Eglises d'Asie

Mystérieux assassinat à Karachi d’un chrétien militant des droits de l’homme

Publié le 18/03/2010




Le 22 mai dernier, le cadavre d’Ivan Edwin, militant des droits de l’homme et membre de la Commission Justice et paix’ de l’archidiocèse de Karachi, a été découvert dans son propre bureau, attaché à une chaise. Cette macabre découverte a soulevé l’effroi chez les membres de la communauté chrétienne de la ville qui soupçonnent que ce meurtre fait partie intégrante d’un complot plus général qui a déjà fait de nombreuses victimes depuis le début de l’année. Les enquêteurs de la police judiciaire n’ont pas révélé la cause et les circonstances de la mort. Mais la famille de la victime a été informée que Ivan Edwin avait succombé à l’injection d’une substance mortelle.

Un membre de la Commission Justice et paix a expliqué que l’onde de choc causée par ce crime chez les chrétiens est d’autant plus violente que c’est la première fois que les terroristes s’en prennent à des chrétiens. Depuis le mois de janvier dernier, des hommes masqués ont assassiné plus d’une douzaine de médecins. Des hommes d’affaires, des promoteurs sont également été leurs victimes. Ces crimes entretiennent un climat de terreur dans la ville mais sont pour la plupart dirigés contre des musulmans chiites. Voilà plus de vingt ans en effet que le conflit entre les branches sunnite et chiite de l’islam a pris une forme particulièrement violente à Karachi. Jusqu’à présent, la communauté chrétienne avait été épargnée. Avec le meurtre d’un chrétien bien connu, la terreur s’étend tandis que l’on se perd en conjectures sur les arrière-pensées des inspirateurs des meurtriers.

L’utilisation d’une injection létale pour donner la mort a également attiré l’attention. Le groupe terroriste n’avait jamais jusqu’ici montré une propension particulière pour les armes chimiques. La police, quant à elle, a montré beaucoup de réticence à révéler au public la récente sophistication des procédés meurtriers du groupe, craignant sans doute de provoquer la panique dans la population et d’avouer son incompétence et son impuissance dans la lutte contre le terrorisme. Un collègue de la victime a déclaré : « La police espère probablement, contre toute espérance, que le meurtre de Ivan Edwin ne constitue qu’une affaire de routine, conséquence d’un acte de violence isolé et fortuit. » Le même a ensuite défié les policiers de trouver une seule personne nourrissant une quelconque rancune contre le mitant chrétien.

En effet, Edwin, propriétaire d’un petit magasin, était une figure très populaire dans son quartier tranquille. Connu comme un esprit pacifique, joyeux et généreux, le militant des droits de l’homme avait toujours dépensé son temps et ses efforts au service des autres, sans compter. Edwin travaillait depuis 16 ans dans la Commission Justice et paix’. Bien qu’il ait occupé des postes importants, au moment de sa mort, il était redevenu un membre ordinaire de cet organisme d’Eglise. Sa famille, ses voisins, ses collègues de travail ont été abasourdis et décontenancés par sa disparition. Comme d’autres amis, la sœur Barbara Anne ne cesse, depuis sa disparition, de s’interroger sur les éventuels motifs de cette mort : « Nous vivons, dit-elle, à l’âge de la terreur ; chaque acte de terrorisme se veut être un signal particulier ! » Dans le cas d’Edwin on s’évertue vainement à en rechercher la signification.

La mort de ce militant chrétien de 46 ans n’a pas été signalé par les médias nationaux. La notice nécrologique publiée par la famille quelques jours après son enterrement n’a fait aucune allusion au caractère tragique de son décès. Son épouse, Sarah, a raconté à ses amis qu’elle avait commencé à s’inquiéter en constatant que son époux ne donnait aucune réponse au coup de téléphone quotidien qu’elle lui donnait dans l’après-midi. Après une longue attente, à huit heures du soir, la police l’avait convoquée à l’hôpital pour l’identification du corps.