Eglises d'Asie

Le tableau de la société pakistanaise dressée par la Commission nationale des droits de l’homme est particulièrement sombre

Publié le 18/03/2010




Le rapport annuel de la Commission des droits de l’homme du Pakistan, publié le 22 février, dresse un tableau extrêmement pessimiste de la situation du pays. Il relève l’augmentation des abus de pouvoir commis par l’Etat pakistanais, le haut niveau de la criminalité, la montée de l’extrémisme religieux et des conditions sociales parmi les pires du monde. Commentant le contenu du rapport lors d’une conférence de presse, le directeur de la commission a déclaré que la situation était très certainement en train de se détériorer et qu’il ne voyait pas comment on pourrait redresser la barre.

La rapport est particulièrement critique à l’égard du pouvoir militaire et de sa décision de rester en place pour deux années encore. Il affirme, en particulier, que la stratégie gouvernementale consistant à discréditer et à marginaliser les partis politiques avait créé un vide que le clergé musulman orthodoxe et les mouvements islamiques radicaux n’avaient pas tardé à remplir. Un certain nombre de groupes comme la secte Ahmmadi, qualifiée d’hérétique par les autorités, ou d’autres associations privées, en particulier celles qui œuvrent à la promotion féminine, sont devenues la cible des attaques des dirigeants musulmans fondamentalistes. Le fait que les autorités assistent en spectateurs silencieux à ces persécutions dirigées contre des personnes qui, pacifiquement et dans le respect de la loi, pratiquent leurs croyances ou se livrent à un travail social, témoigne clairement de leur collusion avec les extrémistes.

Selon la Commission des droits de l’homme, il est inquiétant qu’un régime militaire ait échoué dans sa tentative de réduire le taux de criminalité. Les attentats à l’explosif ont augmenté ainsi que les violences dirigées contre les femmes. Pour une seule des quatre provinces du Pakistan, le rapport fait état de 315 “meurtres d’honneur” de femmes accusées de comportement inacceptable. Deux facteurs sont à l’origine de cette augmentation de la criminalité : la profifération des armes et la dégradation progressive du système policier. Pour la seule province de la Frontière nord-ouest, les autorités ont délivré des autorisations pour deux millions d’armes. Mais beaucoup plus nombreuses encore sont celles qui circulent sans autorisation, y compris des armes fabriquées artisanalement sur place.

Le regain de violence qui secoue aujourd’hui la société pakistanaise accompagne de très piètres statistiques dans la plupart des domaines du développement humain. Même les statistiques officielles ne peuvent cacher que le Pakistan est aujourd’hui un des pays où le taux d’analphabétisme est le plus élevé du monde. 41 % des Pakistanais seulement sont alphabétisés. A Karachi, capitale économique du pays, 27,5 % des enfants en âge scolaire fréquentent l’école. Dans le Pendjab, la province la plus peuplée du pays, 45 % des écoles ne possèdent pas de locaux. Plus de 20 000 enseignants n’existent que sur le papier. En matière de santé, la situation est loin d’être meilleure. Avec une mortalité infantile de 80 pour 1 000 naissances, avec 4,5 millions de drogués pour une population totale de 140 millions d’habitants, le Pakistan se situe largement derrière le Bangladesh, l’Ethiopie et Haïti.