Eglises d'Asie

A quelques jours de la canonisation de 120 martyrs de l’Eglise en Chine, le cardinal Etchegaray se rend en visite à Pékin pour assister à une conférence sur les religions et la paix

Publié le 18/03/2010




Le 12 septembre, le directeur de la salle de presse du Saint-Siège, Joaquin Navarro-Valls, a déclaré que le cardinal Roger Etchegaray (3) allait se rendre en Chine « à titre personnel » pour assister du 14 au 16 septembre dans la capitale chinoise à un symposium sur « les religions et la paix symposium organisé conjointement par l’Académie des Sciences sociales de Pékin et l’université catholique du Sacré-Cour de Milan. Cette visite d’un des membres importants de la curie romaine ne constitue pas véritablement une première (4) mais elle intervient à l’heure où, depuis quelques mois, des signes concordants laissent percevoir l’existence de pourparlers entre le Vatican et la République populaire de Chine (5). Gardée secrète jusqu’au dernier moment, cette visite survient également quelques jours avant que le Saint-Père ne canonise, le 1er octobre à Rome, 120 martyrs de l’Eglise en Chine (6). Ces martyrs ont été mis à mort aux XVIIe, XVIIIe siècles ainsi que lors de la révolte des Boxers en 1900 (et n’ont donc pas été victimes du régime communiste actuellement au pouvoir à Pékin). Mais leur canonisation et la date fixée pour la célébrer semblent susciter l’ire des autorités chinoises. En effet, si, le 1er octobre, l’Eglise fête Sainte-Thérèse de Lisieux, patronne des missions, la Chine populaire célèbre ce jour-là sa fête nationale, jour anniversaire de la « Libération » de 1949.

Bien que le porte-parole du Saint-Siège ait précisé que le cardinal Etchegaray pourrait éventuellement rencontrer à Pékin des représentants de l’Eglise catholique « officielle » et que ces éventuels contacts ne devaient pas être interprétés comme « une reconnaissance [par le Vatican] des structures ecclésiales existantes », cette visite apparaît comme la confirmation que les pourparlers entre la Chine et le Vatican ne sont pas rompus. Selon les observateurs, ces pourparlers portent, entre autres choses, sur l’organisation à donner à l’Eglise catholique en Chine au cas où des relations diplomatiques étaient nouées entre le Saint-Siège et Pékin. On sait que l’Eglise catholique en Chine est divisée entre une Eglise « officielle », placée sous le plus ou moins étroit contrôle de l’Association patriotique des catholiques chinois, organisme qui joue le rôle d’intermédiaire entre le Parti communiste et l’Eglise, et une Eglise « clandestine » qui refuse l’affiliation à cette association. Dans ce contexte, les questions de la nomination des évêques, de la place et du rôle dans l’Eglise de l’Association patriotique sont centrales. Dans la conférence qu’il doit donner à Pékin, le cardinal Etchegaray met en avant la volonté « de paix et de réconciliation » de l’Eglise : « L’Eglise peut difficilement parler de paix si, dans sa propre vie, elle ne donne pas des signes de paix et de réconciliation»

Même si le Saint-Siège a bien précisé que le cardinal Etchegaray se rendait à Pékin « à titre personnel » et qu’il n’était « chargé d’aucune mission de nature diplomatique », sa visite ne peut qu’être interprétée que comme un geste politique. Elle rappelle d’une certaine manière la visite que le même cardinal Etchegaray avait effectuée le 6 novembre 1990 au Vietnam (7). A cette date, le Vietnam, dirigé comme la Chine par un régime communiste, avait entrepris des négociations d’abord discrètes puis quasi-officielles avec le Vatican en vue d’une normalisation de leurs relations (8). Depuis lors, une délégation du Saint-Siège se rend régulièrement à Hanoi négocier les nominations d’évêques et les libertés concédées à l’Eglise au Vietnam, mais rien n’a encore été finalisé quant à l’échange de diplomates ou quant à une éventuelle visite du pape dans ce pays (9).