Eglises d'Asie

Un haut magistrat demande pardon aux chrétiens pour les émeutes de Shantinagar

Publié le 18/03/2010




Preuve de l’émotion qu’elles ont soulevée dans le pays, aujourd’hui encore, les émeutes anti-chrétiennes du 6 février dernier (9) continuent de susciter des commentaires et des réactions dans l’opinion publique pakistanaise, y compris dans les milieux musulmans. Ces troubles, au cours desquels 15 à 20 mille musulmans s’étaient déchaînés contre les lieux de culte ainsi que les biens des chrétiens de Khanewal et de Shantinagar, à 60 km à l’est de la ville de Multan, dans le centre du pays, étaient encore le centre des débats d’une réunion publique organisée à Lahore et présidée par Mgr Alexander Malik, évêque local de l’Eglise du Pakistan, le 20 mars 1997.

L’un des participants était Naseem Hassan Shah, ancien haut responsable de la Cour suprême du pays. Il a publiquement demandé pardon aux chrétiens pour le comportement de tous les Pakistanais. Cependant, selon lui, les pillages qui ont mis à mal 800 maisons particulières, 13 églises, des écoles et des dispensaires, ont été perpétrés par des membres de la pègre plutôt que par de véritables musulmans. De ce fait, il a prié le gouvernement d’élucider les raisons de ces heurts, tout à fait anormaux dans un pays où la constitution garantit les droits des minorités. Il souhaite que toute la lumière soit faite sur ces événements et que la population reçoive à ce sujet une éducation progressive qui empêche le renouvellement de tels actes.

Mgr Malik a exprimé sa satisfaction pour la déclaration du premier ministre condamnant les incidents et annonçant le déblocage d’une indemnisation pour les victimes ; mais il a déploré le silence du président Farooq Legari sur le sujet. Il considère que la cause principale de la récente tragédie doit être recherchée dans les germes de division introduits dans la société pakistanaise par la loi sur le blasphème, promulguée par le récent président, le général Zia ul-Haq. L’évêque a alors lancé un appel au gouvernement Sharif pour restaurer la liberté des minorités et abroger les lois discriminatoires à leur égard, en s’appuyant sur sa majorité des deux tiers à l’Assemblée nationale.

C’est aux chrétiens que s’est adressé l’un des participants à la réunion, le P. Parwez Emmanuel, curé de paroisse. Il les a incités à la réconciliation en leur donnant comme exemple les Juifs qui, lors de la destruction du temple par les Babyloniens, n’ont pas cherché à se venger, mais ont examiné à nouveau leurs relations avec Dieu. Les chrétiens pakistanais ont, en effet, été profondément affectés non seulement par les événements de Khanewal et de Shantinagar, mais aussi par la violente répression qui s’est abattue sur les manifestations organisées par eux en guise de protestation à Karachi ou 600 chrétiens avaient été arrêtés le 13 février 1997 et à Islamabad où 25 autres avaient été appréhendés deux jours plus tard (10). Depuis cette époque, aucune autre manifestation chrétienne n’avait eu lieu concernant ces événements. La réunion de Lahore du 20 mars 1997 est la première où, à nouveau, des chrétiens affichent à publiquement leurs opinions à ce sujet.