Eglises d'Asie

LE POINT SUR LA SITUATION POLITIQUE ET SOCIALE(du 1er janvier au 1er mars 1996)

Publié le 18/03/2010




La dernière livraison d’Asie (EDA 213) faisait état de la marche victorieuse du Parti du Peuple (Prachéachon, ex-parti communiste pro-vietnamien), évinçant toute tentative d’opposition, ou de mise en place de partis d’opposition en vue des prochaines élections cantonales de 1997, et législatives de 1998. La détermination politique du Prachéachon s’est encore renforcée durant les deux derniers mois. Plusieurs faits peuvent être reliés à cette évolution politique interne:

– le rétablissement de la fête du 7 janvier

– le procès du prince Sirivuddh

– la tentative pour faire exploser le Parti de la nation khmère de Sam Rainsy

Si la victoire politique semble complète pour le Prachéachon, l’offensive “finale” contre les places fortes khmères rouges piétine: les combats sont relativement de faible ampleur, mais les victimes, surtout blessés par mines, sont très nombreux.

La situation concernant le respect des droits de l’homme se dégrade inexorablement. Néanmoins, des contrats sont signés, le niveau de vie de la population s’améliore lentement. Mais les disparités sociales sont de plus en plus grandes, l’opposition entre la capitale et les provinces de plus en plus criante: du fait de l’afflux d’aides financières qui profitent à un petit groupe, l’accès aux biens de consommation est de plus en plus coûteux, donc de plus en plus fermé aux pauvres qui commencent, pour certains, à regretter le temps des Khmers rouges…

Le 7 janvier, victoire du Prachéachon

Le 4 janvier, le second-premier ministre Hun Sen propose le rétablissement du 7 janvier comme jour de fête nationale, commémorant la chute du régime khmer rouge, le 7 janvier 1979. Cette proposition a été entérinée par une circulaire approuvée par le roi et signée par Hun Sen et Ranariddh.

Ce jour appelé “le jour de la Libération” était chômé durant la période République populaire du Kampuchéa (RPK), mais avait été supprimé en 1993, lors de la création du gouvernement royal du Cambodge, pour permettre la réconciliation entre les membres du Funcinpec et du Parti démocratique libéral bouddhique (PDLB), qui ont lutté aux côtés des Khmers rouges, pendant 10 ans, contre le pouvoir mis en place par l’armée vietnamienne au Cambodge.

Les 12 membres du comité central du Funcinpec – à l’exception du président Ranariddh – ont signé une lettre adressée au roi, soulignant que “si le 7 janvier était la date de la libération du régime de Pol Pot, c’était aussi celle du début de l’invasion du Cambodge par des troupes étrangères.” Sam Rainsy, de son côté, a exprimé “son regret et son oppositionqualifiant cette mesure d’“affront” à tous les résistants qui sont morts pour défendre leur patrie. Hun Sen a vigoureusement défendu le rétablissemnt de cette fête nationale, demandant qui serait venu délivrer le peuple cambodgien si le Vietnam ne l’avait fait.

Ce jour est également le jour de la fête du Prachéachon. Il faut lire le rétablissement de cette fête comme le point d’orgue de l’action menée pour faire reconnaître le Prachéachon comme le seul maître du jeu politique interne cambodgien.

La parodie de justice dans le procès Sirivuddh

On se souvient que le prince Sirivuddh, député, secrétaire général du Funcinpec, arrêté à son domicile, le 21 novembre, suite à un article de So Naro, publié dans le journal khmer “Angkor Thmey“révélant” la prétendue intention du prince d’assassiner le second-premier ministre Hun Sen. Le prince s’est réfugié en France à la fin du mois de décembre 1995.

De France, Sirivuddh écrit à Chéa Sim, président de l’Assemblée nationale, pour lui demander que son siège de député ne soit pas occupé par un autre membre du Funcinpec. Il se considère toujours comme membre du parti, et comme député, mais déclare avoir “quelques difficultés à résider au Cambodge”. Il affirme être proche des idées de Sam Rainsy, mais qu’il ne se joindra pas à son parti. Il exprime à la presse française son désir de revenir un jour au Cambodge pour y jouer un rôle politique, il dénonce la corruption, la création de casinos, le trafic de drogue, le manque de respect de l’environnement. Suite à ces propos, le roi s’emporte contre son demi-frère et déclare qu’il ne l’aidera en aucne façon en cas de retour au pays. Il considère ses déclarations “comme un camouflet personnel

Loy Sul Chheang, premier vice-président de l’Assemblée nationale, est nommé nouveau secrétaire-général du Funcinpec en remplacement du prince Sirivuddh.

Le second-premier ministre Hun Sen ne voit aucune raison empêchant le prince de revenir au Cambodge pour son procès, mais Sirivuddh ira à la prison T3 dès la fin de son procès! Le ministre de la Justice assure cependant que sa sécurité sera assurée.

Le prince Sirivuddh qui avait initialement prévu de rentrer pour défendre son innocence, annule son voyage. Son épouse, la princesse Christine Alfsen-Norodom, de nationalité française, reçoit des menaces de mort si elle participe au procès de son mari.

Le procès du prince devait se tenir in abstentia le 15 février, puis a été reporté à la demande de la défense, et s’est tenu le 22 février à la cour municipale de justice de Phnom Penh. Les accusations de terrorisme et de complot contre la sécurité de l’Etat avaient été levées, ne restait que le projet d’assassinat du second-premier ministre auquel s’ajoutait la détention illégale d’armes. Sirivuddh a été condamné par contumace à 10 ans de prison pour ces deux chefs d’accusation.

Le procès a duré moins de quatre heures, et a été décrit par de nombreux membres d’organisations de défense des droits de l’homme et du système judiciaire comme une “parodie de justice”. Les journalistes n’ont pu entrer dans l’hémicycle du tribunal et ont suivi le procès par les portes et les fenêtres ouvertes. Say Bory, l’un des avocats de Sirivuddh, affirme avoir reçu des menaces de mort la nuit précédant le procès. Quand il a argué qu’il n’y avait aucune preuve que Sirivuddh soit à la tête d’un groupe de conjurés voulant tuer Hun Sen, pas même l’existence d’un seul conjuré, il s’est entendu répondre qu’il suffisait simplement d’en avoir l’intention pour justifier l’accusation! Pour la possession illégale d’armes, Say Bory affirme que l’arsenal mis en évidence sur le bureau du tribunal n’était pas en la possession de son client. Le ministre d’Etat Ung Phan, ancien du PPC qui a rejoint le Funcinpec avant les élections de 93, appelé comme témoin, a certifié que Sirivuddh lui avait dit par téléphone qu’il pourrait tuer Hun Sen. So Naro, le journaliste qui a créé l’affaire, très nerveux, a confirmé que le prince avait fait de telles déclarations. Pin Samkhon, président de l’Association des journalistes Khmers, a dit, pour sa part, qu’il n’aurait pas écrit ce que So Naro a écrit et qu’il pense que Sirivuddh était en train de blaguer.

Dès le 23 février, l’Australie, par la voix de Gareth Evans, son ministre des Affaires étrangères, protestait contre ce jugement inique. Le 25, 90 étudiants de la faculté de droit, parfaitement disciplinés, manifestaient devant l’ambassade d’Australie à Phnom Penh, fustigeant “l’ingérence de l’Australie dans les affaires intérieures du Cambodge… de mépris pour le gouvernement royal, spécialement pour sa justice”. La conclusion appartient à la très courageuse épouse du prince Sirivuddh: “L’histoire jugera, le peuple cambodgien jugera, et la communauté internationale jugera

On pourrait signaler plusieurs exemples de la dépendance du judiciaire par rapport au pouvoir en place: le 28 décembre 1995, des moines, suivis d’une foule d’environ 200 manifestants, armés de haches, de bâtons et de flacons d’acide, ont mis à sac le tribunal de Kampot. Le juge et son personnel ont fui, craignant pour leur vie. Le tribunal avait en effet prononcé un jugment en faveur d’un homme expulsé d’un terrain près d’une pagode dans le district de Kompong Trach. Koy Yon, député-gouverneur de ce district avait tenté, sans succès, d’acheter ce terrain. Il a ensuite manipulé les gens de la pagode, affirmant que ce terrain était originellement dans l’enceinte de la pagode, les incitant à manifester contre le tribunal. Selon les documents du tribunal, les manifestants, payés entre 5 000 et 10 000 riels (10 à 20 F) chacun, seraient arrivés à bord de 4 camions, menés par une dizaine de moines. Selon un témoin travaillant dans une ONG, la police n’aurait fait aucun effort pour arrêter la foule, bien que le juge ait demandé à la police militaire d’intervenir. Des machines à écrire, une photocopieuse, du mobilier et des téléphones, 100 dossiers en cours ont disparu. Les murs et le sol ont été enduits d’huile. Une plainte a été déposée au ministère de la justice.

Chem Snguon, ministre de la Justice, a fait part aux premiers ministres de pressions et d’intimidations des personnes travaillant dans le système judiciaire. Snguon a même avancé le nom de Kieng Savuth, commandant de la police militaire nationale, comme responsable d’un groupe armé entravant le travail de la justice.

Le Parti de la nation khmère (PNK)

Au début du mois de janvier, le second-premier ministre Hun Sen, affirme qu’il est possible au Cambodge de créer des partis politiques en vue de préparer les prochaines élections et qu’il le souhaite. Cependant le Parti de la nation khmère (PNK) reste interdit, et il semble se confirmer que le second-premier ministre agit à l’intérieur même du PNK pour le faire exploser.

Le 16 janvier, Sam Rainsy lors d’une conférence de presse fait part des projets du PNK d’ouvrir une station radio puis une station de télévision, en vue des élections de 1998. Il va aussi créer à l’intérieur de son parti un “cabinet fictif” pour se préparer à l’exercice du gouvernement. Le nombre des membres de son parti serait passé de 40 000 à 60 000 membres durant les deux derniers mois.

Au début janvier, quatre membres du comité directeur quittent le Parti:

Phan Sina, démissionne le premier, indiquant qu’il y resterait si 5 membres en étaient renvoyés, parmi lesquel Khieu Rada, secrétaire-général. Nou Beng et Doung Sarom ont invoqué leur déception à l’égard du Parti. Nop Ann invoque des problèmes de santé. Le vice-président Nguon Soeur menace de démissionner si Khieu Rada n’est pas exclu.

Le 15 janvier, Sam Rainsy rentre d’un voyage à l’étranger de 6 semaines et qualifie ces querelles d’insignifiantes, soulignant que ceux qui avaient démissionné l’avait fait tout en restant en bons termes avec lui. Il ajoute qu’il était possible que des personnes aient été envoyées pour créer des troubles et des divisions.

Lors de son séjour à l’étranger, la surveillance a été plus serrée que d’habitude. Le journal pro-PPC “Koh Santhéphéap” (Ile de Paix) a fait paraître, avant son retour, un article affirmant que des étudiants en colère attendraient Rainsy à l’aéroport. A son arrivée, le 15 janvier, Rainsy a fait part des inquiétudes concernant sa sécurité: “Si je suis un jour assassiné, ce sera sur ordre de Hun Sen, avec la complicité de Ranariddh, et grâce au financement de Theng Boonma”. Hun Sen répond: “La vie de Sam Raingsy pourrait être écourtée si des armes et des munitions étaient trouvées en sa possession… Vous avez fait un complot pour me tuer, c’est pourquoi vous faites toutes ces remarques sur un assassinat

Rainsy a enjoint au gouvernement de reconnaître a légalité du KNP, indiquant que son parti pourrait fusionner avec un autre parti déjà enregistré si les pourparlers avec le gouvernemnet n’aboutissaient pas. Des contacts avec six partis auaient déjà été pris. Après 10 jours passés au Cambodge, Rainsy est parti vers l’Australie.

Le 29 janvier, le siège du PNK est fouillé durant trois heures par la police.

Kuoy Bunroeun, trésorier du parti, se fait arrêter par un policier nommé Khuon Sophy, et un homme de la police militaire, nommé Chhuon Chhat, au volant d’une voiture qu’il avait empruntée, et dont il ne savait pas que c’était une voiture volée. Au moment où il sortait de la voiture, trois hommes en civil, supposés être des fonctionnaires du ministère de l’Intérieur, arrivent en moto, lui pointent une arme sur la tempe et l’embarquent dans la voiture. Il dit s’être débattu, avoir reçu des coups mais avoir pu s’enfuir et avoir ensuite demandé à Sophy et Chhat de servir de témoins du vol, ce qu’ils acceptent de faire. Chhat et Sophy accompagnent Bunroeun au siège du PNK. Cependant, la police encercle les bureaux du PNK pour “libérer” les deux policiers “détenus” par le PNK. Les forces de police sont dirigées par Mok Chito, chef de la police municipale, par El Samnéang, chef de la police chargée de la circulation, et Mak Chan Sakhan, chef de la police militaire. Le policier Saphy change sa version des faits et affirme qu’il a été emmené contre son gré par une foule de supporters du PNK. Des dizaines de policiers procédent alors à une fouille en règle du siège du parti.

Khieu Rada, en l’absence de Sam Rainsy, condamne cette action de la police comme tentative d’intimidation, déclarant que toute cette affaire a été montée dans le but de perquisitionner le siège du PNK. You Hockry, co-ministre de l’Intérieur, déclare que le PNK pourrait être cité en justice pour avoir forcé les deux policiers à venir au siège du parti, et parce que son trésorier a été pris en possession d’une voiture volée. Le jour même de ces incidents se tenait une réunion à la mairie de Phnom Penh avec des représentants du PNK pour discuter des moyens de légalisation du parti… Une nouvelle fois, le PNK a reçu l’ordre de retirer la plaque indiquant le siège du parti, ainsi que son logo. Khieu Rada refuse d’obtempérer.

Le groupe de défense des droits de l’homme Asia Watch a condamné ce “raid” de la police dans les locaux du PNK comme un acte d’intimidation et d’atteinte à la liberté d’expression.

Le 14 février, Nguon Soeur est renvoyé du PNK et demande au gouvernement l’autorisation de tenir un congrès des dissidents du PNK. Rainsy compare la démarche de Soeur à celle de Ieng Mouly du PDLB, et accuse le gouvernement de fomenter des divisions à l’intérieur de son parti. Le 16, Moung Mondale, autre membre du PNK, est renvoyé.

Les membres du PNK de Californie affirmaient que Moung Mondale était cité en justice pour le meurtre de la femme de son oncle (la police californienne a ensuite démenti l’information). Les membres du PNK de Long Beach l’ont aussi accusé de s’être vanté d’être un agent double, ayant pour but de saboter le parti.

Le 16 février, le ministre de l’Intérieur offre à Rainsy de le rencontrer pour parler de la légitimité du PNK. Le 17, Rainsy accepte la proposition et la rencontre est fixée au 22. Le 20, le ministre annonce que la date de la rencontre est différée. Soeur demande en effet au gouvernement l’autorisation de tenir un congrès. Selon Rainsy, la rencontre avec le ministre de l’Intérieur a été repoussée pour permettre des manoeuvres de division à l’intérieur du PNK, par un groupe qui profiterait du soutien politique, logistique et financier du gouvernement. Seour aurait menacé de l’accuser de contacts avec les Khmers rouges, de cacher des armes, de complot pour renverser le gouvernement et tuer Hun Sen. Quand on sait comment a été traité Sirivuddh, on peut craindre le pire pour Rainsy.

Grandes manoeuvres des partis

Ces trois événements ne sont que des signes extérieurs de l’âpre lutte que se livrent les deux grands partis pour garder le monopole du pouvoir. Les 10 et 11 janvier, le PPC a tenu sa 20ème session plénière. Officiellement, les 186 membres venus de toutes les provinces s’engagent à défendre la royauté et à continuer leur coopération avec le Funcinpec. Ils définissent la stratégie du parti pour les élections de 98.

Les 20 et 21 janvier, le Funcinpec a tenu un séminaire de deux jours à Sihanoukville. Il a réitéré son engagement pour une coopération avec le PPC. Les 200 membres ont voté à l’unanimité une motion demandant la présence d’observateurs étrangers aux élections de 1998, notamment des Nations Unies, d’ONG et d’experts en matière de droit, mais en soulignant qu’ils ne veulent pas de troupes étrangères ni de troupes cambodgiennes pour garder les bureaux de vote. Le communiqué final insiste pour qu’après les élections de 1998 il n’y ait plus qu’un unique premier ministre à la tête du pays.

Incidents de frontière avec le Vietnam

Les observateurs étrangers mettent en relation avec le rétablissement de la fête du 7 janvier et la lutte de partis, la dénonciation, le 17 janvier, faite par Ranariddh, premier-premier ministre, des incidents de frontière avec le Vietnam. On peut y voir également une tactique pour ne pas laisser à Sam Rainsy le monopole du nationalisme. On sait que c’est en accusant l’étranger, vietnamien en particulier, que, traditionnellement, les dirigeants khmers règlent les problèmes qu’ils ont entre eux.

Des paysans vietnamiens, appuyés par des soldats, auraient avancé de plusieurs centaines de mètres en territoire khmer dans les provinces de Prey Veng et Svay Rieng. Ces accusations du prince Ranariddh ont rapidement obtenu le soutien d’une faction du PDBL, ainsi que celui de Sam Rainsy. Selon le premier-premier ministre, on déplorerait un mort du côté cambodgien et deux blessés du côté vietnamien. Par la voix de son ambassadeur à Phnom Penh, le Vietnam fait savoir qu’il a respecté l’intégrité territoriale cambodgienne et que toute dispute devait se règler pacifiquement et par la négociation.

Dans la province de Svay Rieng, il existe certaines zones où la frontière n’est pas matérialisée. Depuis plusieurs années s’est créé un “no man’s land” de 1 000 mètres environ entre les points de contrôle cambodgiens et vietnamiens. Actuellement, le Vietnam réclame la plus grande partie de cette bande de terrain. A la fin de la dernière saison des pluies, les autorités vietnamiennes ont donné ordre aux paysans cambodgiens de terminer leur récolte et de ne pas revenir. Les paysans vietnamiens sont arrivés et ont commencé à planter des patates. Le 3 décembre 1995, les Vietnamiens ont entrepris la construction de nouveaux points de contrôle à 120m des postes cambodgiens. En supposant que la frontière soit au milieu du “no man’s land”, le Cambodge perdrait ainsi 380m. Des villageois et des bonzes khmers d’une pagode proche se sont rassemblés pour demander, sans résultats, aux Vietnamiens de se replier. Les discussions entre les responsables locaux des deux bords n’ont rien donné.

Selon le gouvernement cambodgien, 1 200 km de terres frontalières sont ainsi disputés dans les provinces de Svay Rieng, Prey Veng, Takéo, Kompong Cham et Kampot. Des villageois de Ratanakirit et Mondolkiri se sont également plaint d’empiètements. Dès 1994, Hun Neng, frère de Hun Sen et gouverneur de Kompong Cham, avait indiqué aux deux premiers ministres que 870 hectares avaient été envahis par le Vietnam durant les mois précédents. Sous l’APRONUC, il y avait eu des accrochages dans certaines régions de Svay Rieng et de Takéo, les Vietnamiens ayant pénétré au-delà de 2,5 km à l’intérieur du territoire cambodgien. En janvier 95, le Vietnam et le Cambodge ont décidé de la création d’un groupe de travail pour discuter des problèmes de frontière, mais le groupe ne s’est jamais réuni. L’accord d’Hanoi indiquait que les choses devaient rester en état jusqu’à ce qu’un accord final soit signé.

En 1954, le Service géographique français de l’Indochine a publié des cartes établies en 1907 et 1908. Trois accords concernant la frontière avec le Vietnam avait été signés en 1982, 1983 et 1985 entre Hanoi et la République populaire du Kampouchéa (RPK). Mais l’utilisation de cartes de différentes échelles a conduit à un manque de précision.

Ces empiétements de paysans soutenus par des soldats s’inscrivent dans la tradition séculaire du Vietnam dévorant à petits pas le territoire de ses voisins, ce que les Vietnamiens appellent leur Nam Tien (“marche vers le Sud”). Le Kampouchéa Krom (Sud du Vietnam), berceau du Cambodge, a été conquis par le Vietnam, ou donné par les souverains khmers en échange d’un soutien contre le Siam. Sa reconquête est dans l’esprit de tous les dirigeants khmers, quelle que soit leur idéologie. Durant les années 60, entre autres pour mettre fin à ce grignotage continu, le prince Sihanouk avait demandé aux Vietcôngs et au gouvernement de Hanoi de s’engager à reconnaître le Cambodge “dans ses frontières actuelles”. A juste titre, le prince estimait cette reconnaissance comme vitale pour la survie du pays.

Les combats avec les Khmers rouges

Chaque année, la saison sèche (novembre-avril) est le théâtre d’offensives d’envergure lancées par l’armée gouvernementale, utilisant du matériel lourd qui peut se déplacer plus facilement pendant cette période.

Trois cibles sont visées par les FARC (Forces armées royales cambodgiennes): la base de Khla Ngoap tigre mortverrou permettant l’accès à la place forte khmère rouge du Phnom Malay, An Ma Pass, dans la province de Préah Vihéar, sur la frontière thaïlandaise, et Païlin, capitale des Khmers rouges. Les deux premiers objectifs étaient atteints à la fin du mois de février, au prix de pertes sérieuses.

Ces offensives mobilisent entre 5 000 et 14 000 du côté des FARC, selon les estimations des différents observateurs. 5 000 seraient placés entre Sisophon et Poïpet, et le reste dans la province de Battambang, notamment à Treng et Bavel. Les observateurs estiment que les Khmers rouges seraient quelques milliers. Affaiblis par les désertions, ils n’auraient d’autre solution que de se scinder en plus petits groupes pour mener des opérations “coup de poing”. Les FARC avancent lentement, nettoyant et utilisant les villageois pour reconstruire les voies d’accès.

La région de Poipet, proche de la frontière thaïlandaise, et plus précisément autour des collines 25 et 36, proches du villages de Khla Ngopa, constitue l’un des champ de bataille les plus meurtriers. Plus de 10 000 hommes des FARC seraient mobilisés pour attaquer la colline 25 proche de Khla Ngoap. Les Khmers rouges y seraient au nombre de 200, soutenus par 1 000 autres dispersés dans les environs, équipés de chars et de lance-roquettes venus de Païlin.

Le 18 janvier, l’offensive gouvernementale connaît un échec sanglant, à Chromoh Chrouk, près de Poïpet. Un contingent des troupes d’élite du 911ème régiment, entraîné par les Indonésiens et les Français est décimé par les Khmers rouges. Sur 57 soldats, 6 ont été tués, 4 capturés, 5 blessés. Le gouvernement accuse l’armée thaïlandaise d’avoir indiqué le lieu où les soldats étaient embusqués. De sources thaïlandaises, les FARC auraient perdu 50 soldats dans les combats le samedi 20.

Après deux jours de combats, le 5 février, les FARC se sont emparé des collines 25 et 36. Officiellement, 30 soldats gouvernementaux ont été tués, 20 autres blessés, deux chars détruits. Le 19 février, les FARC se sont emparé d’une nouvelle colline stratégique grâce à une attaque éclair menée à partir de la colline 25 et ont ainsi obligé les Khmers rouges à se replier sur Khlar Ngoap.

Plus de 100 soldats des FARC envoyés de Siem Reap pour renforcer des position près de Poïpet, ont déserté parce qu’ils n’avaient pas touché leur salaire depuis 3 mois et manquaient de nourriture. Ils se sont rendus à la frontière thaïlandaise. 20 soldats loyaux au gouvernement ont tenté en vain de les retenir.

Quatre personnes, dont trois enfants, ont été tuées le mardi 9 janvier par un obus. Durant la semaine du 15 au 21 janvier, des dizaines de civils, dont de nombreux enfants, ont été tués dans des tirs d’artillerie sur Poïpet. Ces tirs d’artillerie sont quasi-quotidiens et font chaque jour des victimes.

Le 30 janvier, après 7 heures de combat, un millier de soldats des FARC ont pris le bastion de An Ma Pass, sur la frontière thaïlandaise, dans la province de Préah Vihéar, défendu par 200 Khmers rouges. An Ma Pass était aux mains des khmers rouges depuis juillet dernier et constituait l’un des trois objectifs principaux des FARC.

Le 7 janvier, les militaires thaïlandais avaient tiré sur 250 hommes des FARC qui étaient passé en Thaïlande pour attaquer ce bastion khmer rouge.

La prise de Païlin constitue le troisième objectif des FARC. Païlin serait vide, défendue seulement par 30 hommes, équipés en matériel anti-aérien (de très bonne qualité, saisi l’an dernier aux FARC). Les hélicoptères des FARC ont déjà bombardé la ville.

Le vendredi 26 janvier, les FARC se sont emparées de Phum Kbal Krabei sur la route 58. Ce même jour sur la route 10, les troupes ont occupé le Phnom Slek. Depuis le 22 janvier, les FARC se heurtent à une forte résistance de la 405ème division khmère rouge, à Phnom Samdek, 50 km au sud-ouest de Battambang. 2 000 Khmers rouges seraient soutenus par 7 chars. Des unités de Koh Kong et Pursat seraient venus les renforcer.

Après la prise de Phnom Samdek, qui a causé plus de 10 morts et une vingtaine de blessés ches les FARC, l’objectif est de prendre le Phnom Veng, qui surplombe Païlin, où les Khmers rouges se sont regroupés, avec 5 chars et une grande puissance de feu (de très bons canons, saisis aux FARC l’an dernier). De gros travaux de terrassement sur la route 58 vers Païlin indiquent que le gouvernement pourrait entrer à Païlin par cette voie. Grâce aux opérations “Nourriture contre travail” (food for work”), la route jadis inaccessible est devenue un axe important.

Le général Nuon Paet, qui aurait donné l’ordre d’exécuter les 3 otages étrangers l’an passé aurait été tué dans une embuscade.

Les FARC affirment que les Khmers rouges utilisent des nouvelles munitions arrivées de Chine et débarquées par la Thaïlande. Le moral des gouvernementaux semble bon, étant mieux organisés et plus disciplinés que l’année précédente.

La tactique des Khmers rouges est d’éviter les affrontement, ils laissent s’approcher les soldats des FARC qu’ils attirent sur des champs des mines, puis lorsqu’un soldat est blessé, ils pilonnent au canon ceux qui tentent d’aller à son secours. Les principaux blessés le sont par mines ou par artillerie.

Les FARC utilisent une nouvelle tactique de guerre psychologique: pour la première fois, sur l’un des 4 tracts lancés par hélicoptères, ils demandent aux officiers Khmers rouges d’assassiner leurs responsables politiques, y compris Pol Pot. Les autres tracts offrent 20 000 dollars aux déserteurs qui se rendraient avec un char. On explique des explosions qui ont eu lieu à Battambang, notamment à l’hôpital, par cette même tactique reprise par les Khmers rouges qui proposent 800 dollars à toute personne qui aura détruit quelque chose à Battambang.

D’importants contrats ont été passé par des personnalités khmères avec des hommes d’affaires thaïlandais concernant la vente des pierre précieuses et du bois de Païlin et de ses environs. Le droit de prospection minière sur le territoire cambodgien auraient également été cédé à des sociétés thaïlandaises. Les contacts auraient été signés par les deux premiers ministres. Si le marché est plus attractif que celui proposé par les Khmers rouges, les hommes d’affaires thaïlandais lâcheront les Khmers rouges pour soutenir le gouvernement.

Les Khmers rouges lancent des opérations de diversion autour de la ville de Mong Russey, pour couper les lignes d’approvisionnement des FARC et permettre à leurs propres renforts d’arriver de la région du Tonlé Sap. Ils ne se contentent plus de faire sauter les ponts, mais placent des mines qui détruisent la chaussé de la nationale 5. Le 20 février, 50 Khmers rouges embusqués le long de la route 5 ont détruit un camion de ciment et tué le chauffeur d’une balle dans la tête, à 7 km au sud de Mong Russey.

Un couvre-feu entre 23h30 et 5h est établi à Battambang, officiellement pour limiter l’activité des Khmers rouges dans la capitale provinciale au cours de la saison sèche. Selon des représentants d’ONG, la véritable raison pourrait être la volonté de limiter le nombre croissant de soldats gouvernementaux qui sortent chaque soir dans des débits de boisson. Le 24 février, Lang Borun, général de Police de Battambang, a été tué à un poste de contrôle qui interdisait l’entrée à des soldats en armes dans la ville.

Dans une intervieuw à Broadcasting Corporation (ABC), un officier des FARC a révélé que des armes et des munitions auraient été vendues aux Khmers rouges par des officiers gouvernementaux. Cet officier a reconnu avoir participé lui-même à ce commerce, et parlé de missiles sol-air, de roquettes anti-char, d’obus, d’AK 47 et de M 16. Il a donné les prix des différentes produits. Dès le lendemain, le commandement des FARC a formellement démenti ces allégations, arguant que les FARC n’avaient pas de missiles sol-air, que l’inventaire des armes était strict et que le poids des armes décrit ne pouvait permettre un tel commerce en toute discrétion.

Le 11 janvier, 1 000 officiers de la cinquième Région militaire (Battambang), ont été rétrogradés. L’opération s’inscrit dans le cadre de la réforme de l’armée.

Ces offensives sont très sanglantes, les hôpitaux sont pleins de blessés. Selon une représentante du CICR, plus de 120 blessés seraient amenés dans les hôpitaux militaires de Battambang et de Banteay Meanchey chaque semaine. On en compte plus de 590 à Phnom Penh. Actuellement, 200 patiens de l’hôpital militaire de Phnom Penh sont couchés à même le sol. On estime que 6 blessés sur 10 le sont par mines. Les médecins militaires ne peuvent dire combien de soldats blessés par mine meurent sur le champ de bataille, mais l’expérience de l’Afghanistan ou du Mozambique laisse penser que un sur cinq n’atteint pas l’hôpital. Les hôpitaux militaires se plaignent d’être à court de matériel médical et de sang. “Je demande sans cesse à mon personnel de donner du sang, dit un des médecins, et je n’en ai jamais assez. J’ai besoin davantage de médicaments, de liquide intraveineux, d’antibiotiques, d’antiseptiques, de matériel chirurgicalLe roi Sihanouk a lancé un appel à la communauté internationale pour obtenir de l’aide en raison du nombre grandissant de soldats blessés lors de l’offensive de saison sèche.

Dans une interview donnée à Pékin, le roi Sihanouk dénonce la guerre civile et la déforestation qui sont en train de tuer le Cambodge. De même, Sam Rainsy lance un appel pour un cessez-le-feu immédiat, fustigeant cette guerre où les enfants des plus pauvres vont sauter sur les mines pour cent francs par mois tandis que les enfants des responsables gouvernementaux partent faire leurs études à l’étranger. Il n’est pas nécessaire de recruter des hommes, dans la province, la faim les pousse vers l’armée pour avoir à manger…

Droits de l’homme

Justice Michaël Kirby vient de terminer son mandat de représentant spécial du secrétaire des Nations-Unies pour l’observation des droits de l’homme au Cambodge. Dans une dernière conférence de presse, il se plaint de ce que les deux premiers ministres aient refusé de le rencontrer depuis plus d’un an. Il dresse une liste de 10 points sur lesquels le Cambodge a progressé et de 10 autres points qui font problème. Comme points positifs, il signale que la santé publique a progressé de 60%, bien que l’éducation sur le sida soit à améliorer; les normes de l’éducation se sont améliorées de 8%, tout en insistant sur la nécessité d’instituer des cours sur les droits de l’homme. Il salue les lois pour la protection d’Angkor, la vitalité des associations de femmes, le passage progressif d’une société militaire à une société civile. A chacun de ses visites au Cambodge, il a constaté un plus grand développement économique. Il signale avec intérêt qu’aucun journaliste n’a été emprisonné depuis la promulgation de la nouvelle loi sur la presse, et que les forêts sont protégées par décrets gouvernementaux, bien qu’il existe des “exceptionsSes inquiétudes concernent la façon dont a été et est traité Sam Rainsy, l’interdiction des partis d’opposition, le fait que les médias ne soient pas indépendants, que le gouvernement ne respecte pas parfaitement les droits de l’Assemblée nationale, que les droits des minorités ethniques des montagnes soient violés, que le Conseil constitutionnel suprême n’ait pu encore se réunir. La corruption est inquiétante, l’état des prisons préoccupant.

La minorité djaraï l’a informé que la signature des concessions signées concernant l’abattage des forêts, s’était faite sous la menace des armes. Il insiste sur la nécessité de consultation de ces tribus et de l’étude de l’impact des concessions sur l’environnement.

Le 16 janvier, Winston Lors, chef de la section pour le sud-est asiatique au Département d’Etat américain, affirme que l’administration Clinton allait demander au sénat américain d’accorder la clause de la nation la plus favorisée au Cambodge, sans conditions, en dépit des inquiétudes grandissantes concernant le respect des droits de l’homme dans ce pays.

Cependant, le 25 janvier, une résolution signée par cinq membres du Congrès américain appelle à un contrôle du respect des droits de l’homme au Cambodge et demande au Département d’Etat d’imposer la présence d’observateurs étrangers pour les élections de 1988. Cette résolution mentionne l’arrestation et l’exil du prince Sirivuddh, l’expulsion de Sam Rainsy du Funcinpec et de l’Assemblée nationale, les grenades lancées au siège du PDLB, la corruption rampante et généralisée, l’extension du trafic de drogue à travers le Cambodge. Selon cette résolution, la situation s’est dégradée depuis que la Chambre des représentants a voté la clause de la nation la plus favorisée pour le Cambodge, en juillet dernier.

La presse de plus en plus muselée

L’Association des journalistes khmers a réélu Pin Samkhon comme président, par 16 voix contre 15 pour son rival Tath Ly Hok. Le vote est contesté par Sor Naro, dont l’article a créé l’affaire Sirivuddh. Les plaintes pour irrégularité se fondent sur le fait que des journaux qui ont cessé de publier, comme “Vietnam Tudo“, fermé par le gouvernement, ont été autorisés à voter. On ne peut s’empêcher de voir la main de Hun Sen. Le Centre des Médias féminins au Cambodge, fatigué des querelles internes, a démissionné de l’association.

Ieng Mouly, ministre de l’information vient d’annoncer la formation d’un “comité médias” chargé de demander aux journaux leurs sources d’information. Ce groupe de 3 membres a pour responsable le sous-secrétaire d’Etat Khieu Kanharidh. Quand les informations contenues dans un article seront considérées comme fausses ou mal informées, le comité fera publier une “clarification”. Mais il ne pourra attaquer le journal en justice, ce qui reste la prérogative du ministère. Cependant, la loi sur la presse contient un article qui permet aux médias de protéger leurs sources. Mouly précise que le “comité médias” pourra demander les sources mais que c’est effectivement le droit des journalistes de ne pas les protéger. Le ministre de l’Information se plaint de la mauvaise image du gouvernement cambodgien à l’étranger, et en rend les journalistes responsables.

Le 9 février, Ek Mongkul, speaker vedette de la radio du Funcinpec, a reçu quatre balles dans une jambe, un bras, le cou et le thorax, tirées par deux hommes en moto. Il s’en est sorti vivant. On ignore le motif de cette agression, mais l’ardeur avec laquelle se défendent les deux premiers ministres, ne permet pas d’exclure les mobiles politiques.

Les aides internationales

La conférence internationale sur la reconstruction du Cambodge va être remplacé cette année par un “Groupe consultatif” qui se réunira à Tokyo les 11 et 12 juillet prochains. Le groupe tiendra des discussions techniques sur des projets. Le gouvernement présentera son programme d’investissements publics sur 5 ans. Ce changement semble indiquer que les pays donateurs deviennent de plus en plus réticents à accorder des aides qui sont largement dilapidées par les gens au pouvoir.

Avec la réduction des subventions accordées en 1996 aux ONG par l’USAID, le maître mot est devenu l’efficacité. Le budget de USAID au Cambodge devrait tomber de 41 millions de dollars en 1995 à 30 millions en 1996.

En 1992-1995, le Japon a accordé une aide au Cambodge pour une valeur de 396 millions de dollars, représentant 29% de l’assistance internationale. Mais Norihiro Okuda, directeur de la “Japanese Grant Aid Division” indique que “le Japon demande aux Cambodgiens d’utiliser l’aide japonaise d’une façon plus efficace, car nous ne pourrons toujours accroître l’aide au Cambodge en raison de contraintes financières intérieures de plus en plus fortes

En dépit d’une récolte de riz relativement bonne, les aides alimentaires restent nécessaires pour la poursuite des projets “Nourriture contre travail” (Food for work). Le gouvernement américain a accordé 10 000 tonnes de riz en réponse à un appel d’urgence lancé par le roi Sihanouk. Le PAM (Programme alimentaire mondial) va donner au Cambodge 60 000 tonnes de riz. Par contre, la Croix Rouge cambodgienne a donné 50 tonnes de riz d’urgence pour aider la Corée du Nord qui connaît des pénuries importantes.

Développement

Le second-premier ministre Hun Sen a inauguré quelques-unes des 79 écoles portant son nom dans les provinces de Svay Rieng, Prey Veng, Kompong Cham et Takéo, chacune coûtant 22 000 dollars, soit un total de 1,7 milion. Hun Sen affirme que ces fonds proviennnent de sociétés cambodgiennes ou étrangères. Le 7 janvier lors de l’inauguration du parc qui porte son nom, le second-premier ministre a reçu 100 000 dollars de la part de l’hôtel Holiday, 50 000 de la Thai Boo Rong et du Casino Naga, et un certain nombre d’autres entreprises telles que Kim Hap Import-Export Co, Cambodgien Tabacco Co, Anco Brothers Co et Sokimex qui ont donné chacune entre 1 000 et 30 000 dollars. Theng Boonma, président du groupe Thai Boon Rong et le plus riche personnage du Cambodge, a financé la réfection du boulevard Mao Tsé Tong à Phnom Penh, offert un hôpital pour soigner les pauvres de la capitale…

La société thaïlandaise Shinawatra prévoit d’étendre son réseau de télécommunications à quatre villes de province: Siem Reap et Sihanoukville à partir du mois de février, Battambang et Kompong Cham en mars. Cette expansion représente un investissement de 2 à 3 millions de dollars. Samart, pour sa part, investit 2,5 millions pour étendre son réseau de téléphone mobile interprovince.

Le prince Ranariddh a indiqué que la société Ariston n’avait pas appliqué les clauses de son contrat de 1,3 milliard de dollars pour installer les infrastructures de Sihanoukville et que certain projets pourraient être accordés à d’autres investisseurs. Il est félicité par Sam Rainsy.

Le gouvernement avait passé un contrat de 3 milliards de dollars en décembre 1994 pour développer Sihanoukville et ouvrir un casino sur Naga Island. Ce contrat inclut aussi la rénovation de l’aéroport, la construction d’une station d’électricité, l’amélioration des routes et l’établissement des réseaux d’eau et d’égouts.

La société malaisienne Ariston a également des ennuis avec la société singapourienne Unicentral, propriétaire du navire arbritant le casino Naga, dont Ariston est propriétaire. Plusieurs loyers (243 000 dollars par mois) sont impayés depuis 6 mois. Par ailleurs, Ariston n’aurait ni renouvelé les garanties bancaires liées aux loyers en retard, ni payé l’assurance du bateau. Unicentral menace de rapatrier le navire à Singapour. Ariston, qui avait l’intention d’acheter le bateau au moyen d’une location-vente, affirme de son côté avoir donné son accord pour une valeur globale du navire de 26 millions de dollars, mais des experts auraient ensuite révisé ce prix à la baisse. C’est de cette révision de la valeur du navire que serait nés le litige et le non-paiement des loyers, de l’assurance, et le non-renouvellement des garanties de banque.

Commerce

Selon le ministre de l’Agriculture les exportations de bois de la province de Koh Kong ont diminué de 80% depuis l’interdiction d’abattre et d’exporter du bois passé en avril 1995. “Nous avons des hélicoptères, des armes et des troupes pour attaquer les trafiquants si les autorités nous appellent. 99 camions, tracteurs et pièces servant au transport du bois ont été saisis depuis l’annonce de l’interdictionLe 7 janvier, le second-premier ministre Hun Sen a attaqué violemment le ministre des Finances Kéat Chhon, l’avertissant qu’il pourrait être relevé de ses fonctions s’il ne prenait pas en considération les inquiétudes des importateurs. Le gouvernement a signé un contrat avec la SGS (Société générale de surveillance), en octobre dernier. Mais “ce contrat ne lui donne pas le droit d’inspecter les biens à destination humanitaire, ni les biens qui sont destinés aux investissements”, a indiqué Hun Sen. Aussi a-t-il demandé à la SGS de ne pas inspecter n’importe quoi dans le port. Cependant, Chanthol Sun, secrétaire d’Etat au ministère des Finances, a assuré aue le contrat avec la SGS ne serait pas annulé, mettant en avant la hausse des taxes d’importation grâce à la SGS. De nombreux observateurs estiment que la véritable raison de ces critiques repose sur le fait que la SGS rend plus difficile la sous-évaluation des biens importés par cargos.

Faits de société

Selon les statistiques du ministère de l’Intérieur, la criminalité à Phnom Penh est en diminution. En 1995, 1 343 crimes ont été commis à Phnom Penh, soit 104 de moins qu’en 1994. 400 sont des crimes à main armée, causant 108 meurtres et 237 blessés. 850 motos et 58 voitures ont été volées. 1 161 suspects ont été arrêtés, 24 personnes suspectées d’être des criminels ont été abattues par la police.

Les pêcheurs travaillant près de la capitale sont régulièrement raquettés par la police, les soldats et la police militaire, ainsi que les autorités locales. Ces extorsions sont courantes dans les diverses provinces, ainsi que l’indique un pêcheur: “La plupart des pêcheurs de mon village ont dû partir à Phnom Penh parce qu’ils craignaient de se faire tuer si ils ne donnaient pas d’argent

Santé

Environ 10 000 personnes ont contracté la dengue l’an dernier, 4,3% en sont morts (5,3% en 1994). Battambang a été particulièrement touché avec 2 500 malades et 154 décès.

Les Nations Unies viennnent de lancer le programme “UNAIDS” pour lutter contre le sida. L’OMS estime entre 50 000 et 90 000 le nombre de séropositifs. Au terme d’un accord passé avec le gouvernement le PNUD a accordé une aide de 756 428 dollars pour renforcer la lutte cotre le sida. La Coopération française, Médecins du Monde et la Caritas lancent un projet d’hébergement des sidéens en phase terminale.

Le gouvernement japonais a accordé une subvention de 26 964 dollars à l’Association des médecins d’Asie pour reconstruire un bâtiment pour les malades mentaux. L’USAID va accorder 800 000 dollars à l’université Harvard (secteur Santé publique) pour établir des programmes concernant la santé mentale au Cambodge, pour les personnes ayant subi des violences sexuelles ou la torture.

Ce même gouvernement japonais a donné 46 millions de doses de vaccins contre la polio et autres maladies infectieuses, des équipements pour la chaîne de froid, pour une valeur de 3,2 millions de dollars. Les 11 février et 11 mars, 1,7 millions d’enfants de moins de 5 ans devraient être vaccinés lors des Journées nationales d’immunisation.

Selon la CIMAC (Comité chargé de déminage), le nombre des blessés par mines a augmenté durant la saison sèche: dans la province de Battambang on en dénombre 37 en novembre et 63 en décembre, dont 25 civils; 45 dans celle de Banteay Meanchey et 23 dans celle de Kompong Thom, dont 14 morts pour ces deux provinces. Outre la recrudescence des combats, c’est la pauvreté qui pousse les paysans à élargir leur rizières en défrichant la forêt ou à aller chercher du bois.

Divers

Le Cambodge va renouer des liens diplomatiques avec la Birmanie. L’actuel ambassadeur au Laos Kek Larang devient le représentant du Cambodge dans ce pays, tout en restant basé à Vientiane.

Les premières études de grottes dans la province de Kampot ont révélé la présence de temples du 6ème siècle, probablement construits par des Indiens installés au Cambodge. Dans une des grottes ont été également trouvées des poteries du 7ème siècle.

La première étude démographique depuis 34 ans va commencer au mois de mars et devrait toucher 20 000 familles. Un comité de trois personnes a élaboré les questions qui seront posées à travers 667 villages, couvrant toutes les provinces, exceptées celles d’Oddar Manchey et de Préah Vihéar.

Le vénérable Maha Ghosananda, connu pour l’organisation des marches de la paix durant les dernières années, vient d’être nominé pour le prix Nobel de la paix.

Le 22 février, 4 touristes français se sont noyés dans le Tonlé Sap suite à la collision de deux bateaux de tourisme de la ligne Phnom Pen-Sieréap.

Le 22 février, Haing Ngor, acteur du film “La déchirure” a été assassiné à San Francisco. On ignore les motifs de l’assassinat.