Eglises d'Asie – Chine
Xinjiang : à l’occasion du ramadan, les autorités chinoises exercent de fortes pressions sur les populations musulmanes, soupçonnées de nourrir des visées séparatistes
Publié le 18/03/2010
Selon le Centre d’information du Turkestan oriental, organisation ouïgoure basée en Allemagne, les écoles et les administrations publiques ont interdit à leurs élèves et à leurs salariés d’observer le traditionnel jeûne du ramadan. Selon une dépêche du 17 novembre dernier de France-Presse, dans une école d’infirmières de la ville de Hotan, située dans le sud du Xinjiang, les consignes demandant à ne pas jeûner durant les heures du jour remontent à l’année dernière mais c’est cette année, à la suite des événements du 11 septembre aux Etats-Unis, que de fortes pressions ont été exercées pour les faire respecter. « Du fait de ce qui se passe en Afghanistan, il nous a été demandé d’accroître notre formation idéologique et politique, témoigne un enseignant de cette école. Nous exigeons de nos élèves qu’elles déjeunent ensemble à la cantine de l’école. Ce sont de jeunes personnes et elles ont à fournir un important travail scolaire. Elles ne doivent donc pas attendre la tombée du jour pour se nourrir. » Toujours selon cet enseignant, l’école a reçu pour instruction d’exclure les étudiants qui refuseraient d’obéir à ces directives.
Selon Dilixat Ravit, porte-parole du Centre d’information du Turkestan oriental, les écoles élémentaires et secondaires de Hotan et de Kachgar ont organisé des activités de façon à maintenir leurs élèves dans l’enceinte des établissements à l’heure du déjeuner ; ces activités incluent le repas. Par ailleurs, au début du mois de novembre, les femmes ouïgoures employées dans les administrations publiques ont reçu pour consigne de ne pas porter de foulard, pratique « féodale », tant qu’elles étaient au bureau. « Le voile qui couvre la tête est accepté dans notre établissement, mais celui qui est noué d’une manière religieuse, de façon à ne laisser apparaître que l’ovale du visage, n’est pas permis », rapporte l’enseignant de l’école d’infirmières de Hotan.
Toujours selon Dilixat Ravit, du 14 au 16 novembre, quarante dirigeants religieux ont été convoqués à Urumqi, capitale de la province du Xinjiang, où un programme spécial avait été préparé à leur intention. Des vidéos leur ont été projetées où l’on pouvait voir des musulmans aux Etats-Unis se faire attaquer et avoir peur de sortir de chez eux du fait des sentiments anti-musulmans que les Américains nourriraient depuis les attaques du 11 septembre. Selon le Centre d’information du Turkestan oriental, Pékin, inquiet de l’influence croissante des Etats-Unis dans la région, chercherait ainsi à désamorcer les sentiments séparatistes que les chefs religieux musulmans sont sensés entretenir.
De fait, la Chine connaît un problème récurrent depuis de nombreuses années au Xinjiang. Les populations ouïgoures, très majoritairement musulmanes, ressentent de plus en plus durement l’implantation de populations chinoises Han, culturellement très différentes. Certains Ouïgours, favorables à l’établissement d’une nation indépendante, le Turkestan oriental, sont soupçonnés d’avoir organisé des attentats à l’explosif dans certaines grandes villes chinoises. A la suite de « la guerre au terrorisme » lancée par les Etats-Unis, la Chine a répété que les « terroristes » ouïgours au Xinjiang, entraînés selon elle en Afghanistan, formaient une menace réelle et justifiaient une réaction ferme (1). En visite dans la capitale chinoise au début du mois de novembre, Mary Robinson, Haut Commissaire aux droits de l’homme des Nations Unies, a cependant mis en garde les autorités chinoises, leur déclarant qu’elles ne devaient pas prendre prétexte de la guerre déclarée au terrorisme pour mener une vaste opération de répression au Xinjiang.