Eglises d'Asie – Sri Lanka
Les responsables chrétiens du cinéma et de l’audiovisuel estiment injustifiée l’interdiction d’un film sur la guerre
Publié le 18/03/2010
Dirigé par Prasanna Withanage, le film décrit la vie d’une famille pauvre de paysans cingalais qui reçoit dans un sac plombé le corps d’un fils tué au combat, explique le P. Fernando, directeur de l’Organisme catholique international du cinéma et de l’audiovisuel pour le Sri Lanka (OCIC). Pour lui, le film qui a reçu plusieurs récompenses internationales traite de la vanité de la guerre, un thème, dit-il, jamais abordé par le cinéma local. « Le point de vue des autorités est qu’il est inadmissible de vouloir démoraliser les forces de sécurité en guerre contre les séparatistes tamouls». Pourtant, affirme le prêtre, « cette interdiction est totalement injuste et antidémocratique Bien qu’approuvée initialement par le comité de censure, la première prévue pour le 28 juillet a été suspendue sine die, le 21, sur ordre du ministre des Services spéciaux, Sarath Amunugama, également responsable du cinéma. Cette interdiction de facto a causé de fortes réactions dans les milieux catholiques de l’audiovisuel.
Sunil Mihindukula, catholique et éditeur de l’hebdomadaire cinématographique cingalais Sarasaviya, fait remarquer que « la démoralisation peut aussi venir d’ailleurs ». Il est « totalement impensable » qu’un film puisse démoraliser les soldats de l’armée, dit-il, parce que « le retour de soldats cingalais dans des sacs plombés est devenu, hélas, quelque chose de tout à fait banal ici ». Ashley Ratnavibhushana, critique cinématographique lié au Centre du film asiatique, a de son côté qualifié l’interdiction de « hautement injuste et immorale ». Le P. Ernest Porutota, fondateur et ancien directeur d’OCIC-Sri-Lanka, affirme que « c’est un film qui n’aurait pas dû être interdit( ‘Mort un jour de pleine lune’ a reçu cette année le grand prix du 19ème Festival international du film d’Amiens, en France. L’an dernier, il a reçu le premier prix du Festival international du film de Fribourg, en Suisse » pour l’excellent et très sensible traitement cinématographique d’un sujet délicat et tragique. Le prix du meilleur acteur du Festival international de Singapour est venu récompenser l’acteur principal, Joe Abeywickrema. Le directeur du film, Withanage, a déclaré pour sa part à la presse : « Il n’appartient pas à un directeur de film de soutenir ou de saper le moral des forces de sécurité. Aussi longtemps que la guerre fera rage dans le pays, mon film n’aura aucune chance d’être projeté ». Mais Withanage, qui est aussi coproducteur du film, intente un procès à l’Etat et demande 5 millions de roupies (64 000 dollars) de dommages et d’intérêts pour la perte d’exploitation subie du fait de cette interdiction.