Eglises d'Asie

Le gouvernement s’inquiète de la baisse du nombre des vocations monastiques chez les bouddhistes

Publié le 18/03/2010




En mai dernier, le Premier ministre Ratnasiri Wickremanayake, qui est aussi le responsable de Buddha Sasana, la plus haute autorité du bouddhisme au Sri Lanka, a lancé une campagne de publicité dans les principaux journaux du pays pour appeler les jeunes bouddhistes sri-lankais à embrasser la vocation monastique et revêtir la robe safran des moines bouddhistes du pays. Pour le 2 309e anniversaire de l’introduction du bouddhisme dans le pays, il avait fixé comme objectif l’ordination de 1 000 jeunes hommes dans un premier temps et de 1 000 autres avant douze mois. Las, 671 jeunes seulement se sont déclarés intéressés par cette proposition. Face à ce relatif insuccès, Seelaratne Senarath, porte-parole du Premier ministre, a déclaré le 4 juin que l’ordination collective initialement prévue était reportée sine die et qu’une simple cérémonie de “remise de ces jeunes aux temples” prendrait place. Le porte-parole a précisé que les moines des principaux temples avaient rejeté l’idée d’une ordination commune, chacune des sectes formant la communauté bouddhiste ayant ses rites propres. Mais, selon d’autres sources, la faiblesse du nombre des candidats qui ont répondu à l’appel du Premier ministre est la véritable raison de l’annulation de la cérémonie d’ordination collective.

Le nombre des moines bouddhistes au Sri Lanka est actuellement de 39 000, un chiffre que le Buddha Sasana juge insuffisant pour assurer une présence significative dans chacun des très nombreux temples du pays. Dans l’argumentaire développé le mois dernier dans les publicités diffusées par voie de presse, le Premier ministre a mis en avant le fait que le bouddhisme est aujourd’hui menacé au Sri Lanka – dont 69 % des presque 20 millions d’habitants sont bouddhistes. Il a mis en garde contre un complot visant spécifiquement les bouddhistes, sans toutefois en préciser la nature. Certains observateurs rappellent que, ces derniers mois, des responsables bouddhistes ont exprimé leur réserve face à des conversions, nombreuses selon eux, de bouddhistes au christianisme, fruit de l’activisme de certaines communautés chrétiennes présentes dans des régions reculées du pays. Dans le sud du pays en particulier, l’activité de certains groupes fondamentalistes chrétiens, forts de ressources financières importantes, posent en effet des problèmes et les responsables des religions établies – y compris les Eglises chrétiennes – se sont élevées pour dénoncer les méthodes de ces groupes (1).

Selon Wickremanayake, la fermeture de plusieurs monastères dans le sud et le nord-ouest du pays n’est pas dû qu’au seul manque de moines. La faiblesse des ressources financières de ces monastères est aussi en cause. La hausse du coût de la vie a entraîné la diminution des offrandes. Pour répondre à ce besoin, le Premier ministre a lancé une campagne appelant à soutenir financièrement les moines. Selon son porte-parole, la réponse a été positive : “Le Premier ministre a reçu les promesses de 1 000 personnes qui se sont engagées à donner les 1 000 roupies (11 dollars) par mois nécessaire à l’entretien d’un moine. Le gouvernement s’est aussi engagé à coordonner ces dons afin que les bienfaiteurs puissent financer les moines vivants proches de chez eux”.

Depuis 1972, date de la mise en place de la “République démocratique du Sri Lanka”, le bouddhisme est religion d’Etat. Les liens qui existent entre l’Etat et la religion bouddhiste sont ambivalents. D’une part, le gouvernement est dominé par les Cinghalais, en écrasante majorité bouddhiste, et, d’autre part, le Sri Lanka est un pays plurireligieux et multiethnique où cohabitent bouddhistes (69 % de la population), hindous (16 %), musulmans (7 %) et chrétiens (8 %) ainsi que Cinghalais et Tamouls. L’Etat respecte la liberté religieuse mais est soumis à la pression de certains milieux bouddhistes qui refusent toute idée de décentralisation et de plus grande autonomie donnée aux régions peuplées de Tamouls, majoritairement hindous.