Eglises d'Asie

Des aborigènes protestent contre l’installation sur leurs terres d’un parc naturel qu’ils craignent de voir se transformer en zoo humain

Publié le 18/03/2010




Les aborigènes du nord-est du Bangladesh protestent contre l’installation d’un « parc naturel à vocation écologique » où, disent-ils, ils seront exposés à la curiosité du public « comme les animaux d’un parc zoologique ». Le 15 avril à Muraichara, dans le comté de Sylhet, à environ 200 km au nord-est de Dacca, plus de 2 000 aborigènes Garo et Khasi ont manifesté. Cinq prêtres et quatre religieuses catholiques s’étaient joints à eux. Le même jour, Syeda Sazeda Chowdhury, la ministre de l’Environnement et des Forêts, inaugurait officiellement un autre parc de 600 hectares, celui de Madhabkunda, également dans le comté de Sylhet, et s’adressait à un auditoire de Bengalis. Par la suite, Mme Chowdhury ne consacra que 5 minutes à Muraichara où elle ne prononça pas de discours. Un grand nombre de policiers avaient été mobilisés mais les protestataires gardèrent leur calme et la ministre put rencontrer quatre de leurs chefs coutumiers dans le jardin d’un salon de thé.

Les manifestants reprochent aux autorités de ne pas avoir consulté ceux qui vivent depuis longtemps dans l’enceinte de ce nouveau parc. Ils ont rejeté l’argument de protection de l’environnement mis en avant par le gouvernement et ils lui ont suggéré, entre autres, de commencer par nettoyer la Buriganga, la rivière polluée qui traverse Dacca. Les Khasi et les Garo vivent dans de petits villages appelés « punjee » bâtis au sommet des collines boisées du parc. Ils craignent que la culture du « pan » (noix de bétel), qui représente l’essentiel de leurs moyens d’existence, ne soit compromise par la présence des touristes. Mme Chowdhury avait expliqué à Madhabkunda que le parc, avec ses belles chutes d’eau, serait une réserve naturelle, que la flore et la faune y seraient protégées et que les gens du lieu pourraient augmenter leurs revenus grâce au tourisme : « Je comprends que les Khasi éprouvent des doutes, des incompréhensions et des craintes sur ce projet mais nous pouvons leur assurer que leur vie n’en sera pas bouleversée ». D’après la ministre, les aborigènes sont tout à fait capables d’expliquer et de montrer leur culture et leurs coutumes aux touristes étrangers dans un « village culturel » aménagé dans l’enceinte du parc. Elle a ajouté que le gouvernement avait déjà « prévu des améliorations sociales » dont des constructions d’habitations. Quoi qu’il en soit, sept chefs de village ont préparé un « manifeste demandant justice » au gouvernement. Ils y affirment que le Service des forêts revendique illégalement la possession de terres qui leur appartiennent et que ses agents coupent les arbres et ouvrent des routes. Ils font également état du fait que, quoique les aborigènes vivent dans cette région depuis des générations, il leur faille payer un loyer annuel au gouvernement. Ils sont défendus par maître Karuna Moy Chakma, avocat à la Cour suprême du Bangladesh et natif de la région des « Chittagong Hill Tract dans le sud-est du pays (1). Il est assisté dans cette affaire d’un autre avocat, Tapas Das, de confession catholique.