Eglises d'Asie – Cambodge
LE POINT SUR LA SITUATION POLITIQUE ET SOCIALE du 1er mars au 30 avril 2002
Publié le 18/03/2010
Après plusieurs mois de négociations infructueuses entre le Cambodge, le Vietnam et le Haut Commissariat pour les ré-fugiés, l’épopée des 905 montagnards Vietnamiens réfugiés au Cambodge se termine par leur accueil aux Etats-Unis.
Le 21 janvier, un accord tripartite signé entre le Vietnam, le Cambodge et l’UNHCR (Haut Commissariat de l’ONU pour les réfugiés) prévoit d’organiser le retour de ces réfugiés au Vietnam sur une base volontaire. Cependant, durant la dernière semaine de février, le HCR décide de suspendre sa participation, car les autorités des deux pays ont décidé de fixer le 30 avril comme date butoir pour la fin des opérations de rapatriement, ce qui va à l’encontre du caractère volontaire du rapatriement. Le Comité cambodgien qui regroupe 18 ONG locales de défense des droits de l’homme partage l’opposition du HCR. Le HCR exprime d’autre part sa « grave inquiétude » après la reconduction à la frontière de 63 montagnards arrivés le 2 mars. « C’est une violation des obligations internationales fixées par la Convention sur les réfugiés de 1951 et le Protocole de 1967 dont le Cambodge est signataire et de plus, « en contradiction avec l’esprit de l’accord tripartite » du 21 janvier.
Le 6 mars, le représentant du gouvernement cambodgien s’en prend violemment aux « responsables du HCR » pour avoir eux-mêmes transporté les 63 « soi-disant réfugiés montagnards » du Vietnam au Cambodge. Il nie également toute forme de torture à l’égard des réfugiés. Le représentant du HCR qualifie ces déclarations d’« absurdes » et maintient ses condamnations.
Les 12 et 13 mars, les discussions entre le Vietnam, le Cambodge et le HCR échouent, la partie vietnamienne refusant d’autoriser le HCR à se rendre sur les Hauts Plateaux. Le Cambodge qui était plutôt favorable au HCR se range de plus en plus du côté du Vietnam.
Le 14 mars, le journal vietnamien Cong An annonce que 17 Cambodgiens ont été arrêtés par la police vietnamienne pour « organisation de départs illégaux » des montagnards.
Ce même 14 mars, 43 montagnards expriment leur désir de retourner au Vietnam, de leur plein gré, sans l’aide du HCR. Au total ce sont donc 174 réfugiés qui sont retournés au Vietnam, dont 15 dans le programme de rapatriement du HCR.
Le 15 mars, les autorités cambodgiennes reconduisent de force à la frontière 35 montagnards qui venaient de la franchir, avant qu’ils ne puissent rencontrer les membres du HCR. C’est une nouvelle violation de la Convention de 1951.
Le 21 mars, 400 personnes venant du Vietnam à bord de douze bus font irruption dans le camp de réfugiés, menacent, malmènent les réfugiés et les membres du HCR. Théoriquement, ce sont des parents venus supplier les réfugiés de retourner chez eux. Il s’agit en fait d’agitateurs vietnamiens venus menacer les réfugiés. Le HCR réagit en exprimant sa « grave inquiétude » ; Washington réagit vivement.
Suite à ces incidents, le 26 mars, les Etats-Unis proposent d’accorder l’asile politique aux 905 montagnards présents au Cambodge. Trois jours après, Hun Sen accepte la proposition, « Le Cambodge est comme un terrain de foot, le Vietnam et les Etats-Unis sont les joueurs dit-il. Le 1er avril, Hanoi accepte à son tour la proposition américaine.
Le 13 avril, environ 350 montagnards arrivent dans la capitale cambodgienne par avion, les autres suivront en camion le 17. Dès leur départ, des fonctionnaires de police cambodgiens et vietnamiens pillent le camp et brûlent ce qui reste, menacent même de tuer les agents du HCR. Ces agents reconnaissent formellement au moins deux fonctionnaires vietnamiens.
Y Hung, militant séparatiste actif a été mis en prison dès la fin mars, par la police cambodgienne, mais sans aucun motif, sous pression de la police Vietnamienne. On l’accuse de rapt, de viols, etc. « Tous les prétextes sont bons dit un observateur. Le Vietnam est prêt à payer une grosse somme d’argent pour que le Cambodge lui livre le militant. Mais finalement, Y Hung est libéré, et envoyé rejoindre les autres réfugiés à Phnom Penh le 26 avril.
Grâce à l’action conjuguée de plusieurs ONG locales et internationales, les montagnards cambodgiens dupés par un général qui leur avait acheté leurs 1 250 hectares de terres pour quelques sacs de sel, en 1999, ont retrouvé la propriété de leurs titres de propriété.
REACTIONS AUX ELECTIONS
Tous les observateurs neutres s’accordent à affirmer que les dernières élections municipales du 3 février ont été marquées par le manque d’information des électeurs, le manque d’accès aux médias pour les partis autres que le PPC (Parti du Peuple cambodgien). L’Union européenne a rendu un avis mitigé sur le déroulement du scrutin : la préparation a été bonne sur les plans technique et logistique, en dépit de quelques incidents, mais « la mort violente de plusieurs candidats et militants, l’intimidation des électeurs et l’accès inégal des partis aux médias d’Etat constituent des éléments négatifs Le bureau de l’ONU pour les droits de l’homme rend un rapport de tonalité très voisine.
Quelques jours après les élections, le NIFEC, association cambodgienne d’observation des élections, ainsi que le FUNCINPEC, parti royaliste et grand perdant des élections, demandent que le CNE (Comité national des élections) soit modifié, à cause de son manque d’indépendance par rapport au pouvoir. Selon l’association, le CNE devrait être composé de cinq à sept personnes seulement, contre onze actuellement, et ne comprendre que des experts et non des représentants de partis politiques. Dans une proposition de loi soumise à l’Assemblée nationale, le FUNCINPEC, quant à lui, propose que le CNE ne comprenne que six membres, soit deux par parti politique représenté à l’Assemblée. Les Etats-Unis, le Japon et l’Australie sont favorables à cette composition.
Dans plusieurs villages, les villageois portent plainte devant les tribunaux pour la mauvaise distribution des terres durant les années 1980 : les chefs de villages s’en étaient attribué des lots assez conséquents…
A O Smach, c’est visiblement le secrétaire, nommé par le ministère de l’Intérieur, qui décide de tout.
Dans une commune de Kandal, le PPC refuse de céder le bâtiment qui servait à la fois de siège du parti et de mairie.
Remous au sein des partis
Grand vaincu des élections, le FUNCINPEC se déchire intérieurement. Au début du mois de mars, 2 000 policiers et militaires lancent une pétition pour demander le renvoi de You Hockry, co-ministre de l’Intérieur, et de Toh Lah, ministre de l’Education. La presse fait état d’une autre pétition de 10 000 signatures, émanant de Kompong Cham, en leur faveur. You Hockry n’aurait pas fait le nécessaire « pour permettre une bonne réintégration des militaires et policiers ayant combattu durement pendant la résistance Il a plutôt placé ses amis aux postes intéressants. Pour le prince Sirivuddh, secrétaire général du parti, l’heure n’est pas aux querelles mais à l’union et à la solidarité.
En tant que co-ministre de l’Intérieur, You Hockry était en possession d’une liste sur laquelle plusieurs membres émi-nents du FUNCINPEC, dont Sirivuddh, étaient fichés com-me CCF (Combattants Cambodgiens pour la Liberté), accu-sation suffisante pour les faire incarcérer. On reproche à You Hockry d’avoir gardé cette liste secrète, et de n’avoir rien fait pour supprimer les noms des membres du parti. Certains accusent You Hockry de faire pression sur eux en inscrivant leur nom sur cette liste, d’autres l’accusent d’avoir provoqué les événements de 1997. Plusieurs mem-bres du FUNCINPEC sont déçus de l’attitude de Ranariddh qui ne s’est pas opposé à Hun Sen, et lorgnent vers le PSR. Deux tiers des soixante-deux membres du comité directeur du FUNCINPEC, réuni le 30 avril à Phnom Penh, demandent la démission de You Hockry, et lui laissent une semaine de réflexion. Pendant ce temps, Ranariddh imite son auguste père en tournant son premier film…
PSR (Parti Sam Rainsy)
Le 22 avril, Srun Vong Vannak, transfuge du PPC, comp-tant parmi les membres fondateur du parti, quitte le PSR avec fracas accusant les responsables de manque de démo-cratie et de népotisme. Phi Tach, chef de cabinet du parti, démissionne également, mais sans bruit, « pour s’adonner à d’autres tâches ». En France, deux factions du PSR se disputent la légitimité de l’appellation « PSR-France ».
Srun Vong Vannak est un homme assez peu recommandable. Il fut accusé du meurtre du beau-frère de Hun Sen, et libéré grâce aux efforts de Sam Rainsy. Il semble que ce soit l’intérêt qui le guide plus que les dissensions d’ordre politique.
Hun Sen est au dessus des partis, certains l’accusent de vouloir devenir roi : « Je n’ai pas le droit d’être roi, mais j’ai le pouvoir de créer le roi répond-il. Son compor-tement est étrangement semblable à celui de Sihanouk : il écrit des poèmes, fait un film, se déclare neutre pour les élections et ne vote pas, ouvre les écoles qu’il baptise à son nom, se rend en hélicoptère (la « Hansa l’Oie sacrée, monture du roi) dans les villages…
ECONOMIE
Agriculture
Le 12 mars, selon une déclaration du ministre de l’Agriculture devant la chambre de Commerce de Phnom Penh, l’agriculture cam-bodgienne est loin d’être compétitive avec celle des pays voisins. Les produits vietnamiens sont cinq fois moins chers que les produits cam-bodgiens et de meilleure qualité. Les 42 marques de pesticides interdi-tes au Vietnam et les 18 interdites en Thaïlande sont, de façon surpre-nante, en circulation au Cambodge. Faisant la liste des principaux produits agricoles, il constate une baisse générale : le tabac (10 000 tonnes par an) a chuté de 10 000 à 7 000 riels le kilo ; le soja (40 000 tonnes/an) ne rapporte que 300 $ la tonne. Le maïs est produit à perte. La noix de cajou est souvent abandonnée pour cultiver des bananiers. Le kilo de poivre (500 hectares sont plantés en poivriers) est passé de 5 à 2 $ le kilo. La canne à sucre ne trouve plus de débouchés.
La compagnie Angkor Kasékam a exporté 20 000 tonnes de riz vers Hongkong et les Etats-Unis. La compagnie donne des semences du riz Néang Malis d’excellente qualité aux producteurs, refuse l’usage d’engrais, et leur achète la récolte à bon prix.
Le 22 avril, la ministre indonésienne du Commerce s’est engagée à acheter entre 50 000 et 100 000 tonnes de riz cambodgien par an.
Le Cambodge veut se joindre à l’Association internationale du caoutchouc pour avoir part aux marchés internationaux. Le Cambodge produit environ 40 000 tonnes de caoutchouc par an, vendues à 580 $ la tonne. Les plantations emploient environ 15 000 travailleurs et couvrent 70 000 hectares. Grâce à une aide de la BAD (Banque Asiatique pour le Développement), le gouvernement espère étendre la superficie des plantations à 150 000 hectares durant les dix prochaines années. Actuellement, le Cambodge se contente des marchés asiatiques, car sa production est insuffisante pour intéresser les marchés internationaux.
Pêches
Pour la saison 2000-2001, d’octobre à mai, le Tonlé Sap a produit 230 000 tonnes de poissons, soit plus de la moitié des quantités capturées dans l’ensemble du pays. On y compte pas moins de 200 espèces de poissons et 235 espèces d’oiseaux. Mais les techniques illégales de pêche, la déforestation, spécialement la réduction du million d’hectares de forêts inondées en bordure du grand lac, constituent autant de menaces pour le vivier cambodgien. Hun Sen accuse le monde entier d’être responsable de cette situation pour avoir coupé le Cambodge de la communauté internationale.
Depuis la fin du mois de février, de très nombreux poissons morts flottent sur un affluent du Mékong près de Kratié. On accuse les montagnards Stéang du Vietnam voisin d’avoir eu recours à un savant mélange végétal comme appât qui fait mourir les poissons. Depuis la mi-avril, on estime à au moins 100 tonnes les poissons morts dans Tonlé Sap, sans que l’on en sache exactement la raison.
Un chercheur américain accuse la Chine de « tuer le Mékong » en voulant y construire des barrages et y creuser des chenaux pour la navigation. La Chine se défend en affirmant que seulement 16 % des eaux du Mékong passent par la Chine.
Bois
Le 11 décembre 2001, Hun Sen signait un énième moratoire concernant l’arrêt de la déforestation. Des agents de Global Witness parviennent à s’introduire dans la concession GAT et y prennent des photos. Ils estiment qu’au moins 1 000 arbres ont été abattus entre mars et avril. Les villageois avaient d’habitude de récolter la résine de ces arbres comme gagne-pain. Déjà en septembre 2000, Global Witness avait donné des preuves des pratiques illégales de GAT et demandé la résiliation de son contrat. Global Witness révèle également que le trafic de bois avec la Thaïlande continue dans les provinces de Siemréap et d’Oddar Méan Chhey, avec le concours des militaires. Des députés ont posé une question au gouvernement sur le sujet. On signale que des arbres continuent à être coupés dans la réserve nationale du Bokor.
En mars dernier, le ministère de l’Environnement critique violemment Global Witness ; de hauts fonctionnaires et militaires citent l’association en diffamation. Mais le tribunal classe l’affaire « sans suite Selon Eva Galabru, présidente de l’association, plus de vingt rapports de délits ont été soumis l’an dernier au gouvernement, mais aucune action n’a été menée…
Selon sa rhétorique habituelle, le 11 avril, le Premier ministre menace de jeter en prison tous ceux qui contreviennent aux règles de l’exploitation du bois : « J’utiliserai tous les moyens d’intervention, les hélicoptères, les chars d’assaut, pour empêcher le déboisement Or chacun sait que c’est la Phéaphimex, société dont le Premier ministre est le principal actionnaire, qui déboise…
Par suite de l’augmentation du prix de bois de construction imposé par l’Etat pour mettre fin au trafic de bois, les célèbres palmiers à sucre des régions de Kompong Svay et de Baray dans la province de Kompong Thom sont abattus à la tronçonneuse et vendus un dollar et demi à des grossistes qui les envoient au Vietnam.
Tourisme
Le nombre de touristes étrangers débarqués à Siemréap a augmenté de 50 % par rapport à l’an dernier. La Société Concessionnaire de l’Aéroport (SCA, en partie française) a décidé l’application immédiate de nouveaux tarifs pour la taxe d’aéroport qui passe de 7 à 15 $ pour les vols internationaux, et de 4 à 5 $ pour les vols domestiques, quelle que soit la nationalité du voyageur (une nouveauté). Les taxes de l’aéroport de Phnom Penh sont de 20 et 5 $. La SCA est chargée de nombreux travaux d’infrastructures qui s’étaleront sur 20 ans, pour un montant de 73 millions de dollars. La capacité maximum d’accueil actuelle de l’aéroport de Siemréap, après aménagements, est estimée à 2,3 millions de passagers par an, estimations prévues atteintes en 2012. Les autorités cambodgiennes attendent 1 million de visiteurs en 2005. La création d’un nouvel aéroport, dont le coût est estimé à 350 millions de dollars, est évoquée, mais non encore planifiée. Une enveloppe de 2 millions de dollars est prévue par la SCA pour une aide technique à la promotion touristique, en partenariat avec l’Unesco et l’autorité Apsara, chargée de la gestion du domaine des temples : amélioration des infrastructures d’accueil, meilleure gestion des flux de visiteurs, etc.
Le 10 mars, la Thaïlande ouvre deux postes frontières aux touristes : O Smach et Païlin. Cela permettra aux touristes de pratiquer un tourisme « historique en visitant les refuges des Khmers rouges. A O Smach, il y a en plus un casino construit sur un terrain cultivé par des paysans que l’on a chassés…
Après la fermeture de la frontière à Préah Vihéar par la Thaïlande, en décembre dernier, le maire de Phnom Penh a décidé de jumeler sa ville avec le temple isolé au sommet des Dangrek. Il fait réparer la route qui y conduit de Phnom Penh (170 km de route asphaltée et 250 km de piste, dont 113 de très mauvaises), forme 25 guides pour diriger les touristes, prévoit d’installer une station radio dans le voisinage du temple. Désormais, le temple reçoit également la visite de 10 à 60 touristes par jour venant de Thaïlande par la piste passant par O Smach et Anlong Veng, qui n’est qu’à 75 km de Préah Vihéar.
Des unités de police touristique sont créées à Phnom Penh, à Siemréap et à Sihanoukville.
Industrie
L’usine Nestlé a interrompu temporairement sa production de lait concentré sucré en avril, et licencié 39 personnes. Cette unité qui produisait environ 10 000 tonnes de lait par an a stoppé ses activités d’exportation depuis le Cambodge, la production au Cambodge n’étant pas compétitive avec celles dans les pays voisins. D’autre part, des produits Nestlé entrent au Cambodge en contrebande, et n’acquittent aucune taxe, et sont donc vendus moins cher que les produits cambodgiens. Les effectifs locaux de la société se sont réduits de 300 à 104.
Coca Cola, Tiger Beer et d’autres sociétés annoncent la possibilité de se retirer du Cambodge, à cause des boissons importées en contrebande des pays voisins.
Pavillon de complaisance
Le 12 avril, un cargo battant pavillon cambodgien, transportant de l’acier de l’Ukraine vers l’Egypte, heurte un cargo turc, et coule dans le détroit des Dardanelles.
Le 24 avril, un cargo battant pavillon cambodgien coule près de Taiwan, après être entré en collision avec un bateau indonésien.
En 1994, le gouvernement cambodgien a désigné le Cambodia Shipping Corp. comme agent exclusif pour opérer au nom du registre des bateaux cambodgiens. 450 bateaux ont ainsi été enregistrés. Sur 233 inspections, 207 déficiences ont été observées. « Le Cambodge fournit un toit à des épaves qui ne peuvent plus naviguer, même plus en Turquie ou en Russie affirme Chamber of Shipping.
Système bancaire
Le 5 mars, la banque malaisienne First Overseas Bank (FOB) de Siemréap gèle sans prévenir tous les dépôts supérieurs à 500 $. La fermeture de cette banque ordonnée par le gouvernement entraîne celles de ses antennes de Sihanoukville et de Phnom Penh. Les 150 000 $ déposés par la branche du CMAC se sont « évanouis dans les aléas du marché le CMAC met son personnel de déminage au chômage technique à partir du 31 mars. Dès l’adoption de la loi sur le système bancaire en 1999, les différentes banques devaient augmenter leur capital de 8 à 13 millions de dollars selon les recommandations du FMI, 11 banques avaient alors fermé leurs portes, 18 ont obtenu une licence provisoire.
Le 7 mars, la banque britannique Standard Chartered Bank déclare qu’elle va fermer ses portes en mai. Cette décision serait liée à l’environnement économique difficile.
Le 19 mars, le Crédit Agricole Indo-Suez annonce qu’il entreprend des négociations avec la Banque nationale pour mettre fin à ses activités au Cambodge.
En avril, la Singapore Commercial Bank ferme volontairement ses portes, après trois ans de service.
Il ne reste actuellement au Cambodge que neuf banques commerciales, contre 31 ou 32 en 1999, ainsi que des banques spécialisées dans le micro-crédit qui sont dispensées de l’augmentation de leur capital.
Aides et investissement
Le 5 mars, la Suède et le Cambodge signent un nouvel accord de coopération d’un montant de 31 millions de dollars pour la période des années 2002-2004. Cette somme servira à améliorer les conditions de vie des populations rurales et à la promotion de la bonne gouvernance.
Le 21 mars, la compagnie Chevron Texaco est autorisée à exploiter 70 % des nappes de gaz et de pétrole situées dans le bloc A du golfe du Siam, soit sur 6 278 km . Un autre groupe, la Mitsui Oil exploration est autorisée à explorer les 30 % restants. Ce travail d’exploration nécessitera une dizaine d’années. D’autres sociétés avaient commencé l’exploration des gisements mais se sont retirées, estimant ne pas pouvoir en retirer suffisamment de profit. Le gouvernement reçoit annuellement 9 millions de royalties, mais personne ne peut dire où va cet argent.
Le 1er avril, les Etats-Unis font un don de 24 400 tonnes de riz et de 2 300 tonnes d’huile végétale au programme du PAM (Programme Alimentaire Mondial) qui a nourri 1,7 millions de Cambodgiens en 2001, par le moyen des opérations « nourriture contre travail Depuis le début de ce programme, le PAM a fait construire 13 500 km de routes.
Le 4 avril est inauguré le pont qui relie Koh Kong et la Thaïlande, long de 1 996 m. Ce pont servira le développement des 110 000 km prévus pour l’implantation d’usines tournées vers l’exportation. Il a coûté 8 millions de dollars, financés par les autorités thaïlandaises. Les travaux de la route nationale 48 reliant Koh Kong à Srè Ambel, longue de 160 km, sont estimés à 7,2 millions : 2 millions sont donnés par le gouvernement thaïlandais, 5 millions prêtés par des hommes d’affaires thaïlandais, notamment le patron du casino de Koh Kong. Cette route commencée dans les années 1960, pourra devenir à l’avenir, une seconde autoroute de l’ASEAN, reliant la Thaïlande, le Cambodge et la Malaisie. Il convient d’y voir une mainmise progressive de la Thaïlande sur l’économie de l’Ouest cambodgien.
Le 10 avril, l’Inde donne 10 000 tonnes de riz au Cambodge.
La BM (Banque mondiale) octroie un prêt de 50 millions de dollars pour réparer les routes secondaires des quatre provinces du Nord-Ouest durant les cinq prochaines années. Ainsi 400 km de route seront améliorés, permettant la visite de centres archéologiques et religieux, comme Koh Kèr et Boeung Méaléa.
Le 1er mai est lancé un chantier de « réhabilitation urgente » du port de Sihanoukville, qui comprend la construction d’un nouveau quai de 240 m pour accueillir des porte-conteneurs, installer un nouveau terminal à conteneurs et des opérations de dragage. Ce projet est financé par un prêt du Japon de 39 millions de dollars. Le port a rapporté 26 millions de dollars de 1997 à 2001, 825 cargos sont passés par le port en 2001 contre 229 en 1992, 145 292 conteneurs ont été déchargés en 2001 contre 4 194 en 1992.
Le Japon et le Cambodge annoncent une étude économique pour développer « le couloir de la croissance » entre Phnom Penh et Sihanoukville, d’ici 2015. Ce « couloir » aidera le Cambodge à exporter ses produits vers l’étranger, spécialement vers la Chine.
Le gouvernement demande à la communauté internationale 1,4 milliard de dollars d’aides pour les trois prochaines années. La réunion des pays donateurs se tiendra en juin à Phnom Penh.
SOCIETE
Le système judiciaire
Les prisons cambodgiennes sont dans un état déplorable, et le système judiciaire l’est tout autant. Par exemple, dans la prison de Prey Sâr, près de Phnom Penh, qui compte 1 347 détenus, 441 sont en détention provisoire, dont 128 ont dépassé les six mois légaux. La prison héberge 276 femmes et mineurs. A la prison CC II, 123 prisonniers sont en détention provisoire dont 38 ont dépassé les six mois réglementaires. Selon un membre du bureau des droits de l’homme de l’ONU, environ 90 % des détenus auraient dépassé le temps de détention provisoire. Les juges se plaignent du manque de moyens : il n’y a même pas de véhicule pour transporter les prévenus de la prison à la cour ! L’association Legal Aid s’est engagée à faire un don de 15 000 dollars pour acheter un véhicule permettant le transfert des détenus de la prison à la cour.
Le Cambodge a un manque criant d’avocats, ce qui explique les détentions provisoires excessives. Le pays compterait environ 250 juristes, mais seulement 180 exerceraient leurs fonctions.
Selon Peter Leuprecht, représentant du secrétaire général de l’ONU pour l’application des droits de l’homme au Cambodge, la réforme judiciaire avance trop lentement. Seulement 0,3 % du budget national est destiné à la Justice
Un rapport délivré le 5 mars par le Département d’Etat des Etats-Unis stigmatise assez durement la situation des droits de l’homme au Cambodge : adoptions frauduleuses, intimidations politiques durant les élections, violation du droit des femmes et des minorités, lynchages, absence d’investigation des crimes commis par l’armée et la police, faiblesse du système judiciaire. Le 6 mars, le gouvernement nie l’existence de ventes frauduleuses d’enfants et ne parle que de « cas isolés
Le 3 mars, un millier de personnes, en majorité des femmes, défilent à Phnom Penh pour réclamer leurs droits. Selon les chiffres officiels, en 2001, on a dénombré 845 cas de violences conjugales, 101 viols de femmes et d’enfants, 120 trafics d’êtres humains.
Un escroc grec, Joannis Petropoulos, qui avait officiellement soutiré de l’argent à des milliers de Cambodgiens, Thaïlandais et Indonésiens en échange d’un contrat en Grèce pour la construction du futur stade olympique, a été arrêté en Grèce. 1 263 Cambodgiens avaient été « sé-lectionnés et avaient versé entre 500 et 1 000 dollars pour arranger l’embauche. Devant le mouvement de protestation des gens spoliés, le gouvernement cambodgien a finalement décidé de les rembourser.
Mouvements sociaux
Les deux derniers mois sont riches en manifestations de toutes sortes, montrant que la marche vers une société plus juste n’est pas stoppée.
Le 4 mars, près de 500 ouvriers de l’usine textile M&G Garment Manufacturing & Co. manifestent devant l’ambassade de Chine, après une semaine de grève. La direction a suspendu un ouvrier absent pendant quatre jours qui prétend avoir été cloué au lit par la fièvre typhoïde. Les grévistes se plaignent de devoir verser 1 000 riels au comptable de l’usine pour connaître le détail de leur fiche de paie. Ils se plaignent également du manque d’hygiène.
Le même 4 mars, plusieurs centaines d’ouvriers de l’usine textile King First manifestent devant l’Assemblée nationale pour réclamer l’amélioration de leurs conditions de travail, pour protester contre le licenciement d’un syndiqué et contre les coups donnés par le service de garde à un travailleur.
Le 7 mars, les ouvriers de Goldfame Enterprise International Knitters, de Saang, appartenant à des Chinois de Hongkong, déposent une plainte au ministère du Travail contre la direction qui bloque tous les efforts pour créer un syndicat : « On nous force à faire des heures supplémentaires, on nous exploite, on intimide ceux qui veulent se syndiquer Après un nouvel arrêt de travail le 21 mars, 25 mars, un incendie ravage les entrepôts de l’usine, après la descente de police durant laquelle plusieurs grévistes ont été frappés à coup de bâton. Chéa Vichéa, président du SIORC, principal syndicat des ouvriers, s’était désolidarisé des grévistes qu’il jugeait trop violents. Un autre syndicat, le FSJK (Fédération des syndicats de la jeunesse khmère) a pris le relais. Quatre ouvriers soupçonnés d’être les incendiaires ont été arrêtés, six autres sont poursuivis. Le coût du sinistre s’élève à près de 10 millions de dollars.
Le 11 mars, le juge de Kompong Speu donne raison aux ouvriers de l’usine Cambodia Apparel Industry Ltd qui attendaient depuis deux ans. 200 ouvriers, essentiellement des femmes, avaient porté plainte pour licenciement abusif et violation du code du travail. Ils étaient soutenus par le syndicat cambodgien CLO (Organisation cambod-gienne du travail) et par l’ONG Legal Aid. Le patron doit réintégrer les ouvriers licenciés, et dédommager chacun des ouvriers en leur versant 1 000 dollars. C’est la première fois que des ouvriers ont gain de cause. Mais le 13 mars, les responsables de l’usine font signer une pétition par les ouvriers pour demander de ne pas réembaucher les sept ouvriers licenciés. La direction a, d’autre part, deux mois pour faire appel, et menace de déplacer l’usine au Vietnam…
Le 19 mars, les ouvriers de Jacqsintex Industries Cambodia se mettent en grève pour demander à leur employeur de répondre à 17 plaintes en souffrance depuis l’an dernier.
Le 27 mars, une cinquantaine de personnes de la faculté des Beaux Arts se mettent en grève à cause de la baisse de leur salaire, puisqu’ils seront désormais considérés comme du personnel administratif. Le 1er avril, Hun Sen cède et restaure les salaires à leurs anciens montants.
Le 18 avril, seize membres du personnel de la Clinique internationale SOS entrent en grève pour demander des clarifications sur les heures supplémentaires. Ils se plaignent également d’intimidations et de menaces. Le 1er mai, quatre employés donnent leur démission, trois autres sont licenciés.
Le 23 avril, environ 200 grévistes de l’usine de confection San San demandent l’intervention du Premier ministre. 800 des 1 075 ouvriers auraient purement et simplement été licenciés après avoir refusé de changer de groupe de travail, et devoir repartir à zéro pour l’ancienne-té. Après une semaine de grève, un accord est trouvé entre les parties.
Les quelque 250 membres du personnel de Royal Air Cambodge, en chômage technique depuis six mois, écrivent une lettre au gouvernement pour protester contre la cessation de paiement de leur salaire après la fin avril. Le gouvernement attend un repreneur de la compagnie… Le 25 mars, les employées séquestrent leur patron pendant quatre heures.
Le conflit qui opposait 218 ouvriers de l’usine Broadland Garment, dont l’activité a été suspendue il y a deux mois, s’est résolue le 25 avril : deux groupes d’entre eux ont accepté d’être transférés dans une usine de Stoeung Méan Chhey, les autres toucheront des indemnités de licenciement.
Le 2 avril est lancé un programme de formation des ouvriers, du personnel de maîtrise et des fonctionnaires pour la résolution pacifique des conflits dans les entreprises. Ce programme est financé par les Etats-Unis à hauteur de 500 000 dollars.
Pour la fête du 1er mai, seul le SIORC demande l’autorisation de défiler (refusée par la municipalité de Phnom Penh) pour demander l’augmentation du salaire minimum à 70 dollars, l’abaissement du nombre d’heures hebdomadaires à 40 heures, la création d’une cour spéciale pour régler les problèmes sociaux, l’arrêt de « la corruption dans les structures de l’Etat qui empêche les patrons d’augmenter les salaires Malgré des mesures policières importantes, 300 syndicalistes ont manifesté.
La deuxième phase de démobilisation de 15 000 soldats prévue pour le mois de mai est reportée, les premiers contingents de démobilisés n’ayant pas encore reçu ce à quoi ils avaient droit…
Spoliations
Le 12 mars, une quarantaine de familles de la région de Sandan, province de Kompong Thom, adressent une plainte à Hun Sen, pour cause de coups et blessures par les gardes de la plantation de caoutchouc. Le 29 août 2001 Hun Sen leur avait promis trois hectares de terrain « pour leurs enfants ».
Le 20 mars, les soldats rasent 115 maisons de Bos Khnor, suite à un arrêté de la cour provinciale de Kompong Cham. Sept mois auparavant, les propriétaires avaient déjà fait raser la plantation, privant ainsi les employés de leur travail.
Le 25 avril, une centaine de représentants de 218 familles de Poïpet manifestent contre la destruction de leurs maisons par les policiers et militaires, suite à un arrêté de la cour de justice. On chuchote qu’on devrait construire un casino sur l’emplacement de ces maisons.
Le 29 avril, environ 150 villageois qui marchent sur la maison de Hun Sen à Takmau sont stoppés par la police. Ils accusent les militai-res et les fonctionnaires de police d’avoir tué trois frères et leur cousin alors qu’ils pêchaient illégalement dans le Bassac, près de Saang.
Education
Une discrimination existe pour le travail des femmes qui touchent environ 30 à 40 % de moins que les hommes pour le même travail. La scolarisation des garçons est supérieure à celle des filles de 50 %. 85 % des enfants iraient à l’école.
Le groupe privé japonais Aeon et l’UNICEF s’associent pour cons-truire une vingtaine d’écoles dans les provinces de Kompong Speu et de Prey Veng pour un montant de 803 000 dollars. Le gouvernement doit accueillir 14 % d’enfants de plus que l’année précédente.
Le Premier ministre fait retirer des écoles un livre d’histoire de la classe terminale, tiré à 50 000 exemplaires, parce que se sont glissées quelques erreurs : la date de la première rencontre entre Hun Sen et Sihanouk s’est tenue le 4 décembre 1987, et non pas le 2. Ranariddh se plaint de ce que ce livre ne fasse pas mention de la victoire du FUNCINPEC aux élections de 1993.
Pour le Nouvel An khmer (14 avril), les jeunes enseignants touchent leur maigre salaire de six mois. Les autres enseignants touchent également leurs émoluments, avec deux mois de retard.
Santé
Les lépreux étaient plus de 18 000 à la fin 1999. En 2001, on note 577 nouveaux cas. 20 % d’entre eux vivent dans la province de Kom-pong Cham, qui soigne 1 236 patients. Jadis une léproserie les regrou-pait à Troeung, qui actuellement n’héberge que 80 malades. Le centre de Kien Khléang, ouvert en 2000, tente de rééduquer les ex-lépreux. L’an dernier, le centre a admis 269 personnes et donné 713 consultations.
Le Cambodge devrait toucher 24,8 millions de dollars par le Fonds global pour lutter contre le sida, la tuberculose et la malaria, pour lutter contre le sida durant les trois prochaines années, et même davantage si l’argent est utilisé à bon escient. L’an dernier, entre 10 et 15 millions ont été dépensés par les ONG.
Le Japon décide d’accorder une aide de 2,3 millions de dollars pour les années 2002-2003 pour des projets de réduction de la mortalité infantile, qui atteint un des taux les plus hauts de la planète. Ce fonds servira à généraliser l’immunisation de base, combattre l’avitami-nose A, les carences en iode et lutter contre les diarrhées et les infections respiratoires.
Le paludisme serait en légère baisse au Cambodge. En moyenne 120 000 personnes le contractent annuellement, un millier en meurent. Les déplacements de populations sont les principaux facteurs de propagation. En 2001, 10 264 personnes ont été atteintes de dengue, 195 en sont mortes.
Le 10 avril, trois machines d’iodisation du sel ont été remises aux paludiers de Kampot. En 1990, une étude conduite par le ministère de la Santé montrait que 19 % de la population de Ratanakiri souffrait d’un goitre. En 1992, une étude menée à l’échelle du pays confirmait l’ampleur du phénomène : 12 % des enfants scolarisés de 8 à 12 ans en souffraient. Pour venir à bout de ces carences en sel iodé, le gouvernement avait décidé l’iodisation généralisée du sel. L’OMS donnait des fonds à la Phéaphimex (dont Hun Sen est le principal actionnaire) pour ioder le sel… mais en 2001 l’iodisation universelle n’était toujours pas atteinte. 80 000 tonnes de sel iodé sont nécessaires au pays. Pour cette année, la moitié des besoins en sel iodé seront comblés. En 2000, seulement 12 % des foyers utilisaient du sel iodé.
Drogue
Un rapport de police affirme que la consommation d’am-phétamines est en croissance de 50 % par rapport à l’an der-nier. Des bureaux de liaison frontaliers sont mis en place aux frontières thaïlandaise et vietnamienne pour coordon-ner la répression des trafics de drogue et d’êtres humains.
D’après les sources officielles, les surfaces cultivées en cannabis auraient diminué de 80 %. Depuis le début de l’année, le ministère de l’Intérieur a arrêté 30 personnes soupçonnées de trafic de drogue, saisi 46 000 pilules d’amphétamines, détruit 124 906 jeunes plants de marijuana et 4 905 plans adultes dans les provinces de Kratié et de Siemréap. Durant la première semaine de mars, la police de Sihanoukville a brûlé 1 100 plants de cannabis.
Adoptions
Les Etats-Unis reprennent leur programme d’adoption d’enfants cambodgiens interrompu l’an dernier après révélation de vente d’enfants. Une « force spéciale » américano-américaine est créée pour lever les obstacles à l’adoption de 99 enfants. 120 familles américaines seraient en attente d’adoption.
Durant l’année dernière, 51 enfants cambodgiens ont été adoptés : 13 par la France, 8 par les Etats Unis, 1 par Singapour, 1 par la Grande Bretagne, 10 par des Cambodgiens. Un cinquième des enfants en orphelinat sont en bonne santé. Un tiers sont séropositifs, un autre tiers handicapés, les autres sont atteints de tuberculose, de maladie du foie causées par la malnutrition.
Pédophilie
Dans un rapport réalisé en 2001, World Vision affirme que la moyenne d’âge des enfants qui se prostituent est de 15 ans. 27,5 % de ceux qui viennent les trouver seraient des Occidentaux, 26 % des Chinois, 18,9 % des Japonais, 7,7 % des Cambodgiens. Le trafic d’enfants rapporte gros : une jeune fille vierge est monnayée entre 400 et 1 200 dollars, et peut atteindre 7 500 avec des clients étrangers.
Pauvreté
Selon le ministère du Plan, 10 % de la population de la capitale ne disposeraient pas de 0,5 euros/jour pour vivre. La proportion s’élève à 25 % dans les chefs-lieux de province et 40 % dans les zones reculées.
DIVERS
Phnom Penh
De grands projets sont lancés pour le drainage des eaux usées avec des dons du Japon et de la BAD (Banque Asiatique pour le Dévelop-pement). Un projet de 13 millions doit s’achever l’an prochain et devrait réduire les inondations chroniques de la ville en saison des pluies. Environ 500 travailleurs nettoient les canalisations, vieilles de plus de 60 ans. Chaque année, Phnom Penh dépense environ 150 000 dollars pour le nettoyage de ses canalisations d’eaux usées. 33 rues ont déjà été nettoyées, 72 devraient l’être d’ici le mois de juin.
Un gigantesque incendie détruit 235 baraques construites sur les toits de l’immeuble Tampa. Ces maisons étaient surtout peuplées de Vietnamiens et s’étaient dotées d’une véritable organisation avec tous les services nécessaires. Après plusieurs solutions envisagées, les sinistrés acceptent d’être relogés sur un terrain qu’ils ont eux-mêmes choisi à 7-8 km de Phnom Penh.
La municipalité semble avoir fait le choix de la chasse aux enfants des rues en les embarquant de force dans des camions et en les lar-guant en pleine nature à 15 km de la ville. Cette politique est dénoncée comme entravant la solution des vrais problèmes de ces jeunes.
Le 10 mars, la carte du Cambodge faite avec des crânes et ossements humains ornant l’un des murs du musée du génocide (Tuol Sleng) a été démontée, les ossements placés dans un stupa.
Angkor et le patrimoine national
Depuis le mois de mars 2001, le Fonds des monuments du monde a partiellement réhabilité le temple de Ta Som, en grande partie détruit. L’association décide d’étendre ce travail à Préah Khan. Cette réhabilitation est opérée en totalité par du personnel cambodgien. Ce projet coûtera 650 000 dollars, la Suisse en fournissant 515 000 et l’autorité Apsara le reste.
Sur proposition du vénérable Tep Vong, patriarche de l’ordre Mohanikay, le ministère des Cultes signe un ordre de destruction de onze pagodes construites sur le site d’Angkor. « Ces lieux sont réservés aux dieux dit-il. Ces pagodes ont été construites sans permis, après les années 1980 ; les moines manquent souvent à la discipline, rackettent les touristes… 170 moines sont visés par cette mesure. Cependant, cette décision, prise sans concertation avec l’autorité Apsara, ne fait pas l’unanimité : les moines font partie, eux aussi, de la culture khmère, les touristes aiment voir des moines dans les temples. Deux anciennes pagodes situées aux environs d’Angkor Vat, et construites vers les années 1940, seront laissées en l’état.
Le 27 mars, Hun Sen signe une circulaire interdisant la vente d’objets du patrimoine national. Il dresse une liste de huit lieux protégés. Depuis plusieurs mois, en effet, des paysans ont creusé une nécropole datant de l’âge de bronze, située dans la région d’Angkor, et ont vendu les objets qu’ils y ont découverts.
Le 26 avril, deux pièces d’art volées au Cambodge lui sont restituées par l’Académie des Arts de Honolulu. Il s’agit d’une tête en pierre de Civa datant du IXe siècle, et de la tête d’un Assura (génie malfaisant) du XIIe siècle. Ces pièces avaient disparu de la conservation d’Angkor pendant la guerre. Il y a environ une centaine de pièces qui sont sur la liste des objets disparus dressée en 1993. Environ 20 % d’entre eux ont été localisés.
Une centaine de jeunes gens, garçons et filles, Américains d’origine cambodgienne, sont rentrés au Cambodge pour aider à la reconstruc-tion du pays. Ils y enseignent l’anglais, l’usage des ordinateurs, les sciences du commerce, etc. Cela ne va pas sans difficultés, mais c’est une initiative intéressante. Il y a quelque 300 médecins cambodgiens en France. La plupart des réfugiés ne se sentent plus chez eux au Cambodge, et préfèrent rester à l’étranger en envoyant de l’argent pour aider les membres de leurs familles restés au pays.
Le 28 mars, Kong Nhien, chef des prêtres brahmanistes bakou officiant au palais royal s’est éteint à l’âge de 84 ans. Il portait le titre de Préah Esaypoatthipadey.
Le 9 avril, le Premier ministre indien se rend en visite officielle de trois jours au Cambodge. Des accords sont signés portant sur la restauration du temple de Ta Prom, sur l’exemption de visas pour les diplomates, des protocoles sur le tourisme et les télécommunications. Cette visite s’inscrit dans le cadre plus général de rapprochement entre l’Inde et les pays de l’ASEAN, dont l’Inde est devenue interlocutrice à part entière depuis 1996.