Eglises d'Asie – Chine
L’évêque coadjuteur de Hongkong fait une description sans complaisance des rapports de l’Eglise et de l’Etat en Chine continentale
Publié le 18/03/2010
Pour illustrer le contrôle exercé sur les catholiques, Mgr Zen a décrit les rapports entretenus par la hiérarchie de l’Eglise officielle avec les autorités chinoises. Ces dernières traitent les évêques comme des citoyens de seconde classe, qu’il faut surveiller. Pour illustrer son propos, il a cité le nombre considérable de personnages officiels qui assistaient à son entretien avec un évêque de l’Eglise officielle lors d’une de ses visites en Chine. Leur présence était si encombrante que son hôte, voulant lui confier un secret, fut obligé de l’entraîner dans une chapelle privée de l’évêché, prétextant une visite au Saint Sacrement. A plusieurs reprises dans son interview, le coadjuteur de Hongkong a souligné que l’Eglise officielle est placée directement sous la coupe de l’Association patriotique dont le secrétaire, Liu Bainian, est un laïc. Mgr Zen à déclaré à son sujet: « C’est lui qui fait les évêques, c’est lui le pape! Les évêques lui obéissentSelon les règlements, les nominations d’évêques ont lieu après des élections approuvées ensuite par le Comité permanent de la Conférence épiscopale. Cependant, Mgr Zen a appris d’un des membres de ce Comité, qu’en réalité ces derniers ne se réunissent pas. Ils sont avertis par téléphone du nom et du poste des nouveaux évêques. Ce n’est qu’alors que la réunion du Comité a lieu et qu’il y a une ordination épiscopale.
Tout en étant très attentif à la division entre l’Eglise officielle et l’Eglise clandestine, l’évêque coadjuteur de Hongkong est d’avis qu’il ne faut pas exagérer la distance qui existe entre les deux communautés catholiques. Toutes sortes de nuances doivent être apportées à cette distinction. Il a noté en particulier que les déclarations du pape à ce sujet avaient toujours eu deux dimensions. D’une part, le Saint-Père encourage l’Eglise clandestine mais, par ailleurs, il n’exclut jamais l’Eglise officielle. L’évêque de Hongkong a rappelé que le pape a accordé la légitimité à de nombreux évêques de l’Eglise officielle, ce qui est, en principe, un secret, mais connu de tous, a-t-il ajouté. Par ailleurs, selon les régions de Chine, les situations sont fort différentes. En certains lieux, il existe une Eglise semi-clandestine qui a passé quelques compromis avec les autorités. Il arrive que le clergé s’accommode de cette situation alors que les fidèles la dénoncent. Ce peut être aussi le contraire. Dans d’autres endroits, il n’y a aucun compromis; les catholiques adoptent alors des positions très dures. Dans certaines régions isolées, le clergé sans grande connaissance théologique prend quelquefois une attitude sans nuance vis-à-vis de Rome. Il se montre alors absolument fidèle ou bien, au contraire, il s’oppose.
Mgr Zen a aussi parlé de son expérience d’évêque de Hongkong et du dialogue qu’il essaie de mener avec l’Eglise du continent. Lui aussi n’est pas sans rencontrer de difficultés auprès des autorités. A la fin de l’année 1997, un voyage en Chine continentale qu’il avait projeté de faire pour rendre visite à ses relations dans les divers séminaires où il avait autrefois enseigné lui fut d’abord refusé sous le prétexte que les évêques de Chine étaient occupés par les fêtes de Noël. Deux jours plus tard, une autre raison du refus lui fut donnée : l’élection des présidents de la Conférence des évêques catholiques et de l’Association patriotique des catholiques de Chine (1). Au mois de mars 1998, le voyage que Mgr Zen avait prévu seulement pour la province de Hebei lui fut enfin accordé à condition qu’il aille à Pékin rendre visite aux deux évêques nouvellement nommés à la tête de l’Eglise officielle. Ce n’est donc qu’après avoir salué ces deux personnalités à Pékin, que Mgr Zen put enfin se rendre dans la province de Hebei où il rencontra des fidèles et des évêques de l’Eglise clandestine.
En conclusion, l’évêque coadjuteur a déclaré qu’il ne voyait pas l’avenir immédiat sous un jour trop optimiste. Cependant, il a reconnu que les choses peuvent changer en une nuit, car « les Chinois n’ont jamais peur d’affirmer le contraire de ce qu’ils ont dit la veille! »