Eglises d'Asie

L’évêque catholique de Jaffna invite la présidente du pays à desserrer l’embargo économique de fait imposé aux zones tamoules où se déroulent des combats

Publié le 18/03/2010




Dans une lettre datée du 22 janvier dernier, Mgr Thomas Savundaranayagam, évêque catholique de Jaffna, invite la présidente du pays, Chandrika Kumaratunga, à faire preuve d’ouverture dans les négociations entre son gouvernement et les Tigres tamouls, négociations qui se déroulent en Europe sous l’égide de la Norvège. Afin de faire réellement avancer les pourparlers, Mgr Thomas demande à la présidente d’envisager cinq points concrets, outre la question du cessez-le-feu, pour, écrit-il, “améliorer la situation et faciliter l’ouverture des négociations en vue de la paix”.

De retour d’une visite pastorale dans les zones de son diocèse contrôlées par les Tigres tamouls (1), Mgr Thomas s’estime en droit d’écrire à la présidente comme une personne “au fait de la situation réelle” sur le terrain. Selon lui, avant d’envisager de signer un éventuel cessez-le-feu avec les Tigres tamouls, le gouvernement sri-lankais doit prendre cinq mesures concrètes : augmenter les livraisons de denrées alimentaires, de médicaments et d’autres biens matériels de nature humanitaire dans les régions de Kilinochchi et de Mullaithivu, deux zones que Mgr Thomas a pu visiter au début du mois de décembre 2000 et dont il a pu constater combien elles étaient affectées par les combats ; autoriser l’accès des ONG locales à la région de Vanni, une région de jungle où Mgr Thomas s’est rendu pour la quatrième fois et qui est un des bastions des Tigres tamouls ; augmenter les quotas de carburant autorisé à pénétrer dans ces régions ; ouvrir le passage d’“Uyilamkulam” afin de permettre aux gens de Vanni de se rendre à Mannar, sur la côte est de la partie nord du Sri Lanka ; et enfin, cantonner les opérations de l’armée à certaines zones seulement.

La veille de l’envoi de cette lettre, Chandrika Kumaratunga s’était adressée par la radio aux Sri Lankais, déclarant qu’un cessez-le-feu n’était envisageable que si les Tigres tamouls s’asseyaient à la table des négociations de paix. Mgr Thomas estime quant à lui que “de nombreuses difficultés seraient aplanies si les deux parties se parlaient”, invitant chacun des deux camps à considérer la médiation norvégienne comme une vraie chance pour la paix. Dans sa lettre, il exprime la conviction qu’en dépit “de toute l’opposition dans le sud [du pays, à majorité cinghalaise] », la présidente Kumaratunga restera fidèle aux convictions qu’elle affiche, i.e. au traitement sur un pied d’égalité de tous les citoyens sri-lankais, quelle que soit leur appartenance ethnique ou religieuse.

Le jour même où Mgr Thomas faisait parvenir sa lettre à la présidente du pays, Anton Balasingham, chef de la délégation du LTTE (les Tigres tamouls), rencontrait à Londres Erik Solheim, le médiateur norvégien. Selon la presse, Balasingham a dénoncé les affirmations du gouvernement sri-lankais, affirmations selon lesquelles les zones tamoules et les zones de guerre ne seraient pas soumises à un embargo économique et recevraient des livraisons adéquates en nourriture et en médicaments.

Depuis maintenant 18 ans, les Tigres tamouls du LTTE et les forces armées gouvernementales s’affrontent dans une guerre meurtrière. Les Tigres réclament l’indépendance des régions nord et est du pays, peuplées en majorité par des Tamouls. Le gouvernement, dominé par les Cinghalais qui constituent la grande majorité de la population du Sri Lanka, s’oppose à cette revendication.