Eglises d'Asie

Nouvelles ordinations, sans consultation préalable avec Rome, d’évêques catholiques “officiels”

Publié le 18/03/2010




Selon des sources habituellement bien informées et proches des milieux de la Secrétairerie d’Etat du Vatican, l’Association patriotique des catholiques chinois, courroie de transmission du Parti communiste dans l’Eglise catholique “officielle” de Chine, a décidé de faire ordonner six ou peut-être sept nouveaux évêques les 7 et 14 (ou 13) mai 2000. Les nouveaux évêques auraient été ordonnés sans consultation préalable de Rome et sont destinés aux provinces du Shandong et du Zhejiang. Trois diocèses sont cités comme devant être pourvus en évêques après cette ordination : Ningbo et Linghai dans le Zhejiang, et Yanggu dans le Shandong.

Le 6 janvier dernier, l’Eglise catholique “officielle” avait déjà procédé à cinq ordinations épiscopales dans un geste qui se voulait provocant vis-à-vis de Rome où le pape présidait lui-même, le même jour, d’autres ordinations épiscopales (2). L’événement se produisait au moment où des rumeurs de plus en plus persistantes faisaient état d’un possible établissement de relations diplomatiques entre Pékin et le Vatican. Beaucoup d’observateurs avaient alors interprété cette décision comme une victoire des “durs” de l’Association patriotique des catholiques chinois et du Bureau national des affaires religieuses opposés à une normalisation des liens avec le Vatican. On avait appris par la suite que plusieurs candidats pressentis avaient refusé d’être ordonnés évêques parce qu’ils n’avaient pas reçu l’accord du pape. C’est la raison pour laquelle il n’y avait eu que cinq ordinations alors que douze étaient prévues à l’origine.

Selon des sources bien informées de Hongkong, une certaine confusion semble régner chez les candidats pressentis pour être ordonnés évêques. Certains attendraient d’avoir l’accord secret de Rome avant d’accepter l’ordination et au moins l’un d’entre eux a obtenu cet accord. Il s’agit de Mgr Zhao Fengchang, âgé de 66 ans : élu en décembre dernier à la tête du diocèse de Yanggu (dans le Shandong), il a été ordonné le 7 mai évêque de Yanggu et administrateur apostolique du diocèse voisin de Linqing (3). Mgr Joseph Ma Xuesheng, évêque “officiel” de Zhoucun (province du Shandong), présidait à la cérémonie d’ordination ; il était entouré de deux autres évêques “officiels” de la même province du Shandong, Mgr Fang Xinyao, de Linyi, et Mgr Joseph Wang Dianduo, de Heze (4). Tous trois sont légitimes. 1 500 fidèles, plusieurs prêtres ainsi que quelques représentants des autorités chinoises ont assisté à cette cérémonie avant laquelle, fait très inhabituel, l’accord du Saint-Siège à cette ordination épiscopale a été lu en public.

On sait que, parmi les évêques “officiels” choisis par l’Association patriotique des catholiques chinois et reconnus par le gouvernement, beaucoup ont, en fait, reçu l’assentiment du Vatican et peuvent donc être considérés comme légitimes de la même manière que les évêques dits “clandestins” qui sont tous nommés par le Saint-Siège mais ne sont pas reconnus par le gouvernement. Depuis plusieurs années, le pouvoir de nommer les évêques dans l’Eglise de Chine reste le principal obstacle à une normalisation des relations entre le Vatican et Pékin. La Chine continue de prétendre que cette exigence du Vatican est une ingérence dans les affaires intérieures chinoises.

Le 3 mai, le cardinal Jozef Tomko, préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, a profité d’une messe pour le cinquantième anniversaire des émissions chinoises de Radio Vatican pour réaffirmer fortement les prérogatives du pape dans la nomination des évêques : “Aucune puissance humaine ne peut espérer changer la constitution de l’Eglise catholique fondée sur Pierre ». Ceci ne signifie pas que l’Eglise “désire remplacer le pouvoir politique ou s’ingérer dans son domaine », mais seuls les évêques unis avec le successeur de Pierre sont les pasteurs légitimes de l’Eglise catholique dans le monde entier et aucune autorité, institution ou association ne peut prétendre à cette fonction ».

La fermeté des déclarations du cardinal Tomko à la veille de ces nouvelles ordinations d’évêques semble indiquer un durcissement des positions du Vatican qui, à la fin de l’année dernière, semblait avoir accepté un compromis sur le pouvoir de nommer des évêques (5). Du côté chinois, la multiplication des ordinations d’évêques, si elle répond à un réel besoin de rajeunissement du corps épiscopal en Chine, témoigne de la volonté des autorités chinoises de poursuivre la réorganisation de l’Eglise catholique “officielle” en cours. Alors même que l’Association patriotique organise ces ordinations, qui sont menées avec ou sans l’approbation du Saint-Siège, son vice-président et vrai patron, Anthony Liu Bainian, a déclaré le 11 mai, en commentant l’ordination de Mgr Zhao : Si nous n’avions pas élu et ordonné des évêques depuis 1958 (date de la rupture entre la Chine communiste et le Saint-Siège), l’Eglise catholique aurait disparu. Au jour d’aujourd’hui, le Vatican n’a pas accepté ce fait» Il a ajouté : Nous espérons que le Vatican agira afin d’améliorer les relations avec la Chine aussi rapidement que possible»