Eglises d'Asie

A Tianjin, lors des liturgies pascales, catholiques “officiels” et “clandestins” se côtoient sans se mêler

Publié le 18/03/2010




Dans le diocèse catholique de Tianjin, les fêtes pascales ont connu une affluence importante. Les catholiques sont venus en nombre pour les différentes liturgies de la Semaine Sainte mais, cette année comme les années précédentes, les catholiques “officiels” ont rempli la cathédrale Saint Joseph (Laoxikai) tandis que les catholiques “clandestins” se sont réunis autour du sanctuaire marial, installé sur le terrain de l’évêché, à un jet de pierre de la cathédrale.

Pour un catholique “clandestin” interrogé à l’issue du chemin de croix le 9 avril dernier, “la communauté à l’intérieur de l’église [la cathédrale] est dirigée par des communistes”. Il explique que lui et d’autres “clandestins” se réunissent autour de la statue de la Vierge pour les liturgies pascales à défaut de mieux “car nous ne pouvons avoir notre évêque pour célébrer Pâques”. Le P. Zhang Liang, curé “officiel” de la cathédrale, exprime pour sa part sa “tristesse” à voir les catholiques “clandestins” prier ainsi en plein air – “particulièrement en hiver, lorsque je les vois agenouillés dans la neige, leurs enfants jouant sur l’esplanade.”

La situation de division entre les deux communautés qui prévaut à Tianjin remonte à plus d’une dizaine d’années. En 1982, Mgr Li Side a été ordonné clandestinement évêque du diocèse. Arrêté en 1989, il fut libéré en juin 1991 et retourna à la cathédrale Saint Joseph où les autorités lui accordèrent la permission de célébrer la messe. Les catholiques de Tianjin affluèrent en masse aux messes célébrées par leur évêque, refusant de participer à celles des prêtres affiliés à l’Association patriotique. Mgr Li Side reçut alors l’interdiction de célébrer la messe en public. Les relations, déjà tendues entre les catholiques et le clergé “officiel”, s’envenimèrent. Le 5 avril 1992, un groupe de laïcs interrompit brutalement la messe célébrée par un prêtre de l’Association patriotique : une bataille rangée s’ensuivit à l’extérieur de l’église et trois personnes furent retenues par la police pendant dix jours pour interrogatoire. Mgr Li Side fut lui aussi placé en garde à vue pendant deux mois comme “témoin”. Il fut aussitôt après assigné à résidence dans le village de Liangzhuang à 170 Km au nord de Tianjin (1).

Aujourd’hui âgé de 78 ans, Mgr Li Side est toujours assigné à résidence dans un village de montagne du district de Ji, au nord de Tianjin (2). Plusieurs centaines de catholiques “clandestins” ont, cette année encore, fait le voyage jusqu’à son église pour participer à la veillée pascale. D’autres catholiques “clandestins” s’étaient réunis dans le district de Tanggu, dans la banlieue de Tianjin, où Mgr Melchior Shi Hongzhen, évêque coadjuteur “clandestin” de Tianjin, célébrait les offices de la Semaine Sainte. Les autorités chinoises ne reconnaissent pas à Mgr Melchior Shi sa qualité d’évêque. Selon des sources locales, elles ne le connaissent que comme prêtre, le laissant agir comme tel tout en surveillant de plus ou moins près ce qu’il fait et ce qu’il dit.

L’évêque “officiel” de Tianjin est Mgr Joseph Shi Hongchen. Ordonné à l’épiscopat dans la clandestinité en 1986 comme évêque auxiliaire de Mgr Li Side, il a été plus tard reconnu par le gouvernement. Après la mort de Mgr Joseph Li Depei en juillet 1991, il a accepté en mai 1992 d’être installé sur le siège du diocèse de Tianjin comme son évêque “officiel”, exprimant alors l’espoir que la division entre “clandestins” et “officiels” pourrait s’amenuiser (3). Plus de dix ans plus tard, un catholique, à l’issue de la liturgie du Vendredi Saint, estimait : “Ce n’est pas la volonté de Dieu que nous soyons divisés. Mais, pour le moment, il est très difficile pour les deux parties de s’unir.”