Eglises d'Asie

Les attaques terroristes dont ont été victimes les Etats-Unis accélèrent la recomposition du paysage politique malaisien

Publié le 18/03/2010




Onze jours après les attentats meurtriers commis aux Etats-Unis par des terroristes suspectés d’appartenir au réseau animé par le Saoudien Oussama Ben Laden, la coalition de l’opposition regroupée dans le Barisan Alternatif (BA) a éclaté après que l’une de ses principales composantes, le Democratic Action Party (DAP), eut estimée qu’il ne lui était plus possible de rester alliée avec le PAS (Parti Islam SeMalaysia). Par treize voix pour, deux voix contre et trois abstentions, l’instance dirigeante du DAP a décidé le 22 septembre de se retirer du BA étant donné l’impossibilité de trouver un accord avec le PAS, d’obédience musulmane, sur la question de l’établissement d’un Etat islamique en Malaisie.

Afin de contrer le Barisan Nasional, la coalition de la majorité regroupée autour de l’Umno (United Malays National Organisation), parti du Premier ministre Mohamad Mahathir, quatre principaux partis s’étaient regroupés pour former le Barisan Alternatif (BA). Outre le PAS, qui ne fait pas mystère de sa volonté de faire de la Fédération de Malaisie un Etat islamique à la faveur des prochaines élections législatives (1), et le DAP, qui bénéficie traditionnellement d’une partie du vote de la communauté d’origine chinoise, le BA compte deux autres partis, le Parti Keadilan Nasional (Parti national pour la justice), dirigé par l’épouse d’Anwar Ibrahim, l’ancien Premier ministre de Mahathir aujourd’hui en prison, et le Malaysian People’s Party (PRM). Lors de la création du Barisan Alternatif, ces quatre partis avaient signé un manifeste commun par lequel ils s’engageaient à respecter les positions idéologiques de chacun des autres partis contractants. Le mois dernier, Kerk Kim Hock, secrétaire général du DAP, s’était publiquement exprimé pour dire sa gêne à l’endroit des priorités politiques du PAS. Il est possible que les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis aient précipité la rupture du DAP avec le PAS, les militants du DAP ayant « senti le souffle du fanatisme islamique », ainsi que l’exprimait Chen Man Hin, membre du DAP.

L’éclatement de la coalition de l’opposition n’a pas été la seule conséquence des attentats. Tandis que les Etats-Unis travaillaient à rassembler un maximum de pays derrière eux en préparation d’une riposte militaire aux attentats, le chef spirituel du PAS, Nik Aziz Nik Mat, a déclaré que le devoir des musulmans dans le monde entier était de soutenir toute nation musulmane choisie pour être une victime, précisant, sans toutefois nommer l’Afghanistan, qu’une manière de montrer son soutien était d’y envoyer des hommes et de l’argent ou bien de prier pour les gens là-bas. Ce à quoi Abdul Hamid Othman, conseiller religieux du Premier ministre, s’est empressé de répondre en appelant les musulmans de Malaisie au calme. « Notre conseil aux musulmans en Malaisie est pour le moment de ne pas s’impliquer [dans le conflit entre les Etats-Unis et l’Afghanistan]. N’agissons pas à la hâte », a-t-il déclaré dans les colonnes du New Strait Times.

Dans ce contexte, le Premier ministre Mahathir a déclaré que son gouvernement soutenait les efforts entrepris pour éradiquer le terrorisme tout en ajoutant : « Si [nous] voulons nous débarrasser du terrorisme, le problème en Palestine ainsi qu’en Iraq en Tchétchénie doit être éradiqué. Ce n’est seulement lorsqu’il n’y aura plus d’oppression [dans ces pays] que le problème du terrorisme sera maîtrisé. » Selon certains observateurs, la crise provoquée par les attentats aux Etats-Unis pourrait bien profiter à Mahathir et légitimer ses initiatives visant à réduire l’audience et la popularité grandissantes du PAS auprès des Malais musulmans de la Fédération. Selon P. Ramsamy, professeur de sciences politiques à l’Université nationale de Malaisie, le gouvernement va redoubler d’efforts pour que les gens établissent un lien entre les extrémistes musulmans et le programme politique du PAS. Le 25 septembre dernier, le gouvernement a fait savoir que, sur les dix membres du « Groupe des moudjahidins malaisiens » arrêtés au début du mois d’août dernier, sept appartenaient au PAS – dont un des fils du chef spirituel du PAS – et qu’ils avaient été transférés à Kamunting, un camp spécialement prévu pour la détention des personnes faisant peser une menace sur la sécurité de l’Etat.