Eglises d'Asie

La fréquentation des universités et instituts d’Etat permet à des religieuses catholiques d’améliorer leur formation

Publié le 18/03/2010




Supérieure des Sours de la Sainte Famille à Lanzhou, dans la province du Gansu, Sour Yan Yumei explique que cette année, sur les soixante religieuses que compte sa congrégation, vingt étudient dans des établissements d’études supérieures ou des universités publiques où elles se forment, entre autres, à la médecine ou à la langue anglaise. Beaucoup de ces religieuses sont entrées en religion dans les années 1980 et ont quitté l’école à la fin du primaire ou du collège ; après avoir prononcé leurs voux, poursuit Sour Yan, âgée de 38 ans, elles sont encouragées à reprendre des études : “Les études sont nécessaires pour l’évangélisation. En effet, le niveau d’éducation des laïcs est en progression constante et il est indispensable que les religieuses soient formées pour être en mesure de rester en contact avec les jeunes et comprendre ce dont ils ont besoin”. Les familles des religieuses participent aux frais occasionnés par les études, souligne-t-elle. Elle admet cependant que certaines religieuses s’habituent difficilement à cette vie estudiantine et peinent à trouver leur équilibre entre le travail intellectuel et la vie de prière du couvent.

De son côté, Sour Huang Qujiao, de Guangzhou, dans la province de Guangdong, signale que sept religieuses viennent de terminer des études supérieures et que cinq autres, sur les 31 jeunes religieuses que compte son couvent, continuent d’étudier. Sour Huang, pour sa part, a terminé une licence en langue chinoise et vient d’entreprendre un troisième cycle. Elle souligne combien le soutien des laïcs est important pour les religieuses en cours d’études.

Ces deux religieuses de Lanzhou et de Guangzhou précisent, au cours de l’interview qu’elles ont accordée à l’agence Ucanews (1que, depuis la fin des années 1990, ne sont plus admises au couvent que les jeunes filles qui ont au moins achevé le premier cycle des études secondaires. Après 1980 en effet, alors que l’Eglise catholique se relevait des ravages de la Révolution culturelle (1966-1976), les congrégations admettaient des candidates qui, souvent, avaient à peine terminé l’école primaire. Dans la Chine d’aujourd’hui, où les changements sont si rapides, les religieuses, elles aussi, doivent progresser sinon elles auront du mal à remplir leur mission, déclare Sour Huang.

Le P. Shen Bin, du diocèse de Haimen, dans la province de Jiangsu, partage la même analyse de la situation. Dans son diocèse, deux religieuses sont parties étudier la médecine à Wuhan, dans la province voisine du Hubei. Bien qu’ils est fort probable que les deux religieuses ne pourront pas dans un proche avenir travailler dans le domaine médical, l’Eglise se doit de se préparer à des évolutions futures qui surviendront sans doute, explique le P. Shen. Pour l’heure, par manque de ressources financières, le cas de ces deux religieuses demeure l’exception ; en effet, bien souvent, les religieuses qui n’ont pas dépassé le collège ne peuvent aller au-delà du lycée et se contentent donc d’achever leurs études secondaires.

Pour le P. Luke Tsui Kam-yiu, directeur de l’Institut catholique pour la Religion et la Société, à Hongkong, assurer une meilleure formation scolaire puis universitaire aux religieuses est très positif car cela permet de renforcer leur crédibilité, tout particulièrement auprès des jeunes mais aussi auprès des laïcs et des prêtres. Organisateur de sessions de formation pour les religieuses en Chine continentale, le P. Tsui indique qu’il a entendu dire qu’un certain nombre de religieuses étudiaient aussi bien l’art que le métier d’infirmière ou la médecine. Selon lui, à mesure que le niveau d’éducation des femmes s’élève dans le pays, il est indispensable que l’Eglise catholique suive le mouvement et ne laisse pas ses religieuses dans un statut d’infériorité par manque de formation intellectuelle.

Une enquête nationale, menée par le Bureau national des statistiques et la Fédération nationale chinoise des femmes et réalisée en septembre 2001, a révélé que le statut social et le niveau d’éducation des femmes avaient beaucoup progressé durant ces dix dernières années. Comparé à 1990, l’analphabétisme chez les femmes âgées de 18 à 64 ans est tombé de 31 % à 11 %. Le nombre des femmes ayant suivi une formation supérieure a lui aussi augmenté et, ces trois dernières années, elles ont été 13,5 % à avoir suivi une formation continue. Cependant, en zones rurales, comparé à celui des hommes, le niveau d’éducation des femmes reste relativement faible : 42,3 % des femmes sont passées par le collège contre 63,2 % pour les hommes. L’analphabétisme féminin y est aussi plus élevé : 13,6 % contre 9,6 % pour les hommes.