Eglises d'Asie

LE POINT SUR LA SITUATION POLITIQUE ET SOCIALE du 1er janvier au 29 février 2004

Publié le 18/03/2010




LA CRISE POLITIQUE

La crise politique laisse le Cambodge sans gouvernement depuis les élections du 27 juillet 2003, soit depuis sept mois. Une issue est peut-être possible dans un proche avenir, après l’achat du FUNCINPEC. Jusqu’à présent, l’Alliance des démocrates a semblé vouloir faire durer la crise le plus longtemps possible pour mettre Hun Sen en difficulté auprès des pays et des institutions donateurs. Hun Sen aurait essayé de soudoyer Ranariddh avec trente millions de dollars, mais sans succès. Il semble possible que certains députés acceptent l’offre dans l’avenir. Où est le bien du peuple khmer ?

Deux pétitions, l’une en date du 26 décembre, portant les signatures de 126 membres du FUNCINPEC, l’autre du 3 janvier, portant 53 signatures, sont envoyées à Ranariddh, en France depuis le 5 novembre. Ces pétitions expriment la désapprobation des membres du FUNCINPEC pour l’union du parti avec le PSR, les deux partis étant comme « l’eau et l’huile et demandent le retour de Ranariddh au Cambodge. Personne toutefois ne connaît l’origine de ces pétitions, ni même si les signataires sont membres du FUNCINPEC.

Sam Rainsy et Sirivuddh, de l’Alliance des Démocrates, se réunissent avec Ranariddh à Paris, le 5 janvier. Hun Sen a beau jeu de critiquer Ranariddh qui « abandonne ses électeurs et abandonne le Cambodge ! » Les trois responsables demandent que débutent des « négociations sérieuses » avec le PPC, laissant entendre ainsi que les précédentes étaient un jeu. Le roi se moque des trois politiciens : « C’est inutile de crier depuis Paris. Ici, personne ne vous entend ! »

Le 13 janvier, une délégation de l’Union européenne incite fortement les partis d’opposition à la « formation rapide » d’un gouvernement et menace de supprimer ses aides au Cambodge. Mais Sam Rainsy s’enorgueillit de jouir du « soutien politique et financier des Etats-Unis » (en réalité de quelques sénateurs).

Le 19 janvier, Sihanouk, découragé, s’envole pour la Chine où il doit suivre des examens médicaux de routine. De Chine, il envoie régulièrement par Internet ses commentaires attristés. Il estime que « l’Alliance a reçu deux gifles tonitruantes » : l’une de la Chine dont le gouvernement a invité Hun Sen pour une visite officielle à la date qui lui conviendra, l’autre du Japon, qui reconduira ses aides prévues pour 2004, sans diminution.

Le 4 février, Sam Rainsy et Sirivuddh rencontrent Ranariddh à Bangkok. Ranariddh aurait demandé au Premier ministre thaïlandais d’intervenir pour résoudre la crise cambodgienne, provoquant la colère de Sihanouk qui se sent humilié !

Le 5 février, les partis de l’Alliance demandent aux investisseurs étrangers et aux pays donateurs de cesser de négocier avec le gouvernement actuel, taxé d’« illégal et inconstitutionnel Cependant, plusieurs pays donateurs européens ignorent cet appel. En visite au Cambodge, le 23 février, le ministre français de la Coopération annonce que l’aide bilatérale de la France, d’un montant de 25 millions de dollars, ainsi que l’aide apportée par les ONG ne seront pas changées. A la question du changement dans l’aide, le fonctionnaire allemand chargé du dossier répond : « Absolument pas ! L’Allemagne fait des dons (18,4 millions d’USD par an), et non des prêts, et n’est donc pas liée à l’approbation de la Chambre des députés. Les Etats-Unis ne prévoient pas de changer les 40 millions d’aide annuelle. Seule, le 10 février, la BAD annonce qu’elle n’approuvera plus de prêt pour le Cambodge sans l’approbation de l’Assemblée nationale.

Ranariddh rentre au Cambodge le 6 février, après trois mois d’absence, mais en repart le 10, pour participer à un congrès de démocrates en Espagne, puis pour l’Allemagne et Bruxelles, sans que des progrès aient été notés dans la formation du gouvernement. Avant son départ, Ranariddh et Hun Sen s’engagent à demander à leurs radios respectives de modérer leurs attaques réciproques afin de créer une atmosphère favorable aux négociations. Hun Sen propose pour sa part de former un gouvernement bipartite, car il craint que le PSR ne crée l’opposition au sein même du gouvernement. Le roi Sihanouk, de Pékin, observe que beaucoup de membres du FUNCINPEC commencent à loucher vers la formation d’un gouvernement bipartite afin d’obtenir de postes… Néak Bun Chhay reconnaît des « courants » dans le parti. Hun Sen fait des offres de plus en plus alléchantes et promet de créer de nouveaux postes pour les membres du FUNCINPEC qui travailleraient avec le PPC.

Le 18 février, vingt-et-un députés du PSR saisissent le Conseil constitutionnel pour qu’il se prononce sur la légalité du gouvernement actuel.

Le 23 février, à son retour de France, Sam Rainsy envisage que l’Alliance des démocrates laisse le pouvoir au seul PPC et s’organise comme un grand parti d’opposition.

Le 18 février a été reconduit le traité khméro-vietnamien de 1979, valable pour vingt-cinq ans, reconductible tacitement pour dix ans. L’opposition qui se bat pour des principes a laissé passer une bonne occasion de se manifester.

A la requête d’un député PPC, Hun Sen approuve un budget d’un million de dollars à l’Assemblée nationale pour deux réunions internationales à venir. L’opposition crie à l’illégalité et se plaint que ses députés ne sont pas payés depuis cinq mois.

Le 10 janvier, le roi Sihanouk accepte le prolongement du mandat des sénateurs qui arrive à échéance dans trois mois, en raison de l’absence de loi encadrant leur élection. Ils continuent à recevoir leur salaire de 1 000 dollars par mois (salaire minimum : 45 USD), même s’ils n’ont rien à faire. Ils ont dû emprunter de l’argent pour faire fonctionner le Sénat (2 500 par mois). Le 13 février, 49 membres du Sénat votent leur propre reconduction, huit s’abstiennent.

Il semblerait qu’un accord bipartite entre le PPC et le FUNCINPEC soit en vue, avec partage à 50/50 des postes ministériels. Le PSR resterait dans l’opposition. Cet accord devrait prendre effet avant le retour de Sihanouk, pour bien montrer à Sihanouk qu’on peut se passer de lui. Le PPC, quoiqu’il en dise, est en mauvaise posture car les caisses sont vides, une bonne partie de son argent a servi à acheter les électeurs, d’un manière ou d’une autre.

JUGEMENT DES EX-DIRIGEANTS KHMERS ROUGES

Dans une lettre ouverte à ses compatriotes, en date du 29 décembre, puis dans une émission radio, Khieu Samphan affirme n’avoir réalisé le système d’extermination systématique du régime qu’il présidait, qu’en visionnant le film de Ritthy Panh « S-21, la machine de mort khmère rouge Il publie un livre chez : L’histoire récente du Cambodge et les motifs de mes prises de position (125 pages). Il nie toute implication dans les massacres, se décrivant comme un patriote et non comme un révolutionnaire. On le tenait à l’écart des prises de décisions, et il ne s’est aperçu de rien. Thèse difficilement crédible, sauf s’il démontre par le menu comment se prenaient les décisions, comment et par qui elles étaient appliquées.

Jacques Vergès se propose comme avocat pour défendre Khieu Samphan qu’il dit avoir connu en France dans les mouvements progressistes. Plusieurs pensent que Vergès a vécu au Cambodge du temps des Khmers rouges.

Le candidat démocrate aux élections américaines John Kerry s’était rendu au Cambodge plusieurs fois en 2000 pour négocier le texte concernant la tenue du tribunal devant juger les ex-responsables Khmers rouges. Il est plus proche de Hun Sen que Bush, et moins favorable à l’Alliance des démocrates.

Le 25 février, la Cour militaire de Phnom Penh prolonge la détention préventive de Ta Mok et de Duch, déjà en prison depuis cinq ans. Selon Benson Samay, avocat de Ta Mok, c’est la dernière fois qu’il accepte une telle reconduction.

ECONOMIE

Avec toute les réserves de rigueur sur des statistiques concernant une économie peu encadrée, comme celle du Cambodge, la croissance aurait été de 4,5 % en 2003 (5,5 % en 2002). Les ressources gouvernementales auraient baissé de 1,7 %, se situant à 19 % en dessous des prévisions ; les dépenses seraient en augmentation de 10 %, l’inflation serait de 1,2 % (3,3 % en 2002), le revenu annuel par personne se situerait à 281 USD par an, soit une hausse de 1 %.

Bois

Le 5 février, le vice-directeur de l’Environnement de la province de Kompong Thom accuse le ministère de l’Agriculture d’avoir autorisé le transport de 200 m3 de bois précieux de la province de Préah Vihéar.

On signale 104 tronçonneuses travaillant dans la réserve forestière du Phnom Aural. Cent mille hectares auraient déjà été dévastés. Les camions chargés de bois partent la nuit. « Il suffit de payer les militaires » pour exporter le bois, explique un contrevenant.

Le 20 février, Global Witness, ONG britannique d’observation de l’environnement, nommée par le gouvernement cambodgien en 2000 puis remerciée sans ménagement en avril 2003 pour être remplacée par la SGS (Société générale de surveillance), diffuse un communiqué révélant qu’un important trafic de bois précieux se passe actuellement (janvier et février) dans plusieurs provinces. Avec la complicité des autorités locales et nationales, dans la province de Kratié, 1 000 m3 d’ébène, d’une valeur d’environ 700 000 USD, sont passés au Vietnam, à Valou, sous la protection de groupes armés, supervisés par l’ancien chef de la police des frontières, avec des documents officiels. D’autres essences rares passeraient en Thaïlande dans la région d’O Smach (province d’Oddar Méan Chhey), pour la société thaïlandaise Thitikam, avec l’aide du gouverneur de la province. Au moins 700 m3 de bois précieux serait entreposés dans le village de O Pouk, sous la protection du Bataillon 42. Une société taïwanaise North East Timber s’attaquerait aux essences précieuses dans la province de Préah Vihéar.

La SGS, mise en place officiellement le 25 novembre 2003, a théoriquement commencé ses opérations de surveillance le 1er février 2004, et a été investie officiellement seulement le 18 février 2004.

Industrie

Le volume des exportations de vêtements a augmenté de 15 % en 2003, alors que celui des chaussures a baissé de 16 %. Les exportations de vêtement ont généré 1,54 milliard de dollars de recettes. L’augmentation des exportations sous quota vers les Etats-Unis a été de 50 millions (72 millions hors quota). Le patronat cambodgien voit dans cette augmentation une récompense pour l’amélioration des conditions de travail des ouvriers. Cette progression des exportations a généré 24 000 emplois et la création de dix nouvelles entreprises. Cependant, Van Sou Ieng, président de l’Association des entrepreneurs, répète, le 12 février, que sans « un remède de cheval la confection textile risque de disparaître du Cambodge : « Pots de vin, bureaucratie et corruption tueront cette industrie 

Tourisme

Le nombre des visiteurs d’Angkor en 2003 a battu les records : 321 557 visiteurs, contre 315 697 en 2002, malgré l’épidémie de SRAS. Mais, pour l’ensemble du pays, on assiste à une baisse de 10 % par rapport à l’année précédente. Les recettes de la billetterie sont montées à 9,4 millions de dollars. L’autorité Apsara en recevra 10 %, le gouvernement 75 % et Sokha Hôtel 25 % des 90 % restant. L’industrie du tourisme a rapporté environ 300 millions de dollars dans l’année. C’est le deuxième poste d’entrée de devises après la confection textile. La grippe aviaire semble rendre les touristes moins désireux de se rendre en Asie. On parle déjà de 10 % de réservations en moins.

La taxe d’aéroport sur les vols internationaux passe de vingt à vingt-cinq dollars pour les étrangers, dix-huit pour les nationaux. Une nouvelle compagnie, la First Cambodia Airlines, dont l’un des actionnaires n’est autre que la fille de Hun Sen, a affrété un A320 qui s’est posé à Pochentong. Cette compagnie reliera Phnom Penh à Singapour, Kuala Lumpur et Canton.

Les communications très bon marché par Internet sont désormais interdites au Cambodge. Le 31 décembre, le gouvernement a lancé une vaste opération pour fermer les cafés Internet : dix-sept cafés ont été fermés, une centaine d’ordinateurs saisis, dix gérants arrêtés.

D’après le Bangkok Post du 30 décembre, le Premier ministre thaïlandais Thaksin menace de sanctionner les fonctionnaires thaïlandais qui iraient jouer dans les casinos construits à la frontière cambodgienne : mise à la retraite, perte de leurs droits aux pensions. Il fait installer des caméras aux postes frontières et demande un contrôle d’identité renforcé. Environ 600 à 700 Thaïlandais passaient la frontière de Poïpet tous les samedis et dimanches, et 400 à 500 les autres jours, pour venir jouer au Cambodge.

Un professeur thaïlandais aurait proposé que le gouvernement cambodgien rende le temple Préah Vihéar à la Thaïlande en remboursement des dettes consécutives aux émeutes anti-thaïlandaises du 29 janvier 2003. Des deux côtés de la frontière, on s’évertue à minimiser ces propos, de peur qu’une nouvelle émeute ne s’en suive.

Industrie

Le Vietnam et le Cambodge projettent de construire des barrages hydroélectriques sur la Sré Pok et la Sé Sann, d’une capacité de 200 MGW, pour un coût de 400 millions de dollars, achevé dans dix ans.

Exportations

Le Cambodge exporte pour près de 19 millions d’USD de denrées au Japon, soit plus qu’il n’en exporte en Chine, Corée du Sud et Hongkong réunis.

Le Laos envisage de faire ses exportations à partir du port de Sihanoukville, pour faire jouer la concurrence avec ses voisins thaïlandais et vietnamien qui lui imposent leur prix. Les importations rejoindraient Phnom Penh par la route, puis Stoung Treng par le Mékong. Des travaux d’installations portuaires ont commencé à Stoung Treng.

L’exportation des bovins serait en hausse. Le cheptel cambodgien comprend 3,5 millions de bêtes, dont 1,7 utilisés pour les travaux agricoles. La Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam sont devenus clients du Cambodge. La demande aurait crû de 50 %.

Réduction des frais diplomatiques

Le 20 janvier, Hor Nam Hong, ministre cambodgien des Affaires étrangères, fait des coupes sombres dans le budget diplomatique : réduction du personnel, du nombre des attachés militaires et des conseillers commerciaux. Les salaires des femmes d’ambassadeur (800 dollars, y compris l’assurance maladie) et des consuls seront supprimés, vu le « très haut salaire de leur mari » (entre 1 000 et 3 500 dollars par mois selon les ambassades, ainsi que les avantages exorbitants réclamés aux ressortissants de leur pays pour l’obtention de documents officiels). Le Cambodge possède vingt ambassades dans le monde et décide d’en ouvrir deux autres, à Londres et à Bruxelles. Le budget prévu pour 2003 s’élève à 13 millions de dollars.

AIDES, DONS & INVESTISSEMENTS

Les investissements, ou du moins les projets d’investissements déposés au CDC (Conseil pour le Développement du Cambodge), ont augmenté de 23,5 % en 2003 par rapport à 2002, et s’élèvent à 308,2 millions de dollars, avec 47 nouveaux projets. Les investissements de nationaux cambodgiens passent de 93 à 185,4 millions, alors que les investissements internationaux baissent de 55 %, passant de 144,6 à 64,7 millions, marquant la défiance des étrangers vis-à-vis de la situation politique du pays. Les projets déjà existants ont connu une augmentation de 587 %. Près de la moitié des nouveaux investissements concernent la construction hôtelière, principalement à Siemréap, et le textile. Le plus important investissement cambodgien de 2003 concerne une raffinerie de sucre et une distillerie (40,4 millions).

Le 27 janvier, un protocole d’accord est signé entre deux cimenteries, l’une thaïlandaise et l’autre cambodgienne, qui aboutira à l’installation d’une structure pour réceptionner et conditionner le ciment à Kompong Som.

Le Japon lance un projet d’étude météo sur trois ans, à hauteur de 750 000 dollars.

Vu la crise politique, le Cambodge demande fin janvier et obtient, le 11 février, un report de six mois pour la ratification de son entrée dans l’OMC. Cette ratification devait être ratifiée par l’Assemblée nationale le 31 mars.

L’Europe va engager deux millions d’euros au profit des 140 000 habitants vivant dans les provinces du Nord, de l’Ouest et de l’Est du pays, via son organisme humanitaire ECHO.

Les Etats-Unis projettent de créer une base militaire à Sihanoukville, le seul port en eaux profondes de l’Asie du Sud-Est. Avec la construction d’une immense ambassade près du Phnom à Phnom Penh, haut lieux spirituel symbolique du Cambodge, et l’annonce de la création d’une base navale à Sihanoukville, on peut aisément déceler la volonté américaine de transformer ce petit pays en une base asiatique pour encercler la Chine.

SOCIETE

Assassinat de Chéa Vichéa

Le 22 février, à 9 heures 20, deux hommes à moto s’arrêtent devant un kiosque à journaux à l’intersection de la rue Pasteur et du boulevard Sihanouk. L’un d’eux descend de moto, sans casquette ni masque sur le visage, et déverse le chargeur de son revolver sur Chéa Vichéa, en train de consulter la presse comme il le faisait chaque matin. Depuis plusieurs mois, ce syndicaliste courageux se sentait menacé et avait reçu des menaces de mort par téléphone (dont on connaît le numéro, qui correspond à celui d’un haut fonctionnaire !). Il avait déposé une plainte au Bureau des droits de l’homme des Nations Unies. « Je travaille pour la nation, pour le peuple. Alors pourquoi m’a-t-on tué, laissant derrière moi ma femme et ma fille dans la tristesse a-t-il écrit quelques jours avant sa mort…

Tous s’accordent à constater que cet assassinat est un immense gâchis et une perte pour le pays : Van Sou Ieng, président de l’Association des entrepreneurs du Cambodge, déclare que « la mort de Chéa Vichéa ne fait pas seulement peur aux syndicalistes, mais à l’ensemble de la société L’association verse 10 000 USD à la veuve de Chéa Vichéa. Le Conseil d’arbitrage se dit « attristé et inquiet pour le développement du Cambodge 

Chéa Vichéa reçoit des funérailles presque nationales, avec la présence d’au moins 10 000 syndicalistes et sympathisants, devant la pagode royale Vat Botum. Le roi le décore, à titre posthume, de l’insigne de Chevalier de l’Ordre royal du Cambodge. C’est la plus grandiose crémation depuis treize ans, qui se passe dans l’ordre le plus complet. Un représentant de l’OIT et un autre du syndicat américain AFL-CIO prennent la parole. Thung Saray s’étonne du silence assourdissant des pays donateurs, à part les vociférations d’un membre du NCI américain.

Ce crime est à mettre en relation avec une série d’assassinats non élucidés : le 30 mars 1997, quatre grenades sont lancées sur les manifestants pacifiques (seize morts, 120 blessés, dont Chéa Vichéa) ; le 6 février 2003, le moine Sam Bouthoun ; 18 février 2003, Om Radsady, conseiller de Ranariddh ; 23 avril 2003, le juge Sok Sétha Mony ; le 19 avril 2003, une Chinoise ; le 18 octobre 2003, Chour Chetharith, rédacteur à la radio Ta Prom, pro-Funcinpec ; 21 octobre 2003, la chanteuse Touch Sunnich… Le scénario est presque toujours identique, comparable à une exécution : les victimes font partie de l’opposition, deux hommes en moto tirent à bout portant sur leur victime… Aucune arrestation ni enquête sérieuse ne s’ensuit. Les autorités cherchent à noircir la vie privée de la victime. Après l’assassinat, tous se demandent : « A qui le tour ? » Une liste blanche de cinq noms a été établie par les futures cibles, et remise au Bureau des droits de l’homme de l’ONU.

Tous pointent un doigt accusateur sur Hun Sen comme commanditaire de ces assassinats, ou du moins l’accusent de n’avoir pas diligenté d’enquête sérieuse pour trouver les coupables réels et leurs commanditaires. Trente-huit ONG locales font une déclaration : « Cet assassinat montre que les autorités sont incapables de remplir leurs devoirs. Les tueurs réussissent toujours à s’échapper. » Certains demandent la démission de Hun Sen.

Le 27 janvier, soit cinq jours après le meurtre, la police fournit un portrait robot, mais sans avoir interrogé les témoins oculaires de l’assassinat. Elle promet 2 500 dollars à toute personne qui apportera des informations concernant le meurtrier. Le jour même, quatre suspects sont arrêtés, qui apparaissent à tout le monde comme « de faux coupables présentés pour protéger les vrais L’un des prévenus « avoue » qu’on lui avait promis 5 000 dollars pour tuer le syndicaliste, mais qu’il n’en a reçu que 1 500. De nombreux témoins, hommes, femmes, enfants, se présentent comme autant d’alibis pour l’un des suspects, qui faisait la fête à 80 Km au moment des faits. La police tente de faire pression sur ces témoins et maintient, contre toute évidence, la culpabilité des suspects. La police essaye assez grossièrement de compromettre Eng Chhai Eng, secrétaire général du PSR, avec un certain Men Vatana, affirmant que c’est lui qui menacé Chéa Vichéa de mort ! L’opposition demande la démission de Hok Lundy, chef de la police. Sam Rain-sy demande à ce que le FBI rende public son rapport sur le massacre du 30 mars 1997 qui avait fait seize morts et plus de 120 blessés. Il accuse directement Hun Sen d’en être le commanditaire. Le 2 février, il porte l’affaire devant le tribunal municipal de Phnom Penh : il demande 50 millions de dollars de dommages et intérêts, ainsi qu’une peine de dix à vingt ans de prison pour Hun Sen. Après un report, il devrait être entendu par le tribunal le 4 mars. Hun Sen porte plainte à son tour contre Sam Rainsy pour diffamation.

On croit savoir que le FBI avait fait un rapport précis concernant les assassins du 30 mars 1997, établissant la culpabilité des sbires de Hun Sen, mais le Congrès aurait demandé l’embargo sur ce rapport. L’ambassadeur américain au Cambodge de l’époque aurait accepté de rester silencieux, en promesse d’une promotion qui ne lui a jamais été accordée. Les assassins se nommeraient Chhay Vee et Chum Bun Thoun et auraient agi pour le compte du chef des gardes du corps de Hun Sen, Hy Bun Héang. Le PPC réagit en accusant Eng Chhay Ieng d’avoir payé deux hommes pour perpétrer l’assassinat et diffusent un film datant de novembre 1998 montrant la rétractation des accusés.

La vendeuse de journaux qui a assisté à l’assassinat avait remarqué que, depuis plusieurs jours, un homme venait observer Chéa Vichéa en train de lire le journal. Après le meurtre, la police et de mystérieux personnages ont tenté de l’intimider. Elle a dû se cacher pendant plusieurs jours. Elle a été interrogée pendant trois heures, le 23 février, par la Cour municipale de Phnom Penh, accompagnée de représentants du Centre cambodgien des droits de l’homme et d’une association d’assistance légale (Lac), mais n’a visiblement pas osé dire ce qu’elle savait.

L’ambassadeur américain actuel, Charles Ray, est la seule personnalité étrangère pour dire que l’enquête concernant l’assassinat de Chéa Vichéa est « professionnelle et appropriée suscitant les remarques acerbes de la société civile, dont l’association ADHOC. Le 12 février, le Parlement européen invite le gouvernement cambodgien à « mettre fin à l’impunité » et que « tout soit mis en ouvre pour retrouver les commanditaires et les exécutants de l’assassinat de Chéa Vichéa 

Le 18 février, Rong Chhun, président de l’Association indépendante des enseignants du Cambodge, adresse une lettre au directeur de l’OIT (Organisation internationale du travail) pour lui demander qu’une enquête internationale soit menée par l’OIT et le FBI sur le meurtre de Chéa Vichéa.

Le 19 février, SIORC remet une liste de 7 000 Cambodgiens qui ont apposé leurs empreintes digitales pour demander que le FBI se charge de l’enquête du meurtre de Chéa Vichéa.

Chéa Kimny, femme de Chéa Vichéa, demande à émigrer aux Etats-Unis avec sa fille de 2 ans. L’épouse de Chour Chéatharith fait la même demande.

Droits de l’homme

Le 16 janvier, le roi annonce que Hun Sen renonce à demander l’extradition de Sok Youn accusé (faussement) d’être l’auteur de la tentative d’assassinat du Premier ministre en septembre 1998. Amnesty International, dix-sept ONG cambodgiennes de défense des droits de l’homme, le roi lui-même, la famille de l’accusé avaient demandé avec insistance la libération du prévenu. Si Thun Sray, d’ADHOC, voit dans ce geste « un signe de maturité Sam Rainsy triomphe, disant que le gouvernement a décidé de relâcher Sok Youn « pour ne pas perdre la face, car le gouvernement thaïlandais a fait savoir qu’il n’extraderait pas Sok Youn, pour un ensemble de considérations diplomatiques et humanitaires Il sort de prison, après quatre ans, le 24 février.

On note plusieurs assassinats de militants PSR dans les provinces durant les deux derniers mois, dont un, le 10 janvier dans la province de Kompong Cham, deux le 15 janvier, à Ang Seila, dans la province de Bantéay Méan Chhey, une tentative de meurtre à Bavel par le chef de village PPC.

Le 24 janvier, un membre du FUNCINPEC de la province de Kampot est tué d’une balle dans la tête.

L’association ADHOC, dans son rapport annuel, constate que l’année 2003 a été marquée par davantage de violences que les années précédentes. « L’impunité continue à être un problème, les fonctionnaires de haut rang, les riches et les personnes importantes continuent à jouir de l’impunité. » Le rapport critique également le manque de progrès dans la réforme de la justice. Quatre cent huit cas de viols sont dénombrés en 2003, dont cinquante-deux concernent des filles de moins de 18 ans.

L’UNHCR est sommé de fermer ses bureaux dans les provinces de Ratanakiri et de Mondolkiri, de crainte que leur présence ne suscite des vocations à l’exil de la part des Montagnards vietnamiens, persécutés dans leur pays.

Le 4 février, la Cour suprême refuse la libération des deux Thaïlandais et de l’Egyptien arrêtés en mai dernier pour présomption de participation aux attentats attribués à la Jemaah Islamiyah. La durée de la détention préventive est dépassée depuis deux mois. Le 18 janvier, Ahmad Yahya, député PSR, avait demandé, en vain, la libération de l’Egyptien. Yahya s’engageait à le loger chez lui et à s’en porter garant. Un début de procès commence le 27 février.

Vers le 15 janvier, dans la province de Bantéay Méan Chhey, les militaires menacent de brûler 136 familles du village de Kanthuy Chroum, pour prendre leurs terres.

La station radio Ta Prom, créée en février 2003, appartenant au FUNCINPEC, convie ses auditeurs deux fois par semaine à une émission de débats. Cela plaît au public mais peu au gouvernement. La station cesse ses émissions le 16 février, en raison d’un litige qui l’oppose à la propriétaire de la maison qui l’abrite. Après avoir rendu un avis en faveur de cette dernière, le 26 février la Cour municipale rend un verdict en faveur de la radio.

En octobre dernier, Chour Chéatharith, collaborateur de la radio, avait été froidement assassiné.

Le porte-parole du gouvernement annonce que le gouvernement cambodgien cessera de payer les frais médicaux de la chanteuse Touch Srey Nich, hospitalisée en Thaïlande. Puis il annonce qu’il continuera… Selon la radio Free Asia, les frais médicaux s’élèveraient déjà à 70 000 dollars. Touch Srey Nich aurait eu une aventure avec Hun Sen. Bun Rany, épouse de Hun Sen, l’aurait faite violer par ses gardes du corps, puis la chanteuse serait tombée amoureuse d’un membre du FUNCINPEC. La Première dame du Cambodge aurait voulu la faire assassiner, mais les assassins ont manqué leur coup.

Mouvements sociaux

Du 18 au 29 janvier, 500 ouvriers de l’usine de confection MSI Garnment et Great Lancelot, qui emploient 2 000 ouvriers, se mettent en grève pour plus de quinze jours, pour demander la réintégration de délégués syndicaux licenciés et le versement d’une prime d’assiduité de cinq dollars mensuels. La police anti-émeute stationne aux portes de l’usine et tente d’intimider les grévistes, employant des bâtons pour frapper les manifestants, tirant des coups de feu en l’air. Une centaine d’ouvriers sont blessés le 29 janvier. Vingt-sept ouvriers sont retenus dans les locaux de l’usine parce qu’ils refusent d’apposer leurs empreintes digitales sur un document demandant la reprise du travail.

Le 10 février, 3 500 ouvriers de l’usine Cambodia Sport Wear se mettent en grève pour obtenir le remboursement de leurs motos volées pendant le temps de travail, l’installation de toilettes dans l’usine et pour n’être pas obligés à faire des heures supplémentaires.

Le 19 février, les employés du supermarché Big A se mettent en grève pour un jour et demi, pour demander des améliorations de leurs conditions de travail (quatre jours de congés par mois) et que cessent les injures durant le temps de travail…

Depuis l’assassinat de Chéa Vichéa, certains patrons qui avaient été contraints de signer des accords favorables aux ouvriers font marche arrière : ainsi, le 19 février, une centaine d’ouvriers de la blanchisserie industrielle Wash Concept manifestent pour demander la réintégration d’une dizaine de syndicalistes licenciés, une meilleure rémunération, toutes choses acceptées avec Chéa Vichéa. Le représentant d’un syndicat progouvernemental propose l’union de tous les syndicats.

Le 28 janvier, le Conseil d’arbitrage rend sa décision concernant le conflit qui oppose les employés des grands hôtels de Siemréap et de Phnom Penh à leur direction, concernant le versement des taxes réclamées au client à titre du « service » : les employés en recevront désormais 10 %. Le salaire minimum est fixé à 50 dollars au lieu des 35 actuels, une prime de 50 % du salaire sera versée à la fin de la première année, 60 % à 70 % les deux années suivantes. Les patrons réagissent en supprimant la taxe de « service Après une menace de grève, les employés obtiennent en partie gain de cause. Le 16 février, le même Conseil d’arbitrage tranche un conflit qui opposait 71 employés licenciés, suite à la crise du SRAS : un seul sera réembauché, cinq salaires et demi seront déboursés au soixante-dix autres.

Conditions sanitaires des ouvriers

Le 5 janvier, trente-huit ouvrières de l’usine Minh You Australia Cambodia ainsi que trois contremaîtres chinois s’évanouissent. On attribue ces malaises aux mauvaises conditions sanitaires à l’intérieur des salles de travail, à l’absence d’hygiène dans la présentation des repas et au trop grand nombre d’heures supplémentaires. Les analyses sanguines indiquent des carences en glucose et en calcium chez les victimes.

Le 2 février, 960 ouvrières de l’usine Sabrina, dans la province de Kompong Speu, perdent connaissance, sans doute pour des problèmes de mauvaise aération. Le 4 février, 23 ouvrières d’une usine textile s’évanouissent, sans doute intoxiquées par les émanations d’une substance chimique. Le 6 février, plus de 100 ouvrières de l’usine Camitex Garnment s’évanouissent à leur tour. La plupart des tests sanguins s’avèrent négatifs, et le directeur de l’hôpital Calmette pense que ces malaises sont d’origine « hystérique Cependant, il y a sans doute quelque fondement objectif à ces évanouissements à répétition : les heures supplémentaires obligatoires, la malnutrition des ouvrières qui économisent pour envoyer de l’argent à leur famille, le manque d’aération… Une ouvrière de Camitex croit avoir trouvé la solution : « C’est probablement parce que nous n’avons pas honoré le génie du sol. »

Travailleurs étrangers

Le Cambodge a délivré 5 727 permis de travail à des étrangers (ONG et diplomates non compris). La plupart sont des Chinois (3 835 depuis 1994). On compte 376 Thaïlandais et 54 Américains. Le visa pour affaires coûte 180 dollars et doit être renouvelé chaque année, celui pour travail en coûte 100 et est valable deux ans.

78 438 Cambodgiens ont été arrêtés pour entrée illégale en Thaïlande durant l’année 2003, dont 54 738 travailleurs clandestins. Selon les autorités policières cambodgiennes, 3 000 Cambodgiens passent quotidiennement la frontière dans la province de Bantéay Méan Chhey, en payant les dix baths réglementaires (0,25 USD). La plupart sont vendeurs au marché thaïlandais de l’autre côté de la frontière. Cinq cents ne repasseraient pas la frontière, attendus par des trafiquants. Les travailleurs clandestins sont employés comme travailleurs agricoles ou dans le secteur de la construction.

Santé

Le nombre des drogués aurait doublé dans l’année, passant de 2 270 en 2002 à 4 387 en 2003.

Durant les onze premiers mois de 2003, les victimes des mines et objets non explosés a diminué de 12 %, passant de 794 tués ou blessés en 2002 à 694 en 2003. Les projets de déminage se réduisent en fonction de la réduction des crédits alloués.

Les routes cambodgiennes deviennent les plus meurtrières de l’ASEAN (douze accidents pour 10 000 véhicules, contre dix dans les autres pays) : 3 760 accidents en 2003 ont provoqué la mort de 824 personnes et en ont blessé 6 329 autres. Il y a 22 % de véhicules de plus que l’an dernier.

Le 18 janvier, le roi Sihanouk écrit sur son site Internet qu’il n’aime pas recevoir de lettres d’étrangers lui demandant de l’aide pour des adoptions. « Nous perdons notre dignité en vendant nos enfants aux étrangers écrit le monarque.

Le 23 février, Hun Sen, en présence du ministre français de la Coopération, inaugure le premier appareil d’imagerie médicale par résonance magnétique. Le ministre français promet la mise en place d’un service de maintenance. Cette machine a coûté 1,4 million d’USD et sera payée en cinq ans (20 % par le ministère des Finances et 80 % par l’hôpital Calmette).

Medical Supply est la première entreprise pharmaceutique cambodgienne à obtenir le certificat ISO (9001-2000) et le label de « bonne méthode de production » (GMP). Elle fabrique 130 médicaments et emploie 200 personnes, encadrées par une dizaine de pharmaciens patentés. La société importe de France, d’Inde, parfois d’Italie ce qu’elle ne peut pas produire sur place, et commence à exporter vers Hongkong, la Birmanie et l’Afrique.

Grippe du poulet

Le 12 janvier, le Cambodge interdit toute importation d’oufs et de volailles des pays suspectés d’avoir des cas de grippe du poulet. Le 18 janvier, conformément à ce décret, 159 000 oufs en provenance du Vietnam sont saisis, dans la province de Takéo, et enterrés. Le ministère de l’Agriculture déclare qu’il n’y a aucun cas connu de la grippe aviaire au Cambodge, ni dans la population ailée, ni chez les humains. Cependant, on signale que 4 000 poulets d’une ferme de Dangkor ont été l’objet d’une mortalité anormale de 80 %. Des échantillons sont prélevés et envoyés à l’Institut Pasteur en France, qui les déclarera positifs. Un comité interministériel est mis en place par le ministère de l’Agriculture avec la collaboration de la FAO et de l’OMS. Le ministère adresse une requête d’assistance à la FAO, à l’OMS, à IOE (Office International des Epizooties). Depuis le 21 janvier, 75 agents sont déployés de façon permanente aux postes frontières pour contrôler le respect du décret de suspension des importations de volailles.

Du 15 décembre au 19 janvier, au moins 59 oiseaux (86 selon WildAid) des 261 oiseaux du parc de Ta Mao sont morts de la grippe du poulet. Cinq cents poulets sont morts dans le district de Lovéa Em. En réalité, depuis janvier plus de 10 000 canards sont morts dans une ferme près de Phnom Penh, mais la police a été payée pour garder le silence. Dans les campagnes cambodgiennes, un très grand nombre de poules sont morts, sans qu’aucune statistique ne soit établie. C’est une catastrophe pour beaucoup de petits paysans.

Le 26 janvier, ordre est donné d’abattre toutes les volailles vivant dans un périmètre de trois kilomètres des foyers de grippe. Cependant, rien n’est fait, si bien qu’en février, il faudra les supprimer sur dix kilomètres.

Les tests du virus H5N1 de la grippe du poulet, pour les humains et les poulets, sont réalisables à Phnom Penh depuis le début février, grâce à l’aide de l’Institut Pasteur. La FAO a dépêché un épidémiologiste et promis 390 000 dollars, l’Australie 50 000 USD, la Chine en a accordé 50 000 et la BAD 91 940 pour lutter contre le fléau. Rien n’indique que les éleveurs touchés seront indemnisés (sauf, sans doute, le plus gros qui est très proche du pouvoir). Cet argent ne sera débloqué que lorsque sera présenté un programme de dépenses précis. Le Cambodge compte 977 élevages de canards, 138 élevages de poules pondeuses. En outre, 80 à 90 % de la population possède quelques poules et animaux de basse-cour.

Une femme de Kirivong présentant les symptômes de la grippe du poulet est morte au Vietnam : ses échantillons de sang ont été envoyés à un laboratoire de Hô Chi Minh-Ville qui ne les a analysés qu’une semaine plus tard. Le virus a donc eu le temps de disparaître. Le cas demeure suspect. Sept autres cas humains, analysés à Calmette, se sont avérés négatifs.

Le 21 février, contrairement à la demande du ministère du Tourisme cambodgien, l’OMS refuse de déclarer le Cambodge exempt de la grippe du poulet. L’OMS n’a jamais interdit aux étrangers de se rendre au Cambodge.

Le 4 février s’est réuni à Siemréap un séminaire de vétérinaires portant sur les pathologies tropicales. Il a rassemblé une cinquantaine de scientifiques de France, de Belgique, d’Italie et du Cambodge.

Education nationale

En 2003, l’Education nationale n’a dépensé que 79 % de son budget (379 750 USD), soit moins qu’en 2002 (389 500 USD). Par contre, le ministère de l’Intérieur a dépensé 167 % du budget prévu, celui des Finances 199 %.

A partir du mois d’août, la France ne financera plus l’Institut de technologie du Cambodge. En onze ans, la France a investi près de seize millions d’euros, dans le cadre de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF). L’ITC a les moyens humains, pédagogiques et administratifs, d’assurer la suite. « Il n’y a que sur le plan financier que nous ne sommes pas prêts dit sa directrice cambodgienne.

Un centre de formation professionnelle de grande envergure, sur neuf hectares, est en construction dans la périphérie de Phnom Penh. Lancé par la Corée du Sud, il dispose d’un budget de 33 millions de dollars, dont six versés par le gouvernement cambodgien. En 2005, 1 200 places seront disponibles, avec un quota réservé aux élèves démunis. Douze formations seront données, dont 3 000 à court terme, et 600 à long terme.

Les athlètes cambodgiens handicapés gagnent dix médailles (deux d’or, cinq d’argent, trois de bronze) aux seconds Jeux para-olympiques asiatiques tenus à Hanoi, durant la dernière semaine de décembre. Le Cambodge renonce à organiser la Tiger Cup, comme prévu, à cause de l’impossibilité d’accès au stade olympique de Phnom Penh. D’une manière générale, les athlètes cambodgiens manquent d’argent pour se préparer sérieusement aux épreuves sportives.

Drogue

Le 13 janvier, on apprend que 32 000 pilules d’amphétamine sont saisies à la frontière khméro-laotienne, transportées par une femme qui sera relâchée le 6 février. Deux sours de cette femme ont fait l’objet d’une arrestation en juin 2002, avec 28 000 pilules ; elles ont été relâchées en juillet.

Pédophilie

Durant ces deux derniers mois, les journaux rapportent de très nombreux cas d’Occidentaux compromis dans des actes de pédophilie ou de débauche. Cependant, on note que la police accepte volontiers de remettre en liberté des pédophiles étrangers pris sur le fait, contre argent sonnant et trébuchant : par exemple, un Autrichien a remis 4 000 USD pour sa libération immédiate. L’arrestation des étrangers devient donc, pour la police, une activité lucrative.

Selon le consultant de l’UNICEF auprès du ministère de l’Intérieur, les étrangers ne sont auteurs que de 10 % des viols et autres crimes sexuels. En 2003, ont été menées 455 enquêtes judiciaires, qui ont abouti à l’arrestation de 393 personnes. Beaucoup de pays donateurs (Grande-Bretagne, Australie, Etats-Unis) montrent une volonté de s’attaquer au problème et sont prêts à débloquer de l’argent pour cela.

L’adoption par le Congrès américain du Traficking Protection Act, en 2000, a poussé beaucoup d’ONG de type confessionnel dans la lutte contre le trafic d’êtres humains. Les conditions américaines, fondées sur une position morale qui ne tient pas compte des besoins du pays, « sont plus idéologiques qu’adaptées aux réalités du Camboge déclare Mu Sochua, ministre de la Condition féminine. La lutte contre le trafic d’êtres humains devient un business humanitaire juteux : en 2001, le département d’Etat américain débloquait 250 000 dollars pour le Cambodge ; en 2002, ce chiffre est passé à 3,3 millions…

Le roi Sihanouk se déclare favorable au mariage homosexuel.

Patrimoine

Dans un fax adressé le 19 février à l’Ecole française d’Extrême-Orient (EFEO), le roi Sihanouk désire offrir « dès 2004 « tout ce qui lui reste de documents… livres, lettres, documents, textes dactylographiés et manuscrits de Norodom Sihanouk et autres papiers importants » à l’EFEO. Le roi estime en effet impossible de faire conserver ces archives au Cambodge, « toujours susceptible de changer de régime politique et d’idéologie Il envisage de créer un musée dans l’enceinte du palais royal pour exposer les cadeaux qui lui ont été remis par les chefs d’Etat et personnalités étrangères.

Les 9 et 10 février, la session technique du Comité international de coordination pour la sauvegarde d’Angkor se réunit à Siemréap. L’autorité Apsara reçoit davantage de pouvoirs pour la régulation générale qui englobera désormais toute la zone d’Angkor.

Les pilleurs d’antiquités usent de nouveaux subterfuges : ils entourent les nouveaux sites à piller de panneaux « mines L’ancien ambassadeur de France est compromis dans un trafic d’antiquités.

Le stade de Siemréap est « vendu » pour dix millions de dollars à la société Seung Mao ImportExport qui s’engage à construire un nouveau complexe sportif à l’extérieur de la ville, plus grand (dix hectares au lieu de cinq), d’une capacité de 5 000 spectateurs, avec piscine et bâtiments administratifs et parkings.

Norodom Shihamoni, ambassadeur du Cambodge auprès de l’UNESCO, fait partie des trente-six personnalités composant le Haut Conseil de la Francophonie, installé le 19 janvier à Paris.

Le 17 février, Rithy Panh a été élevé à la dignité d’Officier de l’Ordre Royal du Cambodge par le roi Norodom Sihanouk pour ses films, dont « S-21, la machine de mort khmère rouge 

Le PPC pensait fêter solennellement le 7 janvier, date de la « libération » du pays par les troupes vietnamiennes pour les uns, « invasion et occupation » pour les autres. Finalement, il a choisi une solution médiane en organisant un meeting de 10 000 partisans au siège du parti. Le FUNCINPEC y a envoyé une délégation. Près du Vat Phnom, environ trois cents étudiants du Parti du Front Khmer manifestent. Quatre d’entre eux sont arrêtés. A Sisophon, 8 000 personnes célèbrent la mémoire des morts durant le régime du Kampuchéa démocratique, en présence de Tep Khunnal, ancien chef Khmer rouge.

Phnom Penh

Le 9 janvier, quarante-quatre squatters sont expulsés manu militari par la police. Un incendie se déclare au moment où les policiers commencent à démonter les maisons. Qui sont les incendiaires ? Les squatters sont provisoirement relogés près de la prison de Prey Sâr.

Au début janvier, un membre du barreau est sérieusement molesté par huit jeunes gens, en présence de plusieurs officiers de police restés inactifs. « Phnom Penh est la ville des fils de grands. Ils font ce qu’ils veulent. Ils peuvent commettre ce qu’ils veulent, et personne ne peut les arrêter avoue, désabusé, un officier de police.

Le nombre des crimes a augmenté de 45 % en 2003 (309 crimes, 792 délits, vingt et un cas de trafic de drogue, soixante et une fermetures de maisons closes).

Hun Sen est favorable à la construction de gratte-ciel dans la ville de Phnom Penh, à part dans le quartier du palais royal et de Vat Phnom. Cependant, les soubassements de la ville, construite sur un étang comblé par les alluvions du Mékong, posent des problèmes pour de telles constructions. Le plus haut bâtiment est actuellement l’hôtel Intercontinental avec quinze étages. Le 26 janvier, le roi Sihanouk, mécontent, nomme Vann Molyvann « haut conseiller privé du roi et son représentant pour tout ce qui regarde l’urbanisation et l’aménagement du territoire ».

Religion

Cent vingt musulmans cambodgiens font le pèlerinage de La Mecque, malgré le tarissement des aides en provenance du Golfe persique. Chaque pèlerin a dû débourser 3 500 dollars.

Le 3 février, une église « protestante » de Ba Phnom, dans la province de Prey Veng est incendiée. On ignore les motifs de l’acte.