Eglises d'Asie – Malaisie
La création d’une Commission des droits de l’homme est accueillie avec scepticisme
Publié le 18/03/2010
Lim Kit Siang, président du DAP (Democratic Action Party), le deuxième parti d’opposition depuis les élections de novembre dernier, derrière le parti musulman Parti Islam SeMalaysia (15), a déclaré qu’il craignait que cette commission « ne serve de paravent [au gouvernement] pour légitimer les violations des droits de l’homme dans le pays ». Lim se demande pourquoi la commission, finalement mise sur pied neuf mois après le vote de la loi autorisant sa création, a déjà dû « reconnaître des lois aussi draconiennes que la loi sur la sécurité intérieure, la loi sur les secrets d’Etat, la loi sur la presse et l’édition, la loi sur les actes séditieux et la loi sur la police ». Selon lui, la loi qui institue cette commission aurait dû se fonder sur la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 et non restreindre son domaine d’action aux « libertés fondamentales telles qu’elles sont définies dans la seconde partie de la Constitution fédérale [malaisienne] ». L’ancien président du Barreau de Malaisie, R. R. Chelvarajah, est allé dans le même sens en précisant que la Constitution comprend plusieurs articles « qui sont en contradiction avec les principes des droits de l’homme ».
Plusieurs organisations de défense des droits de l’homme en Malaisie ont critiqué la composition de la commission elle-même. Selon le président , une publication réformatrice, « il y a dans ce pays de nombreuses et éminentes personnalités qui ont grandement contribué à la lutte pour les droits de l’homme. Malheureusement, aucune de celles–ci ne se trouve sur la liste ». SUARAM (« la voix du peuple malaisien »), une organisation de défense des droits de l’homme, a qualifié la nomination de Musa Hitam à la tête de la commission « d’étape importante » vers la détérioration de la situation des droits de l’homme en Malaisie.
Aux termes de la loi l’instituant, outre sa mission de promouvoir les droits de l’homme, la Commission a pour charge d’enquêter sur les violations des droits de l’homme à travers le pays. Elle peut visiter les lieux de détention, émettre des recommandations, enquêter sur les accusations de violation des droits de l’homme dans des affaires en cours de jugement ou en appel. En juillet dernier, cependant, lors du débat qui a précédé le vote de la loi autorisant la création de cette commission, un sénateur, Zuki Kamaluddin, a soulevé la question de l’indépendance de la commission, une indépendance, selon lui, sujette à caution dès lors que la commission est placée sous l’autorité d’un ministre lui-même dépendant du Premier ministre. Le sénateur Zuki suggérait, à l’époque, que la commission soit totalement indépendante afin de pouvoir enquêter librement sur toutes les violations supposées des droits de l’homme, commises par quiconque en Malaisie, « y compris le Premier ministre ».