Eglises d'Asie

Les massacres du 2 mars 2004 à Quetta provoquent une grande émotion chez les communautés religieuses non musulmanes qui se déclarent solidaires des chiites

Publié le 18/03/2010




Les diverses communautés religieuses non musulmanes du Pakistan se sont émues de l’attaque lancée, le 2 mars, à Quetta, ville frontalière de l’Afghanistan, contre la procession de l’Achoura des fidèles chiites, une attaque qui a fait 45 morts et plus de 160 blessés. Ce jour-là, une très grande foule de musulmans chiites s’était réunie pour commémorer, comme à l’accoutumée, le martyre de l’iman Hussein, petit-fils du prophète Mahomet.

C’est à 13 heurs 10 que les terroristes s’en sont pris à la principale des processions organisées ce jour-là. L’attaque s’est déroulée dans des circonstances jusqu’ici assez confuses. Au moins deux grenades ont été lancées par les agresseurs avant qu’ils n’ouvrent le feu sur la foule avec des armes automatiques. Des bombes cachées sous les vêtements d’autres terroristes explosèrent alors tuant leurs porteurs et de nombreux fidèles. Des échanges de coups de feu ont eu lieu en d’autres endroits de la ville entre les terroristes et la police. Des hommes armés se sont ensuite répandus dans les rues adjacentes déclenchant une émeute qui a incendié plus de 150 bureaux, commerces et habitations privées (1).

La même confusion entourant les circonstances du massacre se retrouve dans les explications proposées et la désignation des responsables présumés. Personne n’a revendiqué l’attaque et plusieurs personnalités chiites ont aussitôt dénoncé des groupes sunnites interdits, comme Laskhar-e-Jhangvi, Spah-e-Sahaba et Jaih-e-Mohammad, déjà dénoncés lors d’une précédente attaque contre les fidèles chiites qui avait fait 48 morts dans une mosquée de Quetta, le 4 juillet 2003 (2). Comme en Irak, où de sanglantes attaques contre les chiites ont eu lieu le même jour, les autorités nationales ont évoqué le réseau Al-Qaida. Le chef provincial de la police, Shafiq-ur Rehman, a affirmé que l’un des terroristes avait parti lié avec une organisation terroriste internationale, suggérant qu’il s’agissait du réseau commandé par Oussama Ben Laden. On a fait remarquer aussi que de nombreuses victimes de l’attaque du 2 mars étaient tombées sous les balles tirées par la police. Le ministre des Sports de la province du Baloutchistan a même déclaré : « La plupart des morts ont été provoqués par les tirs de la police plutôt que par l’attaque des terroristes » (3).

Cette tuerie a suscité une énorme émotion dans les milieux non musulmans du pays. Dès le 6 mars, à l’invitation de la Commission épiscopale pour le dialogue religieux, quelque 430 personnes, parmi lesquels des chrétiens, des religieux musulmans et quelques hauts dirigeants civils, s’étaient rassemblés dans l’enceinte de l’église de Kasur, dans la province du Pendjab, à la frontière de l’Inde. Etait présent, en particulier, un dirigeant sunnite bien connu, le Maulana Abdul Khabir, desservant de la mosquée Badshahi, la plus prestigieuse et la plus grande des mosquées du Pakistan. Citant le verset de l’Evangile : « Bienheureux les artisans de paix il a condamné l’attaque de Quetta comme une conspiration destinée à diviser les musulmans ; il a incité tous les musulmans à montrer au monde qu’ils étaient des pacifiques, une invitation qui s’adressait aux deux groupes musulmans du pays, les chiites qui constituent 15 % des adeptes de l’islam dans le pays et les sunnites qui sont 85 %.

Les divers représentants chrétiens ont insisté sur la solidarité qui doit unir tous les croyants, qui a été qualifiée par le porte-parole de la Conférence épiscopale catholique comme « la nécessité de l’heure Un religieux, membre de la Commission épiscopale pour le dialogue interreligieux, a souligné que cette assemblée se tenant à la frontière de l’Inde revêtait une signification particulière pour la paix. Enfin un représentant de la religion bahaï présent à la réunion a conseillé à toutes les communautés religieuses de s’inspirer des leçons de paix et d’amour que l’ont peut trouver chez les poètes du soufisme, une tradition mystique de l’islam.