Eglises d'Asie – Chine
Sichuan : une très importante manifestation ouvrière a eu lieu dans la province au cours de ces derniers mois
Publié le 18/03/2010
L’affaire a commencé dans une importante soierie de Nanchong. Les ouvriers qui n’avaient pas été payés depuis six mois ont pris le directeur de l’usine en otage et l’ont paradé à travers les rues de la ville. Très rapidement, 20 000 ouvriers provenant des autres usines de la ville se sont joint à eux et ont assiégé la mairie de la ville pendant trente heures. « Nous avons quitté les lieux quand on nous a promis que nous serions payésa déclaré l’un des participants. Une bombe artisanale a aussi explosé dans la mairie, ce qui indique la détermination des manifestants.
Le cas de Nanchong n’est pas unique. A travers le pays, des milliers d’usines nationales se trouvent dans le même cas que celles de Nanchong et plusieurs millions d’ouvriers ont eu leurs salaires réduits au strict minimum, ou bien ne sont pas payés pendant plusieurs mois de suite. Pékin craint qu’ils soient tentés de suivre l’exemple de Nanchong, et c’est la raison pour laquelle les autorités chinoises ont imposé un boycott sur les informations en provenance de cette ville du Sichuan. Des événements comparables à ceux de Nanchong se sont produits ces derniers mois dans d’autres villes, en particulier dans la ville de Taiyuan, dans la province de Shanxi.
En fait, les événements de Nanchong mettent en lumière le dilemme dans lequel se débattent les autorités : la réforme des entreprises d’Etat entraîne une augmentation importante du chômage, et celle-ci provoque l’agitation sociale. Le gouvernement va-t-il choisir de réprimer violemment les travailleurs qui occupent la rue, ou bien va-t-il accepter de les dédommager, encourageant ainsi davantage de manifestations ?
Dans le passé, le parti communiste n’a pas hésité à choisir la répression violente. Les troupes ont ouvert le feu sur les manifestants de Tiananmen, en juin 1989, parce que travailleurs et étudiants étaient en train de forger une alliance. A la suite de ces incidents, ce sont les dirigeants ouvriers, et non les étudiants, qui ont écopé des peines de mort et des condamnations les plus longues à la prison. Les syndicats clandestins ont été immédiatement dispersés et leurs chefs emprisonnés.
Aujourd’hui, les problèmes de la classe ouvrière se sont plutôt intensifiés. Les conflits du travail ont augmenté de 73% entre 1994 et 1995 et l’augmentation a été à peu près la même de 1995 à 1996. On a compté 33 000 conflits de ce type en 1996. On considère généralement qu’un cinquième des ouvriers des entreprises d’Etat est en surnombre. Une ville comme Shanghai doit en principe supprimer 500 000 postes de travail dans les deux ans qui viennent.
Selon les observateurs, les modes de protestation choisis par la classe ouvrière sont aussi en train de changer. Des travailleurs provenant de diverses usines commencent à s’unir pour renforcer leurs demandes, et la violence n’est plus l’exception.