Eglises d'Asie

LE POINT SUR LA SITUATION POLITIQUE ET SOCIALE du 1er mai au 30 juin 2003

Publié le 18/03/2010




POLITIQUE ETRANGERE

Phnom Penh, capitale de l’ASEAN

A Phnom Penh, les ministres des dix pays de l’ASEAN se réunissent du 16 au 19 juin, d’abord pour la 38e réunion annuelle des ministres des Affaires étrangères de l’ASEAN, puis pour le Forum régional de l’ASEAN, avec la participation des représentants de la Chine, de la Corée du Sud et du Japon, les 17-18 juin, puis, avec celle de l’Australie, du Ca-nada, de l’Union européenne, de l’Inde, de la Nouvelle-Zélande, de la Russie et des Etats-Unis, soit vingt-trois ministres des Affaires étrangères, principalement de la région Asie-Pacifique. Le Cambodge, qui présidait l’ASEAN depuis le 1er juillet 2002, passe le relais à l’Indonésie.

Avec une audace diplomatique inhabituelle, les ministres des Affaires étrangères enfreignent le principe de la non-ingérence dans les affaires intérieures d’un pays membre et demandent plusieurs fois à la Birmanie de libérer l’opposante Aung San Suu Kyi. Ils dénoncent également la vague de répression des derniers mois dans ce pays. Ils ne pouvaient faire moins, car la Birmanie doit présider l’Association en juillet 2006, et du fait que plusieurs pays membres se sentent humiliés par la mauvaise réputation internationale de l’un d’entre eux. Même si la protestation, timide, n’est accompagnée d’aucune sanction, Thung Saray, président de l’ ADHOC, association cambodgienne de défense des droits de l’homme, estime que c’est qu’un début prometteur, laissant envisager une amélioration progressive des droits de l’homme dans la région.

Colin Powell arrive le dernier jour, avec deux gardes du corps américains, le crâne rasé, et armés de fusils d’assaut qui escortent sa voiture blindée. Il rencontre Hun Sen, Ranariddh et, brièvement, Sam Rainsy. Il réclame à plu-sieurs reprises la tenue d’« élections libres et équitables » au Cambodge, dépourvues de violences, avec un accès égal de tous les partis aux médias. Il laisse entendre que si la tenue des élections est « crédible c’est-à-dire conforme à l’attente des Etats-Unis, une aide au développement est envisageable à l’avenir, mais ne dit rien si elles n’y sont pas conformes. Hun Sen a promis à Colin Powell de céder sa place en cas d’échec (improbable) aux élections. Les Etats-Unis promettent également une aide pour le procès des Khmers rouges, mais seulement après les élections.

Colin Powell demande à Hun Sen de voter pour l’immunité des ressortissants américains face à d’éventuelles poursuites devant la Cour Pénale Internationale (CPI). Hun Sen répond qu’il « n’y [voit] pas d’objection à condition que cela ne soit pas en violation avec la chartre de la dite CPI, dont le Cambodge a été l’un des premiers membres signataires. Washington a ainsi soudoyé trente-neuf pays qui ont accepté de signer de tels accords d’exemption, de peur de se voir couper l’aide américaine. Le 27 juin, l’accord est signé, justifié par le rôle joué par les Etats-Unis dans la lutte antiterroriste.

Collin Powell s’est abstenu de toute critique virulente contre le gouvernement cambodgien, contrairement aux déclarations d’officiels américains faites précédemment. Il avait en vue en priorité les intérêts des Etats-Unis : soutien dans sa guerre contre le terrorisme international et soutien pour l’exemption américaine devant la CPI. On peut reconnaître le même processus que celui aboutissant à la guerre en Irak sans l’aval de l’ONU.

Sur le plan régional, les dix pays de l’ASEAN se sont engagés à lutter contre le terrorisme, à renforcer la sécurité maritime et frontalière. Colin Powell leur a rappelé que le sida tuait plus que le terrorisme. Le 18 juin, dans le cadre de ce sommet, l’Australie a signé avec le Cambodge un protocole d’accord visant à renforcer la lutte contre le terrorisme, le blanchiment de l’argent et le trafic d’armes. Le ministre des Affaires étrangères australien a promis une aide supplémentaire de deux millions de dollars pour le CMAC (Centre cambodgien d’action contre les mines).

Sept cents journalistes et photographes ont sollicité une accréditation pour couvrir le forum. On leur a recommandé de soigner leur tenue vestimentaire.

Tous les observateurs s’accordent pour dire que le Cambodge a rempli sa mission de présidence de l’ASEAN pendant un an avec brio, malgré les crises rencontrées : l’attentat de Bali, l’épidémie dr SRAS, l’arrestation de Aung San Suu Kyi, la crise nord-coréenne, etc. En dépit de ces obstacles, l’ASEAN a été en mesure de travailler sur d’autres dossiers, tels que ceux de la Communauté de Sécurité de l’ASEAN (ASC) et de la Communauté Economique de l’ASEAN (AEC). « Le Cambodge a fait du bon travail estime le porte-parole de l’Association. Le Cambodge a été projeté sur le devant de la scène diplomatique. « Après de longues années d’isolement, le pays a prouvé qu’il était capable d’organiser de grands rendez-vous internationaux, malgré sa réputation d’Etat de non droit souligne un ambassadeur.

Arrestations d’islamistes

Le 28 mai, trois professeurs de l’école coranique Um al-Qora, située à 25 km. au nord de Phnom Penh, sur la nationale 6, sont inculpés d’activités terroristes en lien avec la Jemaah Islamiyah. Il s’agit d’un Egyptien et de deux Thaïlandais. 54 personnes, soit 28 instituteurs et leurs familles, originaires du Soudan, du Yémen, du Nigeria, d’Egypte, du Pakistan et d’Arabie Saoudite sont expulsés. L’école, fréquentée par 600 élèves est fermée. Elle était financée par des fonds saoudien. La cellule terroriste aurait touché des fonds -Qaida via le réseau des écoles coraniques du Cambodge. L’ONG Um al-Qora aurait touché 40 000 dollars par mois de l’Arabie Saoudite.

Ces arrestations ont été effectuées sur indications des Etats-Unis qui ont procédé à l’examen des numéros de téléphone composés par les suspects pour l’étranger, et à l’examen de leurs comptes bancaires.

L’organisation Revival of Islamic Heritage Society, originaire du Koweït et financée par des fonds saoudiens, a fondé également l’école coranique de Chom Chao, près de Phnom Penh, un orphelinat pour filles et un centre islamique à Battambang, une école coranique et une mosquée dans la province de Takéo. Environ 2 000 enfants sont pris en charge dans ces établissements. Des bourses sont accordées pour que des étudiants puissent aller poursuivre des études dans des universités à l’étranger. Les étudiants en reviennent souvent très radicaux. Une perquisition a été effectuée dans l’école coranique de Cham Chao, mais aucune arrestation n’a eu lieu. L’école est restée ouverte. La discipline y est décontractée. Par contre, celle Al-Quora était très stricte.

Pour Hun Sen, le Cambodge a « retiré une bombe du pays Il se défend d’avoir organisé ces arrestations « pour faire plaisir » à Washington, bien que tout semble aller dans ce sens. Alors que jusqu’alors le Cambodge était l’objet de critiques virulentes de la part des Etats-Unis, il se voit désormais décerner des félicitations. Hun Sen rassure les musulmans cambodgiens, disant qu’ils n’ont rien à craindre du gouvernement, que « cette affaire ne les concerne pas Il avait prévenu Jacques Chirac avant cette opération.

Certains diplomates restent sceptiques sur les preuves « évidentes » de l’implication des trois personnes inculpées d’implication dans un réseau terroriste. Les musulmans du Cambodge semblent accepter avec philosophie : « Cela ne nous regarde pas, c’est une affaire de l’Etat. » Cependant, on demande des preuves.

Les musulmans du sud de la Thaïlande envoient une pétition au gouvernement cambodgien pour demander la libération des deux ressortissants thaïlandais.

Le 12 juin, un Cambodgien musulman, Sman Ismaël, est inculpé d’activités en lien avec l’organisation terroriste Al-Qaida, via la Jemaah Islamiyah. Selon la police, « trois étrangers et trois ou quatre Cambodgiens » feraient encore l’objet de mandat d’arrêt.

Réchauffement des relations avec la Thaïlande

Le 31 mai, quelques jours après un communiqué virulent du secrétariat d’Etat américain contre le gouvernement cambodgien sur la gestion de la crise du 29 janvier avec la Thaïlande, les membres des gouvernements thaïlandais et cambodgien se retrouvent pour une réunion à Siemréap durant la matinée, puis à Ubon Ratchatani, en Thaïlande, durant l’après-midi. Le Cambodge est le troisième pays, après Singapour et la Malaisie, à tenir une telle réunion avec la Thaïlande.

Sept protocoles d’accords sont signés entre le Cambodge et la Thaïlande : lutte contre le trafic des femmes et enfants, construction de ponts et asphaltage de la route reliant Koh Kong à la nationale 4, réparation de la route reliant Anlong Veng à Siemréap, ouverture de trois nouveaux postes frontières, dont Préah Vihéar, libre circulation des Thaïlandais et Cambodgiens dans le pays voisin, octroi de formations professionnelles. La hache de guerre entre les deux pays semble pour le moment enterrée.

PREPARATION DES ELECTIONS

Les députés du PSR et du FUNCINPEC continuent de déserter mutuellement leur parti. Ces changements manifestent la conception cambodgienne de la politique : avant tout une affaire de clans et d’intérêts personnels.

Le 7 mai, Sam Sundoeun, du PSR passe au FUNCINPEC, et Lek Dolnal du FUNCINPEC passe au PSR. Une dizaine de jours plus tard, Sam Sun Soeun s’affirme très déçu du FUNCINPEC, où, selon lui, règne la même corruption qu’au PSR. Le 12 mai, Un Sam An, président du Mouvement des Etudiants pour la Démocratie, annonce sa démission de son mouvement et son adhésion au PSR qui lui a promis la quatrième place sur la liste de Siemréap. Il assure avoir amené avec lui les 150 membres de son association. Le 17 juin, Sam Raingsek, membre du FUNCINPEC, passe au PSR, en apportant un dossier documenté sur le détournement de quatre millions de dollars par Pou Sothirak, ancien ministre de l’Industrie et membre du FUNCINPEC. Ranariddh, président du FUNCINPEC, ne nie pas les faits mais affirme que cette somme était une commission touchée sur des contrats d’exploitation pétrolière alors que Pou Sothirak était ministre. Sam Raingsek affirme d’autre part que le FUNCINPEC lui avait demandé 40 000 dollars pour figurer en septième place sur la liste du parti à Phnom Penh. Le 18 juin, Sok Sovanna, unique candidat du PSR pour Poïpet, quitte le parti qu’il accuse de népotisme, où les gens cherchent plus leur intérêt personnel que l’intérêt de la nation.

Le 8 mai, Pen Sovann, ancien Premier ministre de la RPK, décide de se retirer, ainsi que son parti, de la course électorale, « face à l’injustice et à la corruption qui entachent le processus d’inscription des candidats 

Le 9 mai, de Paris, la princesse Norodom Vachéara invite les partisans de la démocratie à s’unir contre la dictature communiste actuelle. Elle demande donc au FUNCINPEC et au PSR de s’unir contre le PPC. « Plus Jeanne d’Arc que jamais ironise avec sympathie le roi Sihanouk dans son Bulletin mensuel d’information. Le FUNCINPEC demande donc au PSR d’intégrer le parti dont il est sorti. Comment le FUNCINPEC peut abandonner le PPC, se demande le PSR, qui s’est lancé dans une virulente attaque contre Ranariddh, « complètement vendu au PPC qu’il traite de « marionnette de « couard etc.

Au début juin, le PPC et le FUNCINPEC s’injurient copieusement en se faisant porter mutuellement la responsabilité des « événements » du 5-6 juillet 1997.

Au 17 mai, à 17 h 30, date limite de dépôt de candidature des partis, vingt-cinq partis sont inscrits, soit quatorze de moins qu’en 1998. Plusieurs affirment avoir eu des difficultés auprès des autorités communales pour obtenir des documents nécessaires à l’inscription de leurs candidats. Seulement six partis présentent des candidats dans les vingt-quatre provinces et municipalités. Huit d’entre eux n’existaient pas en 1998. Vingt-trois partis sont finalement acceptés, les deux autres n’ayant pas présenté un dossier complet, puis, le 27 juin, le parti des Khmers qui aident les Khmers se retire. Il n’y a donc que vingt-deux partis en lice.

Le 3 juin, le CNE et le ministère de l’Intérieur donnent des directives aux autorités locales, notamment aux chefs de villages, pour qu’ils restent neutres pendant la préparation des élections. Cependant, on constate que les chefs de village n’ont pas été changés, en dépit des élections communales de février 2002, que souvent ils exercent des pressions indues, telles que la confiscation des cartes d’électeurs, le refus de délivrer les documents nécessaires aux candidats, etc. « Les chefs de village sont les partisans du parti au pouvoir se plaint à juste titre un dirigeant du PSR.

Le 12 juin, le CNE rend publique la formule de répartition des sièges après le scrutin, qui favorise le parti vainqueur, comme ce fut le cas en 1998 et 2002. « Cette formule tue les petits partis mais elle a été discutée et votée avant les élections de 1998 ; elle est utilisée en Suède, en Italie et en Allemagne.

Le 24 juin, dix-sept des principaux partis signent un code d’éthique et de bonne conduite mis au point par le CNE et le NDI (National Democratic Institute, américain). Ce document en seize points bannit la violence et l’intimidation sous toutes ses formes. Il sera diffusé à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires. Ce code a déjà été utilisé en Namibie, en ex-Yougoslavie et dans plusieurs pays d’Afrique. Le même jour, le Premier ministre lance un appel à la tenue d’élections « paisibles ». « Les intimidations et les pressions trahissent une sérieuse sottise des politiciens dit-il.

Médias

La station radio Nid d’Abeille du courageux et sympathique Mon Sonando quintuple les possibilités d’émission, grâce à des dons d’un montant de 60 000 dollars. C’est la seule radio indépendante du Cambodge.

Le 5 juin, l’Australie débloque une enveloppe de 75 000 dollars pour assister les médias publics et assurer une couverture équitable de la campagne électorale. La télévision et radio nationales se sont engagées à respecter un temps d’antenne pour chacun des partis politiques selon leur représentativité à l’Assemblée nationale : 44 % au PPC, 27 % au FUNCINPEC, 19 % au PSR et 8 % aux vingt autres partis. Chaque formation bénéficiera en outre de 15 minutes pour défendre son programme. Cette répartition fait grincer les dents des petits partis qui s’estiment lésés. L’ambassade d’Allemagne accorde 94 000 dollars au CNE pour ouvrir un centre d’information qui devrait assurer la transparence des élections.

Le 5 juin, une délégation du National Democratic Institute améri-cain, rend public un rapport qui reprend ses critiques précédentes, concluant à la domination du PPC dans les médias.

Les télévisions sont autorisées « en principe » par le CNE à organiser des débats à la télévision concernant la formation politique. Mais ces émissions doivent être visionnées auparavant par le CNE. Le PNUD remet 75 000dollars au ministère de l’Information pour réaliser ces programmes.

Au moins quatre radios acceptent de vendre des temps aux partis politiques qui le désirent. Selon le COMFREL (Comité pour des élections libres et équitables), le PPC contrôle 90 % des médias cambodgiens.

Ces mesures sont concrétisées par des ouvertures timides. Par exemple, le 23 juin, les spectateurs de la chaîne nationale ont pu voir Sam Rainsy serrant la main de Colin Powell et l’entendre critiquer le gouvernement sur la façon d’organiser les élections.

Cependant, le 17 juin, un directeur général adjoint (appartenant au FUNCINPEC) de la radio nationale FM 96 est muté sans préavis, un jour férié, pour avoir laissé passer une légère critique contre le Premier ministre. « N’oubliez pas ce qui peut vous arriver commente le FUNCINEC.

Budget

Le coût des élections est estimé à 12,8 millions de dollars, dont 5 millions seront versés par le gouvernement. Le 29 juin, la Chine remet du matériel informatique pour une somme de 20 000 dollars au CNE. Le gouvernement indien fait don de 26 000 pots d’encre indélébile pour les élections, chacun pouvant marquer 600 électeurs. Le 14 mai, la Belgique annonce le versement de 401 885 dollars. Le 13 juin, la France contribue pour 500 000 euros à l’organisation des élections, couvrant une partie des frais de fonctionnement du CNE, en particulier ceux de la maintenance du service informatique.

Surveillance des élections

23 500 observateurs, dont 400 étrangers, surveilleront le déroulement de la campagne électoral et la tenue des élections dans 12 826 bureaux de vote.

ANFREL (Asian Network For Free Elections), le plus important réseau régional d’observation électorale, basé en Thaïlande, et auquel est rattachée l’association cambodgienne COMFREL (Thung Saray), dépêche dix observateurs de longue durée, originaires de huit pays, déployés en onze provinces, dès le 15 mai et jusqu’à la proclamation des résultats, et entre vingt et trente observateurs de courte durée. La Malaisie enverra cinq observateurs.

Le 17 juin, une douzaine de groupes d’observation des élections et de responsables de l’opposition, demande au gouvernement d’accélé-rer la nomination des chefs de villages.

Le 24 juin, un rapport d’ANFREL relève « une baisse significative de la violence politique » depuis les communales de 2002. L’ONG relève cependant de nombreux cas d’intimidation, de confiscation de cartes d’électeurs et de tentatives d’achat de votes, notamment par les chefs de village. Le calme, s’interroge le rapport, ne manifesterait-il pas la peur ? Le 25 juin, le Premier ministre rappelle les chefs de villages à l’ordre, leur demandant de ne pas abuser de leurs pouvoirs.

L’Union européenne enverra 106 observateurs, dont 36 à long terme. La délégation est dirigée par Robert Evans, député britannique au parlement européen. Les premiers observateurs arrivent le 11 juin. Le budget de la délégation est de 1,55 millions d’euros. Le député européen déclare que l’aide future octroyée au Cambodge ne sera en aucun cas conditionnée au bon déroulement du processus électoral.

Le Japon enverra vingt-cinq observateurs, dirigés pas Yukio Imagawa, ancien ambassadeur du Japon au Cambodge.

Foundation mettra en place quinze personnes : des expatriés vivant depuis plus de six ans au Cambodge et parlant parfaitement le khmer.

Les National Democratic Institute et Republican Institute, américains, enverront respectivement douze et trente experts internationaux. Les premiers experts américains arrivent le 28 mai.

Les ONG cambodgiennes fourniront un important contingent d’observateurs :

– Le COMFREL annonce la mobilisation de 17 000 personnes, dont 2 000 observateurs de longue durée, 230 « référents » qui fourniront des rapports tous les dix jours. 7 000 seront maintenus pour le dépouillement.

– Le NIFEC (Comité neutre et impartial pour des élections libres et équitables) a mis en place 142 observateurs dès le 9 juin, en sept provinces. Leur mission se terminera quinze jours après la tenue du scrutin. L’ONG donnera un premier rapport quinze jours avant le scrutin, un la veille du vote, un autre une semaine après le scrutin, et un dernier après la proclamation officielle des résultats. Le NIFEC mobilisera 6 000 observateurs à court terme. L’ONG mobilisera en outre « 200 étrangers vivant au Cambodge ».

– 75 000 observateurs seront mis en place par les partis politiques.

Plus de 21 000 policiers, 7 000 gendarmes et 2 000 membres des unités d’intervention d’urgence seront déployés pour assurer la sécurité des élections.

Avec tout ce dispositif législatif et la mise en place d’obser-vateurs, le déroulement des élections devrait être à peu près régulier.

Selon un rapport du chef de la police rendu public le 2 juin, on note jusqu’à présent 1 376 cas de violence dans la préparation des élections. Selon le ministère de l’Intérieur, sur les dix-sept meurtres de militants politiques commis au cours des quatre derniers mois (neuf du PPC, cinq du FUNCINPEC, trois du PSR), aucun n’a de caractère politique, ce que contestent le PSR et le FUNCINPEC. « Pas impossible, mais improbable commente le rapport du National Democratic Institute. Le ministère note également des tentatives de meurtres sur treize candidats, ayant conduit à quatre arrestations, et dix-huit cas d’intimidation politique. Le Comité cambodgien de défense des droits de l’homme relève qu’il a soumis 292 plaintes au CNE, dont 82 remises par les partis d’opposition, 96 cas d’intimida-tion, mais n’a jamais reçu de réponse.

Le 4 juin, un militant du PSR est assassiné dans la province de Kompong Cham. Le 21 juin, un autre militant PSR est trouvé mort à Kompong Cham. Le 25 juin, un membre du FUNCINPEC de Bantéay Méan Chhey est roué de coups. Un membre du FUNCINPEC est abattu par balle à Péam Ro. Le 26 juin, un chef de village de Krakor tue un de ses opposants politiques. Le même jour, à Kratié, un militant du PPC blesse sa femme qui voulait aller à un meeting royaliste.

Le 19 juin, le COMFREL recense 84 cas d’intimidations et de me-naces politiques dans six provinces depuis janvier. Mais aucune action n’a été menée pour en punir les auteurs. Par contre, le CNE enquête durant la première semaine de juin sur un maire qui a confisqué 280 cartes d’électeurs pour les enrôler dans le FUNCINPEC. D’autres cas semblables sont signalés, entre autres à Chambak.

Projet de loi anti-corruption

Le 20 juin, le Conseil des ministres approuve un projet de loi anti-corruption que réclamaient depuis de longues années les pays bailleurs de fonds. Le gouvernement avait promis de déposer ce projet durant cette législature. Cette loi est également requise pour l’entrée du Cambodge dans l’OMC. Ce projet de loi ne sera sans doute pas examiné durant cette législature, l’Assemblée n’ayant jamais pu siéger, faute de quorum, depuis le début de sa dernière session.

L’opposition estime que la corruption fait perdre, chaque année, 400 millions de dollars à l’Etat.

SAGA DU PROCES DES EX-RESPONSABLES KHMERS ROUGES

Le 2 mai, le troisième comité de l’ONU approuve le projet d’accord signé le 17 mars entre Hans Corell, juriste délégué par l’ONU, et Sok An, ministre cambodgien chargé du dossier, malgré les « doutes » de Kofi Annan sur la « crédibilité » du tribunal « étant donné la situation précaire de la justice au Cambodge Amnesty International et d’autres groupes de défense des droits de l’homme ainsi que le député de l’opposition Sam Rainsy ne sont pas favorables, eux non plus, à la forme de tribunal adoptée. Même Hans Corell estime que la composition de ce tribunal n’est pas conforme aux normes internationales. L’ambassadeur du Cambodge aux Nations Unies fait remarquer que « normes internationales » ne signifie pas « contrôle international Les Etats-Unis prennent de la distance par rapport à la décision de l’ONU, « étant donné l’état du système judiciaire au Cambodge 

Le tribunal comprendra donc deux chambres : une chambre de première instance (avec cinq juges dont trois Cambodgiens) et une Cour Suprême (avec sept juges dont quatre Cambodgiens). Les cinq juges internationaux seront choisis par le Conseil suprême de la magistrature cambodgien (CSM), sur une liste de sept juges préparée par le secrétaire général de l’ONU. Il en sera de même pour le juge d’instruction international et son adjoint, choisis tous deux parmi deux candidats. Une super-majorité de la moitié plus un sera requise pour toute décision. En cas de conflit entre les hommes de loi internationaux et cambodgiens, statuera une cour de pré-tribunal composée de trois juges cambodgiens et de deux internationaux.

On estime le coût de la mise en place d’un tel tribunal à 19 millions de dollars, dont la plus grande partie sera destinée à financer les 74 à 90 personnes employées pendant trois ans. Le gouvernement cambodgien payera ses propres juges.

Le 12 mai, l’Assemblée générale des 191 Etats membres de l’ONU adopte le texte de l’accord par consensus, sans le soumettre au vote.

Le 6 juin, Han Corell se rend à Phnom Penh et signe au nom de l’ONU l’accord en question. Si Paris se félicite de cet accord, obtenu en partie à sa demande, Washington est beaucoup plus réservé. Le Japon promet de dépêcher des juges et des fonctionnaires pour le secrétariat du tribunal. Il promet également une aide financière. Le PSR s’oppose à ce jugement qui ne sera, selon lui, qu’une parodie de justice, mais n’aura pas de caractère de justice internationale.

Le 16 juin, le texte de l’accord est transmis pour ratification à l’Assemblée nationale cambodgienne.

L’Australie s’engage à verser un million de dollars pour le tribunal.

James Kelly, le secrétaire d’Etat adjoint américain pour les pays d’Asie de l’Est et du Pacifique, admet que le tribunal n’est pas parfait : « Si nous cherchons un tribunal parfait et idéal, les enfants des Khmers rouges seront morts depuis longtemps. » Il convient que le jugement des Khmers rouges n’est « pas la priorité du peuple khmer. La moitié de la population du pays est née après leur régime ».

ECONOMIE

Bois

Environ 20 000 tonnes de résines sont récoltées chaque année par environ 100 000 Cambodgiens, ce qui rapporterait plus de six millions de dollars. Une grande partie de la récolte part en contrebande au Vietnam, à la moitié de son prix. Les formalités pour demander des permis officiels découragent d’en demander. Hun Sen rapelle à l’ordre les exploitants de résine.

Le 12 mai, lors d’une intervention de militaires contre un camp de forestiers illégaux au Phnom Malay, dans la province de Banteay Méan Chhey, huit tracteurs sont saisis. Le lendemain, au retour à leur base, les militaires tombent en embuscade : six tracteurs sont emmenés dans la jungle, deux villageois réquisitionnés par les militaires sont tués. Dans les provinces de Mondolkiri et de Kompong Thom, des tronçonneuses et du bois sont saisis, deux fonctionnaires sont démis de leurs fonctions dans celle d’Oddar Méan Chhey. Les villageois des provinces de Préah Vihéar et de Kompong Cham font état de difficultés accrues pour acheter du bois afin de construire leurs maisons. Ces opérations ont lieu quelques semaines après le renvoi de Global Witness.

Les pays bailleurs de fonds ne semblent plus croire à la capacité du gouvernement cambodgien de mener à bien la réforme forestière et la mise en place d’un plan de gestion durable des forêts. Ils soumettent au gouvernement un projet d’étude indépendante et approfondie sur l’état des forêts. Sept experts seront nommés et travailleront pendant six mois, ce qui entraînera une dépense de 400 000 à 500 000 dollars. Selon un spécialiste des Nations Unies, 80 % de l’espace forestier cambodgien a déjà été ratissé par les entreprises forestières, et il importe de savoir ce qui reste. Cette étude ne peut être menée qu’avec l’accord du gouvernement. Le ministre de l’Agriculture a donné son accord verbal.

Le 19 juin, la société suisse Société Générale de Surveillance (SGS) est pressentie pour observer l’exploitation des forêts cambodgiennes à la place de Global Witness. En 1995, le gouvernement avait eu recours à la SGS pour contrôler les denrées entrant et sortant du port de Kompong Som, mais la SGS avait rompu le contrat, suite à une absence de paiement par le gouvernement. Cette société est spécialisée dans le contrôle des transports de denrées, non dans la surveillance des forêts.

Tourisme

Le 6 mai, le nouvel aéroport de Phnom Penh est inauguré par le Premier ministre. Cet aéroport pourra accueillir annuellement cinq millions de passagers, contre un million actuellement. Le gouvernement français a financé les travaux de rénovation à hauteur de douze millions de dollars. La SCA (Société Concessionnaire de l’Aéroport, filiale du groupe français Vinci qui détient 70 % du capital, 30 % étant détenu par la société malaisienne Muhibbah), a investi 105 millions de dollars dans les aéroports de Phnom Penh et de Siemréap, dont 32 millions dans le terminal de Pochentong. La société prévoit un investissement de 200 millions dans les années à venir. Ces projets fourniront plus de 1 000 emplois. Le 15 mai est inauguré un nouveau centre de radar d’une valeur de 23 millions de dollars, dont 70 % en prêts de la BAD, 15 % de la compagnie thaïlandaise Samart, et 15 % du gouvernement. Ce nouveau radar couvre désormais tout l’espace aérien cambodgien. Chaque avion qui décollera ou atterrira devra payer entre 700 à 800 dollars. L’aéroport de Phnom Penh reçoit le label ISO 9001.2000 qui certifie sa qualité internationale pour six mois.

De nombreuses compagnies aériennes ont dû suspendre leurs activités à la suite de la baisse du trafic occasionnée par le SRAS. On compterait une baisse de 37 % de visiteurs. Beaucoup de personnel affecté aux activités touristiques ont été soit licencié, soit placés en chômage technique. On estime la perte pour l’Etat à 8,1 millions de dollars pour les quatre premiers mois de l’année.

Le 9 juin, la BAD accorde un prêt de 600 000 dollars au gouvernement pour développer l’éco-tourisme au Cambodge pendant deux ans.

La société Kham Someth, de Siemréap, signe un contrat de 35 ans, pour l’exploitation des temples de Koh Ker. La société s’engage à tracer une route de 105 km. en passant par Boeung Méaléa, et à y investir 21 millions de dollars. Cette route désenclavera, entre autres, les 400 familles du village de Sayang qui sont totalement isolées dans leur forêt. Les quelque cent temples de la région, construits entre 921 et 941, resteront sous le contrôle de l’Autorité Apsara, mais la société percevra les bénéfices de la vente des tickets (entre cinq à dix dollars).

Le 4 juin, le gouvernement cambodgien signe un accord de 25 ans, pour la construction d’un musée à Siemréap, financé par la famille thaïlandaise Vilailuk, qui détient la majorité du capital de la société thaïlandaise Samart. Ce musée exposera les objets d’art qui n’ont pas trouvé de place au musée de Phnom Penh. Un centre commercial avec le premier restaurant Mac Donald’s du Cambodge sera incorporé dans le complexe du musée.

Les locations d’appartement haut de gamme ont baissé de 20 à 70 % par rapport à 2002, les tarifs étaient nettement exagérés par rapport aux pays voisins. La perspective des élections du 27 juillet n’est pas étrangère à ce réajustement des prix.

Le 27 mai, le riel, qui avait connu une subite inflation (1 dollar pour 4 110 riels), a repris son coût d’environ 1 dollar pour 4 000 riels grâce à une intervention de la Banque nationale du Cambodge.

La croissance du PIB et des investissements étrangers baisse d’année en année. Les entreprises de textile sont menacées par l’entrée du Cambodge dans l’OMC, car l’on prévoit que seul dix à vingt pays pourront rivaliser avec le géant chinois. Les recettes de l’Etat proviennent essentiellement des taxes douanières (310 millions de dollars), et des financements étrangers alloués au développement du pays (270 millions de dollars). Deux cents mille nouveaux travailleurs arrivent sur le marché chaque année. Sans des réformes sérieuses pour développer l’industrie agro-alimentaire des campagnes, le Cambodge aura des difficultés pour affronter les défis de l’avenir.

DONS, PRETS ET INVESTISSEMENTS

Le 14 mai, la France accorde un don de 1,4 millions d’euros en tant qu’« appui à la modernisation de la fonction publique » : définition d’une politique des agents de la fonction publique, Ecole Royale d’Administration, gestion du projet.

Le 24 juin, la France accorde un don de 4,7 millions de dollars pour l’accès à l’eau potable de populations défavorisées, pour des centres de santé et des écoles de quartiers périphériques de Phnom Penh. Elle accorde également un don de 4,1 millions de dollars pour le développement de l’hévéaculture villageoise. 445 nouveaux planteurs seront concernés.

Le 25 juin, le Japon fait un don de 6,27 millions de dollars pour per-cer des puits dans 165 villages autour de Phnom Penh. Actuellement, 74 % de la population cambodgienne n’ont pas accès à l’eau potable.

Les Etats-Unis envisagent de reprendre leur aide pour la formation de l’armée cambodgienne interrompue après les événements de 1967.

La société de jeux américaine Win Win, de Las Vegas, lance une loterie au Cambodge, où elle a déjà investi 500 000 dollars.

Le 22 juin, le ministre des Transports signe un contrat de douze millions de dollars avec la société vietnamienne Cienco pour la rénovation des 51 km. de la route nationale de Takéo à la frontière vietnamienne. Le 28 juin, un contrat semblable est signé pour la rénovation de la route 30 à Kampot, avec un don de vingt millions de dollars de la Corée du Sud.

Le 28 juin, des officiels cambodgiens et thaïlandais se rencontrent pour discuter de l’asphaltage de la route 48 reliant Koh Kong à Srè Ambel. Les Thaïlandais offrent un prêt de quatorze millions pour des travaux qui dureront trois ans. Le ministre cambodgien des Transport veut demander un prêt supplémentaire de sept millions pour la construction des ponts de cette route. Actuellement, plus de trois cents véhicules utilisent chaque jour cette route.

SOCIETE

Le 13 mai, le CDRI (Institut de développement des ressources du Cambodge) révèle aux gouverneurs de province un rapport faisant état que 40 à 50 % des familles rurales vivent dans une situation « inquiétante » : 20 % n’ont pas de terres, 25 % travaillent sur un lopin de terre inférieur à 0,5 hectare, 20 % sur une parcelle comprise entre 0,5 et 1 hectare, 25 % sur une parcelle de 1 à 3 hectares, 10 % de plus de 3 hectares. 29 % des familles vivent de l’agriculture.

Le 25 juin, une centaine de personnes manifestent devant la maison de Hun Sen à Phnom Penh, au nom de 120 familles de Chrang Chamrès. Elles protestent contre la saisie par « un puissant » des soixante hectares sur lesquels elles vivent.

Le nombre des enfants des rues de Phnom Penh est passé de 1 500 en 2001 à 1 800 en 2003. Les deux tiers d’entre eux consommeraient de la drogue. « Les enfants des rues constituent le baromètre d’une société dit Sébastien Marot, de l’ONG Les Amis. A Sihanoukville, on estime que le nombre des enfants des rues a triplé en un an. Il y aurait entre 40 000 et 50 000 orphelins du sida. On en prévoit 140 000 d’ici à 2005.

Une étude révèle que plus d’un mineur sur deux est en contact avec la pornographie.

Le 27 mai, les Pays-Bas ont décidé de suspendre les adoptions en provenance du Cambodge à cause de la corruption du système actuel. Bien que favorable à l’adoption, le représentant de l’UNICEF se déclare satisfait de cette mesure. Le Canada et les Etats-Unis avaient déjà décidé d’un moratoire pour l’adoption des enfants, la France est en train d’étudier également la suspension des adoptions. Un nouveau projet de loi sur l’adoption internationale est préparé par le ministère des Affaires sociales et l’Unicef, et sera peut-être adoptée avant la fin de l’année. Environ 2 000 enfants cambodgiens ont été adoptés par des étrangers durant les trois dernières années, donnant souvent lieu à des trafics sordides : les enfants achetés entre 30 et 100 dollars à leurs parents sont revendus entre 5 000 et 20 000 dollars. Pourtant le Cambodge a signé la Convention internationale de la Haye de 1993 sur l’adoption.

Vie syndicale

Le 1er mai, Chéa Vichéa, proche du PSR, est réélu à la tête du syndicat SIORC (Syndicat indépendant des ouvriers du Cambodge) avec 402 voix contre 131 à son concurrent le plus proche, pour un troisième mandat de deux ans. Il s’engage à continuer à se battre pour la réduction du temps de travail, de 48 à 44 heures hebdomadaires, et pour un salaire minimum mensuel de soixante-dix dollars. Le SIORC revendique 35 800 adhérents, dont seulement 30 % paient leur cotisation mensuelle. Il est implanté dans soixante-douze usines du secteur de la confection. Depuis sa création, il a organisé plus de deux cents grèves.

Le Cambodge compte onze fédérations syndicales reconnues officiellement, mais seulement « deux ou trois indépendantes du PPC selon Vichéa. Les syndicats sont présents dans 50 % des 197 usines de textile, qui emploient 210 000 ouvriers, dont 90 % de femmes.

Le 2 mai, les employés de l’usine Tai Yen Enterprise menacent de faire grève si une employée chinoise rentrant de vacances en Chine et soupçonnée d’être atteinte du SRAS n’est pas mise en quarantaine. Après examen, la Chinoise ne présente aucun symptôme de la maladie. Van Sou Ieng, président de l’Association des patrons des usines textiles, conseille aux Chinois, retournés en Chine pour divers motifs, de ne pas rentrer au Cambodge, afin d’apaiser le climat. On compterait environ 1 000 contremaîtres et personnel de maîtrise chinois au Cambodge.

Le 7 mai, les 1 700 ouvriers de l’usine textile Wing Tai Apparel Factory mettent un terme à une grève d’une semaine. Deux admi-nistrateurs chinois qui avaient tenté de s’opposer par la force aux gré-vistes sont suspendus, la commission d’arbitrage de l’OIT examinera les onze revendications des ouvriers. Un accord est conclu le 20 mai.

Les 6 et 7 mai, plus d’une soixantaine d’ouvrières de l’usine Kbal Koah Garnment s’évanouissent, sans doute à cause des vapeurs dégagées par les produits chimiques de traitement des vêtements. D’autres pensent que c’est un mauvais génie qui est en colère contre la direction de l’usine qui ne l’a pas respecté. Quatre fenêtres ont été percées, et douze ventilateurs installés.

Le 21 mai, une usine de textile de quatre étages, employant 1 100 personnes, située au sud de Phnom Penh, est détruite par les flammes, après la sortie des ouvriers. On déplore au moins onze blessés. Les ouvriers touchent la totalité de leur salaire pour le travail effectué, puis 45 % de leur salaire du 11 mai au 15 juin, date à laquelle ceux qui le désirent, reprendront le travail dans un autre local. Environ 80 % des ouvriers reprennent le travail le 23 juin, à Stoeung Méan Chhey. On note l’excellent climat social de l’usine.

La société ne peut visiblement pas toucher les indemnités de l’assurance, étant dans l’impossibilité de fournir les documents concernant le permis de construire et les plans de l’édifice, qui a l’origine ne comprenait que deux étages. Plusieurs cloisons du rez-de-chaussée avaient été supprimées pour gagner de la place, ce qui explique que le bâtiment se soit effondré comme un château de cartes.

Le 3 juin, 4 000 ouvriers des usines de confection Fortune Garnment et Woolen Knitting Factory de Saang se mettent en grève pour réclamer des salaires plus décents, le caractère volontaire des heures supplémentaires, la liste des jours fériés calquée sur ceux de la fonction publique. La direction devrait 770 000 dollars d’impayés aux employés au titre d’août 2001 à janvier 2003.

Le 2 juin, les lanceuses de bière de la marque Tiger se mettent en grève pour demander le licenciement de la responsable financière qui procède à des retenues sur leur salaire. La direction refuse de négocier, prétextant que personne ne parle khmer en son sein, ce qui en dit long sur les rapports au sein de l’entreprise !

Le 12 juin, soixante-dix-huit ouvrières de l’usine Great Lancelot International Co Ldt. s’évanouissent par manque d’air frais dans leur usine.

Le 11 juin, plus de 400 policiers anti-émeutes, armés de bâtons en caoutchouc, de boucliers, d’autres armés de fusils d’assaut AK 47, bloquent 500 ouvrières de l’usine Terratex Knitting and Garnment International Factory près du pont Monivong. La raison évoquée par les autorités est la sécurité avant le forum régional de l’ASEAN, qui commencera le 16 juin. Le 12, après quatre jours de grève, les grévistes sont rejoints par plusieurs ouvriers des usines voisines. Les choses dégénèrent avec l’arrivée de casseurs professionnels et l’attaque de la police qui suit : un ouvrier est tué par balle, un policier est tué par un jet de brique, on déplore au moins neuf ouvriers hospitalisés, dont au moins deux gravement, vingt-quatre policiers blessés. Neuf personnes sont arrêtées entre le 13 et le 25 juin. Ranariddh lance un appel pour que soient arrêtés et punis les fauteurs de troubles.

On s’interroge sur les motifs d’un tel débordement meurtrier : volonté gouvernementale de discréditer le SIORC, et par là le PSR, qui n’était pourtant pas organisateur de la grève ? Dissidences au sein du PPC, visant à discréditer Hun Sen ? Les meneurs de la grève étaient des proches du PPC. Le SIORC note cependant l’absence des « enfants des pagodes milice de type fasciste au service de Hun Sen, et des membres des syndicats pro-PPC. Le PSR, pour sa part, estime que le gouvernement a voulu montrer qu’il est maître de la sécurité avant le sommet de l’ASEAN. On peut légitimement se poser la question : pourquoi les unités anti-émeutes sont équipées d’armes de guerre ? « Ils n’ont jamais reçu l’ordre de tirer se défendent les autorités.

Du côté du gouvernement, on avance être face à une opération de déstabilisation du gouvernement à la veille du sommet de l’ASEAN. Le 17 juin, le ministère des Affaires sociales épouse la thèse d’émeutes provoquées par un groupe extérieur aux manifestants, et se défend de l’accusation de négligence de sa part dans la résolution du conflit.

Le 17 juin, les groupes cambodgiens de défense des droits de l’homme accusent le gouvernement de créer des troubles pour supprimer les activités politiques des groupes d’opposition avant les élections. On pointe le doigt sur David Chanaiwa, avocat du patronat, qui a employé par le passé des méthodes musclées pour supprimer les syndicats dans plusieurs usines, et qui aurait introduit des éléments extrémistes parmi les grévistes. Le barreau de Phnom Penh demande de le rayer des listes pour « actes impardonna-bles D’après Hun Sen, l’action de Chanaiwa pourrait compromettre l’entrée du Cambodge dans l’OMC.

A la fin du mois de juin, après plus d’un mois de discussions au ministère des Affaires sociales, le conflit qui oppose soixante-quatre employés de l’hôtel Cambodiana à la direction n’est pas résolu. Les employés se plaignent d’avoir été licenciés en mai, suite à la crise occasionnée par le SRAS, sans avoir touché d’indemnités suffisantes.

EDUCATION

Le 2 mai, l’agence de coopération américaine USAid débloque quatre millions de dollars pour l’année 2003, et quatre autres millions jusqu’en septembre 2005, pour soutenir la réforme des programmes scolaires et l’apprentissage de méthodes pédagogiques.

Le 10 juin, un plan « Education pour tous » est lancé conjointement par l’UNESCO, l’UNICEF et le gouvernement, après plus de deux ans d’élaboration. Ce plan, qui devrait recueillir le soutien de la Banque Mondiale et des pays donateurs, prévoit d’ici 2015, « un enseignement obligatoire, gratuit et de qualité » à tous les enfants, « notamment les filles les enfants en difficultés et ceux des minorités ethniques, et d’améliorer de 50 % le niveau d’alphabétisation des adultes. Le plan entend augmenter, d’ici 2005, l’accès au collège de 18 à 50 %, et de parvenir à ce que les enfants achèvent leur cycle primaire à 90 % (45 % actuellement). Le gouvernement s’est engagé à faire passer la part du budget consacré à l’éducation de 18 à 20 %.

Cependant, sans une réévaluation correcte du salaire des instituteurs, toute réforme est vouée à l’échec. Hun Sen affirme qu’il ne peut augmenter les salaires sans prélever des impôts sur les paysans. Dans une lettre en date du 10 juin, Rong Chum, président de l’Association indépendante des instituteurs, lui répond qu’il n’est pas satisfait des explications du Premier ministre et que la corruption est la cause de tout.

Le nombre des enfants scolarisés est passé de 2,2 à 2,7 millions, les lycéens de 340 000 à 545 000.

Des bourses annuelles de 45 dollars seront attribuées à 20 000 enfants pauvres pour leur permettre de poursuivre leurs études. 100 000 bourses sont prévues pour 2010. Le PAP (Programme d’action prioritaire) s’occupera de 430 collèges (mais le PAP est-il crédible ? Seulement 53 % des fonds prévus pour 2002 ont été versés ; au 20 mai 2003, seulement la moitié des primes promises par le PAP aux enseignants acceptant une mutation en province ont été versées, seulement 50 % des crédits de l’Education ont été versés, etc.), un fonds japonais de 75 collèges les plus pauvres. La Belgique s’est engagée à soutenir 80 collèges.

Deux mille instituteurs seraient atteints du sida, ce qui laisse présager un déficit sérieux pour l’enseignement des années à venir.

Le 30 mai, le Japon s’engage à verser 154 519 dollars pour trois projets de construction d’écoles et de centres de formation dans la province de Prey Veng.

Ces dernières années, 2 232 écoles portant le nom de Hun Sen ont été construites, ce qui représente une dépense d’environ 44 millions de dollars. Edifiés pour un coût unitaire de 20 000 dollars, leurs murs sont généralement de mauvaise qualité. C’est une façon, entre autres, de rappeler le nom du Premier ministre. Beaucoup de routes, de ponts, de pistes portent le nom du Premier ministre ou de son épouse, comme s’ils étaient les bienfaiteurs universels du Cambodge, tirant l’argent de leur propres fonds.

Une société coréenne projette la construction d’une école technique près de Phnom Penh pour cent étudiants, au coût de dix-sept millions de dollars. Il y a plus de vingt écoles professionnelles dans le pays. Parmi les diplômés de ces écoles, 60 % trouvent un travail dans le privé.

Le Cambodge compte de plus en plus d’universités privées, comme si l’Etat se désintéressait de ce secteur.

Le 26 juin, la police interrompt une réunion d’instituteurs à Kompong Chhnang, organisée par l’Association indépendante des instituteurs du Cambodge. La police agit en contradiction avec la loi, prétextant de n’avoir pas les effectifs pour prévenir des troubles éventuels…

Le 27 juin, les Etats-Unis font un don de trois millions de dollars au ministère du Travail pour favoriser l’éducation des enfants, et éviter qu’ils ne soient soumis au travail.

Justice

Un comité d’une trentaine d’avocates, soutenues par l’agence japonaise JICA, accueille des femmes pour assistance juridique.

Le 26 mai, un groupe de trente-deux ONG défendant les droits des femmes se voit refuser le droit de manifester pacifiquement pour demander l’examen et le vote du projet de loi sur la violence domestique.

SANTE

Le Cambodge n’a pas connu de cas de SRAS, même si l’épidémie de pneumopathie atypique a causé plusieurs fausses alertes. Cela n’a pas empêché une pharmacie chinoise de vendre à prix d’or une tisane aux six ingrédients ayant de prétendues vertus anti-SRAS. Une rumeur selon laquelle il faut manger beaucoup de haricots pour être immunisé fait la richesse de certains commerçants dans la nuit du 7 au 8 mai ! Le Premier ministre doit intervenir sur les ondes et propose la création d’une cellule anti-rumeur, « les rumeurs mettant en danger la stabilité politique du pays » !

Sur 341 cabinets dentaires recensés, trente-sept seulement ont sollicité une licence.

Le 11 juin, la FNUAP annonce un financement de trois millions de dollars pour diffuser l’usage de méthodes contraceptives modernes pendant deux ans. 55 % de la population est âgée de moins de 21 ans. Le taux de fertilité des femmes mariées a baissé de 5,4 % en 1990 à 4 % en 2000. L’usage de la contraception a crû de 7 % en 1994 à 19 % en 2002. Selon un rapport de l’UNICEF, le Cambodge se place au 8ème rang mondial en matière de malnutrition infantile. 437 femmes meurent en couches sur 100 000 accouchements.

80 % des nouveaux-nés ne sont pas enregistrés, bien que la loi stipule qu’ils doivent l’être dans les trente jours qui suivent leur naissance. La corruption est en partie responsable de cet état de fait : à Phnom Penh, on demande 10 000 riels (deux dollars et demi) pour une inscription, officiellement tarifée à 1 500.

L’UNICEF avait débloqué 180 000 dollars l’an dernier pour analyser l’eau de plus de 5 000 puits, suspectés de contenir des doses importantes d’arsenic. Cette année, l’UNICEF annonce le versement de 375 000 dollars pour l’examen systématique de l’eau dans 1 400 villages. Le gouvernement a fixé l’an dernier le taux maximal d’arsenic dans l’eau à 50 microgrammes par litre, mais dans la région de Kandal, on en rencontre fréquemment 500 mmgr.

Drogue

On annonce régulièrement la saisie de pilules de drogue, spécialement d’amphétamine :

Le 7 mai, 8 000 pilules sont saisies à Poïpêt. Durant le mois de mai, la police en saisit 4 000 à Battambang. Le 25 mai, elle en saisit 1 700 à Phnom Penh. Le 28 mai, trois personnes sont arrêtées à la frontière vietnamienne avec 30 kg. d’héroïne. Ce réseau serait parvenu à introduire 130 kilos d’héroïne au Vietnam, en provenance du Triangle d’or. Durant les premières semaines de juin, plus de 30 000 pilules d’amphétamine ont été saisies, huit personnes auraient été arrêtées, dont un militaire à Stoeung Treng, deux femmes avec 28 000 pilules sont arrêtées à Kratié. Le 15 juin, 3 100 pilules sont saisies à Phnom Penh, etc.

Malgré ces actions spectaculaires, il faudrait saisir plus d’un million de pilules et plusieurs centaines de kilos d’héroïne pour que l’on assiste vraiment à l’éradication du trafic de drogue. Ces saisies sont le signe d’un nouveau phénomène : le Cambodge n’est plus seulement un pays de transit de la drogue, mais un pays consommateur.

Le 6 mai, Hun Sen demande aux pays donateurs de lui prêter assistance dans la lutte contre la drogue. Les observateurs étrangers font remarquer que peu de poursuites sont engagées contre les fonctionnaires puissants qui protègent les réseaux de trafiquants.

Trafic d’êtres humains

Le 7 mai, les représentants de vingt-cinq pays d’Asie de l’Est et de la région Pacifique décident de renforcer leur lutte contre le trafic d’êtres humains dans la région. Un million d’enfants de 12 à 17 ans travaillent dans le commerce sexuel en Asie. Le Japon et l’ONU décident de verser 1,2 millions de dollars dans un projet de l’OIT, pour la protection des enfants au Cambodge et au Vietnam, pour trois ans, notamment dans quatre provinces cambodgiennes. C’est avant tout le financement d’opérations de sensibilisation et de soutien destinées aux familles exposées.

Les Etats-Unis rayent le Cambodge de leur liste noire concernant les pays tolérant le trafic d’êtres humains. Placé dans le 3ème groupe de pays, le Cambodge accède au 2ème groupe. Cependant, le rapport des Etats-Unis estime que beaucoup de choses restent à faire : « Le Cam-bodge est un pays de départ et d’arrivée pour des personnes victimes de trafic à des fins sexuelles ou au travail forcé. Son gouvernement, même s’il a fait des efforts, ne répond pas complètement aux standards minimums nécessaires à l’élimination de ces trafics. Selon la ministre des Affaires sociales, « il ne s’agit que d’un encouragement : si le système judiciaire n’est pas réformé de façon à punir efficacement les auteurs de trafics, et les hauts fonctionnaires qui les couvrent, le Cambodge sera à nouveau rétrogradé ». Selon la ministre, ces trafics pourraient concerner « 300 000 personnes ».

Droits de l’homme

Le 12 mai, durant la treizième session de la Commision de l’ONU pour l’action contre la torture, à Genève, le Cam-bodge est épinglé pour de nombreux cas de torture perpé-trée par la police sur les prisonniers. Des questions sont po-sées au gouvernement qui doit y répondre avant le 31 août.

DIVERS

Lors de la treizième journée internationale de la presse, le 26 avril, Reporters Sans Frontières (RSF) qualifie le Cambodge de « bon élève de l’Asie du Sud-Est même si la quasi-totalité des médias audiovisuels est contrôlée par des proches du Premier ministre. RSF reproche au gouvernement son manque de volonté pour mener des enquêtes sur l’assassinat de journalistes perpétrés dans les années 1990 et sur l’interdiction faite à Radio Abeille de rediffuser les émissions de Free Asia et de Voice of America.

La ville de Phnom Penh abandonne la station radio de Préah Vihéar lancée par l’ex-maire, Chéa Sophara. Cette radio coûterait 6 000 dollars par mois. La ville doit 100 000 dollars pour le coût de sa construction.

Au moins trente tortues royales, qui peuvent vivre plus de cent ans, et peser plus de 61 kg. sont apparues dans la rivière de Srè Ambel, près de Koh Kong. On estime que seulement 10 % arrivent à l’âge adulte de 25 ans.

Le 13 mai, on apprend qu’un cargo battant pavillon cambodgien, de la CSC (Cambodgian Shiping Compagny), qui a été reprise par la société coréenne ISROC, a été arraisonné au large de la Grèce avec 2 000 caisses de cigarettes en contrebande à bord. La CSC a gardé les documents, et travaille donc à son compte, en toute illégalité.

Le cinéaste cambodgien Rithy Panh est lauréat du prix François Chalais 2003 pour son film documentaire S21, la machine de mort khmère rouge.

Des armes en provenance du Cambodge sont envoyées en contrebande pour alimenter les maquis indonésiens de l’île d’Aceh. Ce serait d’anciens soldats Khmers rouges démobilisés de Païlin, qui s’adonneraient à ce trafic. D’après l’état-major philippin, le groupe Abu Sayyaf se procurerait également des armes au Cambodge, mais neuves, ce qui exclurait les trafiquants individuels… En avril, le journal Washington Times affirmait qu’un bateau d’armes cambodgiennes en provenance du Cambodge et du Vietnam avait été arraisonné dans les eaux malaisiennes.