Eglises d'Asie

L’isolement international dont souffre la Birmanie a des conséquences sur la vie de l’Eglise catholique

Publié le 18/03/2010




Depuis maintenant dix ans que la Birmanie est isolée sur la scène internationale en raison de la politique menée par la junte militaire au pouvoir à Rangoun, l’Eglise a dû s’adapter aux conséquences de cette situation sur la vie du pays. Selon Mgr Charles Maung Bo, évêque catholique du diocèse de Pathein, l’Eglise a été conduite à s’engager plus largement dans le domaine de l’éducation. Elle y a gagné une visibilité accrue même si la croissance du nombre des fidèles ne traduit pas cette évolution.

Intervenant le 16 septembre dernier à Hongkong devant le bureau pour l’évangélisation de la Fédération des Conférences épiscopales d’Asie (FABC), Mgr Charles Bo a expliqué que la fermeture de son pays au reste du monde a eu pour conséquence un affaiblissement des services publics, en particulier dans le domaine de l’éducation. L’Eglise catholique, désireuse d’aider, a fait de son mieux pour combler les vides ainsi créés, a expliqué Mgr Bo, qui est aussi président de la Conférence épiscopale de son pays. « Nous n’avons pas seulement prêché la Bonne Nouvelle et assuré le service des ‘soins pastoraux’. Du fait de la situation politique, les écoles ont beaucoup souffert. Nous nous sommes efforcés d’aider, concentrant notre action sur l’éducation des jeunes enfants », a précisé Mgr Bo. Selon lui, un tel travail a servi la cause de l’évangélisation.

L’isolement dont souffre le pays dure depuis que les militaires, au pouvoir depuis 1988, ont refusé de reconnaître le résultat des élections législatives de mai 1990, élections remportées par Aung San Suu Kyi et la Ligue nationale pour la démocratie avec 82 % des suffrages. Cet isolement n’a pas eu que des conséquences positives pour l’Eglise. Si des opportunités en terme d’évangélisation sont apparues, note Mgr Charles Bo, l’Eglise en Birmanie s’est trouvée coupée des évolutions que connaissait pendant ce temps l’Eglise catholique dans les autres pays. Il cite, à titre d’exemple, l’engagement des laïcs dans la vie de l’Eglise. D’une façon générale, la vie de l’Eglise en Birmanie est restée « très traditionnelle ».

« La majorité des catholiques tend à vouloir conserver les anciennes façons de faire et n’envisage pas le changement », explique Mgr Bo. « Le prêtre est une sorte de roi au sein de sa paroisse et l’obéissance absolue est une caractéristique de notre Eglise». Ce trait se retrouve au sein de la Conférence épiscopale. Prenant comme exemple le refus de la Conférence d’autoriser l’usage de la guitare pour l’animation des liturgies au séminaire, Mgr Bo précise que « les évêques eux-mêmes tendent à se montrer conservateurs, même si les jeunes évêques voudraient voir les choses évoluer ».

Les conséquences de ce « traditionalisme » sont diverses. Le souci des bâtiments et des constructions accapare trop les esprits. « Nous avons tendance à consacrer notre énergie et l’argent dont nous disposons à construire des églises et des maisons religieuses. L’accent devrait au contraire être porté sur la mission. Bien que nous soyons pauvres, nos constructions sont imposantes. Aujourd’hui, il nous faut construire les communautés et mettre l’accent sur les hommes », souligne l’évêque de Pathein. La recherche d’une certaine sécurité matérielle dans un pays qui reste très pauvre ne serait pas étrangère au nombre assez élevé de vocations que connaît l’Eglise en Birmanie. Selon Mgr Bo, un quart des candidats à la vie religieuse (prêtres et sours confondues) sont motivés par cette recherche. « Ils trouvent là éducation, nourriture et sécurité ».

Des contacts plus fréquents et plus profonds entre le clergé birman et les Eglises catholiques à l’étranger pourraient contribuer à atténuer ces travers. Mgr Bo, qui appartient à la congrégation des salésiens, appelle les autres Eglises à venir en aide à l’Eglise en Birmanie dans le domaine de la formation, l’amélioration du niveau d’anglais de son clergé, séculier comme régulier, constituant un préalable (1). Une intensification des contacts avec l’étranger permettrait ainsi de remédier à ce que Mgr Bo qualifie d’une des plus graves déficiences de l’Eglise en Birmanie : « l’absence de vision claire de ce qu’est l’Eglise en Birmanie et de la direction qu’elle doit prendre ».

Répartis entre douze diocèses, les 570 000 catholiques de Birmanie représentent 1,2 % de la population du pays. Ils appartiennent pour près de 90 % aux minorités ethniques.