Eglises d'Asie

Après 21 années d’existence, la politique de l’enfant unique a été officialisée par le vote d’une loi à l’Assemblée nationale populaire

Publié le 18/03/2010




En vigueur depuis 21 ans dans le pays, la politique de l’enfant unique vient d’être officialisée par le vote d’une loi. Adoptée à la fin du mois de décembre 2001 lors de la 25ème session du Comité permanent de l’Assemblée nationale populaire (ANP), ce texte vient combler un vide juridique qui n’a certes pas empêché les autorités d’appliquer cette politique dans toute sa rigueur mais dont les législateurs chinois se plaignaient car facteur de troubles. Selon Li Peng, président de l’ANP, cette nouvelle loi permettra de “stabiliser”, c’est-à-dire maintenir, cette politique.

Le contenu de cette politique mise en place au tout début des années 1980 est connu (1). Derrière le principe de l’enfant unique se cache une réalité rendue complexe par la diversité de son application sur le terrain. Selon Gu Baochang, secrétaire général adjoint du département de coopération internationale de l’Association chinoise pour le planning familial, seulement environ 30 % de la population chinoise est obligée d’adhérer strictement au principe de l’enfant unique : il s’agit, pour la majorité, des popula-tions urbaines du pays. 50 autres pour cent de la population sont soumis à ce qui est connu en chinois comme la politique de l’“enfant unique et demi”, mesure qui permet aux habitants des zones rurales d’avoir un deuxième enfant lorsque leur premier né est de sexe féminin. Les 20 derniers pour cent de la population ne seraient pas soumis à cette politique : dans certaines régions pauvres du pays, les cou-ples auraient de facto droit à deux enfants et, d’une façon générale, les minorités ethniques peuvent avoir jusqu’à trois enfants par famille. Sur le terrain, il semble que l’application de la loi dépendait jus-qu’à aujourd’hui en grande partie de la volonté des autorités locales. Soumises à des quotas qui leur étaient imposés, ces autorités pouvaient faire preuve, selon les régions et les années, d’une extrême sé-vérité, n’hésitant pas à recourir à des mesures de coercition dramatique, ou alors d’un certain laxisme.

Selon un député de l’ANP cité par le China Daily, il était “temps de voter cette loi car l’idée du planning familial et l’importance de la santé reproductive sont des notions largement acceptées par le public”. La population de la Chine compte aujourd’hui environ 1,3 milliards d’habitants et les autorités chinoises pensent que la politique de l’enfant unique a “évité” au pays 300 millions de naissances supplémentaires en 21 ans. Le gouvernement a admis que sa politique a mené à des excès tels que l’infanticide, les avortements forcés et l’avortement sélectif des fœtus féminins (du fait de la préférence des couples pour les garçons, gage de continuation de la lignée familiale et de soutien matériel pour les vieux jours). Ces abus sont la raison pour laquelle le pays compte un ratio de 117 nouveaux nés masculins pour 100 bébés filles (soit un très net écart par rapport à la moyenne normale qui est de 106 garçons pour 100 filles). Mais, malgré l’aveu de ces excès, la politique de l’enfant unique n’est pas remise en cause par le pouvoir chinois.

La loi récemment votée, estiment les autorités chinoises, devrait permettre de clarifier l’application de la politique de l’enfant unique et donner les moyens juridiques aux tribunaux pour poursuivre les travailleurs du planning familial par trop zélés qui n’hésitent pas à recourir à des mesures extrêmes pour faire respecter les quotas dans la zone dont ils sont responsables. Selon l’agence officielle Xinhua, la loi “encourage” aussi les femmes à retarder l’âge du mariage et celui de la première – et bien souvent unique – naissance. L’usage des appareils à échographie, largement répandus à travers tout le pays, afin de déterminer le sexe de l’enfant à naître est interdit. Selon les observateurs, les dispositions de la loi ne font que reprendre des mesures déjà édictées par les autorités et elles resteront lettre morte tant que le système du planning familial et des quotas prescrits d’en haut à chaque district ne sera pas réformé. D’autre part, l’enrichissement croissant d’une partie de la population et la complexification de la société rendent de plus en plus difficile le contrôle de la fécondité des Chinois. En effet, les classes moyennes urbaines, dans la mesure où elles le souhaitent, disposent désormais des moyens financiers de payer les amendes imposées en cas de seconde naissance et la plus grande mobilité de la population chinoise rend difficile le contrôle des individus, des dizaines de millions de Chinois formant désormais “une population flottante”, instable géographiquement et placée hors des cadres administratifs normaux.