Eglises d'Asie

La présidente Chandrika Kumaratunga ne disposant plus de majorité au parlement, l’archevê-que catholique de Colombo appelle à la formation d’un gouvernement d’union nationale

Publié le 18/03/2010




Le 2 juillet, Mgr Nicholas Marcus Fernando, archevêque catholique du diocèse de Colombo, a appelé les partis et les hommes politiques du pays à former un gouvernement d’union nationale, seule solution à ses yeux pour permettre l’ébauche d’une solution à la guerre qui ravage le Sri Lanka depuis 1983. Son appel intervient alors que la présidente Chandrika Kumaratunga a perdu le 20 juin dernier l’étroite majorité dont son gouvernement disposait au parlement depuis les élections législatives d’octobre 2000 (1). L’Alliance du peuple (People’s Alliance), coalition soutenant la présidente, est en effet devenue minoritaire au parlement après la défection d’un petit parti musulman et ne compte plus que 109 députés contre 115 à la coalition de l’opposition, le Parti national uni (United National Party).

Dans le communiqué du 2 juillet, Mgr Fernando a renouvelé l’appel que l’Eglise catholique a, à deux reprises déjà, adressé au monde politique : en décembre 1999, à la suite de la réélection de Chandrika Kumaratunga à la tête du pays, le président de la Conférence des évêques catholiques du Sri Lanka avait lancé un appel à la formation d’une “coalition gouvernementale nationale” (2) ; en octobre dernier, à la suite des élections législatives d’où aucune majorité claire n’était sortie des urnes et qui avaient donc conduit la présidente à former une alliance avec deux petits partis politiques, l’Eglise catholique avait mis en garde contre la fragilité du nouveau gouvernement (3).

Aujourd’hui, “seul un gouvernement d’union nationale peut apporter le paix et la prospérité”, note Mgr Fernando. De nouvelles élections ne serviraient à rien et ne donneraient pas de majorité suffisamment forte à l’un ou l’autre des camps en présence pour gouverner le pays d’une manière stable, précise encore l’archevêque de Colombo. Si les luttes politiciennes continuent et que les partis ne cherchent qu’à se maintenir à tout prix au pouvoir, les gens perdront confiance dans les institutions démocratiques qu’ils rendront responsables de l’état de ruine et de désespoir dans lequel est plongé le pays, poursuit le prélat. Selon lui, cette crise politique donne une “occasion en or” aux deux principaux partis de former un gouvernement d’union nationale. Un tel gouvernement peut seul retourner la situation et mettre fin à la guerre qui oppose depuis dix-huit ans les séparatistes tamouls aux forces armées du gouvernement, dominé par les Cinghalais, conclue Mgr Fernando.

La présidente a évité le vote d’une motion de défiance au parlement le 6 juillet en ne présentant pas aux députés la loi sur l’état d’urgence, loi en vigueur au Sri Lanka depuis dix-huit ans mais qui doit chaque mois être ratifiée au parlement. L’état d’urgence a donc été automatiquement levé dans le pays mais Chandrika Kumaratunga a invoqué des dispositions de la loi sur la Prévention des actes de terrorisme pour maintenir les mesures d’exception mises en place pour combattre les Tigres tamouls. Cette dernière loi ne nécessitant pas un vote régulier des députés, la présidente peut continuer à diriger le pays tout en étant minoritaire au parlement. En octobre prochain, selon les dispositions constitutionnelles, elle aura la possibilité de dissoudre la chambre des députés et d’appeler à la tenue de nouvelles élections.

La scène politique du pays devenant de plus en plus fragile, les observateurs notent que les responsables religieux sont désormais les seuls à proposer des mesures concrètes pour mettre fin à cette guerre qui a coûté la vie à près de 60 000 personnes. En mai dernier, des responsables bouddhistes, chrétiens, hindous et musulmans ont appelé à une refondation des institutions de la nation (4). En juin dernier, Mgr Nicholas Marcus Fernando, lors d’un colloque organisé sur le thème de la “Coexistence dans une société pluraliste”, s’inquiétait du fait que les hommes politiques avaient fait de la religion un des thèmes de leurs affrontements mais se réjouissait de voir que cela ne s’était pas traduit dans le pays par de réels affrontements interreligieux.