Eglises d'Asie

La révision des lois islamiques proposées par le général Pervez Musharraf suscite des réactions contrastées

Publié le 18/03/2010




Un appel du président Pervez Musharraf à la révision du droit pénal islamique du pays ainsi que des lois sur le blasphème a provoqué des réactions très contractées dans le pays : un timide espoir du côté des minorités religieuses, mais un refus vigoureux et un appel à la résistance de la part des mouvements et partis politiques inspirés du fondamentalisme religieux.

Intervenant au cours d’une convention sur les droits de l’homme, qui se tenait à Islamabad, le samedi 15 mai 2004, le chef de l’Etat avait exprimé le désir que les rigoureuses lois islamiques, adoptées au temps de la dictature militaire du général Zia Ul-Haq en 1979, soient l’objet d’une révision afin de s’assurer que l’on n’en ferait pas mauvais usage. Le président visait plus particulièrement l’ordonnance Hudood et les lois contre le blasphème. Les dispositions de l’ordonnance Hudood qui concernent l’usage de l’alcool, le viol et l’adultère, tiennent lieu de complément à la loi islamique. Elles sont considérées par beaucoup comme discriminatoires à l’égard des femmes, car elles accordent plus de valeur au témoignage des hommes qu’à celui des femmes. Les lois sur le blasphème prévoient la peine de mort pour un outrage à Mahomet et la prison à vie pour un outrage au Coran. Bien souvent, cette loi a été utilisée contre des non-musulmans pour régler des litiges personnels. « La nation ne devrait pas avoir peur, a dit le chef de l’Etat, d’un réexamen de l’Ordonnance par des chercheurs, des juristes et des parlementaires en conformité avec les enseignements du Coran. » S’appuyant sur un précepte religieux affirmant que l’on devait chercher une solution dans la discussion, il s’est demandé pourquoi une discussion ne pourrait pas remettre en cause une ordonnance qui est le produit de l’esprit humain. Le chef de l’Etat a annoncé la mise en place d’une Commission nationale des droits de l’homme chargée de débattre de ces problèmes et de faire appliquer les idéaux des droits de l’homme dans le pays.

Dans un communiqué de presse publié le 18 mai, Mgr Lawrence Saldanha, archevêque de Lahore, a réagi en ces termes : « En tant que président de la Conférence épiscopale du Pakistan, j’accueille chaleureusement le courageux appel du président Pervez Musharraf à réviser l’ordonnance Hudood et les lois sur le blasphème. C’est une demande formulée de longue date par les organisations de défense des droits de l’homme. » Peter Jacob, secrétaire de la Commission ‘Justice et paix’, s’est déclaré complètement d’accord avec le président tout en manifestant un certain scepticisme sur la possibilité de mettre en ouvre ses propositions de révision.

Après la déclaration du président, les partis fondamentalistes musulmans n’ont pas tardé à réagir. Maulana Fazal Ur Rehman, secrétaire général de Muttahida Majilis-e-Amal Pakistan (MMA), une alliance de six partis islamiques, s’est farouchement opposé aux réformes proposées par le chef de l’Etat. Son alliance, a-t-il dit, n’autorisera pas le gouvernement à effectuer des changements dans l’ordonnance Hudood ou dans les lois contre le blasphème. Il a également accusé le général Musharraf de s’incliner devant les Américains en mettant en ouvre un programme inspirée par eux et visant à transformer la République islamique du Pakistan en Etat laïque (1). Un autre mouvement fondamentaliste islamique, le Jamiat Ulema-i-Islam-F (JUIF), a annoncé le lancement d’un mouvement de protestation contre les réformes envisagées par le président.