Eglises d'Asie

LE POINT SUR LA SITUATION SOCIALE ET POLITIQUE du 1er septembre au 31 octobre 1998

Publié le 18/03/2010




La campagne électorale et les élections du 26 juillet dernier se sont globalement bien passées, même si on a pu relever un très grand nombre de petites fraudes et irrégularités, qui aux yeux d’observateurs sérieux, n’ont pas eu d’incidences décisives sur le choix des députés. La Communauté internationale, y compris les Etats-Unis, les associations de défense des droits de l’homme, ont initialement salué ces élections comme « justes et équitables ».

Le PPC ou Prachéachon (Parti du peuple cambodgien, avec Hun Sen) a remporté 41,42 % des voix, et obtenu 64 sièges sur les 122 qui composent l’Assemblée nationale. Le Funcinpec (Front uni pour un Cambodge neutre, pacifique et coopératif, de Ranariddh) a recueilli 31,70 % des voix, et obtient 43 sièges. Le PSR (Parti de Sam Rainsy), obtient 14,75 des voix et 15 sièges. Si le PPC détient la majorité absolue à l’Assemblée, un malencontreux article de la Constitution de 1993 oblige la formation du gouvernement à la majorité des deux-tiers, donc exige une gouvernement de coalition. Unie, l’opposition aurait été vainqueur. Vaincue, elle tient le vainqueur en otage.

Devant la défaite, les partis de l’opposition soumettent plus de 800 plaintes pour fraudes et irrégularités à l’examen de la Commission nationale des élections (CNE) qui refuse de les prendre en considération. Même refus par le Conseil constitutionnel (CC), instance juridique suprême. L’opposition pose quatre conditions pour négocier avec le Prachéachon : décompte des bulletins de vote, tenue de nouvelles élections dans les zones discutées, vérification du

nombre total des bulletins de vote et reprise de la formule initiale d’attribution des sièges. Après la confrontation juridique, l’opposition opte pour la confrontation populaire en organisant des manifestations, notamment un « sit-in » devant l’Assemblée nationale. Après quatorze jours d’inhabituelle patience, le 8 septembre, le gouvernement utilise la force publique pour disperser les manifestants, avec une relative modération. Durant les jours qui suivent, par contre, plusieurs heurts violents causent des morts et des blessés (voir notre dernière livraison).

L’opposition affirme que la formule d’attribution des sièges de députés a changé au cours du processus électoral, alors qu’elle a été fixée le 29 mai, soit près de 2 mois avant le scrutin, et près d’un mois avant l’ouverture officielle de la campagne électorale. Le 24 mai, Sam Rainsy, sûr de sa victoire, disait d’ailleurs que la question de la formule étant sans importance. Pour le PPC, il n’y a donc pas à négocier sur cette question.

Plus que les fraudes, c’est le climat général dans lequel se sont déroulées les élections qu’il conviendrait d’incriminer : le parti au pouvoir, comme dans tous les pays du monde, a organisé les élections pour les gagner. C’est à l’opposition d’être présente sur le terrain pour défendre ses droits, ce que l’on ne peut faire de l’étranger, ou en s’appuyant sur l’opinion internationale ! L’opposition n’a pas eu un accès équitable aux médias, du moins avant la campagne électorale. La CNE et le CC, dont la majorité des membres sont affiliés au PPC, n’ont pas joué leur rôle de modérateurs, et commis de graves erreurs psychologiques en refusant toute vérification, renforçant les suspicions. Mais les membres nommés par le roi étaient à l’étranger ou boudaient. La tenue d’élections ne suffit pas à installer la démocratie, c’est tout un ensemble de comportements nouveaux que la classe politique doit adopter.

I- VIE POLITIQUE

Répression des manifestations

Le 8 septembre, à 13 heures 30, alors que beaucoup font le sieste, 4 camions bourrés de soldats armés de matraques électriques et de fusils d’assaut, ainsi que 6 camions équipés de canons à eau délogent les manifestants de la « Place de la Démocratie ». L’opération est menée par surprise, alors qu’un membre de l’opposition est en train de négocier la fin de la manifestation avec un responsable du ministère de l’Intérieur, visiblement pas au courant d’ordres secrets donnés par les autorités supérieures. C’est Hok Lundi, directeur général de la police nationale et l’homme des basses besognes du gouvernement, qui mène l’opération, Téa Banh, co-ministre de la Défense ayant refusé de le faire, estimant que ce n’était pas le rôle de l’armée. Quoiqu’en disent Amnesty International et beaucoup d’autres associations de défense des droits de l’homme, le gouvernement a agi avec modération et sans brutalité excessive. On ne déplore qu’un seul blessé léger. Une telle manifestation aurait été beaucoup plus rapidement et violemment réprimée dans le plupart des pays occidentaux. « Hun Sen a voulu montrer que la récréation était finiedit très justement Mu Sochua, porte-parole du Funcinpec.

Par contre, durant les jours qui suivent, les forces de l’ordre réagissent avec beaucoup plus de violence contre des manifestants eux-aussi plus violents, et manipulés par on ne sait trop qui. On a la nette impression que des deux côtés, des provocateurs jouent la politique du pire. Les manifestants communiquent entre eux par talkies-walkies. D’aucuns émettent l’hypothèse que les généraux Sin Sen et Sin Song, anciens ministre et vice-ministre de l’Intérieur, impliqués dans une tentative de coup d’Etat contre Hun Sen en 1994 et récemment amnistiés, seraient derrière les manifestants. Avant les élections, Sin Sen s’était rallié avec grande publicité au PSR, et Sam Rainsy avait menacé d’utiliser les nombreuses relations de Sin Sen dans l’armée et la police pour réclamer justice avec des moyens violents si besoin était. Le gouvernement ne pouvait donc pas laisser faire, il y en allait de la paix intérieure du pays. D’ailleurs, si Ranariddh et Sam Rainsy dénoncent la répression gouvernementale de leur manifestation, ils nient, apparemment avec raison, toute participation dans les manifestations spontanées qui ont suivi.

Plusieurs matins de suite, des centaines de manifestants, la plupart des jeunes et des étudiants, se réunissent devant l’ambassade des Etats-Unis, pays estimé comme seul défenseur des droits de l’homme. (On a subitement oublié les bombardements monstrueux de 1973, le soutien des Etats-Unis aux Khmers rouges en 1979, les 350 assassinats légaux opérés chaque année par le gouvernement des Etats-Unis, l’asphyxie économique des pays qui ne partagent pas les visées politiques des Etats-Unis, etc). Le 9 septembre, les manifestants placent des moines bouddhistes en première ligne, et lancent des pierres sur les forces de police qui ouvrent le feu: un jeune homme est grièvement blessé. Les forces de police perquisitionnent les principales pagodes pour y dénicher des moines « activistes » et contrôlent les entrées et sorties des moines. Le 11, au moins un manifestant est tué, quatre autres blessés. Des contrôles sont rétablis sur toutes les routes pour éviter le transport d’armes vers la capitale. 1 200 policiers contrôlent strictement les entrées et sorties de Phnom Penh.

Aucune mention des manifestations n’est faite aux journaux télévisés ou radiodiffusés. Le 9 septembre, le ministère de l’Information ordonne la fermeture de la seule radio libre « Sambok Khmoum » (Nid d’abeilles) pour avoir diffusé une interview du prince Ranariddh. Plusieurs journaux de l’opposition seront fermés dans les semaines qui suivent. Informations et désinformations sur le nombre des victimes circulent, sans que personne ne puisse avancer des chiffres avec certitude.

Contrairement à ce que nous annoncions dans notre dernière livraison, le 7 septembre, ce n’est pas un moine qui a été tué au Cambodiana, mais un civil. Le moine a été violemment battu à l’extérieur de l’enceinte et est sans doute mort des suites de ses blessures.

Le 10 septembre, une foule forte d’au moins 10 000 personnes, organise une marche spontanée à travers le ville, sans heurt. Le 11 septembre, le PPC organise une contre-manifestation en faisant venir des paysans de la province, armés de bâtons et les poches pleines de pierres. Ils sont payés 20 000 riels (environ 30 FF) et reçoivent 15 kilos de riz, mais ne savent trop ce qu’ils viennent faire. Dans le cortège, sérieusement protégé par des forces de police, certains portent des pistolets, utilisant des talkies-walkies: ce ne peut être que des policiers ou militaires en civils. De temps en temps, ces provocateurs courent après des groupes de badauds et les menacent de leurs armes. Mais le peuple de Phnom Penh, qui soutient globalement l’opposition ne bronche pas, faisant preuve de conscience politique. Le lendemain, même scénario. Le 13 septembre, Khieu Khaharith, porte-parole du gouvernement, reconnaît que l’organisation de ces contre-manifestations est une « idée du PPC, approuvée par d’importants membres du Partien réponse au roi Sihanouk qui a demandé à la police de ne pas utiliser la force contre les manifestants. « Le plus important n’est pas d’entrer en confrontation avec d’autres manifestants, mais de montrer que, nous aussi, nous avons des supportersLe gouvernement est coutumier du fait: il monte une partie de la population contre une autre, comme déjà l’avaient fait en 1967 les sbires de Sihanouk pour réduire la jacquerie de Samlaut. Le Funcinpec demande à ses partisans de cesser toute manifestation. Chéa Sim, président du PPC et président de l’Assemblée nationale, demande lui aussi la cessation des manifestations et des contre-manifestations, et appelle les responsables à la négociation.

Le 11 septembre, de Siemréap, le roi Sihanouk intime aux leaders de l’opposition de reconnaître le résultat des élections, et aux députés élus d’assister à l’ouverture de la séance inaugurale de l’Assemblée nationale, le 24 septembre, faute de quoi ils perdront leur immunité parlementaire, et « il ne pourra rien faire pour les sauver« . Pour sa part, le chef d’Etat-major des FARC (Forces armées royales cambodgiennes) déclare que « l’armée a le devoir de protéger le résultats des électionsOn risque alors un affrontement armé.

Le 14 septembre, pour le huitième jour consécutif, quelques milliers de manifestants envahissent le boulevard Mao Tsé Toung. La police tire en l’air. Vingt-neuf manifestants, dont deux touristes étrangers un peu bizarres, sont arrêtés pour interrogatoire. Huit seront écroués pour port d’armes, les autres relâchés, mais l’effet psychologique est produit. Une voiture du bureau du représentant spécial du secrétaire général de l’ONU qui transportait un blessé est retenue par le ministère de l’Intérieur. 3 personnes arrêtées seront libérées trois jours plus tard.

Dans les jours qui suivent les manifestations, on découvre des corps de jeunes gens torturés, défigurés, les yeux bandés, les mains liées derrière le dos, enterrés à la va-vite ou flottant sur les eaux du Mékong ou des étangs aux environs de Phnom Penh. Certains pensent que ce sont des jeunes gens arrêtés par la police. La police répond que ce sont des voleurs exécutés. La ressemblance dans le processus avec les exécutions sommaires qui ont suivi les événements des 5-6 juillet 1997 est trop frappante pour en exclure à priori la responsabilité du pouvoir. D’ailleurs aucune enquête sérieuse n’a été menée ni pour la première ni la seconde série. Un certain nombre d’étudiants et de moines ont disparu. Même s’il s’agissait de voleurs, la police d’un Etat de droit n’est en aucun cas autorisée à les exécuter sans jugement.

La police se lance dans un certain nombre d’exactions : vol de motos, dont les propriétaires sont soupçonnés, à tort ou à raison, de soutenir les manifestants.

Le matraquage des bonzes par les forces de l’ordre cause le désarroi parmi la population. Cependant certains reprochent aux moines d’enfreindre les lois bouddhiques, surtout celle qui interdit de sortir le soir pendant la période de carême. La police affirme, sans convaincre, que ces bonzes sont de faux moines, portant des tee-shirts sous leur robe. Ce peut-être vrai en tel ou tel cas, mais pas pour l’ensemble. Si les moines ont avant tout un rôle spirituel et ne doivent pas s’immiscer dans les affaires de ce monde, on doit se souvenir qu’ils ont toujours joué un rôle politique : en 1942, ils ont obligé la puissance coloniale à renoncer à la romanisation de la langue khmère. Ils représentent un contre-pouvoir que les dirigeants ont toujours tenté de se concilier. Certes, on peut reprocher le manque de formation religieuse de beaucoup de jeunes moines, manipulés par un moine cambodgien venant des Etats-Unis, ou par d’autres agents occultes. Depuis la fin des manifestations, une centaine de moines ont fui la capitale pour rejoindre leur province natale. Plusieurs sont portés disparus. La police a demandé à chaque pagode de fournir une liste complète de tous ceux qui y résident, bonzes, étudiants, laïcs, et d’indiquer ceux qui ont participé aux manifestations. Le roi Sihanouk demande à Hun Sen d’assouplir sa position concernant les déplacements des moines et d’autoriser « l’entrée et la sortie des bonzes« . Le 22 septembre, une manifestation pacifique d’une vingtaine de bonzes, devant le Palais royal est interdite par la force publique, mais sans violence.

Le 10 septembre, deux corps sont découverts au nord de Pochentong. L’un est reconnu formellement comme celui de Sath Sophéaktra, 19 ans, de l’école Bak Touk.

Le 16 septembre, un rapport établi par Thomas Hammarberg, envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour l’observation des droits de l’homme, fait part de sa « grande préoccupation » concernant l’arrestation et la disparition de manifestants, et affirme que ses services ont découvert 18 corps depuis le 7 septembre, début de la répression. Ce rapport accuse formellement la police pour deux meurtres, celui de Sath Sophéaktra, et celui de deux bonzes. Les autorités gouvernementales se défendent par la négation, comme d’habitude, sans pour autant mener des enquêtes qui pourraient éventuellement les innocenter. Le nombre de corps découverts augmentera de jour en jour. Dans un second rapport rendu public le 24 septembre, le bureau des droits de l’homme de l’ONU fait le point sur 49 investigations concernant des meurtres commis entre le 20 mai et le 20 août: 16 sont apparemment motivés politiquement, 14 autres ne le sont pas. Le 29 octobre le bureau de l’ONU remet un rapport faisant état de 34 morts durant les mois d’août et septembre, incluant les 4 Vietnamiens lynchés par la foule.

La sérieuse association cambodgienne Adhoc a recensé 11 exécutions sommaires commises en août en province. Parmi ces 11 victimes, 2 sont membres du PPC, 2 du PSR. Chaque fois les policiers affirment qu’il s’agit de voleurs.

Le 16 octobre, le gouvernement publiera un livre blanc de 45 pages dans lequel il accusera l’opposition d’être à l’origine des violences. Sam Rainsy dénoncera violemment ce livre blanc.

Des manifestations aux négociations

Le 14 septembre, le vice-ministre thaïlandais des Affaires étrangères offre ses bons offices pour résoudre pacifiquement la crise chez son turbulent voisin: l’opposition donne son accord pour cesser les manifestations, organiser un sommet sans conditions, et convoquer lAssemblée nationale le 24 septembre. Ranariddh lance un nouvel appel à la cessation des manifestations. Cet appel semble entendu.

Le 16 septembre, après une rencontre avec son royal père à Siemréap, Ranariddh affirme « avoir l’honneur, mais non le plaisir« , d’annoncer qu’il ne boycottera pas la première séance de l’Assemblée nationale, le 24 septembre, comme il avait menacé de la faire jusqu’alors. Le lendemain, Sam Rainsy quitte son refuge (le bureau du représentant des droits de l’homme de l’ONU), pour regagner son domicile puis se rendre à Siemréap auprès du roi.

La 17 septembre, le roi invite la nouvelle assemblée à se réunir à Siemréap le 24 septembre et à prêter serment dans le prestigieux cadre d’Angkor Vat, « symbole de la stabilité, de la permanence et de la paix intérieureAuparavant, il invite les trois leaders des partis vainqueurs à un sommet à Siemréap le 22 septembre. La pression internationale et la pression du roi ne laissent apparemment pas de choix à l’opposition qui se doit d’entrer dans un gouvernement de coalition. Mais les intentions des participants semblent irréconciliables: l’opposition entend faire triompher ses deux requêtes: vérification des bulletins et réexamen de la formule d’attribution des sièges. Le PPC ne vise que la formation d’un gouvernement de coalition. Sam Rainsy se considère comme otage. Pour Khieu Khanarith, porte-parole du gouvernement, tout est négociable, excepté la candidature de Hun Sen comme premier ministre et celle de Chéa Sim comme président de l’Assemblée.

Si, officiellement, le sommet de Siemréap du 22 septembre est un succès, « un très bon sommet« , chacun a campé sur ses positions, la seule décision commune étant celle de convoquer l’Assemblée nationale le 24 septembre. « Ne rêvez pas« , dit Hun Sen à l’opposition. Avec ou sans le Funcinpec, il sera premier ministre pour les cinq années à venir. Il menace de faire arrêter plusieurs opposants politiques qui n’auront plus d’immunité parlementaire dès la tenue de la première séance de l’Assemblée nationale. « Si quelqu’un tente d’empêcher le gouvernement actuel de fonctionner, alors il y aura une réaction militaireIl fait une seule concession: celle de faire examiner le nombre des bulletins utilisés et inutilisés lors des élections. (Cette vérification sera opérée par la seule CNE, qui annoncera le 11 octobre la perte de seulement 152 bulletins. Ces résultats seront immédiatement contestés par l’opposition.).

Après la réunion, Sam Rainsy dit avoir été contraint de participer à un gouvernement de coalition, mais « ne peut s’engager personnellement à cautionner une politique destructrice et un système anti-démocratique qui trahit définitivement le peuple« . Il demande de « changer radicalement le système: de passer de la jungle économique à une économie de marché; nous avons besoin, de démanteler la maffia qui détruit l’économie; nous avons besoin que cesse l’impunité, de mettre fin à un Etat terroristeLe Funcinpec demande la présidence de l’Assemblée nationale, puisqu’en 1993, le Funcinpec avait cédé ce poste au PPC vaincu.

Le 24, juste avant la prestation de serment des députés, à 9h 30, Hun Sen est victime d’une tentative d’attentat à la roquette: une roquette B40 passe à quelques mètres de son véhicule, et tue une personne dans une maison voisine. Dans un premier temps, on pense a un faux attentat, comme celui des grenades du 7 septembre, mais force est de constater que c’est un travail de spécialiste, que seule une pluie nocturne a fait échouer. Quatre roquettes étaient reliées entre elles, et devaient causer un hécatombe. On parle alors des troupes de Nhiek Bun Chhay, des Khmers rouges, du service de sécurité lui-même, de membres du PPC. Hok Lundy, directeur de la police nationale, a droit à une réprimande sérieuse pour la négligence du service de sécurité. Hun Sen promet 200 000 dollars à toute personne permettant d’identifier l’auteur ou le commanditaire de l’attentat. Là encore, aucune enquête sérieuse ne sera menée.

Les députés prêtent un serment solennel de servir la nation, dans le cadre d’Angkor Vat. Pour le peuple, c’est très important, car on ne peut se parjurer sans que mort s’ensuive. Pour d’autres, notamment pour Rainsy, ce serment a peu d’importance: « J’estime que ce n’est qu’une formalité. Nous avons rempli les formalitésdit-il.

Dès le lendemain, Kem Sokha, ancien président de la commission des droits de l’homme de l’Assemblée, membre du PLDB (parti de Son Sann), et qui n’a plus d’immunité parlementaire, se voit signifier l’ordre de se présenter aux autorités judiciaires pour clarifier son rôle dans les manifestations et incitations à la haine raciale. Pour Sam Rainsy, le message est clair: « C’est une tentative pour nous effrayer, spécialement le prince Ranariddh et moi-mêmeKem Sokha refuse de se présenter, et dénonce l’encerclement de sa maison par les forces de l’ordre.

Le 10 septembre, Kem Sokha s’était vu interdire de quitter le pays, alors qu’il s’apprêtait à monter en avion. Les policiers affirment agir sur ordre express de Hun Sen. On apprend les jours suivants que Hok Lundi, directeur général de la police, a établi une liste de 53 nouveaux élus et de 15 autres personnalités de l’opposition qui sont interdits de quitter le territoire cambodgien. Parmi eux figurent Ranariddh et Sam Rainsy. Cela correspond aux directives de Hun Sen, données le 7 septembre, après le prétendu attentat à la grenade contre sa résidence. Cette mesure viole l’article 40 de la Constitution concernant la liberté de déplacement. Il semble que cette mesure vise à forcer les nouveaux députés à ne pas boycotter la nouvelle Assemblée nationale comme ils ont menacé de le faire. L’Onu et le gouvernent thaïlandais critiquent publiquement la décision gouvernementale qui, selon eux, pourrait avoir des répercussions fâcheuses pour le pays. Le gouvernement se défend tant bien que mal en affirmant que la mesure n’est que temporaire et ne vise que les personnes impliquées dans les manifestations et négociations. Le 21 septembre, Mam Sonando, propriétaire de la radio Sambok Khmoun se voit refouler lui aussi à Pochentong. Le PPC fait savoir que la mesure sera levée si l’opposition accepte de former un gouvernement de coalition. Effectivement, après la réunion de l’Assemblée nationale à Siemréap, le 24 septembre, le gouvernement autorise la sortie du territoire de tous les nouveaux parlementaires qui le désirent. Ranariddh, Sam Rainsy et son épouse partent immédiatement servir le peuple à l’étranger. « Je n’ai plus rien à faire à Siemréap« , dit Ranariddh !

Cette mesure vexatoire d’interdire la sortie du territoire aux députés avant la tenue de la première réunion de l’Assemblée peut se comprendre, vue l’immaturité politique de la plupart des députés. Suivie de la citation en justice de Kem Sokha, elle a un effet psychologique catastrophique, justifiant la position des membres de l’opposition qui refuseront d’être des « otages » et de négocier sous la contrainte.

Durant la première quinzaine d’octobre, 16 députés, dont les 15 du PSR adresseront une pétition pour défendre Kem Sokha : les faits reprochés à l’intéressé ont été commis alors qu’il jouissait de l’immunité parlementaire. Il n’est donc pas passible de condamnation. Le Conseil constitutionnel sollicité pour trancher l’affaire, s’avouera non compétent.

Le 29 septembre, une délégation du Funcinpec conduite par Tol Lah rencontre une délégation du PPC. Le PSR n’y est pas invité, mais le Funcinpec impose la délégation du PSR. Apparemment rien de positif ne sort de la réunion. Il semble que le PPC tente d’acheter les 17 parlementaires qui lui manquent pour arriver à la majorité des deux tiers : 80 000 dollars par personne, mais la tentative échoue. Dans une attitude illogique pour des occidentaux, les deux partis de l’opposition remettent sans cesse en question le résultat des élections, alors qu’ils ont accepté de participer à la première séance de l’Assemblée nationale et prêté serment, et donc implicitement reconnu ce résultat des élections.

Dans un geste de bonne volonté, Hun Sen demande l’amnistie pour Srun Vong Vannak, responsable de la sécurité du Parti de la Nation khmère (qui deviendra le PSR), condamné en septembre 1977 à 13 ans de prison, accusé faussement d’avoir été le commanditaire du meurtre de Kov Samuth, beau-frère de Hun Sen. Il est libéré le 30 septembre.

Comme pour forcer les trois parties à s’entendre, Sihanouk annonce qu’il compte se rendre en Chine pour traitement médical. Mais en ce cas, personne ne peut assurer la position de chef d’Etat par intérim. Le PPC qui ne sait plus comment agir avec l’opposition fait le siège du souverain pour le prier d’intervenir. La communauté internationale le pousse également en ce sens. Le 30 septembre, le roi accepte finalement de venir à Phnom Penh pour tenter de jouer le rôle d’arbitre que lui confère la Constitution. Ce séjour à Phnom Penh semble être un désavoeu des pratiques de l’opposition, qui ne se prive pas de clamer haut et fort, mais à tort, que le roi est pris en otage par le gouvernement.

Sam Rainsy est aux Etats-Unis où il demande que soit refusées toute aide et reconnaissance au gouvernement cambodgien alors que « personne ne connaît le résultat des élections« . Le 3 octobre, il n’est toutefois pas autorisé à s’adresser au sous-comité du sénat pour l’Asie-Pacifique. Ce même 3 octobre, Sven Linder, chef du groupe des observateurs européens, donne un avis final sur son travail : « Les élections ont été libres et équitables, et reflètent d’une façon crédible la volonté du peuple cambodgienIl regrette que la CNE et le CC n’aient pas examiné les plaintes de l’opposition, mais reproche également à l’opposition d’en avoir soumis un trop grand nombre, sans choisir celles qui étaient essentielles. Quant à « la formule d’attribution des sièges », c’est un problème de règlement interne cambodgien, sur lequel il n’a rien à déclarer, sinon qu’elle devrait figurer dans la loi électorale plutôt que laissée à la compétence de la seule CNE, afin « d’éviter d’inutiles controverses« .

Le 5 octobre, une seconde réunion tripartite de groupes de travail ne permet pas de débloquer la situation: l’opposition en revient toujours à ses questions. Le PPC accepte que l’Assemblée nationale examine la question de la formule d’attribution des sièges, mais le Funcinpec refuse toute réunion de l’Assemblée avant que la question ne soit réglée. Le Funcinpec exige la présidence de l’Assemblée, les deux postes de vice-président étant accordés au PPC et à Sam Rainsy. Il exige la présidence de 4 commissions parlementaires sur les 9, et l’attribution d’une au PSR. Le PPC ne veut céder que la vice-présidence de l’Assemblée, et 4 présidences de commission au Funcinpec, rien à Sam Rainsy. Par la suite, le PPC envisagera une double présidence de l’Assemblée.

Les interférences extérieures, notamment des Etats-Unis où se trouve Sam Rainsy, ne facilitent pas les négociations. Au début du mois de septembre, Dana Rohrabacher, député de Long Beach où réside une importante communauté de réfugiés cambodgiens, et qui doit se présenter devant les électeurs au mois de novembre prochain, propose au Congrès de voter une motion citant Hun Sen à comparaître devant un tribunal international pour crimes contre l’humanité, à l’instar de Pol Pot. Deux universitaires américains, spécialistes des Khmers rouges, Steve Heder et Craig Etcheson, estiment cette plainte injustifiée. Ce même Dana Rorhabacher écrit une lettre au roi Sihanouk le mettant en garde de ne pas forcer l’opposition à entrer dans un gouvernement da coalition. Il en écrit une autre à Madeleine Albright affirmant que le roi a remis son voyage en Chine sur pression de Hun Sen qui veut l’obliger à forcer l’opposition à former un gouvcernement de coalition. « C’est absolument fauxécrit le roi, le 6 octobre. Si le département d’Etat exige une enquête sur les violations des droits de l’homme à Phnom Penh, elle ne soutient pas la résolution 553 qu’a réussi à faire adopter Rorhabacher demandant à ce que Hun Sen passe devant un tribunal international. Dana Rorhbacher s’en prend alors au Congrès et demande à Hun Sen de démanteler ses forces privées de sécurité et de limoger Hok Lundy, du « brutal ministère de l’Intérieur« .

Le 30 septembre, John McCain et John Kerry, sénateurs américains, écrivent une lettre à Hun Sen pour exprimer leurs préoccupations devant la violence qui a suivi les élections de juillet. Hun Sen leur répond dans une lettre de quatre pages et accuse l’opposition d’avoir été à l’origine des violences par leur appels racistes et les appels à l’action militaire.

Le 2 octobre, Stanley Roth, vice-secrétaire d’Etat pour l’Asie de l’Est et le Pacifique, déclare que les Etats-Unis s’opposeront à l’attribution du siège de l’ONU au Cambodge et la reprise de l’aide tant qu’il n’y aura pas de gouvernement formé au Cambodge. qui inclura l’opposition avec un réel pouvoir. L’aide non humanitaire des Etats-Unis, suspendue après les événements de 1997 s’élevait à 30 millions de dollars. Les Etats-Unis exercent un contrôle de fait sur le FMI (Fonds Monétaire International) et la Banque mondiale.

A la fin du mois d’octobre, on apprend que, le 11 septembre, Sam Rainsy et Ranariddh ont écrit une lettre à Jesse Helms, président de la commission sénatoriale en charge des Affaires étrangères des Etats-Unis pour empêcher la nomination de Kent Wiedemann, en poste en Birmanie et pressenti pour remplacer l’ambassadeur Kenneth Quinn à Phnom Penh, comme étant « un moins bon soutien à la démocratie au CambodgeLe département d’Etat se dit surpris de la démarche. L’opposition cambodgienne demande en outre, que le siège demeure vacant, pour signifier à Hun Sen « qu’il n’y a pas de récompense pour la corruption, la violence et la manipulation des électionsL’opposition obtient le changement de nomination, mais pas que le poste reste vacant.

Le 7 octobre, Hun Sen annonce que le gouvernement continuera son travail jusqu’à la formation d’un gouvernement de coalition, même si Sam Rainsy le traite, à tort, d’illégal. 32 des 58 députés de l’opposition (15 du PSR et 17 du Funcinpec) sont partis à l’étranger. Visiblement, ils tiennent à se soustraire au conseil du roi. « Etre élu à l’Assemblée et refuser d’y siéger n’a pas de sens« , fait remarquer, non sans raison, le PPC. Le PPC envisage de changer la Constitution pour gérer seul le pays, mais si le roi n’est pas favorable à cette modification, il ne s’opposera pas à un effort légal dans ce sens. Le 8 octobre, Chéa Sim, président du PPC et ex-président de l’Assemblée nationale, lance un appel au retour de députés ainsi qu’à la tenue d’une réunion au sommet des trois responsables de partis, parallèlement à la tenue des réunions des groupes de travail tripartites. Mais l’opposition refuse tout sommet qui ne se passera pas à l’étranger: à Bangkok, à Tokyo ou à Pékin : « A l’intérieur du Cambodge on ne pourrait garantir la sécurité ni assurer une atmosphère neutredit Ranaridddh. Chéa Sim pense qu’il n’est plus besoin d’internationaliser le problème cambodgien. « Le Cambodge est un pays indépendant avec une souveraineté territoriale, et ne se trouve sous la domination d’aucun pays tiersLa diplomatie française est également de cet avis. Plus que des aménagements précis, c’est avant tout, semble-t-il, la volonté de négocier qui fait défaut de part et d’autre.

Sam Rainsy écrit à la Banque mondiale de considérer comme « illégale » toute demande en provenance du gouvernement de Phnom Penh. Alors que les parlementaires cambodgiens se disputent, le 20 octobre, la commission d’accréditation de statut à l’assemblée générale des Nations Unies laisse le siège vacant, même si la porte reste ouverte en cas de formation d’un gouvernement. Aucune demande en provenance de Phnom Penh ne lui a été adressée.

Le 22 octobre, dans une cérémonie célébrant le septième anniversaire des accords de Paris, Hun Sen déclare ne plus vouloir être l’otage de l’opposition. Il dresse un véritable programme de « gouvernement orienté vers l’économie, d’unité nationale, plus efficace et plus fortIl considère que les blocages actuels sont ceux « d’opportunistes et d’extrémistes, sans racines dans le peuple cambodgien, en collusion avec les Khmers rougesIl annonce sept mesures: continuation du plan de sécurité en 8 points déclenché en juillet 1997, poursuite du travail des institutions à tous les niveaux, mise en place de mesures pour lutter contre la corruption, lancement d’une nouvelle politique de l’eau, d’une politique forestière avec la révision de toutes les concessions, mise en oeuvre d’une politique de transparence sur les taxes et la politique fiscale, réforme du système judiciaire. Il ajoute qu’un tel plan ne peut être efficace qu’avec le renforcement et la défense des droits de l’homme. Pour lui, il n’est pas besoin d’un autre sommet que celui du 22 septembre à Siemréap. Il ne fait donc aucune concession à l’opposition. Ce plan est très beau, trop beau, disent certains diplomates.

Le 24 octobre, le roi Sihanouk annonce qu’il partira à Pékin le 14 novembre, mais qu’il accepterait de présider un sommet des trois chefs de partis à Siemréap ou à Phnom Penh, à condition que ce sommet porte des fruits. Pour tenter de débloquer la situation, Hun Sen propose d’accorder à Ranariddh le poste de « conseiller

suprême du gouvernement avec rang de premier ministre » ou celui de « co-président de l’Assemblée nationale« . Ranariddh refuse, car ce serait anti-constitutinnel. Le secrétaire d’Etat pour les Affaires étrangères japonais, Nobutaka Machimura, en visite officielle au Cambodge s’étonne de ce que les leaders de l’opposition restent à l’extérieur du pays : « Ils ont l’obligation de revenir« .

Le 26 octobre, Ranariddh et Sam Rainsy écrivent une lettre à la Banque asiatique du développement de refuser tout don et prêt au Cambodge jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement. En novembre, en effet, la BAD doit accorder un prêt de 110 millions pour la construction de routes longtemps attendue. « Cet acte montre une absence de moralité et d’amour de la nationcommente le porte-parole du gouvernement. Ce même jour, la BAD débloquait pourtant un prêt de 976 000 dollars pour un projet d’assistance technique au secteur forestier. Deux jours plus tard, l’Union européenne annonce qu’elle reconduit ses deux programmes, le Pasec et le Prasac, pour une durée de quatre ans. Cette aide s’élève à 55 millions de dollars.

Le 28 octobre, Chéa Sim, président du PPC, dans un communiqué de trois pages fait des propositions de négociations au seul Funcinpec, mais refuse toute remise en cause des résultats des élections. Le PPC propose un sommet, plutôt que des groupes de travail. « Chéa Sim saupoudre de sucre la pilule de poison que Hun Sen demande à l’opposition d’avalerréagit aussitôt Sam Rainsy. Les royalistes acceptent de négocier, mais demandent au préalable que les autorités fassent une promesse par écrit, contre-signée par le roi, assurant que les élus de l’opposition seront libres de leurs mouvements, y compris de quitter le territoire. Ils dressent une liste de sujets généraux à aborder pour rétablir la confiance et comme lignes d’action d’un gouvernement. Ranariddh préfère être président de l’Assemblée nationale et demander à Chéa Sim d’être conseiller suprême du gouvernement : « Dans la mesure où le PPC contrôle l’exécutif, nous souhaiterions avoir le législatif. Il vaut mieux négocier pendant trois mois et avoir une coalition qui dure cinq ans, plutôt que de négocier pendant trois semaines une coalition qui ne durerait que trois moisdit le prince.

Depuis le 30 octobre, ce sont les fêtes de l’anniversaire du roi, puis les trois jours de la fête des eaux. La vie s’arrête brusquement au Cambodge. Malgré la misère, des millions de provinciaux envahissent Phnom Penh. La vie politique des grands n’intéresse finalement qu’un petit nombre de nantis. La politique n’est pas encore l’affaire du peuple !

II- VIE ECONOMIQUE

Le retard dans la formation d’un gouvernement issu du scrutin du 26 juillet, fait craindre à beaucoup d’investisseurs une instabilité politique peu favorable aux affaires. En plus de la crise monétaire asiatique, ce facteur joue sur la détérioration progressive de l’économie cambodgienne.

Une étude menée par le CDRI (Institut pour le développement des ressources du Cambodge), estime que les ventes de produits alimentaires sont en baisse de 41% depuis les élections. Les organisateurs de voyages et les hôtels de Siemréap sont confrontés à une baisse de 50%. La filière du bois ne fonctionne pas à plein régime à cause de la baisse de la demande due à la crise monétaire régionale. Seule l’industrie du textile n’est pas concernée par la crise, et a exporté pour 140,5 millions de dollars de marchandises durant les six premiers mois de l’année.

Cependant, plusieurs projets d’investissement d’une valeur totale de 351 millions de dollars ont été signés durant les mois d’août et de septembre, dont l’un de 215 million pour la zone industrielle de Sihanoukville, par une société taïwanaise. 2 usines de cigarettes, 16 usines de confection (pour une valeur de 28 millions). Sur 33 projets, 19 sont signés par des Chinois de Chine, de Hongkong ou de Taïwan. On compte plus de 100 entreprises chinoises de Chine continentale au Cambodge.

Le Cambodge devra attendre au moins trois ans avant que le Japon n’investisse au Cambodge. Les autres pays du sud-est asiatique sont devenus plus attirants en terme d’infrastructures, de personnel qualifié, de ressources naturelles, de main d’oeuvre guère plus chère depuis la chute des monnaies. Le Japon a investi seulement 11,8 millions de dollars de 1995 à 1997, soit 1% des investissements directs du Cambodge.

Le 16 septembre, est inaugurée officiellement une mission d’étude australienne pour la recherche de gisements d’hydrocarbures dans le golfe de Thaïlande, d’un coût de 4,5 millions de dollars.

Mong Rethy, homme d’affaires proche de Hun Sen, investit plusieurs millions de dollars dans un projet de mine de charbon, située à Préah Vihéar, près de la frontière thaïlandaise. Cette mine avait été découverte par les Français durant les années 50, puis par les Chinois durant les années 60.

Le 28 octobre, le Conseil des ministre approuve une loi concernant les titres de propriété et la légalisation des concessions aux sociétés étrangères. C’est une révision de la loi de 1992 exigée par la BAD pour l’obtention de la seconde part d’un prêt de 30 millions de dollars au ministère de l’Agriculture. Seulement 4 % des terres sont mappés. Le projet de mapper les terrains s’étendra sur plus de 10 ans.

Plusieurs banques thaïlandaises ferment, comme la Siam City Bank, le 1er octobre. D’autres diminuent leur personnel, comme la Bangkok Bank, la Pacific Commercial Bank, Lippo Bank, en raison de la crise monétaire interne dans leurs propres pays, et devant l’absence de perspectives éconiques au Cambodge.

Le gouvernement allemand verse la somme de 2,2 millions de dollars pour un projet d’éducation rurale. L’Union Européenne prolonge pour trois ans son aide de 55 millions.

Bois

Le 11 octobre, le ministre de l’Agriculture interdit tout transport de bois sur tout le territoire cambodgien. Les officiels cambodgiens parlent de « pillage frénétique » des forêts depuis le début de la campagne électorale, par des responsables locaux, civils ou militaires, sachant qu’il seront sans doute remplacés après le scrutin.

III- DIVERS

Social

Avec la crise politique, un certain nombre d’employeurs en profitent pour exploiter leur personnel. Le 10 septembre, 200 ouvrières de l’usine singapourienne Courts, manifestent : elles ne sont pas payées depuis 48 jours. « Nous travaillons 10 heures par jour, parfois autant la nuit, sans obtenir de prime« .

Rémi Aufrère, de Force Ouvrière, se rend au Cambodge pour faire le point sur la situation sociale. Il a fait reconnaître deux représentants du SIORC (Syndicat Indépendant des Ouvriers du Royaume du Cambodge), lancé par Ou Mary, aidée par Sam Rainsy, comme observateurs officiels à la conférence de l’OIT (Office International du Travail) à Genève, et entraîné ipso facto la reconnaissance internationale du syndical.

Selon le répertoire du Programme pour le développement humain de l’ONU, le Cambodge occupe la 140ème place dans la liste des 174 pays. L’an dernier, il était à la 153ème place. L’espérance de vie y est de 52,9, soit 10 % de moins que la moyenne générale, les adultes sont alphabétisés à 65 %, 47 % des Cambodgiens ont accès aux services de santé ; 40 % des enfants sont mal nourris, 49,3 des enfants de moins de cinq ans sont d’un poids insuffisant ; 56,1 % d’entre eux souffrent d’un retard de croissance. Le fossé entre riches et pauvres s’est creusé: 20% de la population consomment 16 fois plus que les 20% plus pauvres. 40 % des Cambodgiens vivent au-dessous du niveau de pauvreté.

La famine règne dans plusieurs provinces cambodgiennes. La sécheresse inhabituelle est l’une des raisons de la pénurie. Le riz cambodgien a été vendu à bas prix à la Thaïlande et au Vietnam par l’administration, lors de la récolte. Le PAM (Programme alimentaire mondial) a distribué du riz a plus d’un million de personnes (soit à 10% de la population. Ce qui manque n’est pas à proprement parler le riz, mais l’argent pour l’acheter. Le roi Sihanouk organise plusieurs donations de riz devant le palais royal pour les pauvres, mais bientôt ce sont des villages entiers qui viennent pour bénéficier de ces dons. Il demande « aux grands et aux puissants » d’aider les pauvres. On signale un père de famille qui a assasssiné son dernier né, ne pouvant pas le nourrir. D’autres familles vendent leurs enfants pour se nourrir.

Le 21 octobre, le Japon fait un don de 16 532 tonnes de riz au PAM pour nourrir les populations démunies.

250 000 personnes profiteront de ces aides distribuées sur 200 sites.

En dépit de la sécheresse, de plusieurs invasions de chenilles, de rats, d’insectes divers, le ministère de l’Agriculture prévoit une récolte excédentaire de 65 000 tonnes de riz.

L’USAID accorde 500 000 dollars pour un programme d’aide aux victimes de guerre pendant trois ans.

Le 16 octobre, la FAO accorde 261 000 dollars pour des projets agricoles. Le 20 octobre, le gouvernement anglais accorde une aide de 748 000 dollars au PNUD pour améliorer la vie des pauvres à Phnom Penh.

Le Royaume Uni accorde 721 600 dollars pour une extension de 12 mois du « programme de développement de la capitale ».

Santé

Le 11 septembre, le gouvernement allemand fait un don de 86 000 dollars pour combattre l’épidémie de dengue qui s’est abattue sur le pays. 9 000 enfants ont été atteints par la maladie depuis le mois de janvier, 250 en sont morts.

Le 21 octobre, le gouvernement de l’Inde accorde une aide de 1 904 kilos de médicaments, d’une valeur globale de 15 000 dollars pour soigner les pauvres en province.

Sécurité

Le 15 septembre, un officier des FARC annonce que 200 soldats khmers rouges et leurs familles ont déserté leurs campements situés le long de la frontière thaïlandaise, pour rejoindre Anlong Veng qu’ils avaient quitté après la défaite d’avril dernier. Le 11 septembre, Tep Khunnal et Khan Soeun, hauts dirigeants khmers rouges, ainsi que Méa Som, seconde épouse de Pol Pot, désertent à leur tour. Le 7 octobre, on annonce qu’environ 170 soldats, dont certains gardes du corps de Ta Mok ont déserté.

Le 24 octobre on apprend que des forces anti-gouvernementales ont pris cinq villages dans le nord du pays, proches de la frontière thaïlandaise.

8 177 réfugiés sont rentrés de Thaïlande, dont 4 967 en provenance de Surin, 3 210 de Trat. Ils seraient encore 37

566, dont 7 533 dans la région de Trat et 14 812 dans la région de Si Sa Ket.

Le 29 septembre, le gouvernement allemand accorde un don de 700 000 dollars à le CMAC (Centre d’Action contre les mines). Le 11 octobre, les Etats-Unis accordent une subvention de 150 000 dollars à l’association britanique Hallo Trust pour le déminage de la région d’Anlong Veng. Du 26 au 28 octobre, le CMAC organise un séminaire sur les mines à Phnom Penh qui regroupe plus de 200 participants venant de 29 pays, et qui a coûté la modique somme de 300 000 dollars, donnés par le Japon à cet effet, soit le coût de 12 démineurs pendant 1 an. Le Japon a accordé une aide totale de 6,9 millions de dollars depuis 1992, et a contribué pour 900 000 dollars aux opérations de déminage cette année.

Pour lutter contre la criminalité urbaine, la municipalité de Phnom Penh décide de procéder à un nouveau recensement des familles, à une vérification de ports d’armes et au contrôle de véhicules. Une opération de rachat des armes de guerre est lancée.

Divers

La communauté chinoise du Cambodge a récolté la somme de 88 771 dollars pour les victimes des inondations en Chine.

Une trentaine d’étudiants pourront bénéficier de bourses d’études pour la Russie. Depuis 1996, le gouvernement russe a offert 100 bourses, dont 58 en 1997. Depuis 1992, la Russie a déboursé 11,3 millions de dollars dans ce programme.

Une nouvelle loterie est lancée au Cambodge par une société canadienne qui y a investi 800 000 dollars sur 5 ans.