Eglises d'Asie

LA FORMATION DES JEUNES PRETRES CHINOIS

Publié le 18/03/2010




Le nombre de prêtres ordonnés en Chine croît régulièrement. Le programme de formation commencé dans les premières années 80 est en train de porter aujourd’hui ses fruits. Cependant, le nombre et la qualité des prêtres ne peut pas encore satisfaire tous les besoins des fidèles, spécialement parce qu’un seul prêtre doit desservir plusieurs églises. Malgré tout, comme les jeunes prêtres assument les services pastoraux de base, le grave manque de prêtres qui prévalait à la fin de la Révolution culturelle a été partiellement comblé. Cependant, avec le nombre de nouveaux prêtres qui entrent dans le ministère, le nombre des problèmes qui viennent à la surface augmente aussi. Il y a pour cela plusieurs raisons, mais la formation sacerdotale est certainement la principale. Ceci n’est pas pour amoindrir la contribution qu’ont apportée et continuent d’apporter les nouveaux prêtres à l’Eglise, mais ceci demande des solutions à présenter aux autorités ecclésiastiques pour aider à améliorer la situation. Les jeunes prêtres ont aujourd’hui besoin d’une formation additionnelle.

Une formation pré-Vatican II

La plus grande partie de la formation qu’ont reçue les jeunes prêtres est basée sur une théologie de type pré-Vatican II. Le Concile était déjà entré dans sa seconde année (1966) quand la Révolution culturelle commença en Chine. Toutes les activités de l’Eglise cessèrent complètement. Les jeunes prêtres qui vinrent après la Révolution reçurent les premiers éléments de la foi de leurs parents à l’intérieur de leurs familles. Leur foi fervente était fondée sur une théologie pré-Vatican II. Après la Révolution culturelle, les vieux prêtres revinrent de prison ou des camps de travail et entreprirent le lourd travail de former la génération suivante de prêtres. Ces vieux prêtres transmirent instinctivement ce qu’ils avaient eux-mêmes reçu. Tout le monde reconnaissait leurs souffrances passées et les sacrifices qu’ils avaient endurés. Néanmoins, toute leur formation était aussi de type pré-Vatican II. Beaucoup de vieux prêtres avaient peut-être une certaine connaissance de Vatican II, et ils firent de leur mieux pour introduire sa théologie et ses méthodes, mais c’étaient de bonnes intentions qu’ils n’avaient pas les moyens de réaliser. Après 1986 ou 1987, quelques prêtres nouvellement ordonnés commencèrent à travailler comme formateurs. Ces nouveaux enseignants transmirent à leurs étudiants ce qu’ils avaient eux-mêmes reçu de leurs maîtres. Naturellement, leur théologie et leurs méthodes étaient aussi pré-Vatican II. Après 1986 et 1987, quelques professeurs de séminaire venant de Hongkong, Taiwan et d’autres lieux purent entrer en Chine continentale et donner des cours, mais ils ne restaient que peu de temps. Bien qu’ils aient introduit un esprit post-Vatican II, la formation générale restait de type pré-Vatican II.

Le laïcat a pris un rôle très important dans l’Eglise actuelle, et le clergé n’est qu’un des éléments de l’Eglise mais sa fonction reste irremplaçable. Le Concile de Trente, par sa réforme du clergé, changea la face de l’Eglise. Pour mettre en oeuvre son désir de réformer l’Eglise, son esprit et son enseignement, Vatican II s’appuie sur le clergé pour jouer un rôle important. La formation des jeunes prêtres en Chine dans l’esprit de Vatican II est par conséquent cruciale.

Le besoin urgent de formation

Après la Révolution culturelle, les vieux prêtres sortis des prisons ou des camps de travail retournèrent à leurs anciens postes. A cause des restrictions apportées par la Révolution culturelle sur leurs activités pendant une période de vingt ans, ces prêtres n’avaient pas de successeurs. De plus, le nombre de ces vieux prêtres était insuffisant pour faire face aux besoins pastoraux des fidèles au cours des années qui suivirent la Révolution culturelle. Beaucoup se rendirent compte du sérieux de la situation et la formation de leurs successeurs commença graduellement à prendre forme. Cependant, cette formation fut souvent coupée court par les besoins urgents, les demandes de temps et les ressources limitées. Pour certains, la formation dura seulement deux ans, pour d’autres trois ou quatre ans. Mais d’autres purent compléter les six années de formation demandées par la loi de l’Eglise.

La loi de l’Eglise accorde aux évêques locaux le droit de réduire à quatre les six années normales de formation lorsque des besoins urgents le demandent, mais la situation en Chine semble demander quelque chose de plus. D’abord, la plupart des jeunes qui désirent devenir prêtres sont nés juste avant ou durant la Révolution culturelle. Puisque toutes les activités de l’Eglise furent empêchées durant cette période, on peut deviner sans peine que l’éducation catholique et la compréhension de la foi données en ce temps-là étaient terriblement inadéquates. Naturellement, ceci ne met pas en doute la ferveur ou l’intensité de la foi de ces jeunes gens. Leur constance est évidente. Cependant, la ferveur ou la constance dans la foi ne peuvent remplacer la connaissance et la compréhension de la théologie et des sciences sacrées que doit posséder un prêtre pour être un leader dans l’Eglise d’aujourd’hui. Donc, une formation de quatre ans pour ces jeunes gens, fermes dans la foi, mais de connaissances insuffisantes, n’est pas du tout suffisante. Ceci est encore plus vrai pour ceux qui reçurent moins de quatre ans de formation. Le nombre de professeurs et leurs qualifications sont aussi limités ; les livres sur la formation des prêtres ainsi que les autres documents sont rares. Bien que quelques besoins urgents dans la formation commencent aujourd’hui à être remplis, la formation cléricale en général est encore déficiente et il y a un besoin évident d’amélioration.

Les demandes de l’Eglise

L’Eglise demande que la formation cléricale soit continue. Ceci est un mandat même lorsque la formation de base a lieu dans des conditions idéales. Chaque prêtre doit avoir conscience que cette formation continue fait partie intégrante de sa vie, quels que soient son âge, les circonstances ou les conditions de travail. En plus, cette formation doit être étendue et inclure la théologie et les autres sciences. Une formation continue correspond aux besoins personnels de chacun et en même temps elle répond aux exigences de l’Eglise.

Le futur de l’Eglise chinoise

Un sérieux écart de générations existe entre les prêtres en Chine. Parce que la formation cléricale n’était pas possible durant cette période, il n’y a presque pas de prêtres entre les âges de quarante à soixante ans. En d’autres termes, il n’y a pas de groupe de prêtres d’âge moyen. Ce facteur peut produire beaucoup de problèmes pour le futur de l’Eglise chinoise. Cela manifeste aussi le problème d’une meilleure formation sacerdotale.

Cette rareté de prêtres d’âge moyen place une très lourde responsabilité sur les épaules des jeunes prêtres. Ils vont devenir la force motrice qui renouvellera l’Eglise dans l’esprit de Vatican II. Il est donc impératif que leur éducation soit conduite dans l’esprit du Concile.

Aspects importants de la formation sacerdotale

L’identité

Comme celle de tous les chrétiens, l’identité sacerdotale est trinitaire. A travers l’ordination sacerdotale, le Père envoie le prêtre vivre et travailler en union avec Jésus-Christ le Médiateur, s’appuyant sur l’Esprit-Saint pour servir l’Eglise dans sa mission à travers le monde. En parlant de l’identité sacerdotale, le Saint Père Jean-Paul II dit : “Notre identité trouve finalement son origine dans l’amour du Père. Le Père envoya le Fils pour être Grand Prêtre et Pasteur. Nous sommes unis à Son sacerdoce commun directement par l’Esprit et à travers les sacrements. Notre vie sacerdotale et notre mission sont la continuation de la vie et de la mission du Christ. C’est notre identité et notre véritable dignité, la source de notre joie et la véritable fondation de notre vie” (1).

La formation de la personne

La formation de la personne est au coeur d’une saine formation sacerdotale. Le pape Jean-Paul II a souligné que s’il n’y a pas une formation personnelle adéquate, tout le programme de formation sacerdotale manque d’une solide fondation de base (2). On ne devrait préparer au sacerdoce que des personnes mûres et saines d’esprit. Des personnes immatures ne peuvent devenir un pont par lequel d’autres rejoindront le Christ ; au contraire, elles deviendront des pierres d’achoppement.

Les prêtres doivent être en accord avec le coeur humain, capables de dialoguer, de bâtir la confiance et de percevoir les difficultés que ressentent les autres. Les prêtres doivent aussi être stables dans leurs devoirs, capables de se comporter avec objectivité et justice avec des personnes et dans des situations variées. Ils doivent avoir un esprit ouvert, être patients, chaleureux, loyaux, soucieux de justice et de service, avec un jugement équilibré, courtois et respectueux envers les autres. Ils doivent éviter orgueil et arrogance, dureté, grossièreté, et toutes sortes d’égoïsmes qui les empêcheraient de comprendre les autres et de sympathiser avec eux.

Le prêtre doit se connaître lui-même, être le maître de sa vie intérieure, conscient de ses sentiments, émotions, qualités et défauts, et s’efforcer de corriger ses faiblesses.

La formation d’une conscience morale est de la plus haute importance. Il doit développer une conscience informée et sensible pour être capable d’entendre la voix de Dieu en lui-même. C’est seulement avec ce genre de conscience que le prêtre sera capable de guider et de former les consciences des fidèles.

La formation spirituelle

La formation spirituelle revêt la plus grande importance dans la formation sacerdotale. Bien que la vie spirituelle soit nécessaire à tout catholique, pour le prêtre, elle est le coeur de sa vie. Sans elle, le ministère sacerdotal perd ses bases.

La spiritualité est la relation de la personne à Dieu. Cette relation est un besoin religieux de base pour tout homme ou femme. Naturellement, le prêtre, qui agit au nom du Christ, doit constamment développer sa relation à Dieu. En dépit de la faiblesse de la nature humaine, il doit rechercher la perfection. Ceci pour réaliser ce que dit le Seigneur : “Vous devez être parfaits comme votre Père céleste est parfait” (Mathieu 5 :48).

La spiritualité est aussi la relation de la personne au Christ. Le prêtre doit toujours chercher à imiter le Christ. C’est à travers le Christ qu’il vivra intimement avec le Père dans l’Esprit. Sa nourriture spirituelle importante sera la méditation des Ecritures et l’Office divin, la messe et l’union au Christ à travers la Sainte Eucharistie. En plus, il doit trouver le Christ dans les hommes et les femmes, spécialement dans les pauvres, les enfants, les malades, les pécheurs et même ceux qui n’ont pas la foi.

La spiritualité du prêtre est constituée de divers éléments : la prière, les retraites, la méditation quotidienne de la parole de Dieu, la visite au Saint Sacrement, la dévotion à Marie, l’étude de la vie des saints, le service humble, la réception du sacrement de la réconciliation, et un temps suffisant pour le repos et la récréation.

La formation intellectuelle

La formation intellectuelle est aussi essentielle à la formation sacerdotale. Ceci est spécialement vrai aujourd’hui où les études humanistes et théologiques sont en développement constant. Si le prêtre veut bien remplir son ministère, il doit faire tous ses efforts pour rester au courant des nouveaux développements des études ecclésiastiques, aussi bien que celles dans les domaines de l’éthique sociale, la bioéthique et la psychologie. C’est seulement en faisant cela qu’il sera capable d’entretenir un dialogue effectif avec les hommes et les femmes modernes.

La formation pastorale

L’importance de la formation pastorale est évident. D’après l’enseignement de Vatican II, la formation sacerdotale “devrait avoir comme objectif de faire des prêtres de vrais pasteurs des âmes, d’après l’exemple du Seigneur Jésus Christ, enseignant, prêtre et pasteur” (3). Bien que la formation sacerdotale comporte beaucoup de facettes, l’élément pastoral doit être présent dans tous les aspects de la formation sacerdotale : personnel, spirituel et intellectuel.

Il y a plusieurs aspects dans la formation pastorale sacerdotale ; par exemple l’étude de la catéchétique, des problèmes concernant la famille, la jeunesse, les personnes âgées, les malades, les questions liturgiques, la théologie pastorale, les oeuvres charitables etc. Des études en pédagogie, psychologie et sociologie peuvent être utiles pour traiter des aspects pastoraux du travail, ou d’un aspect en particulier.

Conclusion

La formation sacerdotale doit être soigneusement planifiée. Ce plan doit inclure les différents aspects d’une formation d’ensemble. La formation sacerdotale doit donc être systématique, employer des méthodes éprouvées, d’un riche contenu, et mise en pratique par des stages. La réalisation des différentes étapes dans le processus de la formation demande une réalisation équilibrée dans le temps (un timing). De plus, chaque aspect de la formation sacerdotale doit être conforme aux enseignements de Vatican II et des documents actuels sur le sacerdoce. Et enfin, mais non moins important, la formation doit répondre aux besoins actuels des jeunes prêtres chinois.