Eglises d'Asie

A Canton, les méthodes de régulation naturelle des naissances, enseignées par un organisme catholique de Hongkong, reçoivent un bon accueil de la part des autorités et des Chinoises

Publié le 18/03/2010




La Chine, connue pour les méthodes parfois brutales utilisées par les autorités pour faire respecter la politique dite de « l’enfant unique », est aussi un des pays du monde où les méthodes de régulation naturelle des naissances sont officiellement enseignées et encouragées par les autorités. Le ministère de la Santé a reconnu l’efficacité de la méthode Billings en 1995, lui donnant le label de « méthode naturelle de planning familial En mars dernier, lors d’un symposium organisé en Australie, le docteur Qian Shaozhen, responsable de la recherche sur la méthode Billings en Chine, a déclaré que 2,6 millions de couples dans son pays utilisaient cette méthode pour contrôler leur fécondité. Depuis 1996, dans la ville de Canton, un projet est mené par un organisme catholique de Hongkong ; financé par deux agences catholiques allemandes, Misereor et Missio, il s’attache à populariser les méthodes de régulation naturelle des naissances auprès des couples chinois.

Les premiers contacts entre le Centre de conseil pour le mariage du diocèse catholique de Hongkong et les autorités de la ville de Canton remontent à 1993 lorsque Chen Qiqi, médecin de profession et ancien vice-maire de Canton, s’est rendu à Hongkong pour un congrès sur les méthodes de régulation naturelle des naissances. Après plusieurs voyages à Canton, le Centre a été invité par le Bureau municipal de la population de Canton et les responsables locaux du Planning familial à envoyer des formateurs auprès des unités de planning familial dans deux districts de la ville ; l’objet de la mission était d’enseigner la méthode sympto-thermique, la seconde principale méthode de régulation naturelle des naissances avec la méthode Billings. Après cette première expérience, il fut décidé que les formateurs du centre hongkongais travailleraient directement au sein des unités de travail des entreprises d’Etat plutôt que dans les centres de planning familial de quartier à attendre la visite des couples.

Selon le docteur Ramon Churuiz, responsable du Centre catholique de Hongkong, il a été décidé dès le départ de ne pas travailler sur ce dossier avec l’Eglise catholique locale, afin de ne pas mettre en avant le soutien de l’Eglise à ces méthodes, mais au contraire de les présenter aux autorités civiles responsables du planning familial, sans chercher pour autant à occulter l’identité « catholique » du Centre mais en insistant sur le côté « technique » des méthodes. Dès les origines du projet, en 1996, Ramon Churuiz a insisté auprès de ses interlocuteurs cantonais pour que ceux-ci obtiennent l’assentiment de Pékin dans leur démarche. Aujourd’hui, l’enseignement de la méthode peut être considéré comme un succès, estime Ramon Churuiz, citant l’exemple de la Compagnie N° 1 de bus de Canton, une entreprise de 9 500 personnes. La direction de cette société a encouragé ses employées à se former à ces méthodes, en leur permettant de suivre une formation prise sur les heures de travail et en leur offrant un thermomètre. « Nous avons eu des témoignages d’employées qui se disent très satisfaites de ces méthodes, ayant supprimé les douleurs et les saignements provoqués par les stérilets qu’elles portaient auparavant. Elles se sentent mieux pour travailler rapporte Ramon Churuiz, qui ajoute que leur employeur est également satisfait, les absences pour maladie et inconfort provoquées par le recours au stérilet ayant sensiblement diminué. Pour Ramon Churuiz, les méthodes naturelles sont tout bénéfice pour les responsables du planning familial étant donné leur efficacité et leur quasi-gratuité.

La première phase du projet allait de 1996 à 1999 et a consisté à assurer la promotion des méthodes naturelles auprès des responsables du planning familial de Canton. Une étude menée sur cinq cents couples a montré qu’avec un taux d’échec de 2,01 %, les méthodes naturelles étaient au moins aussi fiables que les méthodes artificielles utilisées jusque là. Ensuite, à partir de 2000, le projet a consisté à former une soixantaine de formateurs aux méthodes naturelles. Ils pourront, à leur tour, propager ces méthodes. Le programme devrait se terminer à la fin de cette année.

En comparaison de ce relatif succès des méthodes de régulation naturelle des naissances auprès des autorités de la ville de Canton, la popularité de ces méthodes n’est pas acquise auprès des catholiques cantonais. Le P. Peng Jingtong, prêtre à Canton, explique que le diocèse n’arrive même pas à dégager des ressources suffisantes pour mettre en place des sessions de préparation au mariage et qu’il n’est donc pas question d’enseignement des méthodes naturelles. Selon lui, les méthodes artificielles de contraception restent la norme, tant auprès de l’ensemble des Chinois que des catholiques chinois. Dans la province du Shanxi, le P. Niu Guangxing, du diocèse de Xinjiang, rapporte le fait que des catholiques se plaignent des méthodes naturelles préconisées par l’Eglise et de leur taux élevé d’échec. Dans cette région, les familles catholiques en milieu rural ont en moyenne de 4 à 5 enfants. Commentant ces remarques, Ho Man-hong, secrétaire général du Centre de conseil pour le mariage de Hongkong, déclare que, dans l’ignorance des méthodes utilisées par les paysans catholiques du Shanxi, il lui est difficile de se prononcer et précise que les méthodes naturelles ne s’apprennent pas en un jour ou deux mais nécessitent un apprentissage de plusieurs mois.