Eglises d'Asie – Pakistan
Le petit nombre de prêtres et leur vieillissement pourraient conduire la population chrétienne à se détacher de leurs Eglises
Publié le 18/03/2010
La pression sociale et les vœux de leurs parents encouragent les enfants à se diriger vers d’autres sphères d’activités. Dans le cas où leurs enfants ne peuvent poursuivre le cycle scolaire, les parents, désireux d’être rapidement soulagés de leurs obligations, les orientent vers des activités commerciales ou vers une formation professionnelle. Dans une homélie particulièrement sombre, le P. D’Mello s’est ainsi lamenté : “Où sont les jours où les familles se sentaient l’obligation de donner au moins un de leurs membres à l’Eglise ?” Il a continué son admonestation à ses fidèles en disant : “Si vous refusez d’offrir un de vos enfants à l’Eglise, interrogez-vous pour savoir qui sera à même de conduire le troupeau des fidèles lorsque vos petits-enfants seront venus au monde !”
Ce manque de vocations tourmente au plus haut point l’Eglise catholique où la moyenne d’âge des prêtres est de 65 ans. Le petit nombre de pasteurs aujourd’hui en activité interdit aux plus âgés d’entre eux de partir en retraite. Beaucoup de paroisses de Karachi sont confiées à des prêtres âgés et affaiblis physiquement. Chacun les loue pour le courage qu’ils manifestent en continuant leur ministère à cet âge avancé, tout en souhaitant que de nombreux jeunes viennent bientôt prendre la relève.
La situation n’est pas plus brillante dans les Eglises anglicane et baptiste. La plupart des jeunes gens sont rebutés par les difficultés et la rigueur de la vie religieuse. Interrogée sur le problème de la voca-tion, une jeune chrétienne célibataire, secrétaire de profession, a répondu : “Ce n’est pas le célibat qui m’inquiète en premier lieu ! Mais je ne peux imaginer que quelqu’un puisse abandonner ses espoirs et ses rêves pour devenir prêtre ou religieuse !” Ces vues sont partagées par beaucoup de jeunes gens qui savent que leurs familles attendent d’eux qu’ils les soutiennent financièrement. Un enseignant à l’Institut St Patrick, une école qui a fourni deux cardinaux au sous-continent, a fait remarquer que “dans le cursus scolaire qui conduit aujourd’hui vers le succès, on n’accorde guère de place aux aspirations spirituelles Il a ajouté que, aujourd’hui, les étudiants sont tellement sollicités par les besoins financiers de leur famille qu’ils ne sauraient se tourner vers un quelconque idéal religieux.
On note pourtant une croissance exceptionnelle de la population chrétienne du Pakistan qui a quadru-plé en trente ans, une croissance telle que ses membres, particulièrement les anglophones, s’efforcent de s’exiler et d’obtenir un droit de résidence en Amérique du Nord ou en Australie. Selon des études démographiques menées à l’intérieur des Eglises, le nombre des chrétiens se situe actuellement entre quatre et cinq millions, beaucoup plus que ne le laissent entrevoir les statistiques officielles. Ces der-nières années, des conversions au christianisme ont eu lieu en grand nombre dans le Sind et à Quetta, chef-lieu provincial du Baloutchistan, grâce au travail de missionnaires étrangers ou autochtones. Malgré cette apparente vitalité, un certain nombre de chrétiens lancent une mise en garde aux Eglises. Le vieillissement du clergé et l’absence de directives spirituelles pourraient conduire à la désertion des adhérents des Eglises. Celles-ci ayant perdu leur ancienne jeunesse ainsi que l’ardeur de leurs prêtres, la population chrétienne pourrait se tourner ailleurs pour y réaliser son accomplissement spirituel.