Eglises d'Asie – Pakistan
Nouvelle protestation de l’Eglise catholique contre la marginalisation des minorités religieuses et le régime des électorats séparés
Publié le 18/03/2010
Au nom de l’unité nationale, évêques et religieux demandent au chef du gouvernement la restauration immédiate d’un électorat unique et l’abandon du système des électorats séparés (20). Celui-ci a été mis en place en 1979 pour les élections locales, puis a été étendu, en 1985, aux élections générales. Explicité dans le huitième amendement à la Constitution du pays, il prévoit que dix sièges de l’Assemblée nationale sont attribués aux minorités religieuses, quatre pour les chrétiens, quatre pour les hindous et deux pour les autres religions. Les membres des minorités ne peuvent voter que pour les candidats présentés par leurs religions respectives. « Nous voulons être traités comme des citoyens égaux aux autres, disent les auteurs de la lettre, pour apporter notre pleine contribution au progrès, au bien–être et à l’intégrité du Pakistan et continuer de participer à l’édification du pays dans les domaines de l’éducation, de l’action sociale et de la défense ».
Les évêques et supérieurs religieux font valoir que ce système électoral n’affecte pas seulement les non-musulmans, mais aussi l’ensemble de toutes les communautés du pays. Cette discrimination des citoyens sur une base religieuse a, selon les auteurs de la lettre, empoisonné l’atmosphère socio-politique du pays. Elle a contribué à répandre le sectarisme et la violence tout en multipliant les meurtres. En ce domaine précis, le chef du gouvernement pakistanais est invité à appliquer la déclaration universelle des droits de l’homme dont le Pakistan est signataire. Il lui est demandé d’abolir immédiatement cet « apartheid religieux » qui donne une apparence légale à la marginalisation des non-musulmans. Pour favoriser l’égalité des musulmans et des non-musulmans, il convient également, selon les évêques et les supérieurs religieux, de réviser immédiatement l’actuel programme de décentralisation du pouvoir en sorte qu’il soit possible aux citoyens non musulmans d’être élus aux plus hautes fonctions dans les assemblées et les institutions locales. Cette possibilité existant autrefois a été supprimée par le nouveau programme.
Les chrétiens du Pakistan n’ont cessé de lutter contre la nouvelle réglementation électorale depuis sa mise en place en 1979 et 1985 (21). Tout récemment, cinq jours avant la lettre des évêques et supérieurs religieux, les participants à une consultation organisée par le Conseil national des Eglises, au nombre d’une centaine, se sont opposés aux élections pour les assemblée locales organisées sous le régime des électorats séparés et prévues pour le 31 décembre prochain. Ils ont adopté une résolution appelant les partis politiques, les minorités et le peuple pakistanais à boycotter les élections pour manifester leur rejet du système électoral en vigueur. La résolution demande également au gouvernement militaire de restaurer la démocratie en organisant des nouvelles élections. La même décision de boycott des élections, au cas où le système d’électorat unique ne serait pas restauré, avait été prise une semaine plus tôt, le 19 novembre, par la Conférence de solidarité et d’union de toutes les minorités du pakistan. Les 200 participants, représentant les chrétiens, les hindous, les sikhs, les parsis et les adeptes de la religion Bahaï, avaient qualifié le système électoral en vigueur « d’injuste, d’antidémocratique et de destructeur de l’unité et de la solidarité du pays
Les réponses gouvernementales à ces prises de position ont été relativement modérées. Le ministre des Minorités, des Sports et de la Culture, le protestant S.K. Tressler, nommé à ce poste après la démission de son prédécesseur catholique, a plaidé pour la conservation du régime électoral actuel et a déconseillé aux chrétiens le boycott des élections, les assurant qu’ils allaient à l’échec.