Eglises d'Asie

Un évêque catholique d’origine tamoule accuse les Tigres du LTTE de recruter des enfants pour en faire des soldats

Publié le 18/03/2010




Le 16 janvier dernier, Mgr Kingsley Swampillai, évêque de Trincomalee-Batticaloa, a transmis à “Ramesh le responsable militaire des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE) pour la région, une liste de vingt-cinq noms de jeunes âgés de 15 à 18 ans. Cette liste, présentée également lors d’une réunion paroissiale à Ayithiamalai, indiquait l’heure et le lieu des enlèvements présumés, tous commis depuis la mi-décembre 2002 (1). A l’issue de la rencontre, qui s’est déroulée dans une atmosphère cordiale, Mgr Swampillai a déclaré que le responsable des Tigres tamouls avait affirmé avec fermeté que son armée ne recrutait pas de membres âgés de moins de 18 ans. Cependant, a continué l’évêque, “suite aux plaintes répétées des parents, j’ai exigé la vérification des noms pour savoir si ces enfants étaient ou non sur la liste des conscrits afin de pouvoir les faire libérer immédiatement”. Mgr Kingsley Swampillai a ajouté qu’il avait demandé aux rebelles de considérer très sérieusement ce grave problème susceptible de compromettre le cessez-le feu signé en février 2002 entre Colombo et le LTTE.

D’après Mgr Kingsley Swampillai, “les plaintes relatives aux recrutements forcés et aux enlèvements continuent bien que, semble-t-il, moins nombreuses qu’avant”. Il a ajouté que les gens de son diocèse, à majorité tamoule, faisaient confiance au LTTE, lequel a donc le devoir d’assumer ses responsabilités. Il a aussi réaffirmé que personne dans son diocèse ne souhaitait une nouvelle guerre. Donnant son avis sur la question de la création d’un Etat indépendant au profit des Tamouls sri-lankais, il a déclaré soutenir le projet d’un Etat autonome “au sein d’un même pays avec un maximum de délégations de pouvoirs. Un territoire séparé serait peu réaliste et pourrait susciter de nouvelles divisions” (2).

Par ailleurs, Mgr Swampillai a réfuté un article du Sunday Times du 19 janvier où on pouvait lire que l’évêque allait porter le problème de l’enrôlement de force des enfants devant des organisations internationales de défense des droits de l’homme. Le 22 janvier, l’évêque a déclaré à des journalistes que l’article “ne correspondait pas à [ses] propos”.

Entre-temps, le Norvégien Hagrup Hauckland, numéro 2 de la Mission de surveillance pour le Sri Lanka, a confirmé que des recrutements d’enfants, principalement dans la province de l’Est (qui comprend le diocèse de Trincomalee-Batticaloa) avaient eu lieu. Il a déclaré aux médias que, en dépit des assurances données par Anton Balasingham, un intellectuel chrétien membre du LTTE, ces pratiques continuaient et que les rebelles avaient été jusqu’à menacer les parents de ceux qui avaient déserté leurs rangs. La Mission de surveillance pour le Sri Lanka a déclaré avoir reçu 603 plaintes entre mars et décembre 2002.

Devant l’évidence qui ressort de tous ces témoignages, les LTTE, conscients de leur impact sur l’opinion publique, ont fini par reconnaître à Berlin, où se déroulent en ce moment les ultimes pourparlers sous l’égide de la Norvège, que des mineurs avaient bien été enrôlés. Le même Anton Balasingham, principal négociateur des LTTE, a cependant tenté d’en minimiser l’importance en parlant de cas isolés. Se voulant rassurant, il a indiqué, le 8 février dernier, que durant ces derniers six mois, 350 jeunes avaient été rendus à leurs parents et que les responsables de ces enrôlements d’enfants, reconnus coupables, avaient été radiés.