Eglises d'Asie

Après l’abrogation d’une des dispositions du huitième amendement, les chrétiens attendent la suppression des autres mesures discriminatoires.

Publié le 18/03/2010




Le 1er avril dernier, les chrétiens pakistanais se sont réjouis de voir le “huitième amendement” soumis à la discussion du Parlement, et amputé d’une de ses dispositions. Ce jour-là, en effet, les députés ont voté l’abrogation d’un des articles de l’amendement donnant au Président le pouvoir de démettre de ses fonctions le gouvernement d’une des provinces du pays. Cette intervention du parlement était devenu nécessaire à la suite d’un conflit opposant le premier responsable du Penjab, un frère du premier ministre, au président Farooq Ahmad Leghari. Celui-ci, en vertu des pouvoirs conférés par le huitième amendement s’opposait à la nomination de titulaires à un certain nombre de postes-clefs de l’administration provinciale. Après six semaines d’impasse, le premier ministre, appuyé par le général Jéhangir Karamat, adjoint au chef d’Etat-major, avait alors convoqué l’Assemblée nationale.

Cependant le sentiment de satisfaction des chrétiens est mêlé d’une certaine amertume à la pensée que le “huitième amendement” comporte encore 130 dispositions, dont plusieurs sont directement ou indirectement dirigées contre eux. Le sentiment général est que cet amendement consolide, sans nul doute, la position du premier ministre, mais qu’il n’aura aucun effet sur la situation des chrétiens et des diverses minorités. Un jeune chrétien, nommé Yunas, a évoqué l’article de l’amendement, punissant les blasphèmes contre le prophète Mahomet et l’a comparé à une épée suspendue au-dessus des têtes des non-musulmans. Selon cette disposition, tout blasphème, ou plutôt, tout comportement ou propos considérés comme tels, entraîne automatiquement la peine de mort (11).

Les articles 50 et 51 constituent le deuxième objet du mécontentement des chrétiens. Ils prévoient en effet une Assemblée nationale composée de 209 députés représentant des circonscriptions régionales musulmanes et 10 députés représentant des circonscriptions régionales minoritaires, élues par des électorats séparés. Beaucoup jugent que ce système électoral est discriminatoire à l’égard des minorités sous-représentées et de peu de poids pour décider de l’orientation de la politique du pays.

D’autres chrétiens pourtant se prennent à espérer que ce premier amendement n’est qu’une première étape vers l’abrogation des autres dispositions attentatoires aux droits de certaines catégories de citoyens et discriminatoires. Les militants de la Commission Justice et Paix, qui, après les émeutes de Shantinagar, ont entamé une campagne de signatures contre le huitième amendement, se sont dits encouragés par le dernier vote de l’Assemblée nationale. Par ailleurs les observateurs ont noté que le premier ministre a appelé l’Assemblée à étudier les autres problèmes relatifs au huitième amendement et à essayer de leur donner une solution. On attend aussi avec curiosité de voir comment le président emploiera ses pouvoirs désormais restreints.

Le huitième amendement date de l’ancien président, le général Zia ul-Haq, qui l’avait fait adopter par l’Assemblée nationale, après les élections de 1985, où les partis politiques n’avaient pu faire une campagne officielle.