Eglises d'Asie

Lahore : six cents chrétiens ont été arrêtés à la suite d’une manifestation pour l’abrogation de la loi sur le blasphème

Publié le 18/03/2010




Trois mille chrétiens environ se sont rassemblés à Lahore, le vendredi 15 mai 1998, pour exiger que le gouvernement pakistanais abroge les sections 295-b et 295-c du code pénal. Le dernier article rend la peine de mort obligatoire pour toute personne convaincue d’avoir blasphémé, directement ou indirectement, contre le prophète Mahomet.

La police, craignant que des maulanas (chefs musulmans) n’organisent une contre-manifestation à la sortie de la prière du vendredi et que les deux groupes s’affrontent, avait demandé aux chrétiens d’arrêter leur manifestation à 13 heures. Pour se plier aux ordres de la police, Mgr Samuel Azariah, évêque de Raiwind et modérateur de l’Eglise protestante du Pakistan, avait commencé à diriger les manifestants vers la cathédrale catholique. Alors qu’un millier de chrétiens environ avaient déjà atteint les lieux, la police a commencé à charger la foule avec des matraques et des gaz lacrymogènes. Une bataille rangée a suivi. La police n’ayant pas donné l’autorisation aux ambulances d’entrer dans le terrain de la cathédrale pour évacuer les blessés, la foule a commencé à lancer des pierres contre les forces de sécurité. Dans la confusion, un camion de la police et plusieurs voitures ont été incendiés.

Plus de six cents chrétiens ont été arrêtés sur les lieux et inculpés de violence contre les forces de l’ordre. Aucune accusation n’a cependant été portée contre le P. Abid Habib, prêtre capucin, et le Rév. Khokar, pasteur protestant, qui ont été relâchés au bout d’une dizaine d’heures.

Les blessés se sont fait soigner à l’hôpital “United Christian“, les hôpitaux publics de la ville ayant refusé de les recevoir. Le 17 mai, plusieurs prêtres ont essayé d’aller célébrer la messe pour les détenus chrétiens dans la prison de la ville, mais l’autorisation leur en a été refusée par les autorités.

Ces incidents font suite au suicide de Mgr John Joseph, qui s’était donné la mort le 6 mai 1998, pour protester contre la loi sur le blasphème (5). Celle-ci a été utilisée à plusieurs reprises contre les minorités religieuses pakistanaises, souvent pour vider des querelles personnelles, avec l’appui bruyant de plusieurs groupes fondamentalistes musulmans. Plusieurs condamnations à mort ont été prononcées contre des chrétiens mais aucune n’a été menée à terme, le tribunal d’appel ayant acquitté les accusés. Ceux-ci ont cependant dû quitter le pays, des groupes fondamentalistes menaçant de les assassiner. Plusieurs chrétiens accusés de blasphème ont tout de même été tués, soit au cours de leur garde à vue soit au cours de leur procès. Il y a quelques mois, un juge musulman de la cour d’appel de Lahore a été assassiné pour avoir participé à l’acquittement d’un chrétien (6).