Eglises d'Asie

L’EGLISE DE CHINE S’APPLIQUE A METTRE EN OUVRE LES REFORMES DU CONCILE VATICAN II

Publié le 18/03/2010




Agence Ucanews : Comment était l’Eglise en Chine immédiatement après le concile Vatican II ?

P. Jean-Baptiste Zhang Shijiang : Nous ne savions rien de Vatican II. Les églises étaient fermées du fait de la Révolution culturelle. Elles n’ont été rouvertes qu’à la toute fin des années 1970. Nous avons appris l’existence de Vatican II de la bouche de Chinois d’outre-mer, en visite en Chine. Cela s’est fait au début des années 1980.

Comment les catholiques ont-ils réagi ?

La dévotion était très forte. Cette dévotion prenait de nombreuses formes : la prière du Rosaire, les chemins de Croix. Les églises étaient pleines lors des célébrations eucharistiques. Mais les catholiques savaient très peu de choses de Vatican II. Par exemple, la réforme de la liturgie mise en place au début des années 1980 (en fidélité aux enseignements du concile) a suscité de très vives réactions de la part des Chinois. Beaucoup ne pouvait admettre l’usage de la langue chinoise pour la liturgie. Mais, parce qu’ils avaient été coupés durant si longtemps de l’Eglise universelle, ils ont compris que, par fidélité au Saint Père, ils devaient suivre l’Eglise universelle. Ils ont ensuite accepté dans leur presque totalité ce changement. Pour autant, l’ajustement aux pratiques issues de Vatican II reste difficile.

A quel rythme les changements ont-ils été introduits ?

J’ai célébré la messe en latin durant trois années, de 1989, date de mon ordination, à 1992. Après, des enseignants, des professeurs sont venus de plus en plus nombreux des Eglises de Hongkong et de Taiwan. Ils ont enseigné à partir des documents de Vatican II, dans les séminaires tout comme dans le reste de l’Eglise. Les prêtres plus âgés n’avaient pas vraiment le loisir d’étudier ces documents mais ils en ont entendu parler et se sont procurés des copies via Hongkong ou Taiwan. Nous nous sommes mis peu à peu à l’étude et avons changé. A l’époque, nous avions une relativement faible conscience de l’importance du travail social. Moi-même, je m’étais surtout impliqué dans les publications pour l’Eglise. C’était le début des années 1990 lorsque l’Eglise se préoccupait surtout de l’évangélisation, de la catéchisation, de la formation des vocations et de la construction des églises. La publication par les presses catholiques de Shanghai des documents de Vatican II à destination de tous les catholiques ne remonte qu’à il y a quelques années.

Quels sont les obstacles qui empêchent la compréhension ou l’application du concile ?

L’enseignement de Vatican II est encore très sommaire. Nous n’avons qu’une vision impressionniste du concile ; nous manquons d’un enseignement complet sur Vatican II et ses implications théologiques. Les séminaires et de nombreux centres diocésains de formation devraient faire quelque chose en direction des laïcs, du clergé, de l’ensemble de l’Eglise. L’enseignement du catéchisme devrait également être revu de façon à intégrer le concile.

Jusqu’à quel point l’Eglise en Chine a-t-elle mis en pratique les enseignements du concile ?

Je pense que l’Eglise en Chine a sauté sur Vatican II. J’emploie le verbe ‘sauter’ parce que nous avons disposé d’un temps très court pour changer et nous faire à Vatican II. Par exemple, avant le concile, nous disions que, sans le baptême, sans l’Eglise, vous ne pouviez entrer au paradis. Aujourd’hui, personne dans l’Eglise ne dit plus cela. Lors d’une récente assemblée interreligieuse sur le thème de l’environnement, je me rappelle d’un délégué bouddhiste qui a dit : “Lorsque j’étais enfant, j’entendais que, sans le baptême, sans l’Eglise, j’irai en enfer.” Des professeurs d’université lui ont immédiatement répondu que c’était un enseignement pré-Vatican II et que l’Eglise en Chine ne professait plus cela.

Quels aspects du concile souhaitez-vous voir mieux appliquer en Chine ?

En premier lieu, la réforme liturgique. Les Chinois sont finalement très lents à accepter ce grand changement dans l’usage de la langue. Quatre-vingt-quinze pour cent des fidèles assistent à des messes dites en mandarin mais, tôt le matin, des messes en latin sont dites à l’attention principalement des personnes âgées. En deuxième lieu, le développement du travail social. De nombreux diocèses aujourd’hui gèrent des cliniques, des maisons pour personnes âgées et des orphelinats. Ils sont impliqués dans le travail social. C’est là un grand changement. Moi-même, j’ai été largement influencé par l’enseignement social de Vatican II. Enfin, le dialogue interreligieux. Il se développe peu à peu. Le gouvernement chinois fait du bon travail dans ce sens. Il rassemble régulièrement les diverses religions ensemble pour des réunions et enjoint leurs responsables à bâtir l’harmonie et la stabilité sociale. Beifang Jinde va construire des écoles en coopération avec des organisations dépendant d’autres religions. Nous travaillons déjà sur des projets sociaux ensemble. L’Eglise en Chine souhaite apporter sa contribution à la société chinoise et l’accompagner dans sa marche.