Eglises d'Asie

LE POINT SUR LA SITUATION SOCIALE ET POLITIQUE Du 1er avril au 30 juin 1998

Publié le 18/03/2010




I – PREPARATION DES ELECTIONS

La préparation des élections législatives du 26 juillet, on s’en doute, a mobilisé toutes les énergies durant les mois de mai et de juin, même si la campagne n’est officiellement ouverte que depuis le 25 juin. Autant, sinon plus que pour des idées et des systèmes politiques opposés, on se bat pour garder le pouvoir ou y accéder.

Combats à l’Assemblée nationale

Le 30 avril, les députés de l’opposition boycottent l’Assemblée nationale pour tenter de bloquer le processus électoral, tant que l’Assemblée refusera de voter un amendement à la loi électorale : la loi stipule, en effet, que le dépouillement des voix s’effectue à l’échelon des communes, l’opposition demande qu’il se fasse au niveau des srok (sous-préfectures) ou des provinces. En outre, elle demande la nomination par l’Assemblée, des 3 membres du Conseil Constitutionnel (CC), organisme souverain pour régler les litiges électoraux. Les trois partis du FUN (Front Uni National : Funcinpec, Parti Sam Rainsy, Parti Son Sann) demandent la révision de la composition du Comité national des élections (CNE) qui leur paraît trop favorable au PPC, et le libre accès aux médias. Le FUN menace de boycotter les élections si ces conditions ne sont pas remplies avant le 18 mai. La composition du CNE a pourtant été ratifiée par un vote favorable de 70 voix contre 15 la semaine précédente.

Chéa Sim, président de l’Assemblée, demande instamment aux députés de cesser leur boycott, Hun Sen menace de rester au pouvoir indéfiniment, tant que les élections n’auront pas eu lieu, ou de dissoudre la Chambre des députés. Il refuse de rencontrer Ranariddh, rentré définitivement au Cambodge le 4 mai, tant que ce dernier exigera de garder le titre de premier Premier ministre. Le 5 mai, cependant, Hun Sen prend l’initiative de téléphoner à Ranariddh et lui propose un compromis. Sans consulter ses alliés, Ranariddh accepte que le décompte des voix se fasse au niveau des communes et le vote des 3 candidats au CC. Il n’y aura que 1 595 lieux de décompte des voix au lieu de 10 000 initialement prévus. Sam Rainsy accuse le prince d’avoir cédé trop vite, sans rien en échange et le trouve trop faible, trop mou, trop incohérent et incompétentsa première semaine a été un désastre pour l’opposition démocratique. Le 7 mai, Ranariddh continue, il raye 8 membres du Funcinpec de sa liste électorale, sans consulter personne, car, au début de l’année, ces députés avaient signé une pétition interdisant aux membres de la famille royale de faire de la politique. Nous savons bien que ce n’est pas un démocrate“, dit Son Chhay, membre du PSR.

Campagne d’enregistrement

L’enregistrement des partis auprès du Comité national des élections est officiellement clos le 7 mai. 39 partis sont inscrits, soit 19 de plus qu’en 1993, pour élire 122 députés. Avant le 12 juin, le CNE devra approuver définitivement ou rejeter les candidatures. Toutes seront autorisées.

A partir du 13 mai, 46 observateurs à “long terme” (provenant de l’UE, des Etats-Unis, du Canada, de l’Australie), commencent à se déployer dans les provinces cambodgiennes. Ce sont des “Volontaires de l’ONU”, placés sous l’autorité de Sven G. Linder, ancien ambassadeur de Suède en Chine, qui dirige l’unité européenne d’observation. En juillet, on comptera au total près de 400 observateurs étrangers “à court terme”. (On avance parfois le nombre de 800). Leur rôle est précisé par les autorités cambodgiennes: ils observent, mais n’organisent pas, comme en 1993. Quatre bureaux d’un Secrétariat de l’ONU pour les Elections seront ouverts à Battambang, à Kompong Cham, et deux à Phnom Penh.

L’enregistrement des électeurs commence le 18 mai pour se terminer le 15 juin. L’Union Européenne (UE) a fourni 1114 kits contenant le matériel nécessaire pour l’enregistrement de 3 500 personnes chacun, pour une valeur totale de 4,5 millions de dollars, pris sur le budget de 11,6 millions promis. L’UE a dû payer un supplément de 1,1 million pour que tout soit prêt dans les délais prévus. Le Canada et la Grande Bretagne en ont fourni 200 supplémentaires. 2 005 équipes de 5 membres, recrutées et formées par le CNE, la plupart dans le corps enseignant, enregistrent les électeurs dans environ 12 000 centres, durant 3 ou 4 jours par centre. Ils sont payés 18 dollars pour 8 jours d’enregistrement. Pour la deuxième fois dans l’année, la plupart des écoles ferment, faute d’instituteurs. En mars, pour le recensement, elles avaient déjà fermé pendant 12 jours.

97,27 % des électeurs potentiels, soit 5 334 419 citoyens, se sont fait inscrire sur les listes électorales et ont reçu une carte d’électeur avec leur photo. Ces chiffres dépassent parfois les prévisions; ainsi à Phnom Penh, il y a 80 000 électeurs de plus que prévus. Cependant, les membres d’associations de défense des droits de l’homme, les 14 observateurs étrangers en poste et l’ensemble des gens des campagnes font état d’actes d’intimidation, de pression constante de la part des autorités villageoises appartenant au PPC et de nombreuses irrégularités. Certains bureaux ne sont pas aux emplacements prévus, ferment leurs portes avant l’heure prévue, apparemment pour décourager des électeurs. Les chefs de villages interviennent dans les bureaux d’enregistrement qui n’inscrivent que les candidats accompagnés d’un membre du PPC, distribuent du glutamate de sodium (assaisonnement apprécié des Cambodgiens), des kramas, du riz, des nouilles, des sarongs, des T-shirts frappés du logo du PPC, de l’argent, etc…à ceux qui promettent de voter PPC, obligent la population à jurer devant Bouddha qu’ils voteront PPC, ramassent les cartes d’électeurs nouvellement établies pour relever les numéros et faire croire ainsi que l’on saura pour qui les gens ont voté, etc.

La campagne d’apposition d’empreintes digitales et d’engagements par serment de voter pour le PPC a été lancée depuis des mois. Hun Sen, dans un premier temps a désapprouvé ces agissements qualifiés d’actes de “supporters trop zélés”, puis les justifie devant Thomas Hammaberg, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU au Cambodge, qui y voit des mesures d’intimidation. Il affirme que les villageois signent des “reçus”, permettant de vérifier que les membres de son parti ont bien reçu ces cadeaux. Il assure avoir distribué 250 tonnes de glutamate. Cela permet, en fait, de connaître le nombre précis des gens susceptibles de voter pour le PPC. Malheur à qui se dédira !

Selon le journal d’opposition “Monoséka khmer” (“Conscience khmère”), Hun Sen aurait dépensé 10 millions de dollars pour acheter des voix. Des observateurs plus neutres estiment la somme à 2,5 millions au moins. D’après le PPC, le parti compterait 3 millions de membres sur un total de 5,4 millions de votants. De son côté, Sam Rainsy (PSR) signale plusieurs cas où les bureaux d’enregistrement ont refusé d’inscrire ses partisans ou ont tenté de les décourager.

Bon nombre de travailleurs des usines de textiles n’ont pas été autorisés par leur patrons à aller s’inscrire, ou ont été menacés de licenciement s’ils y allaient. Les 80 000 réfugiés en Thaïlande, les réfugiés établis à l’extérieur du pays (5 % de la population), n’ont pas été inscrits sur les listes électorales. Environ 5.318 des quelques 80 000 réfugiés cambodgiens en Thaïlande suite aux événements des 5-6 juillet 1997 ont été rapatriés à la date du 1er juillet. Le gouvernement thaïlandais s’est engagé à tenter de les rapatrier tous avant les élections. Il a proposé à maintes reprises au gouvernement cambodgien d’enregistrer ces réfugiés sur les listes électorales (55 000 sont des électeurs potentiels), mais ce dernier a refusé, prétextant que la date limite du 15 juin était dépassée, et qu’il ne pouvait enfreindre ses propres lois.

Le président de la CNE a décidé de prolonger jusqu’au 18 juin l’enregistrement des électeurs dans un bureau de la province de Mondolkiri, dans 6 bureaux de celle de Kompong Speu, et de 2 bureaux en Kandal. Il a refusé par contre de prolonger l’enregistrement à Phnom Penh pour les travailleurs du textile.

Sam Rainsy, ainsi que le Funcinpec, dénoncent l’enregistrement d’étrangers, notamment vietnamiens, et de mineurs. Le 25 juin, le CNE examine la plainte du PRS et raye 7 noms des listes électorales. Le PSR dépose encore une autre plainte concernant 364 personnes. Il fournit aussi deux listes : l’une mentionne les personnes inscrites illégalement; l’autre porte les noms des Cambodgiens à qui ce droit aurait été refusé. Le FUNCINPEC, pour sa part, a fourni une liste de 7641 personnes inscrites illégalement.

La présence des Vietnamiens au Cambodge est un problème délicat. Durant les dernières années, nombre de fonctionnaires ont accordé des cartes d’identité cambodgienne aux immigrants vietnamiens, contre des pots de vins. Le PPC s’appuie sur cette minorité, présente dans tous les organes du pouvoir, spécialement dans la police. Généralement les étrangers ne se rendent pas compte du problème et accusent volontiers les Khmers de racisme. L’immigration rampante et le déplacement des frontières sont des faits incontestables dont dépend la survie du Cambodge. Au mois de mai, Hun Sen et Ung Huot annulent un voyage officiel prévu au Vietnam, suite à un traité vietnamo-thaïlandais signé en août 1997, partageant entre les deux pays les 5 570 km2 d’eaux territoriales riches en pétrole, objet de litige avec le Cambodge depuis près 26 ans. Finalement, seul Ung Huot, premier-Premier ministre, se rend à Hanoi le 2 juin, les accords en sous-main étant sans doute passés directement avec Hun Sen.

Grâce à l’enregistrement par ordinateur, on pense éliminer les gens qui se sont enregistrés deux fois (sous le même nom). L’Australie a financé ce centre informatique d’enregistrement des donnés, comprenant 32 ordinateurs, pour une valeur de 850 000 dollars. 3 équipes travailleront 24 heures sur 24 afin d’enregistrer tous les noms dans les délais prescrits.

Hun Sen “regrette” les irrégularités, le CNE intervient pour qu’elles cessent, mais il est sans réel pouvoir. Le CNE déclare qu’il n’a pas le temps d’examiner les trop nombreuses plaintes qui lui parviennent…

Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel, organe législatif suprême, est chargé d’examiner la conformité des lois avec la Constitution et de trancher les litiges électoraux. Il devrait être composé de 9 membres, nommés pour 9 ans, renouve-lables par tiers tous les trois ans. Le roi Sihanouk a nommé Chau Sen Cocsal Chhum, 93 ans, Son Sann, 85 ans, et Pung Peng Chheng, 81 ans, depuis trois ans. L’Assemblée nationale et le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM), devaient en nommer six autres. Mais, par la suite, l’opposition entre Ranariddh et Hun Sen avait bloqué toute nomination.

Le 7 mai, l’Assemblée nationale nomme 3 candidats, membres du PPC, au Conseil Constitutionnel: Bin Chhin, Yang Sem et Top Sam qui recueillent respectivement 71, 64 et 61 voix. En signe de protestation Ahmad Yahya quitte l’hémicycle. Sam Rainsy voulait négocier la nomination de ces 3 candidats: un du FUN, une personnalité neutre et une du PPC, mais Ranatridh a tout bradé lors de la conversation avec Hun Sen. Le 21 mai, le CSM, réuni par Sok An, ministre de la justice par intérim, nomme ses trois candidats : Prak Sok, secrétaire d’Etat à la fonction publique, Thor Peng Léath, ex-gouverneur de la Banque Nationale du Cambodge, Chan Sok, président de la Cour Suprême. Tous trois sont membres du PPC. Une querelle juridique éclate aussitôt: Chhem Sgnoun, ministre de la Justice, étant en France pour soins médicaux, on devait nommer Uk Vithun, secrétaire d’Etat à la Justice, pour le remplacer. Or le Conseil des ministres a nommé Sok An, ministre attaché au Conseil des ministres. Il n’a donc pas autorité pour convoquer le CSM. La nomination des 3 sages est donc déclarée “illégale” par l’opposition. Le 25 mai, Son Sann écrit une lettre au roi: “Comment du Conseil Constitutionnel illégal peut juger de la légalité des futures élections ? “.

Le 2 juin, 7 des 9 membres du CC prêtent serment au palais royal devant Chéa Sim représentant le roi. Son Sann et Chau Sen Cocsal Chhum n’étaient pas présents; ils ont contesté à plusieurs reprises la légalité des candidats du CSM. Le lendemain, le CC devait tenir leur première séance, mais les deux personnalités étaient encore absentes, or, selon la loi, Chau Sen Cocsal, doyen d’âge, devait convoquer et présider la séance. Chau Sen Cocsal quitte le pays, en laissant une déclaration dans laquelle il affirme que, le 29 mai, de hautes personnalités l’ont obligé à signer une lettre de convocation du CCOn accuse Sam Rainsy d’avoir rédigé cette déclaration qu’a signée le doyen du CC. Le roi nie être à l’origine du boycott du CC par les deux membres qu’il a nommé. Le 8 juin, Hun Sen fait une visite surprise au roi, à Siemréap, durant laquelle est négociée la question du CC. Le roi promet, en outre, de rester au Cambodge jusqu’à la fin du processus électoral et la nomination du premier ministre par la nouvelle Assemblée nationale. Pung Peng Chheng, 81 ans, doyen de facto, accepte de convoquer le CC pour le 15 juin, afin d’élire un président, tout en annonçant son intention de démissionner après la séance inaugurale se sentant trop vieuxpour remplir sa mission. Chan Sok, ancien inspecteur des Finances et ancien président de la Cour suprême, diplômé de l’Ecole royale d’administration, est élu président du CC. Le 25 juin, le roi Sihanouk nomme Say Bory, bâtonnier du barreau de Phnom Penh, en remplacement de Pung Peng Chheng. A 58 ans, Say Bory se considère comme “un technicien et non un politique”. Au 1er juillet, le Conseil Constitutionnel avait rédigé son règlement intérieur et réglé les problèmes matériels, mais n’avait pas encore commencé à examiner d’éventuels recours.

Pour un accès équitable aux médias

Le 25 mai, le CNE rend public le règlement concernant l’accès aux médias durant la campagne électorale. Selon l’article 4 du règlement, chaque parti disposera de 5 minutes chaque jour pour diffuser un message radio ou un spot télévisé qu’il remettra au CNE. L’ordre de passage sera déterminé par l’ordre d’arrivée des documents. Les partis auront accès à des tables rondes à laquelle participeront deux, trois, ou quatre partis. Les médias publics devront diffuser gratuitement ces messages. La télévision officielle diffusera 4 heures et demie de programme quotidiens préparés par les 39 partis, et la radio nationale les diffusera pendant 5 heures. Le CNE imprimera et distribuera chaque jour 10 000 exemplaires d’un bulletin concernant les messages des différents partis. Le CDS (Centre de Développement Social) a conçu un “guide de l’électeur”, tiré à 30 000 exemplaires qui sera distribué à travers le pays, présentant la plate-forme des 39 partis.

Le CNE interdit aux journaux de publier de la propagande politique durant la campagne électorale. Plusieurs associations de défense des droits de l’homme s’insurgent, au moins 6 journaux de l’opposition déclarent ne pas vouloir respecter la réglementation du CNE comme contraire à la démocratie et à la constitution. Le 25 juin, Thomas Hammarberg, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU, diffuse un rapport de 15 pages, dans lequel il déplore que les conditions d’accès aux médias pour l’opposition cambodgienne sont loin d’être justes et équitablesUne étude portant sur le mois de mai montre que Hun Sen est apparu 170 fois sur les différentes TV cambodgiennes, alors que Ranariddh et Sam Rainsy n’y sont intervenus que 5 fois chacun, et, de plus, ont été présentés sous des aspects défavorables. Les personnalités du PPC ont paru 500 fois à l’écran, Ung Huot et ses proches une centaine de fois. Selon la teneur des émissions diffusées, les auteurs du rapport estiment que 8 des 13 radios, et 5 des 6 stations de TV sont affiliées ou proches du PPC. Les partis d’opposition n’ont aucun média à leur disposition. Seul le parti Son Sann a une licence pour diffuser sur 93,5 mais manque d’équipement pour opérer. Le 15 juin, Sam Rainsy, s’est vu refusé pour la cinquième fois, l’autorisation de créer une radio et une télévision. Depuis le 19 juin le FUNCINPEC est autorisé à disposer d’une radio, mais pour des raisons financières et des raisons de temps, la radio ne sera pas opérationnelle avant les élections.

Le 12 juin, la municipalité de Phnom Penh interdit toute manifestation politique afin de maintenir la sécurité et l’ordre public dans une bonne atmosphère de neutralité politiqueCette interdiction a été immédiatement objet de critiques de la part des partis d’opposition et de groupes de défense des droits de l’homme. Le 20 juin, lors de leur réunion à Bangkok, les Amis du Cambodge insistent sur le respect de la liberté de rassemblement pendant la campagne. La municipalité doit se rétracter et dire que son interdiction n’était qu’une “suggestion”. Le 21 juin, Sam Rainsy organise à Phnom Penh, malgré l’interdiction de la municipalité, un meeting qui rassemble plus de 2 000 personnes, malgré le blocage par la police et l’armée de plusieurs cars de supporters. Depuis le 25 juin, date du début de la campagne électorale, tous les partis semblent ignorer cette interdiction.

Violences politiques

Durant les deux derniers mois, on ne compte pas moins de 7 assassinats politiques. Le 25 avril deux responsables du parti de Son Sann sont tués par une grenade à Takéo. Le 8 juin, le fils d’un militant du PSR de Kompong Cham est condamné au défi de toute justice à un an de prison ferme, pour usage illégal d’arme (qu’il n’a pas utilisée !). Le 8 juin, le directeur du journal pro-gouvernemental Koh Santéphéap Ile de la Paixest blessé de deux balles. La journal avait critiqué des officiels corrompus, notamment Chéa Sim… Le 14 juin, Phon Phun, membre du FUNCINPEC, et Mme Néang Mom Yang, dans la province de Prey Veng, sont tués par balles. Le 19 juin, le corps d’Em Eam, membre du PSR, disparu depuis le 10 juin, est découvert à Tbong Khum (province de Kompong Cham). Le 23 juin, Chan Vichet, membre du FUNCINPEC est assassiné à Pursat, le lendemain du passage de Ranariddh dans la ville. Le 27 juin, le corps de Thong Sophâl, membre du FUNCINPEC, disparu depuis une semaine est retrouvé. L’examen du corps révèle qu’il est mort sous la torture. Le 28 juin, Sam Rainsy déclare dans un communiqué de presse que 5 de ses militants ont été menacés et battus à Kampot, Pursat, Phnom Penh, qu’un chef de village a fait décrocher l’enseigne d’un bureau de son parti à Koh Kong. Ces assassinats viennent s’ajouter à la liste des quelque 80 assassinats survenus depuis les événements des 5-6 juillet 1997, dûment documentés par le Centre des Droits de l’Homme de l’ONU. L’impunité des coupables est régulièrement dénoncée notamment par l’Union Européenne qui demande à ce que les auteurs de crimes soient punis avant les élections

Le 5 juin, Thommas Hammarberg, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU, répète dans une conférence de presse que l’ONU n’a pas encore pris la décision de s’impliquer dans le processus électoral cambodgien.

La décision sera prise à la fin du mois. De toute façon, la présence d’observateurs ne signifie pas une reconnaissance par avance des élections. Le jugement final ne pourra intervenir qu’après le scrutin. Le représentant de l’ONU rappelle les principales causes des réticences de l’ONU : accès non équitable aux médias par tous les partis, intimidation des électeurs, culture d’impunité. Rien n’a été fait pour découvrir et punir les auteurs de l’attentat du 30 mars 1997 et des assassinats politiques qui ont suivi les événements des 5-6 juillet dernier. Hun Sen promet la composition d’une commission d’enquête.

Le 8 juin, les deux premiers ministres forment un Comité des Droits de l’Homme, de 4 personnes, nommant chacun leurs conseillers personnels. Thomas Hammarberg salue cette création, mais attend les résultats. Il faut signaler que le code de procédure pénale a été composé, mais pas encore discuté à l’Assemblée nationale. Le Comité, présidé par Om Yin Tieng, conseiller de Hun Sen, arrête des suspectsvisiblement créés pour la circonstance, qui pourraient avoir commis les assassinats survenus à Prey Veng et à Pursat…

Le 19 juin, plus 750 chefs de cellule du PPC ont tenu un “meeting secret” pour préparer les élections. On leur a

expressément demandé d’éviter toute violence durant la campagne.

Sécurité

20 000 policiers ont été affectés à la sécurité durant la campagne d’enregistrement des électeurs. Pendant la campagne électorale, 3 620 hommes seront déployés dans 181 districts. Le jour du vote, en plus des effectifs déjà sur le terrain, 3 policiers seront en faction dans chaque bureau de vote, soit 34 140 fonctionnaires de police.

Le Conseil des ministres nomme le directeur de la Police nationale, Hok Lundi, chef du groupe de travail de 7 personnes chargé de coordonner la sécurité durant les élections. Beaucoup de gens le soupçonnent d’avoir liquidé son rival Ho Sok, lors des événements des 5-6 juillet, .

Le 15 juin, le CNE annonce que la sécurité des bureaux de vote sera assurée par 5 gardiens qui surveilleront la situation à distanceLa commission locale des élections pourra recourir aux forces armées et à la police qui doivent agir en toute neutralitéPlusieurs partis de l’opposition s’insurgent, car l’armée et la police sont entre les mains du PPC.

Tout est prêt

Plusieurs fois, Ranaridh avait menacé de boycotter les élections, ce qui a eu pour principal effet de lasser la communauté internationale. A partir du 19 juin, il abandonne cette menace. Par contre Sam Rainsy et Son Soubert lancent un ultimatum: si la CNE ne prend pas les mesures qui s’imposent pour la tenue d’élections libres et équitablesavant le 5 juillet, leurs deux partis boycotteront les élections. Il semble que déjà plusieurs conditions soient remplies. Plusieurs fois les partis d’opposition ont tenté de retarder la date des élections, relayés par des parlementaires américains ou des groupes de défense des droits de l’homme. Cependant le gouvernement a tenu ferme sur ce point : quoi qu’il arrive,les élections auront lieu le 26 juillet !

Depuis le 28 juin, les bulletins de vote, imprimés en Nouvelle Zélande, avec une encre spéciale ne pouvant être

photocopiée, commencent à arriver par avion et sont acheminés sous bonne garde. Sur ces bulletins, l’ordre d’inscription des partis a été tiré au sort par les chefs des ordres bouddhique du pays : le FUNCINPEC porte le n° 34, le PPC 35. 12 500 urnes, très sophistiquées, d’une valeur totale de 3 millions de dollars, arriveront par bateau. Les électeurs seront marqués d’une encre indélébile, empêchant théoriquement tout nouveau vote. En plus des 400 observateurs étrangers, 10 000 Cambodgiens recrutés par le COMFREL (Comité pour des élections libres et équitables), surveilleront les bureaux, avec les représentants des différents partis. Cependant, si les urnes ne peuvent être transportées au centre du décompte des voix, elles seront entreposées chez le responsable du bureau de vote, le plus souvent membre du PPC… Tout est beau sur le papier, mais la réalité peut être très différenteremarque un observateur étranger.

Comme on pouvait s’y attendre, le CNE réclame de l’argent de la Communauté internationale : il lui manque 2,6 millions de dollars pour financer le transport des urnes et le décompte des voix, 2 millions pour les opérations de logistique, plus difficiles et plus coûteusesavec l’arrivée des pluies. Il faut prévoir 500 000 dollars pour les problèmes de dernière minute. Cheng Phon, président du CNE, fait remarquer que le financement des élections de 1998 ne représente que 2 à 3% de celui des élections de 1993.

Le 26 juin, Koffi Annan lance “un urgent appel” aux pays donateurs pour qu’ils honorent leurs promesses. Sur les 27 millions que doit verser la communauté internationale, le CNE estime devoir débourser 4,5 millions pour les salaires des 70 000 agents recrutés par ses soins, pour superviser pendant 5 jours les 11 500 bureaux de vote du pays et le décompte des voix. Le CNE promet un salaire journalier de 35 dollars (alors que le salaire moyen des fonctionnaires est de 20 !). Une bonne partie de ces “agents” sont des gens ignares, recrutés dans le squat du “building”, ou “constructions anarchiques” de Phnom Penh, là même où le PPC a l’habitude de recruter son personnel pour les manifestations “spontanées” qu’il organise…

Le 19 juin, le Japon s’est engagé à verser 3 millions de dollars pour les élections pour aider le PNUD a acheter du matériel de transport et matériel divers. Cela porte la contribution du Japon à 9,5 millions de dollars. Le Japon enverra en outre environ 30 observateurs faisant partie d’ONG. La Chine, pour sa part, a fait don de 27 véhicules de transport.

Le 27 mai, à cause des inquiétudes concernant le processus électoral, les Etats-Unis ont décidé de réduire de 70% l’aide prévue. Au lieu des 7 millions promis, il y en aura que 2,3 millions pour aider les ONG, couvrir les frais des observateurs internationaux, de l’éducation électorale, du secrétariat électoral des Nations Unies. Pas un cent n’ira au gouvernement. L’UE a versé 11,5 millions de dollars, destinés au soutien technique et à la formation des agents recrutés par le CNE.

Blanc seing de la Communauté internationale

Le 17 juin, Francis Vendrell, directeur des Nations Unies pour la région Asie-Pacifique, en visite au Cambodge, a une discussion très franche et ouverteavec Hun Sen concernant les élections.

Le 20 juin, les “Amis du Cambodge”, (comprenant les Etats-Unis, le Japon, l’Australie, l’Union Européenne), réunis à Bangkok donnent leur feu vert pour les élections du 26 juillet, même s’ils émettent de “sérieuses préoccupations” sur les assassinats politiques et le climat d’impunité qui règne au Cambodge. Le 24 juin, les représentants de l’Union Européenne, réunis également à Bangkok se déclarent globalement satisfaits de la préparation des élections, même si des infractions durant la campagne d’enregistrement des électeurs sont relevées. Sven Linder, responsable des observateurs étrangers, fait remarquer qu’il ne faut cependant pas prendre comme critère de comparaison la maturité démocratique occidentale. Ramener la démocratie au Cambodge n’est pas chose aiséeNous devons procéder par étape et faire une évaluation à chacune d’entre ellesSi rien n’était fait contre la violence et l’impunité, cela influencerait notre évaluationSi ces élections peuvent aider la Cambodge à s’engager dans la voie de la démocratie, ce sera alors une récompense, car il n’y a pas d’avenir sans démocratie. Le 27 juin, une délégation de la “troïka” de l’ASEAN (Philippines, Indonésie, Thaïlande) se rend au Cambodge, rencontre Hun Sen, Ranariddh et le roi Sihanouk, et se déclare satisfaite de la préparation des élections : Nous espérons que les élections se passeront dans le calme et que la communauté internationale sera remerciée de ces effortsdit le ministre thaïlandais des Affaires Etrangères, dirigeant la délégation. La délégation exprime cependant avec force ses préoccupations concernant les 4 derniers meurtres de membres de l’opposition, que le gouvernement refuse de considérer comme politiques

II – CESSEZ-LE FEU

Selon le plan japonais pour la tenue des élections, un cessez-le-feu doit intervenir avec les forces royalistes dissidentes. Le 30 avril, le général Nhiek Bun Chhay, chef de la résistance royaliste, déclare au journal thaïlandais The Nation, que Ranariddh n’est plu son chef, puisque ce dernier a été chassé du poste de commandant en chef des FARC les 5-6 juillet 1997. Ses troupes appartiennent donc toujours aux FARC et non au prince. Le prince peut donc participer aux élections sans encourir le blâme d’entretenir une armée pour son parti.

Le 4 mai, Hun Sen nomme cinq officiers pour négocier la réintégration des unités fidèles à Ranariddh, représentées par le général Khann Savoeun. Les généraux Nhiek Bun Chhay et Serey Kosal, chefs des résistants royalistes pourraient éventuellement bénéficier d’une grâce royale, après le cessez-le-feu et la réintégration de leurs unités dans les FARC. Nhiek Bun Chhay fait 5 propositions: cessez-le-feu, amnistie pour les officiers, retour des officiers à leur grade dans les FARK, récupération de leurs biens, garantie personnelle et protection par l’ONU.

Le 15 mai, la première séance de négociations ne dure que 15 minutes, les représentants de Phnom Penh refusant la présence de Long Satrin, premier secrétaire de l’ambassade du Cambodge en Thaïlande, et de Hang Savuth, ex vice-gouverneur de Siemréap. Seuls des militaires peuvent négocierD’autre part, les négociateurs envoyés par Nhiek Bun Chhay ont distribué une déclaration de cessez-le-feu immédiat et permanent, supervisé par des observateurs étrangers, et la demande d’amnistie pour les généraux, la réintégration dans les FARC ne venant qu’en troisième position, alors qu’elle constitue l’essentiel de la négociation pour Phnom Penh.

Le 20 mai, une nouvelle réunion tourne court, à nouveau à cause de la présence de civils dans la délégation envoyée par Nhiek Bun Chhay, et la présence de quatre autres officiers, rayés des cadres des FARC, puis nommés par Nhiek Bun Chhay. Le 29 mai, une troisième rencontre échoue, car les envoyés de Nhiek Bun Chhay disposent de grades accordés par Ranariddh après les événements de juillet 1997. Pour la quatrième fois, le 10 juin, les négociations tournent court: les royalistes demandant une déclaration préalable de cessez-le-feu, déjà déclaré le 27 février par Ranariddh. Phnom Penh n’envisage que la réintégration des forces armées dissidentes.

Le 11 juin, Ranariddh met en garde le gouvernement contre toute tentative de l’exclure du processus électoral, en l’accusant d’avoir une armée, en violation de l’article 6 la loi électorale, ce serait un désastre politiquedit le prince.

Sur le terrain, il semble qu’un cessez-le-feu de fait, s’est installé. Le 6 juin, les autorités es FARC de Koh Kong annoncent que 85 soldats de la résistance de Samlaut se sont rendus au gouvernement, et que d’autres suivront.

Samlaut est vide de ses habitants, les militaires des FARC démontent systématiquement toutes les maisons pour en emporter le bois et le revendre.

Le 18 juin, une centaine de militaires attaquent un campement de la CMAC (centre de déminage), à Boeung Trakuon, dans la province de Bantéay Méan Chhey. On déplore 5 morts, dont 1 bébé de 12 mois et une fillette de 11 ans. On accuse la résistance. Cependant le général Khann Savoeun, nie : il s’agirait des membres de la 7ème division des FARC basée à Thmâr Puok.

Un Antonov 24 des Forces aériennes cambodgiennes heurte une mine sur l’aéroport de Koh Kong. On ne déplore que des dégâts matériels. Une mine avait déjà explosé sous un autre Antonov 24, en décembre dernier, à un mètre de l’endroit de la nouvelle explosion. Les officiers et soldats dissidents après les événements des 5-6 juillet avaient annoncé alors qu’ils avaient placé 5 mines, mais personne n’a pensé à déminer. Le commandant militaire, Thmar Da, ancien du FUNCINPEC avant de se rallier au PPC après les événements des 5-6 juillet 1997, est limogé.

FIN VIRTUELLE DES KHMERS ROUGES

Après la débâcle militaire des Khmers rouges de la branche dure d’Anlong Veng, après le mort de Pol Pot, le ralliement des Khmers rouges d’Anlong Veng et leur promotion (notamment du bourreau Ke Pauk, responsable personnel de dizaines de milliers d’assassinats!), le gouvernement de Phnom Penh mène des négociations avec un certain nombre d’autres groupes. Cependant, le 26 avril, ces négociations avec Khem Nguon, l’un des chefs militaires, sont interrompues, le gouvernement refusant d’accorder aux derniers Khmers rouges les mêmes avantages que ceux qui se sont ralliés en août 1996 à Pailin. Selon des sources militaires thaïlandaises, Hun Sen aurait envoyé des émissaires pour contacter Ta Mok. Khieu Samphan et Nuon Chéa auraient contacté Téa Banh.

Durant les derniers jours d’avril et les premiers jours de mai, près de 30 000 civils khmers rouges franchissent la frontière thaïlandaise à Sa Ngam, pour fuir les combats. 13000 sont conduits dans un camp à Huay Saran, à 8 km à l’intérieur de la Thaïlande, 2 800 à Phu Noi. Un nombre à peu près égal attend à la frontière. Certains chefs khmers rouges déclarent que leurs soldats sont allés mettre leur famille en sécurité en Thaïlande pour revenir lutter ensuite contre les FARC. Les militaires thaïlandais affirment pour leur part, qu’ils désarment les soldats à leur entrée sur le sol thaï.

Malgré les pressions américaines, Hun Sen refuse de parler de tribunal international pour juger les Khmers rouges avant la tenue des élections, pour ne pas détourner l’attention du peuple, et ne pas compromettre les négociations en cours. Selon les Etats-Unis, une vingtaine de responsables khmers rouges, dont Ieng Sary et Ke Pauk, amnistiés par le roi, sont susceptibles de passer en jugement.

Les déserteurs khmers rouges parlent d’une prison située à O Keng Kong, à 6 km l’est d’Anlong Veng où des centaines, peut-être des milliers de personnes, ont été internées, avant d’être exécutées à Tuol Kruol. Selon une estimation raisonnable, le nombre des victimes se situerait aux environs de 3 000.

Le 11 mai, les FARC s’emparent de la position de Chuam, et saisissent les deux tanks qui restaient aux troupes de Ta Mok, ainsi qu’un véhicule blindé. De sources militaires, l’émetteur radio des khmers rouges, “installé sur le sol thaïlandais”, a été détruit à l’AK 47 par 4 ou 5 déserteurs. La dernière émission remonte au 12 mai au soir. Les troupes khmères rouges se seraient scindées en deux ou trois groupes : 2 à 300 soldats avec Ta Mok se dirigeraient vers Phnom Chhung, aux confins du Cambodge, du Laos et de la Thaïlande; d’autres avec Khieu Samphan et Nuon Chéa, se dirigeraient vers Ta Tum; d’autres tenteraient de rejoindre Nhiek Bun Chhay.

Les officiers de l’armée thaïlandaise déconseillent au Premier ministre Chuan Leekpai de rendre visite aux camps de réfugiés khmers rouges comme il en avait l’intention, à cause des combats.

Les 10 000 civils d’Anlong Veng réfugiés à O Bei Tap retournent progressivement chez eux à partir du 17 mai: c’est là qu’ils veulent vivre, ils y ont leurs rizières, leurs maisons. Le 3 juin, les FARC assurent avoir pris la colline de Ta Tum, où il n’y avait, de fait, personne…

Le 5 juin, au cours d’une cérémonie, 3.563 soldats khmers rouges, et 23 084 civils d’Anlong Veng sont réintégrés dans les FARC et la communauté nationale. Ils sont enregistrés pour les prochaines élections. Le 11 juin, 5 intellectuels du mouvement khmer rouge se rallient au Gouvernement : Chan Youran, ancien ambassadeur en Chine, Mak Ben, ministre du Commerce, Thiuon Thieun, ministre de la Santé, In Sophéap et Kao Bun Heng, diplomates. Accompagnés par Ieng Sary, le 21 juin, ils se rendent à Phnom Penh où ils sont reçus chaleureusement par Hun Sen et par Téa Banh, co-ministre de la Défense. Il faut oublier le passé, le futur consiste à joindre nos mains pour la paix et la réconciliation nationaledit Mak Ben, faisant un peu facilement l’impasse sur plus de deux millions de morts.

Ieng Sary aurait reçu, de fait, une liste de 80 noms d’intellectuels khmers rouges désirant rejoindre le gouvernement, mais seulement 5 ont fait le pas décisif. Le 15 juin, des négociations entre le gouvernement et les derniers khmers rouges échouent. Téa Banh, co-ministre de la Défense, et Ke Kim Yann, chef d’Etat-major des FARC, rencontrent Khim Ngun et Ta Tem, responsables de la guérilla khmère rouge. Ces derniers posent des conditions inacceptables pour Phnom Penh. En échange de la paix, ils veulent obtenir une zone autonome et maintenir leurs propres forces armées.

Le 18 juin, Hun Sen propose l’amnistie à Khieu Samphan, à condition qu’il livre Ta Mok et Nuon Chéa. Hun Sen serait très heureux d’apparaître, avant les élections, comme l’homme de la réconciliation. Cependant certains membres du PPC sont réticents devant trop d’offres faites à leurs anciens ennemis. Le 26 juin, Hun Sen change d’opinion et déclare que la seule perspective est l’arrestation de Khieu Samphan. Tant que les Khmers rouges n’ont pas comparu devant un tribunal, nous ne pouvons pas dire que leur organisation militaire et politique est finiedit le second Premier ministre. Ranaridh accuse Hun Sen d’hypocrisie : celui-ci fait en effet ce qu’il avait tenté de réaliser l’an dernier avec Khieu Samphan, et qui lui avait valu une condamnation (théorique) de 30 ans de prison.

III – ECONOMIE

La Banque Nationale du Cambodge fait l’impossible pour maintenir le riel à la parité de 4 000 riels pour 1 dollar jusqu’aux élections, en injectant massivement des dollars sur le marché intérieur. L’an dernier, à même époque, 1 dollar s’échangeait contre 2 700 riels. Le vie quotidienne du petit peuple devient de plus en plus difficile. Le ministère des Finances tente vainement de faire entrer les ressources qui lui sont dues. Ses ressources ont baissées de 2 % par rapport à l’année dernière. Il tente de faire entrer 3,5 millions de taxes dues pour l’année 1995-6 par la société aérienne Royal Air Cambodge, consortium cambodgien-malais, créé en 1995. On ne parle pas de l’année 1997!.

La propriété d’un dépôt d’or d’une valeur de 135 millions de dollars a été attribuée au Cambodge par une banque suisse de Bâle. Ce dépôt a été opéré durant la période du Sangkum de Sihanouk en 1958, puis laissé improductif sous Lon Nol en 1971. Le gouvernement cambodgien aurait voulu le récupérer en 1994, mais n’avait pas réussi pour des raisons administratives. Pen Sovann, ancien Premier ministre de la RPK, accuse Hun Sen de s’être emparé de 12,4 tonnes d’or et de 2 kg de diamants du trésor national rassemblé du temps des Khmers rouges. Il en aurait pris la majeure partie et partagé 25 kg aux membres du parti.

Bois

Le gouvernement autorise l’abattage de milliers d’arbres sur 46 km de pistes reliant Kompong Thom et Préah Vihéar. La compagnie construisant la route est autorisée à couper les arbres sur une profondeur de 100m des deux côtés, ce qui pourrait aider le gouvernement à recueillir les 900 000 dollars nécessaires à la construction de la route. Certains craignent que la compagnie taïwanaise à qui a été confié le travail, ainsi que les militaires en profitent pour en couper davantage. La Banque Mondiale a établi un rapport catastrophique sur l’exploitation du bois au Cambodge, qui confirme tout ce qui a été avancé jusqu’ici. Sans une intervention immédiate et radicale de la part du gouvernement, dans 5 ans il n’y aura plus de ressources provenant du boisElle propose un plan d’exploitation des forêts. Les deux premiers ministres s’engagent à le respecter. Cependant, durant la première semaine de juin, Global Witness révèle que Or Soeurn, directeur des Forêts a négocié 3 concessions de bois de la province de Koh Kong, d’une superficie de 388 500 hectares à une société d’Etat chinoise. Or Soeurn dément. Le 18 juin, l’association anglaise Global Witness, affirme que 100 000 m3 de bois ont été coupés dans la province de Stung Treng, pour être exportés en Thaïlande par le Laos, représentant une valeur de 50 millions de dollars. Selon Global Witness, 8 500 m3 ont déjà traversé la frontière du Laos au mois de mai, escortés par des militaires. Les autorités laotiennes demandent 50 dollars par m3 comme droit de passage. Le bois serait vendu 280 dollar le m3 à la frontière laotienne et 450 en Thaïlande. Comme par ironie, les convois de bois utilisent la route nationale n° 13, en cours de réparation aux frais de la Banque Mondiale. Du matériel de construction de la route serait d’ailleurs utilisé pour tracer des pistes pour l’exploitation du bois. Ung Huot, premier Premier ministre, demande une enquête à son ministre de l’Agriculture. Le gouvernement thaïlandais promet également de clarifier la situation. Pour sa part, la Banque Mondiale estime que sur les 4 millions de bois coupés en 1997, 90 % l’étaient illégalement.

Aides

Durant le dernière quinzaine de juin, la FAO a débloqué la somme de 350 000 dollars en assistance technique au programme spécial cambodgien pour la sécurité alimentaire : irrigation, (près de 20 000 hectares en 4 provinces) sélection des semences, fertilisation, utilisation de pesticides, gestion du bétail.

 Le 23 avril, le gouvernement a signé un agrément d’un an avec la France, pour une aide de 330 000 dollars, permettant de développer la production du caoutchouc. Deux experts français sont envoyés au Cambodge. Un projet de 4,5 millions de dollars a été interrompu après 4 ans en 1996. Il est à noter que le caoutchouc, jadis principale entrée de devises, a une place très minime dans le budget. Seulement 5 % des ressources générées par le caoutchouc entrent dans les coffres de l’Etat.

L’Institut de des sciences de l’ingénieurerie de Clermont Ferrand (CUST) a fait don de machines-outils datant de 1974-1979 a l’ITC (Institut de Technologie du Cambodge) en remplacement des vieilles machines russes datant de 1964. La livraison des machines a pris deux ans et demi de formalités.

Le 13 mai, la France a passé deux protocoles d’accord d’un montant total de 41,2 millions de francs : l’un pour financer des équipements de l’aéroport de Pochentong. Avec les deux précédents accords de 1995 et 1996, ce projet aura bénéficié d’une somme d’un montant total de 75 millions de francs. L’autre, de 1,2 millions de FF est une assistance technique destinée au ministère des Finances. Durant la dernière semaine de mai, la France a accordé un don de 800 000 dollars pour aider à la mise en place d’un plan cadastral de Phnom Penh.

Le 5 juin, le gouvernement japonais accorde 9 aides d’un montant total de 426 539 dollars pour des projets de construction d’écoles et de centres de santé. Depuis 1991, 112 projets ont été financés par le Japon, pour une somme totale de 5,6 millions de dollars.

Riz

Suite à la vente massive du riz cambodgien empaqueté au Cambodge dans des sacs “products of Thaïland”, à la Thaïlande et au Vietnam, le prix du riz à la consommation à augmenté de 50 % par rapport à l’année dernière, ce qui affecte directement la vie des petites gens, principalement dans les villes. Comme prévu, le gouvernement tend la main aux généreux donateurs étrangers…

Le PAM (Programme Alimentaire Mondial) lance un appel d’un montant de 6,5 millions de dollars pour nourrir les réfugiés cambodgiens de Thaïlande.

Suite à une sécheresse inhabituellement longue, les semis ont été retardés. Une armée de chenilles s’est, de plus, abattue sur les semis et rizières de Kompong Cham.

IV – FAITS DE SOCIETE

Selon une étude financée par le PNUD, 36 % des Cambodgiens vivent sous le seuil de pauvreté. Parmi ces 36%, 2 Cambodgiens sur 10 ne mangent pas à leur faim. La proportion atteint 40 % dans les campagnes, contre 11 % à Phnom Penh, et 30 % dans les autres régions urbaines. Le nombre des enfants par famille a décru, dans toutes les couches sociales, de 5,9 à 4,9. Le nombre des enfants de 0 à 14 ans, est passé de 3,4 à 2,8 par famille. En 1993-4, 39% de la population vivaient sous le seuil de pauvreté. Malgré les milliards de dollars déversés sur le Cambodge, on constate qu’une faible amélioration de la situation, les aides internationales et les ressources nationales étant confisquées par un petit groupe de gens au pouvoir, et retenues spécialement dans la capitale.

637 hectares ont été déminés par la CMAC durant les 5 premiers mois, éliminant 6.280 mines antipersonnelles, 110 mines anti-tank, dans 29 endroits. 393 905 hectares sont enregistrés comme minés. Il faudra environ 20 à 30 ans, au rythme actuel pour déminer l’ensemble du pays. Deux engins ultra sophistiqués, RA-140 DS, fournis par la Finlande, comme partie d’un plan de deux ans, d’un montant de 1,6 millions de dollars, destiné à déminer la province de Kampot, demeurent cependant sur place sans être employés. Ces machines pourraient déminer 15 000 m2 en 5 heures de travail, ce qui correspond au travail de 15 groupes de 29 démineurs travaillant 8 heures chacun.

Enseignement

Le 23 juin, après une dizaine de jours de manifestation, plus de 800 étudiants de la faculté de Droit obtiennent la révocation du doyen de leur faculté et l’annulation du diplôme accordé à Mme Kéa Sahorn, secrétaire d’Etat à l’Education, dans des circonstances plus que douteuses.

Elections obligent, les examens des 22 000 candidats à l’examen de fin du second cycle seront repoussés au 17 août, ceux des 80 000 candidats au brevet de fin de premier cycle sont repoussés au 28 août.

La faculté de Droit et Sciences économiques, rouverte en 1992 grâce aux subsides de la France, accueille aujourd’hui 1902 étudiants, dont 292 filles.