Cambodge.
Les arguments ne manquent pas, il est vrai, pour Hun Sen: « Le plus grand violateur des droits de l’homme » au Cambodge (selon Jimmy Carter le 19.04.1978) n’est pas Pol Pot, mais l’équipe Nixon-Kissinger, pour avoir plongé le pays dans la guerre, pour la criminelle invasion meurtrière américano-vietnamienne de mai 1970, pour le soutien à la renaissance des Khmers rouges en 1979, pour l’impérialisme culturel actuel… Les Etats-Unis brandissent l’argument des droits de l’homme quand il favorise leur politique…
Les Occidentaux devraient réfléchir sur le fait que les droits de l’homme sont un héritage typiquement chrétien, et non transportable tel quel dans une mentalité imprégnée de bouddhisme. D’autre part, l’utilisation de l’argument des droits de l’homme est souvent une arme politique déguisée, que l’on utilise quand elle rend service.
Hun Sen se félicite de l’aide japonaise qui n’est liée, elle, à aucune revendication de ce type.
Dans un rapport de cinq pages, le gouvernement s’en prend violemment aux groupes de presse, aux ONG et autres groupes internationaux, affirmant que leurs propos négatifs et exagérés ont contribué à donner à ce gouvernement, vieux de deux ans, une mauvaise réputation. Le rapport souligne que le gouvernement royal respecte la démocratie, le système du pluripartisme et les droits de l’homme, qu’il a fait de son mieux pour transformer le Cambodge en un Etat de droit. Il ajoute que le problème Khmer rouge a été réglé en grande partie, et que le gouvernement considère le problème de la drogue comme étant de première importance.
Les diplomates étrangers réagissent prudemment aux propos tenus par le second-premier ministre. Les ambassades américaine et française refusent tout commentaire. Sam Raingsy a au contraire fermement condamné ce discours qui révèle, à son avis, la formation communiste de son auteur. Des ordres de prudence sont donnés aux ressortissants étrangers, la sécurité des ambassades de France et des Etats-Unis est renforcée. Les manifestations prévues contre les ambassades française et américaine sont interdites au dernier moment par le ministère de l’Intérieur. Hun Sen précisera par la suite qu’il a simplement voulu souligner le droit des Cambodgiens à manifester, tout en niant avoir déclaré la guerre à quelque pays que ce soit. « Je n’ai ordonné d’attaque contre aucune ambassade, car je sais qu’une ambassade est un territoire qui jouit de l’indépendance et de la souveraineté sur notre sol ». Il a ensuite décrit le scénario d’éventuelles manifestations: les ambassades seront prévenues une semaine à l’avance, les manifestants porteront des banderoles et enverront des représentants porter des lettres de protestation.
L’ambassade de France a transmis une note verbale au ministère des Affaires étrangères pour notifier officiellement au gouvernement cambodgien l’incident dont a été victime Gildas Le Lidec, ambassadeur de France, le 16 décembre: alors qu’il quittait une soirée à Phnom Penh, un responsable de la police municipale, manifestement furieux que la voiture de l’ambassadeur bloque momentanément la chaussée, a pointé son arme vers Le Lidec, puis a tiré en l’air à trois reprises. Le roi a présenté des excuses.
Le 11 décembre, dans une interview radio-diffusée, Tony Kevin, ambassadeur d’Australie au Cambodge, fait remarquer qu’au terme des accords de Paris, « ce n’est pas une violation de la souveraineté cambodgienne que de rappeler aux partenaires cambodgiens leurs responsabilités dans le respect des dits accords ». L’hebdomadaire The Economist rappelle qu’au moins 40% du budget national vient de l’aide internationale et que les pays donateurs devraient faire savoir que « l’autarcie a un coût élevé
La guerre contre les Khmers rouges
Durant la saison des pluies et du fait d’inondations exceptionnelles cette année, les activités militaires se sont ralenties de part et d’autre. On se prépare cependant des deux côtés pour la campagne de saison sèche.
Des routes et la voie ferrée nouvellement réparée dans la région de Battambang sont régulièrement coupées. Le 22 novembre, une roquette atteint la ville de Battambang, causant la mort de deux personnes. Des escarmouches sporadiques ensanglantent la nationale 10 reliant Battambang à Païlin, notamment autour de Treng, pris et repris par les deux camps en début d’année. Le 25 décembre, 3 obus tirés par les Khmers rouges sur le marché de Poipet tuent sept commerçants cambodgiens et en blessent cinq autres. D’autres obus se sont écrasés sur la route 5. Cette attaque apparaît comme le début des combats de la saison sèche.
Selon les services thaïlandais, 2 000 Khmers rouges ont quitté Païlin pour se rendre au village de Kla Ngoap, théâtre de sanglants combats en début d’année. Ces nouvelles forces comprennent 4 régiments de la division 415 et remplacent la division 450. Le commandement Khmer rouge a également demandé aux villageois qu’il contrôle de récolter rapidement tout le riz, en prévision de longs combats contre le gouvernement.
30 000 cartes dites « de sécurité » garantissant la protection aux éventuels Khmers rouges qui se rendraient aux autorités gouvernementales vont être distribuées dans les villages et par hélicoptères dans les zones contrôlées par les Khmers rouges avant l’offensive de saison sèche. Les statistiques du ministère de la Défense indiquent que depuis le lancement du programme d’amnistie, en 1993, 16 457 soldats et 3 209 familles khmers rouges se sont ralliés au gouvernement.
Les FARC (Forces armées royales du Cambodge) ont inauguré la formation de l’unité de commandos 911, qui doit être utilisée dans les combats contre la guérilla. Sur les 1 019 éléments du bataillon, 200 ont reçu un entraînement de 8 mois en Indonésie. L’unité toute entière a suivi un entraînement de 6 mois au Cambodge.
Le 12 décembre, 4 205 lieutenant-colonels et 6 940 commandants ont été rétrogradés, dans le cadre de la réforme de l’armée. En avril, le nombre des généraux avait déjà diminué de 77% .
Des blindés et des troupes ont été acheminés dans le district de Rattanak Mondol, en perspective de l’offensive de saison sèche. « Nous attendons l’ordre de combat dans les 15 jours qui viennentdit un officier qui estime à environ 3 000 le nombre des Khmers rouges dans cette zone, dont 1 000 armés. Mais Téa Banh, co-ministre de la Défense, affirme que ces hommes sont là pour défendre la zone et n’attaqueront pas les premiers.
Six avions de combat achetés d’occasion à Israël, pour une valeur de 3,6 millions de dollars, devraient arriver au Cambodge vers le 15 janvier. En août, 10 pilotes cambodgiens ont suivi une formation en Israël. Au début 1995, le Cambodge avait déjà pris livraison de plus de 100 chars d’occasion provenant de la République tchèque et de Pologne. Les nations occidentales refusent toujours de fournir des armes, estimant que l’armée cambodgienne est trop mal organisée et trop corrompue.
Relations internationales
Le roi Sihanouk n’a pas de pouvoir sur le gouvernement. Ses visites au Laos et au Vietnam au début du mois de décembre sont toutefois significatives du nouveau climat des relations entre les trois pays.
Le roi se rend au Laos du 7 au 9 décembre, à la tête d’une délégation de 27 personnes. Un traité signé à Vientiane va permettre aux Cambodgiens de traverser le Laos pour se rendre en Chine (Kunming). Le Cambodge permet en retour aux Laotiens de traverser le Cambodge pour accéder au port de mer de Kompong Som. Un traité d’amitié et d’assistance mutuelle a aussi été signé par les ministres des Affaires étrangères des deux pays.
Le 14 septembre, le roi Sihanouk se rend au Vietnam pour la première fois depuis 22 ans. Après des décennies de conflits, les deux pays sont en train de discuter des moyens de résoudre les points de dispute concernant les 1 130 km de frontière commune et la question des ressortissants vietnamiens au Cambodge. Le roi n’a que peu de pouvoir poitique mais cette visite revêt un aspect symbolique fort. Bien qu’officiellement sans aucun lien, cette visite s’effectue après l’arrestation des groupes anticommunistes vietnamiens du Cambodge.
Depuis un an, le ministère cambodgien de l’Intérieur est sur les traces d’une organisation anticommuniste nommée « Vietnam Tu Do » (Vietnam libre) qui vise à renverser le gouvernement vietnamien. L’ambassade américaine à Phnom Penh confirme l’existence de ce groupe. Les autorités vietnamiennes affirment qu’il existe d’autres organisations semblables au Cambodge, dont « Chinh Phu Vietnam Phuc Quoc(Rétablir le gouvernement vietnamien). Le gouvernement cambodgien nie tout soutien à ces groupes, comme l’explique Ieng Mouly: « A cause de notre neutralité, nous ne pouvons laisser aucun groupe étranger avoir des activités militaires ou politiques contre un gouvernement voisin. S’il y en a, ils doivent être punis ». Ces organisations auraient 2 000 membres, elles auraient établi des cartes de membres et se cacheraient derrière une entreprise de construction et un centre d’entraînement. Elles diffusent de la propagande en vietnamien, décrivant le programme et la composition d’un nouveau gouvernement. Selon certains diplomates, l’ancien premier ministre Nguyen Cao Ky serait impliqué dans un de ces groupes et aurait visité le Cambodge pour organiser des opérations de résistance.
D’autres pensent que ces groupes stockent des armes qu’ils peuvent facilement obtenir des soldats mal payés ou au marché noir. Leur financement proviendrait essentiellement de Vietnamiens résidant aux Etats-Unis. Beaucoup de militants seraient recrutés au Cambodge, notamment parmi les Kampuché Krom (Cambodgiens du Vietnam-Sud) et les anciens soldats de l’ARVN (Armée de la République du Vietnam). Les autorités vietnamiennes accusent ces groupes d’être à l’origine d’actions terroristes au Vietnam, notamment d’une tentative d’attentat à la bombe pendant les célébrations du 20ème anniversaire de la libération de Saigon, le 20 avril 1995. Officiellement, elles assurent que la présence de ces groupes n’altère pas les bonnes relations avec le Cambodge et les Etats-Unis, mais en privé, elles considèrent le problèmes comme très sérieux, et susceptible d’ouvrir un conflit diplomatique. De sources vietnamiennes et de sources diplomatiques occidentales, on confirme que de hauts fonctionnaires du gouvernement cambodgien ou de l’armée soutiennent individuellement ces groupes.
Le gouvernement cambodgien a expulsé six citoyens américains suspectés d’appartenir au groupe Vietnam Tu do. 32 autres membres de l’organisation, pour la plupart d’origine vietnamienne, ont été arrêtés et temporairement détenus par la police. Les citoyens vietnamiens seront explusés vers le Vietnam. Les autres seront relâchés avec menace d’arrestation et d’expulsion en cas de continuation de ces activités.
Le sommet des pays de l’ASEAN à Bangkok comptait 10 pays: les 7 pays membres et 3 pays observateurs, dont le Cambodge, qui espère être bientôt intégré au groupe des nations du sud-est asiatique. Dans son discours, le prince Ranariddh a cité une série d’efforts qu’a déjà effectué le pays pour satisfaire aux conditions des pays membres de l’ASEAN: diminution de l’inflation, croissance du PNB, changement des règles concernant les importations et l’obtention de permis de commercer au Cambodge. Il a cependant demandé aux pays de l’ASEAN de renforcer leur aide au Cambodge.
Des visites de chefs d’Etats étrangers s’inscrivent dans les rapports normaux bilatéraux entre le Cambodge et le reste du monde.
Le ministre des Affaires étrangères allemand, Klaus Kintel, accompagné d’une délégation de 65 membres, fait une visite de trois jours au Cambodge, pour renforcer les relations bilatérales et promouvoir le commerce entre les deux pays. L’Allemagne aura versé plus de 50 millions de dollars d’aide entre 1992 et 1997.
Les liens économiques entre le Cambodge et la Hongrie semblent revenir à la normale après la visite d’une délégation hongroise à la fin du mois de novembre. Budapest avait dénoncé les protocoles de commerce et de coopération avec Phnom Penh à la suite du démantèlement de la République populaire du Kampuchéa.
Economie
Le budget 96 de l’Etat a été approuvé le 28 décembre par l’Assemblée nationale. Il s’élève à 580,9 millions de dollars, dont 4,4% pour l’agriculture, 8,4% pour la santé, 11,8% pour l’éducation, 27,5% pour la défense. Les hausses les plus importantes par rapport au budget 95 concernent l’éducation ( 8%), l’agriculture ( 26%) et la santé ( 65%). Les recettes prévues proviennent des taxes d’importation, des taxes sur la propriété et sur les services, ainsi que sur les droits de douane dont on attend des hausses respectives de 58,2, 89,2 et 7,6% par rapport à 1995.
Production
En dépit des prévisions alarmantes concernant la récolte du riz compromise par les inondations catastrophiques, la région de Battambang devrait exporter plus de 37 000 tonnes de riz, selon un fonctionnaire. Ce serait la première fois depuis les années 1960 que le Cambodge exporterait du riz. Néanmoins les responsables gouvernementaux demandent que l’aide internationale alimentaire continue pour constituer des stocks et continuer les opératons ‘nourriture contre travail’.
Le Cambodge a exporté pour près de 3 millions de dollars en Grande-Bretagne, au mois d’octobre, spécialement des vêtements, fabriqués par 20 usines qui emploient 10 000 ouvriers, payés entre 20 et 100 dollars par mois.
Bois
Le gouvernement a commandé un rapport auprès de la Banque mondiale, la FAO et l’UNDP concernant l’attribution des concessions de coupes de bois. Les conclusions du rapport sont prévues pour la mi-janvier. D’ores et déjà, 30 dossiers soumis pour attribution vont être mis en sommeil. Le gouvernement affirme avoir pris cette décision du fait qu’il n’a plus de forêts à mettre en vente.
Mais les pressions exercés par la FAO, la Banque mondiale ou des ONG, comme « Global Witness », sont sans doute la raison principale de ce gel. Une enquête est menée sur la pratique de coupes illégales de bois commises par la « Colesim Company », une société mixte japonaise et cambodgienne. C’est le premier cas d’enquête par la police économique.
« Global Witness », une ONG anglaise, a en effet établi un rapport critiquant la politique du gouvernement concernant les concessions de bois et de poisson. Selon l’ONG, les concessions sont attribuées par les deux co-premiers ministres, puis signées par le ministère de l’agriculture, des forêts et de la pêche, sans en référer à l’Assemblée nationale, ou aux autres ministères, à ceux de l’environnement ou des finances, notamment. Bien qu’une interdiction formelle ait été prise en janvier dernier concernant les coupes de bois dans les forêts cambodgiennes, Global Witness affirme que le gouvernement a attribué 8 concessions soit 2,25 millions d’hectares, et serait en train d’en attribuer 19 autres, pour une superficie de 4,2 millions d’hectares. Global Witness a diffusé une vidéo du directeur de la société thaïlandaise Khukan Aroonsawat, qui possède une concession sur le long de la frontière thaïlandaise, près de la zone tenue par les Khmers rouges de Anlong Veng. Ce directeur révèle que pour un mètre cube de bois il doit payer une taxe de 200 dollars, dont 95 vont aux Khmers rouges, 30 au gouvernement cambodgien, 20 à chaque co-premier ministre, 30 aux ministères thaïlandais de l’intérieur et de l’Agriculture, et 5 aux militaires cambodgiens. Thao Sen Huor, ministre cambodgien de l’Agriculture se serait amassé une immense fortune.
Selon Pall Sann, vice-gouverneur de la province de Koh Kong, un bâtiment militaire de la marine cambodgienne patrouille pour traquer le trafic illégal de bois dans le golfe de Thaïlande. Cependant la coupe et la fuite illégale de bois continuent au même rythme qu’avant l’interdiction d’avril 1995. Le rapport de Global Witness chiffre à 6 000 mètres cubes de bois les quantités qui passent chaque semaine vers la Thaïlande. La marine percevrait 150 dollars de « taxes » à différents « points de contrôle » et autoriserait les trafiquants à utiliser des bateaux plus importants pour compenser ces frais.
Tourisme
Selon le troisième vice-gouverneur de Siemréap, plus de 50 000 touristes ont visité Angkor Vat et les attractions touristiques voisines durant l’année 1995. Il convient de comparer ce chiffre avec les 35 000 visiteurs annuels des années soixante.
Les deux co-premiers ministres ont approuvé un projet de spectacle son et lumière à Angkor Vat, par la société malaise YTL, en demandant à David Green, le producteur, de s’attacher à l’histoire et d’ajouter de la musique khmère. Le producteur précise qu’il n’y aura ni trous, ni boulons dans la pierre du temple, que les lumières et les hauts-parleurs seront soutenus par des socles en nylon pour ne rien abîmer. Le projet prévoit trois spectacles d’une heure pour 500 personnes. Les spectateurs partiront de l’entrée principale pour se rendre jusqu’au lac où des gradins seront installés. Le spectacle sera donné en khmer, anglais, français, japonais et chinois mandarin, et il y aura des séances séparées et gratuites pour les Cambodgiens.
YTL est la société qui a obtenu le contrat de la zone touristique de 1 000 hectares prévue entre Siem Réap et les temples, auquel un accord préliminaire a été donné le 7 novembre par les deux co-Premiers ministres.
YTL est aussi partenaire d’une société de Hongkong pour la construction de deux autres hôtels à Siem Reap, en dehors de la zone touristique.
YTL a signé également le contrat de restauration de l’hôtel de l’Indépendance à Sihanoukville. Francis Yeoh, directeur de YTL prévoit un investissement de 200 millions de dollars sur 10 ans.
YTL est responsable du développement de l’approvisionnement en eau et en électricité de la zone touristique, et de la construction des premiers hôtels. Les autres investisseurs devront passer par YTL, mais le gouvernement, en tant que propriétaire, devrait récupérer des fonds sur la location et les taxes. La structure mise en place, les autres investissements devraient apporter plus de 500 millions de dollars. Si ce projet est vu par certains comme une extraordinaire chance de créer les infrastructures touristiques nécessaires à Siem Reap, pour d’autres, YTL n’aurait pas les moyens de financer le tout.
YTL prévoit de vendre l’électricité au gouvernement au prix de 0,15 dollars le kilowatt, alors que le prix est de 0,075 à 0,08 à Phnom Penh. Un prix de 0,09 à 0,10 semblerait plus raisonnable. Yeoh explique que ce prix élevé est dû au coût de transport du fuel pendant la saison des pluies. Mais des personnes au courant du contrat pensent que ce tarif est dû au fait que les banques rechignent à prêter au Cambodge à cause des risques que présente le pays. YTL prévoir de commencer à travailler dès janvier 96.
Un autre contrat d’hôtel de 200 chambres prévu pour 97 a été signé avec la société malaisienne Monomas. Cette compagnie est une filiale du groupe Sri Tajudin Ramli qui contrôle la Malaysian Airlines et une partie de Royal Air Cambodge.
Selon Tuon Chay, gouverneur de Siem Reap, le temple de Banteay Srei est actuellement suffisamment sûr pour être visité sans la coûteuse et peu efficace escorte que les autorités locales recommandaient jusqu’à présent. Le gouverneur demande cependant de venir vérifier chez lui, le matin avant de partir, pour connaître l’état de la sécurité. En pratique, il vaut mieux obtenir une sorte de laissez-passer.
Aides internationales
En mars 1995, à l’occasion de la Conférence internationale pour la reconstruction du Cambodge (ICORC), Paris avait accordé 56 milions de dollars d’aide au développement du Cambodge. Avec un nouvel accord à deux volets, la France s’engage à verser 10 millions de dollars supplémentaires pour le développement d’infrastructures et la réhabilitation socio-économique. Le second volet prévoit la remise de 77% des dettes du Cambodge à l’égard de la France. Le reste de la dette sera réparti sur une période plus longue.
La Banque asiatique de développement (BAD) a signé de nouveaux prêts à taux réduit pour 45 millions de dollars. L’accord de principe pour ces prêts avait été donné en août. Un premier prêt de 25 millions est accordé pour la formation technique, notamment du personnel de santé; un second prêt de 20 millions est accordé pour le développement d’infrastructures rurales, la reconstruction des routes rurales en direction des marchés, et pour l’alimentation en eau. La banque a également signé un accord permettant d’accorder des prêts aux investisseurs privés, sur une base commerciale, sans garanties du gouvernement.
Le PNUD (Programme des Nations Unies pour le développement) va engager 2,17 millions de dollars dans un programme de 4 ans, pour l’attribution de petits prêts à plus de 16 000 personnes dont 80% seront des femmes.
L’Union européenne va donner plus de 3 millions de dollars d’aide aux victimes des mines et de la guerre. L’argent sera distribué par les ONG européennes en collaboration avec le « Cambodian Mine Action Center ».
Le Japon et l’Allemagne vont accorder plus de 16 000 tonnes d’engrais qui seront distribuées dans 7 provinces.
Investissements
La compagnie petrolière française Total va achever la construction d’un dépôt de carburant d’une valeur de 5 millions de dollars et va ouvrir 30 stations services avant la fin de 1997. Le dépôt se trouve à 30 km au sud-est de Phnom Penh sur la route n°1.
Les études préliminaires et la prospection s’étant avérées satisfaisantes, la société malaisienne Delcom va bientôt commencer à exploiter de l’or qui se trouve dans la province de Préah Vihéar.
Un terrain de 60 hectares a été acheté le long de la RN 4 près de Pochentong par « Northbridge-KC Developpement Co », une société mixte Khméro-thaï-américaine pour un projet de 94 millions qui inclut un hôpital, un centre commercial et des aires de loisir.
Une entreprise thaïlandaise, la « MDX Power Plc », se prépare à recruter des Khmers rouges pour la construction de trois barrages sur la rivière Mnam, dans la province de Koh Kong. Ces barrages pourront produire 400 mégawats qui seront vendus en Thaïlande. « Si nous sommes sûrs qu’ils ne créeront pas de problèmes, pourquoi ne pas les embaucher? » indique l’entreprise.
Une digue récemment achevée à Takeo et financée par des prêts de la Banque asiatique de développement devrait garantir l’irrigation de plus de 4 500 hectares et faire vivre environ 2 000 familles.
La première phase du projet de réhabilitation du port de Phnom Penh, financé par le Japon, est officiellement terminée. Le port peut actuellement débarquer 600 à 700 tonnes de fret par jour. Quand la deuxième phase, d’un montant de 32 millions, sera achevée, le port pourra en acuceillir plus de 2 000 tonnes par jour. Cependant, le problème reste la lourdeur administrative vietnamienne pour obtenir les autorisations de transit par le Mékong en territoire vietnamien.
La municipalité de Phnom Penh rénove les réseaux d’eau, d’égouts et d’électricité. 14 km de cables électriques souterrains et 22 km de tuyaux devraient être posés avant avril.
Santé
75 cas d’encéphalite japonaise ont été recensés au Cambodge depuis avril 95.
L’OMS et le Programme national cambodgien contre le sida estiment entre 50 000 et 90 000 le nombre de personnes séropositives. En septembre, l’organisation avait déjà revu ses estimations à la hausse passant de 6 000 à 30 000. 9 personnes sont déjà « officiellement » mortes du sida, dont un enfant. Le nombre de personnes atteintes de la maladie s’élèverait à 86, (on en comptait 13 en juillet). La prostitution est l’un des facteurs majeurs de propagation. 38% des échantillons sanguins de prostituées sont positifs; sur 1 700 policiers testés, 8,1% sont séropositifs; au moins 2,6% des femmes enceintes également.
Société
L’OIT (Organisation internationale du travail) prévoit une augmentation considérable du chômage dans les années à venir. Environ 120 000 nouveaux actifs entrent chaque année sur le marché du travail. Parmi eux, 20 000 viennent des
campagnes vers la capitale. A ces 120 000 emplois nécessaires chaque année, il faut ajouter les 90.000 fonctionnaires qui doivent quitter l’administration ou l’armée. Selon le rapport, le secteur privé comprend moins de 10% des actifs, et les estimations les plus optimistes n’espèrent pas plus de 10 000 créations d’emplois pour 27.000 emplois urbains nécessaires.
Le général Lour Ramin, directeur du département des étrangers au ministère de l’Intérieur, ainsi que 5 de ses subordonnés sont accusés d’avoir détourné 2 millions de dollars des revenus gouvernementaux sur les frais de prolongation des passeports d’étrangers.