Eglises d'Asie

L’établissement de relations diplomatiques entre la Chine et le Saint-Siège pourrait être imminent

Publié le 18/03/2010




Selon un article du South China Morning Post paru le 15 décembre à Hongkong, la Chine et le Vatican seraient parvenus, après plusieurs mois de négociations secrètes, à un accord en vue de l’établissement très prochain de relations diplomatiques. Des sources internes à l’Eglise, que ce soit sur le continent chinois, à Hongkong ou à Taiwan, auraient été prévenues de l’imminence de l’annonce, rapporte l’article. Afin de renforcer les structures de l’Eglise “officielle”, une réorganisation d’ampleur serait en cours au sein de l’épiscopat chinois “officiel”.

L’auteur de l’article, toujours en citant des sourcessans plus de précision, affirme que les deux parties seraient parvenues à un accord sur une Eglise unifiée, emmenée par un ou plusieurs cardinaux, et où Rome accepterait que le pouvoir chinois ait un droit de regard sur les nominations d’évêques, à l’image de ce qui se passe au Vietnam. Le Vatican aurait de plus accepté de transférer sa représentation diplomatique de Taipei, où elle est actuellement, à Pékin, rompant ainsi ses liens diplomatiques avec Taiwan. Les dirigeants chinois, quant à eux, auraient donné leur accord à une visite de Jean-Paul II en Chine dans la foulée de l’établissement des relations diplomatiques – pour autant que la santé du Saint-Père le permette. Les dirigeants chinois auraient aussi accepté de retirer à l’Association patriotique des catholiques de Chine son pouvoir sur l’administration de l’Eglise en Chine, qu’il s’agisse des propriétés de l’Eglise ou de son personnel.

Les négociations entre Rome et Pékin qui seraient proches d’aboutir auraient été menées plus particulièrement depuis le mois d’août dernier ; une vingtaine de rencontres auraient pris place entre Mgr Claudio Maria Celli, ancien assistant au secrétariat d’Etat du Vatican, aujourd’hui responsable du Patrimoine du Saint-Siège, et des représentants du ministère des Affaires étrangères chinois, à l’ambassade de Chine auprès de l’Italie, à Rome. Mgr Fernando Filoni, représentant officieux du Saint-Siège à Hongkong, aurait également joué un rôle clef dans les négociations.

Selon l’auteur de l’article, les dirigeants chinois auraient accepté de quasiment supprimer l’Association patriotique car ils pensent que la plupart des Eglises en Chine sont “patriotiques”. Depuis qu’ils ont pris conscience que la situation est plus complexe qu’ils ne l’avaient imaginé (1), ils chercheraient à réorganiser l’Eglise de Chine afin de s’assurer de sa “loyauté” une fois les relations diplomatiques établies avec le Vatican. Cette réorganisation en cours expliquerait que des réunions aient été convoquées dans plusieurs provinces, comme dans l’Anhui et le Zhejiang, ces dernières semaines afin de promouvoir l’influence patriotiqueà travers l’Eglise. On pourrait ainsi expliquer pourquoi le clergé du diocèse de Fengxiang, un bastion de l’Eglise “clandestine” dans le Shanxi, a été “rassemblé” pour des sessions “spéciales” d’éducation politique. Des fonds dans certaines provinces comme le Shanxi auraient été débloqués pour mettre au pas les catholiques “clandestins”. L’article du South China Morning Post rapporte qu’une source de Chine continentalea confirmé que le Comité central du Parti communiste a émis un document appelant les cadres à renforcer le caractère patriotiquede l’Eglise catholique en Chine.

Selon des observateurs, une telle mobilisation du pouvoir chinois et de son appareil bureaucratique (2) peut effectivement avoir comme explication l’établissement dans un avenir très proche de relations diplomatiques entre la Chine et le Saint-Siège. Elle peut aussi s’expliquer comme une reprise en main généralisée de tous les phénomènes religieux non directement et étroitement contrôlés par le pouvoir central. Elle s’inscrirait ainsi dans le cadre de la campagne de répression menée actuellement contre le mouvement Falungong (3). Enfin, s’il existe des signes évidents d’un regain d’activité des négociations entre Rome et Pékin (4), rien n’indique pour l’heure avec certitude que tous les obstacles à la reprise des relations diplomatiques entre la Chine et le Vatican aient été levés ; en particulier, dans le domaine des assurances données par les dirigeants chinois au Saint-Siège d’une réelle liberté pour les catholiques en Chine.

Sollicité par la journaliste du South China Morning Post à propos de ce changement, un porte-parole de la Conférence des évêques de Taiwan a minimisé l’impact d’une rupture des liens diplomatiques entre le Vatican et le gouvernement de la République de Chine (Taiwan) pour les catholiques taiwanais. “[Un tel événement] ne remettra pas en cause notre communion avec le SaintSiège. Les relations diplomatiques sont un problème de nature politique, pas de nature religieuse. L’Eglise catholique de Taiwan peut maintenir des relations avec le Vatican sans cela“, a-t-il précisé.