Eglises d'Asie

Hongkong : le cardinal Wu Cheng-chung et les catholiques du territoire soutiennent le droit de certains Chinois continentaux à résider sur le territoire

Publié le 18/03/2010




Dans une lettre pastorale datée du 31 mai, le cardinal Jean-Baptiste Wu Cheng-chung, évêque de Hongkong, a pris parti sans ambiguïté dans la querelle qui divise l’opinion publique de la Région administrative spéciale depuis que, le 29 janvier dernier, la Cour de dernier appel de Hongkong, s’appuyant sur la Loi fondamentale, a considéré que tout enfant chinois ayant un parent résidant légalement à Hongkong avait également le droit de résider dans le territoire (1). “Les catholiques de la région ne doivent pas endurcir leur coeur. Il importe qu’ils fassent preuve de bonté et d’esprit de partage à l’égard des continentaux qui demandent à bénéficier du droit de résidencea affirmé le plus haut dirigeant de la communauté catholique du territoire. Il a aussi demandé aux fidèles d’envisager ce problème dans une perspective chrétienne et de tenir compte de tous ceux qui, sans autorisation, ne pourront jamais rejoindre leurs parents dans le territoire.

La lettre du cardinal, intitulée Dieu est amourest allée à l’encontre du sentiment d’une bonne partie de la population effrayée depuis qu’à la fin du mois d’avril, le gouvernement a fait connaître une estimation du nombre d’enfants que la décision du tribunal autoriserait à résider sur le territoire de Hongkong. Le chiffre annoncé dépassait 1,6 million, chiffre quatre fois plus élevé que celui qui était avancé jusqu’alors. Cet afflux de population, selon les calculs gouvernementaux, correspondrait à des dépenses supplémentaires de 710 milliards de dollars de Hongkong pour les dix prochaines années.

Par ailleurs, la lettre du cardinal a critiqué de front la motion adoptée par l’Assemblée législative deux semaines plus tôt, le 19 mai, proposant de recourir au Comité permanent du Congrès national du peuple de Chine continentale pour s’informer de son interprétation de la Loi fondamentale, la mini-constitution de Hongkong. Il est probable que la réponse venue du continent mettra en cause la décision prise par le tribunal le 19 janvier. Puisque le pouvoir de légiférer en matière de résidence est de la compétence du gouvernement local, ce recours à l’Assemblée législative chinoise, a dit le cardinal, ne peut pas favoriser l’autonomie de la Région spéciale, elle ne peut que lui porter tort. L’initiative du Conseil législatif, a-t-il encore ajouté, ébranle les fondements de la cellule familiale à Hongkong, en même temps qu’elle introduit des doutes dans l’esprit de la population concernant la sincérité des promesses du gouvernement, qui s’est engagé à maintenir une région, deux systèmes et un haut degré d’autonomieIl souligne aussi que la motion votée par le Conseil législatif de Hongkong est susceptible de ruiner la confiance internationale en Hongkong.

Dès le 7 juin, un communiqué du gouvernement démentait avec vigueur les affirmations du cardinal Wu à propos de la famille et du recours au Congrès national du peuple. Il affirmait attacher une grande importance au regroupement familial : une grande majorité des 150 continentaux qui s’installent à Hongkong chaque jour sont des femmes et des enfants de résidents. En 1998, 98% des 54 000 personnes venus s’installer à Hongkong l’ont fait dans le cadre du regroupement familial. Par ailleurs, le communiqué assurait que l’interprétation de la Loi fondamentale était une attribution du Comité permanent du Congrès national du peuple, et que recourir à lui ne diminuait en rien le rôle et le statut du tribunal de dernier appel. Le gouvernement soulignait de plus qu’une interprétation n’était pas synonyme d’une annulation de jugement.

La lettre du cardinal avait été précédée d’un certain nombre de protestations émanant des milieux catholiques, partie de la population qui s’est montrée la plus favorable à l’accueil des enfants de résidents du territoire nés sur le continent. Le 16 mai, dans un hebdomadaire catholique, “Kung Kao Po“, l’évêque coadjuteur, Mgr Zen Ze-kiun, appelait les catholiques à accueillit favorablement les nouveaux immigrants et avouait avoir été troublé d’entendre le gouvernement inciter la population à l’intolérance et à l’égoïsme. Lui-même encourageait les catholiques à pratiquer la tolérance, l’ouverture et l’hospitalité. Dès le 27 mai, un lettre rédigée par divers groupes chrétiens, parmi lesquels la commission “Justice et paix”, la commission des affaires du travail et la fédération des étudiants chrétiens, avait été proposée à la signature de la population et des associations du territoire. Le texte contenait déjà la plupart des arguments opposés au gouvernement par le cardinal, arguments fondés sur l’autonomie de la région et le caractère sacré du regroupement familial.