Eglises d'Asie

L’ordination au diaconat de quatre séminaristes cambodgiens confirme la lente mais régulière progression de l’Eglise catholique

Publié le 18/03/2010




A Phnom Penh, le 10 juin prochain, en l’église Saint Joseph, l’Eglise catholique au Cambodge connaîtra une nouvelle étape dans la lente mais régulière croissance qui est la sienne depuis dix ans. Ce jour-là, après avoir suivi une formation de neuf années, quatre séminaristes cambodgiens, Soun Hang Ly, Lay Paul, Nget Viney et Un Son, seront ordonnés au diaconat. On se souvient que toute forme de vie religieuse fut supprimée au Camdodge durant la période khmer rouge (1975-1979) et que, sous l’occupation vietnamienne (1979-1990), toute pratique religieuse était interdite. Après le départ forcé des missionnaires étrangers en 1975, tout le clergé catholique autochtone, sans exception, avait péri sous le régime khmer rouge (1). Il a fallu attendre les années 1990 pour voir renaître l’Eglise au Cambodge et le 2 juillet 1995 pour assister à l’ordination du premier prêtre cambodgien, le P. Pierre Tunlop Sophal (2). Les quatre ordinations diaconales du dimanche 10 juin sont donc un événement d’importance pour l’Eglise catholique au Cambodge.

Lay Paul est né à Phnom Penh, aîné d’une famille bouddhiste de huit enfants. Agé de 40 ans, il se rappelle des longues années passées dans les camps de réfugiés, entre 1984 et 1992, comme d’années difficiles et incertaines. A l’époque, il ne connaissait rien du christianisme et n’aspirait qu’à une seule chose : obtenir un visa pour un pays d’accueil définitif, y trouver un travail et aider sa famille. Cependant, la visite quotidienne d’un prêtre catholique dans le camp l’amena à se joindre à un petit groupe de réfugiés qui étudiaient la Bible. Ce n’est que plus tard, après un long entretien avec Mgr Yves Ramousse, alors responsable du BPAC (Bureau pour l’apostolat des Cambodgiens) (3), et avec le P. Bernard Dupraz, qui s’est installé ensuite à Battambang, qu’il décida finalement d’entrer en 1991 au séminaire.

Un Son, également âgé de 40 ans, a connu un parcours un peu différent. En 1975, peu après la prise du pouvoir par les Khmers rouges, lui et sa famille purent s’échapper de la province de Takeo jusqu’en Thaïlande. En 1977, lui et son frère aîné furent envoyés étudier le bouddhisme et devinrent moines dans un temple bouddhiste thaïlandais. “J’y ai vécu durant trois années et y ai appris le thai. Après quoi, j’ai quitté l’habit de moine et je suis retourné vivre dans le camp”, raconte-t-il. Là, il entendit des protestants parler du “Dieu d’amour” mais il “ne les crut pas”. En 1980, il obtint un visa pour le Canada grâce à une famille canadienne et fut rejoint un an plus tard par le reste de sa famille. Sa “mère adoptive” lui apprit le français, lui parlait tout le temps de Jésus et l’emmenait à des cérémonies religieuses. Après deux années d’études de la Bible, lui et sa sœur cadette demandèrent le baptême qu’ils reçurent en 1984. Ses parents voulaient le voir se marier mais “je commençais à penser aux pauvres et à ceux qui souffrent. Je voulais être un missionnaire mais je n’avais pas fait d’études”, se rappelle-t-il. La première étape vers le sacerdoce fut une retraite prêchée par un prêtre des Fils de la Charité. Un Son partit vivre parmi les prêtres de cette congrégation jusqu’en 1991, date où il est retourné au Cambodge pour entrer l’année suivante au séminaire.

Soun Hang Ly, âgé de 30 ans, est originaire de la province de Kandal. Baptisé jeune enfant car sa mère est chrétienne, il fréquenta pourtant le temple bouddhiste situé à proximité de son village, son père étant bouddhiste. En 1990, lorsque la liberté religieuse fut restaurée, sa mère le poussa à aller à l’église catholique où il suivit des cours de Bible. Là, des catholiques âgés l’incitaient à devenir prêtre mais Ly ne se sentait pas une vocation sacerdotale. Finalement, “après avoir réfléchi et prié durant quatre mois avec le P. Dupraz”, il décida d’entrer au séminaire.

Nget Viney, quant à lui, est âgé de 31 ans et est issu d’une famille catholique de la province de Kompong Cham. Sa vocation commença à germer en 1991 lorsqu’il prit part à un groupe de louanges rassemblant des catholiques et des protestants. Après l’école secondaire, il étudiait la philosophie le jour et gagnait sa vie comme gardien de nuit auprès des Sœurs de la Charité. “Je remarquai que les sœurs étaient très gentilles avec les gens, particulièrement avec les pauvres. Cela m’a fait réfléchir à ce que je voulais faire de ma vie”, se remémore-t-il. En 1992, il décidait d’entrer au séminaire.

Après leur ordination diaconale, Soun Hang Ly et Un Son seront affectés au vicariat de Phnom Penh, Lay Paul à la préfecture apostolique de Konpomg Cham et Nget Viney à celle de Battambang. On compte aujourd’hui environ 25 000 catholiques au Cambodge. Les deux tiers d’entre eux sont d’origine vietnamienne et sept mille autres sont issus de milieux khmers. Trente-quatre prêtres, de seize nationalités différentes, travaillent dans le pays ; un seul d’entre eux est cambodgien. Les religieuses sont au nombre de 62 (dont trois Cambodgiennes). Outre les quatre séminaristes qui seront ordonnés le 10 juin, deux autres jeunes se préparent au sacerdoce.