Eglises d'Asie

Des enfants soldats faits prisonniers racontent comment ils ont été enrôlés de force par les Tigres tamouls

Publié le 18/03/2010




Ils sont 16 adolescents alignés devant la caméra, garçons et filles. Certains semblent démoralisés, d’autres ont des regards stoïques ou même dénués d’expression. Leurs cous qui étaient ornés d’une capsule de cyanure sont maintenant nus. Les forces armées srilankaises ont présenté récemment à une conférence de presse, 12 garçons et 4 filles, âgés de 12 à 17 ans, anciens membres des brigades d’enfants des Tigres de la libération du Tamil Eelam (LTTE). Les LTTE combattent depuis 15 ans pour l’autonomie des Tamouls du nord et de l’est du Sri Lanka. “C’est la première fois qu’un nombre aussi important de membres des LTTE se rendent ensembleexplique le général de brigade Sunil Tennakoon. Dix autres qui se sont rendus eux aussi au cours des combats du 29 septembre, à Mankulum, au nord-est du Sri Lanka, sont toujours hospitalisés.

Les enfants ont raconté comment ils avaient été recrutés pour combattre dans cette guerre ethnique qui oppose les Tamouls aux Cingalais, une guerre qu’ils disent ne pas comprendre. Le garçon de 13 ans, originaire de Mulliavallevu, explique qu’il vivait avec sa grand-mère quand il a été pris par les LTTE sur le chemin de l’école. Quand ils étaient venus à notre école, ils nous avaient parlé, disant que nous avions à sacrifier nos vies pour l’Eelam, mais nous n’avons jamais voulu les écouter. Nous ne savions pas ce qu’ils disaient ni pourquoi ils voulaient se battre. J’ai crié de ne pas me prendre de force, mais j’étais tout seuldit-il. Il n’avait jamais porté d’arme. On l’entraînait au tir de mortier.

Une fille de 17 ans, de Pallai, raconte qu’elle allait acheter des livres quand elle a rencontré des membres des LTTE qui distribuaient des tracts de propagande. Je suis rentrée à la maison sans les écouter. Le lendemain ils sont venus chez nous et quand j’ai refusé d’aller avec eux, ils m’ont prise de force“. Elle dit qu’elles étaient 150 filles au camp. Les enfants racontent que malgré leur entraînement au maniement des armes, ils n’ont jamais tué personne. Ils disent aussi qu’ils n’avaient jamais vu de Cingalais auparavant. Nous n’avons jamais vu un groupe de Cingalais avant; nous les voyons ici pour la première foisprécise l’un d’entre eux. On nous a dit que les Cingalais étaient nos ennemis et que notre devoir était de les tuer“.

Cependant, les enfants ont avoué que c’était le désir de vivre qui comptait le plus pour eux. Nous avons vu les membres de notre groupe partir devant et tomber en tirant avec leurs armes“, raconte l’un d’eux. Nous étions la ligne de défense. Quand nous avons vu les autres mourir, notre désir de vivre était grand“. Nous avons crié que nous voulions nous rendre, mais comme on devait continuer à se battre, personne ne nous entendait“, continue un autre. Nous sommes descendus dans l’abri et à l’aube nous avons été vers l’armée avec nos mains levées“.

Les enfants disent qu’ils veulent vivre en paix et continuer à étudier. La jeune fille de 17 ans espère devenir médecin. Tennakoon, le porte parole des militaires, a promis de tout faire pour la réinsertion des enfants. Cependant, demeurent les problèmes personnels et familiaux. Nous ne pouvons pas rentrer au villageexplique l’un des enfants. Notre vie y est menacée parce que nous avons refusé les ordres des LTTE d’avaler du cyanure plutôt que de nous rendre aux forces armées“. Et la jeune fille de 17 ans d’ajouter : Si je ne rejoins pas les LTTE, ma famille en subira les conséquences“. Les choses vont mal tourner quand les LTTE sauront que nous nous sommes rendus volontairement“. J’ai peur de penser à ce qui pourrait arriver à tous ceux qui sont chez nous“.